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6.3.21. Audition des témoins: le témoin 10
Le Président : Bien, le témoin
suivant, Monsieur le témoin 10. Monsieur, quels sont vos nom et prénom ?
le témoin 10 : Euh…
Je m’appelle le témoin 10.
Le Président : Quel âge avez-vous ?
le témoin 10 : Euh…
55 ans.
Le Président : Quelle est
votre profession ?
le témoin 10 : Euh…
Je suis médecin.
Le Président : Quelle est
votre commune de domicile ou de résidence ?
le témoin 10 : Euh…
J’habite à Westouter, commune de Heverland.
Le Président : Connaissiez-vous
les accusés ou certains des accusés, avant le mois d’avril 1994 ?
le témoin 10 : Avant…
Le Président : Les accusés,
c’est NTEZIMANA, HIGANIRO, Madame MUKABUTERA, pardon, Madame MUKANGANGO et Madame
MUKABUTERA ?
le témoin 10 : Oui, je connaissais
Monsieur NTEZIMANA Vincent, Monsieur HIGANIRO Alphonse qui était une autorité,
les sœurs peut-être je les aurai croisées au… au monastère de Sovu. Elles sont
jeunes, peut-être elles me reconnaissent, mais moi, je ne me souviens pas exactement.
Peut-être quand je passe là pour des séminaires ou des conférences.
Le Président : Bien oui,
d’accord. Etes-vous de la famille des accusés ou des parties civiles ?
le témoin 10 : Pardon ?
Le Président : Etes-vous
de la famille des accusés ou des parties civiles ?
le témoin 10 : La famille
des accusés ?
Le Président : Est-ce que
vous êtes le frère, le cousin, l’oncle des accusés ?
le témoin 10 : Non, il faut
bien m’expliquer. Je ne suis ni frère ni cousin des accusés.
Le Président : Vous n’êtes
pas de la famille des accusés ?
le témoin 10 : Non.
Le Président : Vous n’êtes
pas de la famille des parties civiles, non plus ?
le témoin 10 : Non.
Le Président : Vous ne travaillez
pas pour les accusés, ni pour les parties civiles ?
le témoin 10 : Pour le moment,
je ne travaille ni pour l’un, ni pour l’autre.
Le Président : Bien.
Je vais vous demander de lever la main droite et de prononcer le serment de
témoin. Voulez-vous bien lever la main droite et prononcer le serment de témoin ?
le témoin 10 : Je jure de
parler sans haine et sans crainte, de dire toute la vérité et rien que la vérité.
Le Président : Je vous remercie,
asseyez-vous, Monsieur le témoin. Vous êtes en Belgique depuis juillet 1994 ?
le témoin 10 : Depuis le 4
août 1994.
Le Président : 4 août 1994.
le témoin 10 : Mais avant,
j’étais, j’avais fait un séjour de quatre ans, ici en Belgique aussi.
Le Président : Pour les études ?
le témoin 10 : Pour les études,
oui.
Le Président : Euh… Au mois
d’avril 1994, vous étiez à Butare ?
le témoin 10 : Oui, mais pas
pendant tout le mois.
Le Président : Vous avez
été… Vous étiez médecin à l’Hôpital universitaire de Butare, à cette époque-là ?
le témoin 10 : Oui.
Le Président : Et vous étiez
également professeur à la faculté de médecine de cette université ?
le témoin 10 : Oui, oui.
Le Président : C’est comme
ça que vous connaissez Monsieur Vincent NTEZIMANA ? Lui était aussi, à
cette époque-là, professeur à l’université ? Pas dans la même faculté ?
le témoin 10 : Oui, c’est…
c’est à ce… c’est à ce moment-là que je l’ai connu. Il était… il était professeur
à la faculté des sciences… des sciences appliquées. Mais parfois, on se rencontrait
aussi lors des activités organisées pour les professeurs, pour le personnel
de l’université nationale du Rwanda.
Le Président : Est-ce que
c’est un professeur ou un de vos collègues que vous fréquentiez beaucoup ?
le témoin 10 : Euh… Non. Je
ne peux pas dire que je le fréquentais beaucoup mais on se croisait parfois
au cours d’une réunion à l’université ou au guesthouse. Parce qu’il ne faut
pas oublier qu’il venait d’arriver, moi, je venais de passer plusieurs dizaines
d’années, lui ne faisait que, je crois, une année ; il venait de terminer.
Et puis, les deux facultés euh… n’étaient pas situées sur le même campus. Alors,
les occasions de nous rencontrer vraiment étaient rares, sauf par exemple, lors
de la réunion de tous les professeurs au campus de Ruhande.
Le Président : Euh… Est-ce
que vous connaissiez quelque chose des opinions politiques de Monsieur NTEZIMANA ?
le témoin 10 : Je ne connais
pas beaucoup de ses opinions politiques mais je sais qu’avant, il était membre
du… du MDR, Mouvement Démocratique Républicain, qui a été rénové au moment où
il y avait le nouveau… le multipartisme qui était accepté pour le Rwanda. Mais
par après, j’ai appris qu’il avait fondé avec d’autres collègues, un autre parti,
le PRD.
Le Président : PRD. Et vous
savez quelles étaient les… les opinions de ce nouveau parti ?
le témoin 10 : J’entendais,
c’est ce que j’entendais par les médias et par, enfin, certaines personnes,
qu’il s’agissait d’un… d’un parti pour le renouveau démocratique parce que les
autres partis ne semblaient pas… ne semblaient pas vraiment prôner pour la
démocratie mais surtout pour les… pour les autres intérêts, surtout que le MDR
qui était, à ce moment-là, qui était un parti d’opposition fiable, venait
de se scinder en deux… en deux parts… en deux groupes et ceci était surtout
causé par les intérêts… les intérêts matériels, les personnes qui voulaient
certains postes, d’autres qui voulaient être les premiers dans la hiérarchie
du… de ce parti politique.
Le Président : C’est ça.
Vous avez expliqué que certains professeurs avaient parfois des… la réputation
de donner des bonnes notes ou des mauvaises notes aux étudiants en fonction
de leur origine régionale ou ethnique. Euh… Vous avez expliqué qu’en ce qui
concerne Monsieur NTEZIMANA, vous n’aviez jamais, vous, entendu parler de… de
ce genre de comportement de sa part.
le témoin 10 : C’est ce que
j’ai dit lors de ma déposition. Je l’ai dit.
Le Président : Vous avez
changé d’avis depuis lors ?
le témoin 10 : Non, non, je
n’ai pas changé d’avis parce que je n’ai pas une copie mais je pourrais l’avoir
dit et c’est correct parce que NTEZIMANA était nouveau, il y avait d’autres,
quand même... Même si on n’était pas sur le même campus, mais on connaissait
des professeurs quand même qui abusaient certains… certains enfants Tutsi ou
d’une autre région mais NTEZIMANA, moi, je n’ai pas entendu parler de lui
sur ce côté-là. Il venait d’arriver, il fallait peut-être qu’il ait une expérience
convenable pour peut-être faire partie intégrante de la maison.
Le Président : Il était pourtant
déjà président de l’APARU ?
le témoin 10 : Oui.
Le Président : Vous avez
expliqué aussi dans votre déposition que le 13 ou le 14 avril 1994, donc après
les événements, après le 6 avril, en tout cas, c’est au moment où l’avion présidentiel
a été abattu, il y avait le couvre-feu, on ne pouvait sortir qu’un jour sur
deux, à l’époque, pour aller notamment faire des achats, et vous avez expliqué
que le 13 ou le 14 avril, il y a eu une grande réunion à Butare dans le stade
de Huye, réunion présidée par ou dirigée par le préfet Jean-Baptiste le témoin 32.
Se trouvait là aussi, le bourgmestre KANYABASHI Joseph, il y avait le commandant
du camp de Ngoma et un représentant de la gendarmerie. Vous avez expliqué que
le but de cette réunion, c’était que toutes ces personnes étaient là pour tranquilliser
la population, euh… faire un sort à certaines rumeurs qu’il y avait à Butare,
à l’époque. Une certaine rumeur notamment, faisait courir le bruit que des gardes,
des membres de la garde présidentielle se trouvaient à Butare, qu’ils étaient
même cachés à… dans une usine de Butare, la SORWAL, usine dirigée par Monsieur
HIGANIRO, et que notamment, au cours de cette réunion, le préfet a dit qu’il
avait vérifié ces informations-là qui apparaissaient incorrectes. C’est bien
exact ?
le témoin 10 : Oui. Mais,
bon, je me demande, peut-être me serais-je trompé quant à la date du 14, je
crois que la… quand on vient d’assister à ces événements atroces, parfois on
n’a pas suffisamment de mémoire, mais je pense que ce n’est pas le 14, mais
c’est un peu plus tard, c’était, je crois, le 17 avril. Donc, toutes ces autorités
locales, donc, préfectorales, communales, militaires et ceux de la gendarmerie,
nous ont réunis au stade de Huye pour… pour essayer de… de calmer toute la population
parce qu’il y avait des rumeurs qui disaient qu’il y avait le… l’usine d’allumettes
où se cachaient les éléments du… de la garde présidentielle qui se préparaient
à perpétrer des massacres dans le… dans la ville de Butare. Donc, toute la commune,
toute la population de Butare était invitée. Et les autorités, tant militaires
que civiles, étaient là. C’est le… le préfet le témoin 32 qui a ouvert la réunion,
qui nous a assurés, qui nous a assurés en disant : « Oui, vous avez
peur qu’il y ait des éléments d’Interahamwe, des… des éléments de la garde présidentielle
qui sont cachés à l’usine d’allumettes dirigée par Monsieur HIGANIRO. Je viens
de là. Nous avons vérifié. Nous n’avons vu aucun élément là-bas. Il faut rester
calme. Il ne faut pas paniquer. Nous sommes là ». Surtout que les militaires,
les militaires étaient là, le commandant de la gendarmerie, le commandant de
camp Ngoma était là aussi et tout le monde était rassuré.
Donc, ils ont insisté surtout sur le fait de nous entraider comme
à l’habitude, à la traditionnelle, quand un voisin a un malheur, quand il est
attaqué la nuit, tout le monde, tout le monde qui entend le cri de celui qui
est attaqué doit intervenir au plus… le plus vite possible, le plus vite possible
pour dire : « Bon, sois fort, je suis là, j’arrive, ne t’en fais pas,
nous sommes avec toi, nous allons… nous allons écraser cet ennemi qui vient
s’aventurer chez toi ». Donc, c’est ce que les autorités nous ont dit de
faire dans nos quartiers respectifs et en faisant des rondes. Donc, il fallait
organiser des rondes pour surveiller tout le quartier. Donc, chaque groupe de…
d’habitants devait organiser les rondes pour surveiller les intrus. Les intrus,
à ce moment-là, les intrus, du moins comme je le… comme je le pense, ce sont
toujours le… les gardes, les éléments de la garde… de la garde présidentielle,
donc, qui voulaient venir tuer les gens comme ça ou bien des milices en même
temps, donc, des miliciens Interahamwe qui avaient commencé d’ailleurs des actions
néfastes dans d’autres régions du pays.
Le Président : Est-ce que
vous habitiez le quartier de Buye ?
le témoin 10 : De Buye ?
Le Président : Oui.
le témoin 10 : Oui, j’habitais
le quartier de Buye ?
Le Président : Et suite à
cette réunion publique avec le préfet, il y a eu une réunion dans votre quartier
pour mettre au point, au fond, ce que demandait ou ce que préconisait le préfet,
mettre au point ces rondes ?
le témoin 10 : Oui, bien sûr.
Donc, je crois que, si j’ai encore bonne mémoire, je crois que c’est le lendemain,
bon, il y a des gens qui pourraient peut-être me rappeler s’ils ont encore une
idée là-dessus. Donc, un jour après, le professeur KARENZI qui était dans le…
qui habitait le quartier, qui était respecté, je le respecte toujours, parce
qu’il a été mon professeur, euh… il nous a téléphoné, il a téléphoné aux personnes
habitant le quartier pour voir comment organiser ces rondes nocturnes. Et on
s’est réuni chez… chez un collègue. On s’est réuni chez un collègue…
Le Président : Chez Monsieur
le témoin 9,
le témoin 10 : le témoin 9,
c’est mon homonyme. Donc, on habitait le même quartier. Donc, on a tenu des
réunions, on a voulu quand même que ce soit fait, qu’il fallait vraiment être
aux aguets, même rester debout éventuellement pour appeler au secours et avertir
les… les collègues ou les amis qui seraient incessamment attaqués par ces éléments
ennemis.
Le Président : Alors, au
cours de cette réunion, de cette réunion chez Monsieur le témoin, euh… Monsieur
NTEZIMANA était présent ?
le témoin 10 : Monsieur NTEZIMANA
était présent. Je crois qu’il est arrivé un peu plus tard.
Le Président : Il semble
que tout le monde n’était pas d’accord de faire ces rondes parce que, notamment,
on trouvait… certains trouvaient que c’était dangereux de faire des rondes.
le témoin 10 : Euh…
ça… ça a été… ça a été
une décision finale. Mais moi, je l’ai toujours dit, je l’ai dit même dans le
rapport, j’ai vu que le Monsieur NTEZIMANA, de prime abord, il n’était pas,
il n’acceptait pas ces rondes, il n’acceptait pas ces rondes. Mais en continuant
la discussion, on a vu qu’effectivement c’était dangereux de se mettre devant
des gens qui sont probablement fortement armés et nous, on avait des petits
bâtons, des gourdins, sans quelque chose de métallique. Alors, on a préféré
laisser mûrir les choses et éventuellement nous rencontrer quelques jours plus
tard.
Le Président : Vous avez
quitté Butare quelques… quelques jours plus tard ?
le témoin 10 : Oui.
Le Président : Parce que,
apparemment, vous avez été averti par un voisin et accompagné d’un militaire
de ce que, bon, on commençait à entendre des coups de feu dans Butare, que ces
coups de feu, ça correspondait à des personnes qu’on… qu’on assassinait et que
les personnes de… de l’université étaient en danger, semble-t-il, parce qu’il
y avait, chez eux, parmi les riches universitaires, beaucoup de suspects qui
allaient se faire exterminer. Il semble que le militaire vous ait demandé 10.000
francs rwandais pour vous aider notamment à passer des barrières ?
le témoin 10 : Euh… Non. En
fait, nous sommes partis parce que si vous avez vu Buye, il y a d’autres collines
en face, donc c’était, je crois, le… la journée où il y avait vraiment des tirs,
il y avait des camionnettes qui amenaient des gens, après on entendait des…
des… en regardant à travers le corridor de notre maison parce qu’on ne pouvait
pas sortir, il y avait des tirs et puis la camionnette repartait, revenait,
même scénario. Et puis, un voisin a eu peur, un voisin… un voisin qui habitait
à côté de moi. Il a eu peur et il voyait ça aussi, il voyait qu’on tuait les
gens et puis il est venu chez moi pour me demander l’aide, donc, ce n’est pas
le militaire en fait qui est venu nous dire que nous devions partir. Mais il
a eu peur et puis il a négocié avec ce militaire pour essayer de… de l’aider
à quitter Butare, à quitter Butare. Et puis, comme il est voisin de moi et moi
je…, en fait, chez moi, la famille n’était plus là, même s’il y avait quelqu’un
qui était encore caché là, j’étais plus ou moins libre pour… pour me déplacer.
Et puis, j’avais peur aussi parce que voir les gens qui étaient…
qu’on tuait de l’autre côté, ça devait arriver chez nous. Parce que le militaire
même qui accompagnait ce fuyard et sa femme, il disait : « Mais vous
ne savez pas si ce qui a été fait à Kigali ou ailleurs, ne pourra pas arriver
ici. Ca va commencer ici, on va… on va faire… on va faire aussi ces massacres
et surtout parmi les gens de l’université, il y a beaucoup de suspects ».
C’est ce qu’il a dit. Alors, on… on avait vraiment à partir parce qu’il venait
d’accepter de nous aider à passer certains… la barrière, la barrière, là, à
Buye. J’ai pris la voiture, j’avais de l’essence et j’ai mis la famille avec
les deux enfants. Il ne fallait pas bien emmener beaucoup de choses parce que
c’était se faire suspecter. Mais quand… quand on a dépassé la première barrière,
il nous a laissés. Il nous a laissés là, et a dit : « Vous êtes des
hommes, il faut débrouiller comme ça ». Donc, 2 mètres… 200 mètres environ,
on était… on pouvait continuer seuls. Nous avons opté à continuer jusque… jusqu’au
centre du pays. Donc, en essayant de… Quand on arrivait à une barrière de militaires,
on disait : « Bon. On va voir un enfant qui est malade et nous revenons
vite comme ça nous… nous vous retrouverons ici ». Et puis, nous sommes
allés nous cacher à l’intérieur du… au centre du pays, dans une école où j’avais
étudié, où NTEZIMANA a étudié.
Mais malheureusement, après quelques jours, on devait encore quitter
parce qu’il y avait toujours les coups de fusil le soir, le matin et puis, il
y avait un groupe de gens qui étaient venus de l’autre côté du pays et qui restaient
à Byimana et tout le monde est parti à Kabgayi. Après, alors, je me suis
retrouvé à Kabgayi avec les deux… la famille que j’avais ramenée de Butare,
et ses deux enfants. Par après, cette famille a voulu regagner sa colline natale
et moi, comme je restais à Kabgayi, je rencontrais les gens qui avaient tué,
exterminé toute ma famille. Alors, je me suis dit : « Ca ne sert à
rien de rester ici, il faut que je retourne à Butare. Si je dois mourir, je
dois mourir à Butare ». Cela, c’est une des raisons aussi qui a fait que
je suis retourné à Butare mais en même temps, il y avait… il y avait un ami
de longue date que j’avais caché dans le faux plafond, qui avait à manger, mais
j’avais peur que les provisions se finissent et je suis revenu le rejoindre
également.
Le Président : Lorsque… Pendant
que vous séjourniez à Butare à cette époque-là, avez-vous vu Monsieur NTEZIMANA
se déplacer en compagnie de militaires ?
le témoin 10 : Euh…
Jamais. Enfin, le fait que j’habite… j’habitais en bas, je ne pouvais
pas vraiment voir NTEZIMANA se déplacer, sauf s’il venait chez moi ou dans le
quartier plus ou moins en bas, mais moi, je ne l’ai pas vu avec les militaires,
du moins, là où j’habitais. On ne sortait pas facilement aussi. Il y avait le
couvre-feu même pendant la journée. On regardait cette camionnette qui… qui
amenait les gens, tuer, à travers le corridor et les rideaux comme ça.
Le Président : Vous avez
rencontré un certain Monsieur Jean-Marie Vianney le témoin 142 ?
le témoin 10 : Jean-Marie
Vianney le témoin 142, oui.
Le Président : A Butare ?
le témoin 10 : Oui.
Le Président : Et ce… ce
Monsieur le témoin 142 vous a expliqué qu’il habitait chez Monsieur NTEZIMANA ?
le témoin 10 : Oui, il me
l’a dit, il me l’a dit. Non seulement le témoin 142 mais il y avait un autre, il y
avait un autre qui fut… logeait là, dans la banque de Kigali.
Le Président : MUKIMBIRI.
le témoin 10 : Oui. Donc,
c’est…
Le Président : Est-ce que
Monsieur le témoin 142 vous a dit quelque chose de particulier en ce qui concerne lui-même ?
Est-ce que lui-même avait peur, Monsieur le témoin 142 ? Est-ce qu’il ne vous
a pas expliqué qu’il avait peur, parce que le témoin 142 était métis, semble-t-il ?
le témoin 10 : Oui, il était
métis. Mais, Monsieur le président, les métis étaient aussi très recherchés
parce que les métis étaient considérés comme des Tutsi en fait, parce que, du
moins dans la région de Butare, il y a un groupe d’Interahamwe qui ont tué le…
un métis parce que non seulement, ils voulaient tuer un métis, mais ils voulaient
tuer un blanc. Donc, ils disaient : « Les autres ont tué les blancs,
moi aussi je dois tuer le blanc. Ils sont blancs et Tutsi ». Donc, ça c’est
arrivé, ceux qui connaissent KARUMUHINZI, je crois qu’ils le savent, c’est un
fils… un métis, son père est Hutu mais il a été tué. Donc, non seulement il
était… il était en danger probablement.
Le Président : le témoin 142, Monsieur
le témoin 142 ne s’est pas plaint en disant : « Moi, j’ai peur d’habiter
chez Monsieur NTEZIMANA parce que Monsieur NTEZIMANA est un homme dangereux ? ».
le témoin 10 : Non, je ne
l’ai pas entendu…
Le Président : Il ne vous
a pas parlé de ça ?
le témoin 10 : Je ne l’ai
pas entendu, vraiment, parce que parfois, il disait : « Je vais aider
le… ». Il m’a dit qu’il aidait les militaires pour les… les containers
d’essence, là que c’était lui qui était spécialiste pour les… pour les fermer,
pour ouvrir, pour donner l’essence aux militaires, du moins c’est ce qu’il faisait,
tandis que MUKIMBIRI, je ne sais pas. Avant, il était banquier, je ne sais
pas ce qu’il faisait à Butare. Mais, ils m’ont dit : « Nous habitons
chez NTEZIMANA ». Ca, il me l’a… il me l’a dit.
Le Président : Bien. Y a-t-il
des questions à poser au témoin ? Monsieur l’avocat général ? Les
parties civiles ? La défense ? Les parties sont-elles d’accord pour
que le témoin se retire ? Monsieur le témoin, est-ce bien des accusés ici
présents dont vous avez voulu parler ? Persistez-vous, confirmez-vous vos
déclarations ?
le témoin 10 : Oui, je les
confirme, Monsieur le président.
Le Président : Eh bien, la
Cour vous remercie pour votre témoignage. Vous pouvez disposer librement de
votre temps. Bien. Eh bien, l’audience va enfin être suspendue pour aujourd’hui,
elle reprendra demain à 9h00, donc, deux témoins d’aujourd’hui qui viendront
à 9h00, avant que Monsieur DEGNI-SEGUI n’arrive et que nous puissions l’entendre
lui aussi. Je vous souhaite, à tous et à toutes, une excellente soirée. |
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