assises rwanda 2001
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Instruction d’audience V. Ntezimana Audition témoins compte rendu intégral du procès
Procès > Instruction d’audience V. Ntezimana > Audition témoins > le témoin 105
1. N. Gasana 2. le témoin 9 3. le témoin 125 4. le témoin 134 5. le témoin 116 6. le témoin 61 7. le témoin 124 8. le témoin 50 9. le témoin 150 10. le témoin 73 11. le témoin 55 12. le témoin 100 et commentaires V. Ntezimana 13. le témoin 97 14. le témoin 104 15. H. Gallee 16. le témoin 84 17. le témoin 36 18. B. Van Custem et commentaires V. Ntezimana et E. Seminega 19. Lecture président attestation J.B. Seminega 20. le témoin 77 21. le témoin 10 22. le témoin 96 23. le témoin 42 24. R. Degni-Segui 25. le témoin 15 26. J. Léonard et commentaires partie civile et V. Ntezimana 27. J.P. Van Ypersele de Strihou 28. le témoin 118 29. le témoin 31, commentaires avocat général, partie civile, défense, audition interview I. Nkuyubwatzi 30. le témoin 108 31. le témoin 127 32. le témoin 109 33. le témoin 147 34. le témoin 105 35. le témoin 89
 

6.3.34. Audition des témoins: le témoin 105

Le Président : Monsieur, quels sont vos nom et prénom ?

le témoin 105 : Mon nom est le témoin 105.

Le Président : Quel âge avez-vous ?

le témoin 105 : J’ai 44 ans.

Le Président : Quelle est votre profession ?

le témoin 105 : Pour le moment, sans profession. J’ai fait mes études d’économie et de gestion des entreprises.

Le Président : Dans quelle commune êtes-vous domicilié ?

le témoin 105 : Pardon ?

Le Président : Dans quelle commune êtes-vous domicilié ?

le témoin 105 : 1000 Bruxelles.

Le Président : Connaissiez-vous les accusés ou certains des accusés, avant le mois d’avril 1994 ?

le témoin 105 : Oui.

Le Président : Qui connaissiez-vous ?

le témoin 105 : Vincent NTEZIMANA, HIGANIRO Alphonse aussi.

Le Président : Etes-vous de la famille des accusés ou de la famille des parties civiles, c’est-à-dire de ceux qui réclament des dommages et intérêts aux accusés ?

le témoin 105 : Je ne réclame ni dommages et intérêts aux accusés.

Le Président : Non, mais vous n’êtes pas de la famille de ceux qui réclament des dommages et intérêts ?

le témoin 105 : Non.

Le Président : Il n’y a pas des membres de votre famille qui réclament des dommages et intérêts aux accusés ?

le témoin 105 : Non.

Le Président : Vous ne travaillez pas non plus, sous les liens d’un contrat de travail, soit pour les accusés, soit pour les parties civiles ?

le témoin 105 : Non.

Le Président : Je vais vous demander, Monsieur, de bien vouloir lever la main droite et de prêter le serment de témoin.

le témoin 105 : Je jure de parler sans haine et sans crainte, de dire toute la vérité et rien que la vérité.

Le Président : Vous pouvez vous asseoir, Monsieur.

le témoin 105 : Merci.

Le Président : Monsieur le témoin 105, vous avez été professeur à l’université nationale du Rwanda à Butare ?

le témoin 105 : Oui, Monsieur le président.

Le Président : C’est là, sans doute, que vous avez fait la connaissance de Vincent NTEZIMANA ?

le témoin 105 : C’est ça.

Le Président : Vous étiez également administrateur trésorier de l’université ?

le témoin 105 : Administrateur trésorier adjoint de l’université.

Le Président : C’est ça. C’est encore une fonction que vous exerciez au moment des événements d’avril 1994 ?

le témoin 105 : Oui, oui.

Le Président : Euh… Monsieur le témoin 105, Monsieur NTEZIMANA a notamment été élu, avant les événements d’avril 94, président, je crois de l’APARU ?

le témoin 105 : Oui, c’est ça.

Le Président : Vous avez eu des contacts avec lui ?

le témoin 105 : Oui, oui.

Le Président : Dans vos fonctions à l’université ?

le témoin 105 : Surtout ça, donc, pour des relations socioprofessionnelles.

Le Président : Euh… vous souvenez-vous de ce que Monsieur NTEZIMANA aurait, vraisemblablement dans le courant du mois d’avril 1994, adressé au vice-recteur de l’université, une liste de personnes qui souhaitaient évacuer Butare pour se rendre dans différents endroits ?

le témoin 105 : Oui, oui, j’ai eu connaissance de sa lettre et de ses annexes, c’est-à-dire les listes qui accompagnaient cette lettre.

Le Président : Oui. Quel est le sort qui a été réservé à cette lettre ? Que demandait cette lettre ?

le témoin 105 : C’est ça. Donc, euh… j’ai eu une réunion avec… une réunion qu’on appelait « réunion de direction » ; le vice-recteur du campus de Butare et le secrétaire général adjoint du campus de Butare et moi-même, on a eu une réunion de direction pour étudier l’objet de cette lettre qui concernait l’évacuation des professeurs et de leurs familles. Donc, malheureusement, ça n’a pas été, dû au problème euh… de ressources, c’est-à-dire ressources humaines pour trouver donc les gendarmes qui pouvaient accompagner les familles, et notamment, pour trouver les bus de l’ONATRACOM que nous avons voulu louer. Alors, lorsque nous avons eu malheureusement l’échec de ces négociations que nous avons commencées, nous avons dû renoncer. Alors, le vice-recteur s’est chargé, comme c’était lui, la lettre était adressée à lui, s’est chargé de communiquer à Vincent, donc, la réponse finale de cette…

Le Président : Donc, il s’agissait bien de listes de personnes qui souhaitaient être évacuées ? La demande a bien été formulée par Monsieur NTEZIMANA dans ce sens-là ?

le témoin 105 : Oui.

Le Président : Une réunion au moins, a eu lieu pour traiter ce problème ?

le témoin 105 : Oui.

Le Président : Il y a eu des difficultés pour donner suite, à savoir, semble-t-il, d’après ce que vous dites ici, la location de bus ou de cars pour pouvoir transporter les personnes ? Si j’ai bien compris aussi, l’impossibilité d’obtenir, euh… la protection de la gendarmerie ?

le témoin 105 : Oui, pour l’escorte.

Le Président : Pour l’escorte. Et vous aviez, je crois, signalé déjà aussi à la police judiciaire, lorsque vous avez été entendu, que euh… il fallait vraisemblablement des autorisations individuelles et pas des autorisations collectives, parce qu’il y avait de toute façon des contrôles individuels ?

le témoin 105 : Oui. Ça a été toujours comme ça, même à la dernière minute, lorsqu’on a fui Butare, il fallait toujours avoir une autorisation individuelle et une autorisation du véhicule.

Le Président : De vos rapports avec Monsieur NTEZIMANA, comment décririez-vous sa personnalité ?

le témoin 105 : Euh… mes rapports peuvent se situer à deux niveaux. Le premier niveau, c’était lorsqu’il était assistant au département de physique, moi aussi, j’étais assistant au département de comptabilité, euh… on se voyait ou on avait le même transport de l’université et je le voyais souvent jouer avec les étudiants, il jouait beaucoup au basket, euh… je le voyais comme ça, comme d’autres collègues, sans autre… sans pouvoir essayer de lui trouver une autre personnalité. Mais le deuxième niveau, c’est que euh… lorsque j’étais administrateur trésorier adjoint à l’université, lorsqu’il est revenu d’ici, qu’il a été élu président de l’APARU, là, nous avions des relations socioprofessionnelles euh… souvent tendues, lorsqu’il fallait demander pour le problème de logement que nous avons eu, lorsqu’on me demandait des indemnités de logement, donc, c’étaient des relations entre un responsable et quelqu’un qui représentait, d’une façon socioprofessionnelle, les enseignants.

Le Président : Connaissiez-vous ses opinions politiques ?

le témoin 105 : J’ai pas bien connu ses opinions politiques mais, comme on était à l’université, on parlait de… d’un autre parti qui venait d’être fondé, qui, apparemment, était un parti comme un parti euh… une scission du MDR. Sinon, je ne l’aurais jamais rencontré dans une manifestation quelconque.

Le Président : Savez-vous si Monsieur NTEZIMANA entretenait des relations avec des militaires ?

le témoin 105 : Ça, je l’ignore.

Le Président : Oui.

le témoin 105 : Je l’ignore.

Le Président : Vous l’ignorez. Connaissez-vous le capitaine NIZEYI-MANA ?

le témoin 105 : Oui, je le connaissais. Je l’ai vu, je le voyais mais je n’ai jamais, jamais, jamais, je n’ai jamais communiqué avec lui. Lui non plus, n’a jamais communiqué avec moi.

Le Président : Vous-même, vous étiez affilié à un parti politique ?

le témoin 105 : Oui, j’étais affilié au parti politique du MRND.

Le Président : Y a-t-il eu des réunions du MRND à Butare, dans les semaines qui ont précédé les événements d’avril ?

le témoin 105 : A ma connaissance, je ne me souviens pas qu’il y a eu une réunion. Mais il y avait eu des tentatives de réunion, il s’agissait de… il y avait des élections en vue, concernant les conseillers communaux. Alors, chaque parti essayait de se rencontrer, de faire des réunions. On m’avait parlé d’une réunion qui devait avoir lieu, mais j’ai jamais participé à une réunion, malheureusement.

Le Président : Et à la fin de l’année 1993, auriez-vous participé à des réunions du MRND ?

le témoin 105 : A la fin de 1993 ? Non. Je vous ai dit que j’ai jamais participé à une réunion.

Le Président : Aucune ?

le témoin 105 : Aucune.

Le Président : Donc, vous étiez simplement affilié à un parti, sans participer aux activités de ce parti politique ?

le témoin 105 : Oui, comme on le disait, affilié non actif.

Le Président : Vous avez dit tout à l’heure que vous connaissiez également Monsieur HIGANIRO ?

le témoin 105 : Oui.

Le Président : Vous pouvez indiquer de quelle manière vous avez fait sa connaissance, ou dans quelle mesure vous le connaissiez et à quelle époque vous l’avez connu ?

le témoin 105 : Euh… HIGANIRO, je l’ai connu, d’abord lorsqu’il était secrétaire général au ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique. Je devais aller au Canada pour étudier au Canada, c’était un problème de bourse, problème qui avait lieu, donc, concernant mon départ. Alors, je l’ai rencontré. Il y avait des problèmes, apparemment, on le voyait, au niveau du ministère. Alors, il m’a accueilli et ça a été débloqué. Euh… depuis lors, lorsqu’il était ministre, on le voyait comme on voyait tous les ministres. Lorsqu’il était à Butare, je ne l’ai jamais croisé, je ne l’ai jamais croisé. Voilà donc les circonstances que…

Le Président : C’est ça.

le témoin 105 : …dans lesquelles j’ai connu HIGANIRO.

Le Président : Vous avez expliqué à la police judiciaire que, lorsque Monsieur HIGANIRO, ça remonte évidemment à un certain temps, était secrétaire général du ministère de l’enseignement supérieur, il avait une fonction équivalente à celle de chef de cabinet et que, en conséquence, quand le ministre était absent, il remplaçait le ministre ?

le témoin 105 : Il remplaçait le ministre ?

Le Président : Oui.

le témoin 105 : Bah, de toute façon, c’est une évidence. Le secrétaire général remplaçait toujours le ministre lorsqu’il était absent.

Le Président : Et au moment où Monsieur HIGANIRO donc, est venu, euh… à Butare, où il est devenu directeur général de la SORWAL, vous ne l’avez jamais rencontré ?

le témoin 105 : Jamais croisé.

Le Président : Même croisé ?

le témoin 105 : Même croisé.

Le Président : Vous habitiez dans quel quartier ?

le témoin 105 : J’habitais le quartier de Buye, tout près de la route macadamisée qui entre dans Butare, tout près de la commune Ngoma, de la maison communale de Ngoma. 

Le Président : Euh… et Monsieur HIGANIRO habitait aussi dans ce quartier-là, non ? Le quartier est peut-être très grand, hein.

le témoin 105 : Oui, moi aussi, c’est ce que je connaissais. Donc, le quartier était grand, donc, là où il habitait, je n’ai jamais été chez lui, lui non plus, donc, comme je le dis, je ne l’ai jamais croisé, jamais, jamais.

Le Président : Euh… à la police judiciaire, vous aviez indiqué que, selon ce que vous saviez, les postes importants à la SORWAL étaient occupés par des gens qui venaient de la région du Nord ?

le témoin 105 : Que j’ai dit à la police judiciaire que la SORWAL était occupée par ?

Le Président : Que les gens, les places importantes à la SORWAL étaient occupées par des gens venant de la région du Nord du Rwanda. Monsieur HIGANIRO, il venait du Nord ?

le témoin 105 : Oui, bien sûr.

Le Président : Il y avait d’autres responsables, d’autres personnes importantes de la SORWAL qui venaient du Nord, aussi ?

le témoin 105 : Ce que je me souviens, ce que j’ai dit, c’est que depuis que la SORWAL a été créée, il y avait des directeurs expatriés mais il y a eu toujours quelqu’un, un directeur du Nord, ça a été… les quatre que je connais, les quatre, ils étaient du Nord, donc, c’est ce que j’ai dit.

Le Président : C’est qui, les quatre que vous connaissiez ?

le témoin 105 : Bon, en commençant par HIGANIRO, euh… celui qu’il a remplacé était NGIRIRA, celui que NGIRIRA a remplacé, UWILINGIYIMANA Léonard qui était mon collègue à la faculté des sciences économiques, euh… Léonard a remplacé, si je me souviens bien Gaspard, NSUBIJE Gaspard. Voilà donc, du moins, les quatre dont je me souviens.

Le Président : Et en 94, le témoin 21, il était du Nord ?

le témoin 105 : Oui, Martin, du Nord, oui.

Le Président : Jean-Paul le témoin 40 ?

le témoin 105 : Je ne sais pas où les limites se fixent. Mais le témoin 40 vient de Kigali.

Le Président : Avez-vous observé que, pendant les événements d’avril 94, d’avril et mai 1994, il y avait des entraînements militaires à la SORWAL, ou en tout cas, des entraînements du maniement d’armes ?

le témoin 105 : Non, je ne l’ai pas remarqué.

Le Président : Vous n’avez pas remarqué ?

le témoin 105 : Non.

Le Président : Et vous ne le saviez pas non plus ?

le témoin 105 : Non.

Le Président : A la police judiciaire, vous avez indiqué que pendant les événements, vous saviez qu’il y avait des autorités militaires qui dispensaient des cours de maniement des armes à des jeunes hommes civils. Ce n’était pas à la SORWAL, peut-être ? C’était peut-être ailleurs ?

le témoin 105 : Non, ce n’était pas à la SORWAL.

Le Président : Et ça se faisait dans quel cadre, ces entraînements ?

le témoin 105 : Ça se faisait dans le cadre de la défense civile. Alors, les gens demandaient : « Est-ce que c’est possible d’avoir, nous aussi, des armes au lieu d’être à la merci de tout le monde, des Interahamwe, du FPR ? ». Alors, au niveau de la défense civile, ils ont travaillé tout ça, ils ont essayé d’enseigner le maniement des armes.

Le Président : Vous avez participé, vous, à ce genre d’enseignement ?

le témoin 105 : Non, jamais.

Le Président : Bien. Y a-t-il des questions à poser au témoin ? S’il n’y a pas de questions au témoin, les parties sont-elles d’accord pour qu’il se retire ? Alors, Monsieur le témoin 105, confirmez-vous les déclarations que vous venez de faire et persistez-vous dans ces déclarations ?

le témoin 105 : Oui, je le confirme.

Le Président : La Cour vous remercie pour votre témoignage. Vous pouvez disposer librement de votre temps.

le témoin 105 : Je vous remercie, Monsieur le président.