assises rwanda 2001
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Instruction d’audience C. Mukangango, « sœur Gertrude » et J. Mukabutera, « sœur Kizito » Audition témoins compte rendu intégral du procès
Procès > Instruction d’audience C. Mukangango, « sœur Gertrude » et J. Mukabutera, « sœur Kizito » > Audition témoins > M.le témoin 44
1. le témoin 19 2. M.le témoin 44 3. R. Tremblay 4. le témoin 110 5. le témoin 38 6. le témoin 72 7. le témoin 101 8. le témoin 79 9. le témoin 138 10. le témoin 57 11. le témoin 2 12. le témoin 66 13. le témoin 71 14. le témoin 64 15. le témoin 81 16. le témoin 151 17. le témoin 115 18. le témoin 136 19. le témoin 7 20. le témoin 75 21. le témoin 82 22. le témoin 80 23. le témoin 99 24. le témoin 152 25. le témoin 78 26. Commentaires sur textes rédigés à Maredret 27. le témoin 95 28. le témoin 133 et commentaires de défense 29. le témoin 74 30. le témoin 70 31. le témoin 20 32. le témoin 60 33. le témoin 17 34. le témoin 49 35. le témoin 127 36. le témoin 47 37. le témoin 46 38. le témoin 147 39. le témoin 51 40. A. JANSSENS 41. le témoin 48 42. le témoin 145 43. G. Dupuis
 

8.6.2. Audition des témoins : le témoin 44

Le Greffier : La Cour.

Le Président : L'audience est reprise, vous pouvez vous asseoir et les accusés peuvent prendre place. Madame le témoin 44 est de retour ? Nous avions deux témoins, en début d’après-midi, qui ne se sont pas présentés : le témoin 119 et le témoin 53. le témoin 119 Eugène ayant fait parvenir un courrier signalant qu’il était à l’étranger, et le témoin 53 n’ayant pas pu être joint parce qu’il est radié d’office, depuis 1996. Les parties renoncent-elles aux auditions de ces deux témoins ? Alors, on peut faire approcher Madame le témoin 44. Vous vous exprimez et vous comprenez bien le français, Madame ? Ou vous voulez vous exprimer en français, ou vous préférez avoir un interprète ?

le témoin 44 : En kinyarwanda.

Le Président : Bien, donc un interprète… Monsieur l’interprète, voulez-vous bien demander au témoin quels sont ses nom et prénom ?

L’Interprète : Amazina yawe yombi ?

le témoin 44 : Nitwa le témoin 44.

L’Interprète : le témoin 44.

Le Président : Ce n’est pas Marie-Bernard ?

le témoin 44 : Izina nitwaga ndi mu babikira ni Marie-Bernard.

L’Interprète : Le nom qu’elle portait quand elle faisait encore partie de la communauté religieuse était Marie-Bernard.

Le Président : Quel âge a le témoin ?

L’Interprète : Ufite imyaka ingahe ?

le témoin 44 : 41.

L’Interprète : 41 ans.

Le Président : Quelle est sa profession ?

L’Interprète : Umwuga wawe ?

le témoin 44 : Ndikorera.

L’Interprète : Une profession libérale.

Le Président : Quelle est sa commune de domicile ou de résidence ?

L’Interprète : N’iyihe Komine utuyemo ?

le témoin 44 : Ubundi byari Nyarugenge ariko byarahindutse, hasigaye ari Nyamirambo.

L’Interprète : Nyamirambo, avec les changements actuels.

Le Président : Au Rwanda ?

le témoin 44 : Yego.

L’Interprète : Oui.

Le Président : Le témoin connaissait-elle les accusés ou certains des accusés, avant le mois d'avril 1994 ?

L’Interprète : Wari uzi abaregwa cyangwa se bamwe mu baregwa mbere y’ukwezi kwa kane kwa 94 ?

le témoin 44 : Ndabazi babiri kuko twarabanye.

L’Interprète : Oui, j’en connais deux, puisque nous vivions ensemble.

Le Président : Il s’agit de sœur Gertrude et sœur Marie-Kizito ?

le témoin 44 : Yego.

L’Interprète : Oui.

Le Président : Est-elle de la famille des accusés ?

L’Interprète : Ufitanye isano mu muryango w’abaregwa ?

le témoin 44 : Isano… ?

L’Interprète : Isano y’umuryango.

le témoin 44 : Oya.

L’Interprète : Non.

Le Président : Elle est partie civile constituée ?

L’Interprète : Uregera indishyi ? Uri mu baregera indishyi ?

le témoin 44 : Yego.

L’Interprète : Oui.

Le Président : Est-ce qu’elle travaille pour les accusés ?

L’Interprète : Hari umurimo ufite uwo ukorera mu baregwa ?

le témoin 44 : Umurimo ?

L’Interprète : Yego, umurimo w’akazi gasanzwe, ko bagukoresha, umukozi wabo bahemba, mu baregwa.

le témoin 44 : Njyewe kubahemba se ?

L’Interprète : Baguhemba, ubakorera umwuga w’umurimo, akazi gasanzwe.

le témoin 44 : Abaregwa ?

L’Interprète : Abaregwa niba bagukoresha mu kazi gasanzwe.

le témoin 44 : Oya.

L’Interprète : Non.

Le Président : Elle ne travaille pas pour d’autres parties civiles ?

L’Interprète : Nta bandi waba ukorera akazi mu baregera indishyi ?

le témoin 44 : Oya, njyewe ndikorera kuri compte yanjye.

L’Interprète : Non, moi, je travaille pour mon propre compte.

Le Président : Bien. Alors, vous voulez bien lui expliquer que comme elle est partie civile constituée, elle sera entendue sans serment, elle ne doit pas prêter serment.

L’Interprète : Ngo ubwo uri mu baregera indishyi ukaba waramaze kubikora ntabwo uribuze kumvwa umaze kurahira, urumvwa gusa nk’umuntu gusa uzanye ubuhamya bwe.

Le Président : Vous pouvez l’inviter à s’asseoir et vous asseoir à côté d’elle. Voulez-vous bien lui demander si, en avril 1994, elle faisait bien partie de la communauté des religieuses de Sovu ?

L’Interprète : Mu kwezi kwa kane kwa 94, wari mu muryango w’ababikira b’i Sovu ?

le témoin 44 : Yego. Nari ndi mu muryango w’ababikira b’i Sovu.

L’Interprète : Oui, je faisais partie de la communauté des religieuses de Sovu.

Le Président : Quel était son statut ? Est-ce qu’elle était novice déjà ou aurait-elle un autre statut ?

L’Interprète : Wari uhari nk’umunovise cyangwa se wari mu rundi rwego ?

le témoin 44 : Oya nari naramaze gukora amasezerano arangiza, professe solennelle.

L’Interprète : Non, j’avais déjà fait mes promesses solennelles.

Le Président : Bien. Est-ce que, dans le couvent, elle avait un rôle, une fonction particulière ?

L’Interprète : Mu kigo cy’ababikira, mu muryango wari uhafitemo umurimo wihariye, inshingano zawe bwite warushinzwe.

le témoin 44 : Ubundi ntawe ugira umurimo we yihariye, ntawagiraga umurimo we yihariye, bagendaga bahindura umuntu bakurikije uko umwaka ushize.

L’Interprète : Normalement, personne n’avait des attributions précises, particulières, puisqu’on les attribuait et on les modifiait après chaque année.

Le Président : Est-ce qu’en avril 1994, elle avait un rôle particulier, une attribution particulière ?

L’Interprète : Mu kwezi kwa kane kwa 94, hari inshingano wari ufite zihariye ?

le témoin 44 : Oui. Nakoraga muri atelier ikora amahostiya.

L’Interprète : Oui, je travaillais dans l’atelier qui fabriquait les hosties.

Le Président : C’est cela. A partir de quelle date, des réfugiés sont-ils arrivés au couvent de Sovu ?

L’Interprète : Impunzi zatangiye kuza mu kigo cy’i Sovu kuva ku yihe tariki ?

le témoin 44 : Kuva ku itariki ya 17.

L’Interprète : A partir du 17.

Le Président : Est-ce qu’il n’y avait pas déjà à l’intérieur du couvent, d’une part, des personnes qui suivaient un séminaire ?

L’Interprète : Nta bandi bantu bari mu kigo mbere, bari mu mahugurwa ?

le témoin 44 : Bari bahari.

L’Interprète : Si, il y en avait.

Le Président : Et, est-ce qu’il n’y avait pas, peut-être déjà aussi, à l’intérieur du couvent, des membres des familles des religieuses ?

L’Interprète : Mu kigo ubwaho, nta bantu bari bahari bo mu muryango wo mu babikira ?

le témoin 44 : Harimo abantu babiri.

L’Interprète : Oui, il y avait deux personnes.

le témoin 44 : Njye nashakaga kuvuga amazina yabo.

L’Interprète : Est-ce que je peux dire leurs noms ?

Le Président : Oui.

le témoin 44 : Cyarimo umudamu witwaga Chantal, madamu wa BUTERA Charles,

L’Interprète : Oui, il y avait une dame du prénom de Chantal, l’épouse de BUTERA Charles,

le témoin 44 : Nièce de Scholastique wa BUTERA Charles. BUTERA Charles, c’est le neveu de sœur Scholastique.

L’Interprète : BUTERA Charles, étant le père de sœur Sholastique.

le témoin 44 : Son neveu.

L’Interprète : Etant le neveu de sœur Scholastique.

le témoin 44 : Aussi, mbere y’itariki 17, halimo musaza wanjye wahahungiye kuri 15. Avuye i Kigali, aje n’amaguru.

L’Interprète : Avant cette date, il y avait aussi mon propre frère, qui s’y était réfugié le 15 avril, et il venait de Kigali, à pied.

Le Président : Lorsque les réfugiés ont commencé à arriver des collines, hein, les réfugiés venant des collines, les 17 et le 18 avril 1994, quelle a été l’attitude de sœur Gertrude ?

L’Interprète : Ubwo impunzi zatangiraga kuza ku itariki ya 17 na 18 ziva mu misozi aho, imyitwarire ya sœur Gertrude yari imeze ite ? Yari myitwarire ki ?

le témoin 44 : Ku itariki ya 17 impunzi zimaze kuza, bari bakiri bakeya, ku italiki ya 18, igihe se impunzi zatangiye kuba nyinshi.

L’Interprète : Le 17, au début de leur arrivée, les réfugiés étaient encore peu nombreux. Le 18, leur nombre a commencé à s’accroître.

le témoin 44 : Hanyuma nyuma yo kuri uwo munsi wo ku itariki ya 18, ajya i Butare, kubwira abasirikare ko impunzi zaje.

L’Interprète : Alors, à cette date, le 18, elle s’est rendue à Butare, annoncer aux militaires, l’arrivée des réfugiés.

Le Président : Oui, quel a été le résultat de cette démarche ?

L’Interprète : Urwo rugendo rwakurikiwe n’iki ?

le témoin 44 : Urwo rugendo aruvuyemo, yaraje aratubwira, abasilikare ko bamubajije nimba abo bantu abazi bose.

L’Interprète : Après son retour, elle nous a dit que les militaires lui avaient demandé si elle connaissait tous ces réfugiés.

le témoin 44 : Hanyuma asubiza ko, asubiza abo basirikare ko impunzi atabazi bose.

L’Interprète : Et qu’elle avait répondu à ces militaires qu’elle ne connaissait pas tous ces réfugiés.

le témoin 44 : Nabo baramubwira bati : « Nimba utabazi ntubareke binjira, kuko hashobora kuba harimo abafite intwaro cyangwa hihishemo Inkotanyi ».

L’Interprète : Alors, les militaires lui avaient dit que si elle ne connaissait pas tous ces réfugiés, qu’elle ne devait pas les laisser entrer, puisqu’il pourrait y avoir parmi eux, des personnes armées ou alors des Inkotanyi.

le témoin 44 : Nkomeze ?

Le Président : Oui, que s’est il passé alors ?

le témoin 44 : Ubwo umugoroba warageze, bukeye bwaho, haje kugwa imvura nyinshi cyane,

L’Interprète : Ce fut alors le soir et puis, le lendemain, il a plu abondamment,

le témoin 44 : Hanyuma nkuko bari babimubwiye ntabwo yongeye gukingura kiriziya, yarakinze impunzi ziguma hanze ziranyagirwa.

L’Interprète : Alors, suivant ce que les militaires lui avaient dit, elle n’a plus ouvert l’église, elle l’a fermée, et puis les réfugiés sont restés dehors, sous la pluie.

le témoin 44 : Harimo abana batoya bariraga, n’abandi bakuru,

L’Interprète : Il y avait, parmi ces réfugiés, des petits enfants qui pleuraient et d’autres adultes,

le témoin 44 : Basaba ko babakingurira bakugama, ariko ntabwo yabyemeye.

L’Interprète : Qui demandaient qu’on leur ouvre, qu’ils se mettent à l’abri, ce qu’elle n’a pas accepté.

le témoin 44 : Ndibuka umunovise umwe witwaga Mathilda, yararize cyane abonye banze kugamisha impunzi,

L’Interprète : Je me souviens d’une novice qui se prénommait Mathilde, qui a beaucoup pleuré face à ce refus d’ouverture de la porte aux refugiés,

le témoin 44 : Hanyuma aravuga ati : « Ese koko nimba yari Kristu wari uje gusaba ngo umwugamishe, ntabwo mwakingura ? »

L’Interprète : Elle a dit : « Et si c’était le Christ qui venait demander abri, vous n’auriez pas ouvert ? ».

le témoin 44 : Icyo gihe Gertruda ntacyo yashubije, yamurebye nabi, ariko ntabwo yigeze akingurira impunzi ngo zugame.

L’Interprète : Gertrude n’a rien répondu, elle lui a adressé un mauvais regard,, mais elle n’a pas ouvert la porte aux réfugiés pour qu’ils se mettent à l’abri.

le témoin 44 : Ubwo uko iminsi yahitaga igakomeza, niko ubuzima bw’impunzi bwarushagaho kubaho nabi,

L’Interprète : Au fur et à mesure que les jours avançaient, la situation des réfugiés se détériorait.

le témoin 44 : Ntabwo bari bafite ibyo barya,

L’Interprète : Ils n’avaient ni nourriture,

le témoin 44 : Ndibuka ko hari umugabo w’i Butare Lawuriyani NTEZIMANA wabazaniye umuceri,

L’Interprète : Je me souviens qu’il y a un homme de Butare, qui s’appelle le témoin 110, qui leur a apporté du riz.

le témoin 44 : Yazanye imifuka 12 ariko impunzi ntabwo bigeze bayiziha ngo zirye.

L’Interprète : Il a apporté avec lui 12 sacs de riz, mais ce riz n’a jamais été distribué aux réfugiés pour qu’ils mangent.

Le Président : Est-ce que sœur Gertrude n’a pas expliqué pourquoi elle ne distribuait pas le riz ? Est-ce qu’elle n’a pas expliqué que, si elle donnait la clé qui permettait d’aller dans le magasin où se trouvait le riz, elle pouvait être considérée comme une complice des Inkotanyi ?

L’Interprète : Ntabwo yigeze mama Gertrude abasobanurira impamvu atatanze uwo muceri, ko iyo ajya gutanga urufunguzo yari gufatwa nk’inkoyanyi, nk’ikitso cy’Inkotanyi ?

le témoin 44 : Oya ntabwo yadusobanuriye bazaga gusa gusaba urufunguzo bakarubura.

L’Interprète : Elle ne nous a rien expliqué. Ils venaient chercher la clé et ne la trouvaient pas.

Le Président : Que s’est-il passé entre le 18 avril et le 22 avril ? Est-ce que les Interahamwe étaient déjà présents à partir du 18 avril ?

L’Interprète : Byagenze bite hagati ya 18 na 22 z’ukwa kane ? Interahamwe zari zihari kuva kuri 18 ?

le témoin 44 : Ntabwo Interahamwe zahazaga buri munsi, hari umupolisi warindaga izo mpunzi,

L’Interprète : Les Interahamwe ne venaient pas tous les jours, il y avait un agent policier qui gardait ces réfugiés.

le témoin 44 : Ahubwo umubikira witwa Kizito, niwe wazamukaga, agasanga Interahamwe aho zabaga ziri.

L’Interprète : Par contre, c’est une sœur du nom de Kizito qui montait, qui rejoignait les Interahamwe, là où ils étaient.

le témoin 44 : Kizito rero ukuntu twashoboraga kumubona asanga Interahamwe, twari turi muri étage ya hôtellerie,

L’Interprète : La façon dont nous voyions Kizito se rendre là où se trouvaient les Interahamwe, c’est que nous étions dans un étage de l’hôtellerie,

le témoin 44 : Tukarebera mu idirishya tukabona ko Kizito yazamutse agasanga Interahamwe,

L’Interprète : Et, à travers la fenêtre, on voyait que Kizito était montée vers les Interahamwe.

le témoin 44 : Njyewe ubwanjye nigeze kubaza Kizito ibintu bitarakomera, bataratangira kwica, ndamubaza nti : « Ese ni kuki ukunda gusanga Interahamwe kenshi ? ».

L’Interprète : Personnellement, quand les choses n’étaient pas encore graves, quand les tueries n’avaient pas commencé, personnellement, j’ai demandé à Kizito : « Pourquoi tu vas souvent voir les Interahamwe ? ».

le témoin 44 : Kizito yanshubije ko agenda kureba interahamwe ngo azisabe imbabazi ngo ntibazice impunzi. Ariko ntabwo ariko byagenze.

L’Interprète : Kizito m’a alors dit qu’elle allait voir les Interahamwe pour implorer leur pitié pour qu’ils ne viennent pas tuer les réfugiés, mais ce n’est pas ce qui s’est produit par la suite.

le témoin 44 : Kizito rero yasohokaga kenshi, kuva intambara, kuva impunzi ziza, kenshi cyane yabaga ari hamwe n’Interahamwe cyangwa hamwe na REKERAHO,

L’Interprète : Ainsi, Kizito sortait souvent, trop souvent, voir les Interahamwe, trop souvent, elle était avec les Interahamwe ou alors avec REKERAHO,

Le Président : Mais Kizito expliquait que c’était pour implorer la pitié des Interahamwe ?

L’Interprète : Ngo Kizito yavuze ko ari ugusaba imbabazi Interahamwe ?

le témoin 44 : Kizito nuko njyewe yanshubije, ariko ntabwo ariko byagenze kuko abantu bose barapfuye.

L’Interprète : Kizito, c’est cela qu’elle m’a dit mais ce n’est pas ce qui s’est passé, puisque tout le monde est mort.

Le Président : Est-ce que Kizito avait, par rapport aux autres sœurs de la communauté, une raison un peu plus particulière que les autres, d’aller voir les Interahamwe ?

L’Interprète : Ugereranyije n’abandi babikira bo mu kigo, Kizito hari impamvu yari afite y’umwihariko yatumaga ajya kureba Interahamwe we ?

le témoin 44 : Kizito icyatumaga agenda cyane, hari ku musozi w’iwabo. Kizito ubundi avuka i Sovu.

L’Interprète : Ce qui poussait Kizito à s’y rendre souvent, c’est que c’était sur sa colline, Kizito, normalement, est originaire de Sovu.

le témoin 44 : Nta n’undi mubikira wigeze atinyuka gusohoka, kuko twari dufite ubwoba bwinshi.

L’Interprète : Et aucune autre sœur n’a osé se rendre dehors car nous avions énormément peur.

le témoin 44 : Kizito rero yagendaga kenshi kuko yasangaga, yasangaga abantu azi kurusha abandi bandi bahasanzwe.

L’Interprète : Alors, Kizito sortait souvent puisqu’elle allait vers des personnes qu’elle connaissait mieux que d’autres personnes du couvent.

Le Président : Est-ce que, parmi les Interahamwe, elle en connaissait certains très bien ?

le témoin 44 : Ngo ? Ntabwo numvishe neza cyane.

L’Interprète : Ngo bamwe mu Nterahamwe bari bamuzi neza

le témoin 44 : Bari bamuzi cyane kuko bari abo ku musozi w’iwabo kandi harimo na basaza be babiri bari bari mu Nterahamwe.

L’Interprète : Oui, elle les connaissait bien puisqu’ils étaient de sa colline d’origine, et puis, parmi eux, il y avait deux de ses frères qui faisaient partie des Interahamwe.

Le Président : Est-ce que Kizito a dit au témoin que deux de ses frères étaient parmi les Interahamwe ?

L’Interprète : Kizito yarakubwiye ko babiri muri basaza be bari mu Nterahamwe ?

le témoin 44 : Ntabwo njyewe yabimbwiye ariko njye ntungutse mvuye mu Rwanda, nahuye na musaza wa Kizito.

L’Interprète : Elle ne me l’a pas dit personnellement, mais à mon retour d’exil, j’ai rencontré un frère de Kizito.

le témoin 44 : Yambwiye ko umudamu we ngo bamwishe, mubajije igituma bamwishe ambwira ko nawe bamutwaraga kuri barrière ku ngufu. Ni musaza wa Kizito wabimbwiye nsubiye mu Rwanda muri 95.

L’Interprète : Il m’a dit que sa femme avait été assassinée. Quand je lui ai demandé la raison de cet assassinat, il m’a dit que sa femme aussi était emmenée à des barrières.

le témoin 44 : Son frère était emmené à la barrière, par force.

Le Président : Que s’est-il passé le 22 avril ?

L’Interprète : Kuri 22 byagenze bite ?

le témoin 44 : Kuri 22 hari mu gitondo,

L’Interprète : Au matin du 22,

le témoin 44 : Nagiye kumva numva amasasu aravuze,

L’Interprète : J’ai entendu des éclatements, des tirs.

le témoin 44 : Narazamutse aho nari ndi ndahava nsanga abandi babikira aho bari bari, bariho basenga.

L’Interprète : Je suis partie de là où j’étais, puis, j’ai rejoint les autres religieuses qui priaient.

le témoin 44 : Nyuma naje kubona abantu benshi cyane bafite intwaro, bambaye amakoma, bavuza ingoma,

L’Interprète : Après, j’ai vu une foule de plusieurs personnes habillées en feuilles de bananeraie et qui battaient des tambours,

le témoin 44 : Bagendaga bavuza induru cyane,

L’Interprète : Et qui criaient beaucoup,

le témoin 44 : Bamanuka bajya aho impunzi zari ziri kuri centre de santé,

L’Interprète : Qui descendaient en direction de là où étaient des réfugiés, au centre de santé.

le témoin 44 : Ubwo batangiye kurasa kuva mu gitondo cya kare,

L’Interprète : Ils ont commencé à tirer très tôt le matin,

le témoin 44 : Hanyuma bikomeza umunsi wose.

L’Interprète : Et ça s’est poursuivi toute la journée.

le témoin 44 : Twageze igihe tugira ubwoba bwinshi,

L’Interprète : Nous avons été saisis d’une grande frayeur,

le témoin 44 : Hanyuma turamanuka tujya, dusanga abo bashyitsi bari baraje muri session yo muri hôtellerie

L’Interprète : Et nous avons rejoint des visiteurs qui étaient en session à l’hôtellerie.

le témoin 44 : Bakomeza kurasa cyane, uko bakubise isasu, umuntu akagwa hasi kubera ubwoba, bakubita isasu abandi bakaryama ku ntebe,

L’Interprète : Des tirs ont continué. A chaque tir nous tombions par terre à cause de la peur, et d’autres tombaient sur les bancs.

le témoin 44 : Bakomeza kurasa umunsi wose, bigejeje nko mu masaa… nyuma ya saa sita ntabwo nibuka isaha neza,

L’Interprète : Ils ont tiré toute la journée, puis, à une heure dont je ne me rappelle plus, de l’après-midi,

le témoin 44 : Hanyuma Kizito na Gertrude barasohotse baragenda,

L’Interprète : Kizito et Gertrude sont sorties et sont parties.

le témoin 44 : Ntabwo nzi ahantu bagiye mu by’ukuri ariko baragiye baratinda,

L’Interprète : Je ne sais pas où elles sont allées, toujours est-il qu’elles ont fait longtemps, là-bas.

le témoin 44 : Baragarutse, Gertruda ubwe agarutse yaratubwiye ngo yabonye ko impunzi zapfuye ariko ntabwo abantu bapfuye bose.

L’Interprète : A son retour, Gertrude nous a dit, personnellement, qu’elle a vu que les réfugiés étaient assassinés, mais que tout le monde n’était pas mort.

le témoin 44 : Noheho aravuga ati : « Hari umuntu umbwiye ko ejo bazica ababikira ».

L’Interprète : Alors, elle nous a dit que quelqu’un venait de lui dire que le lendemain, on viendrait tuer les religieuses.

le témoin 44 : Aratubwira ngo buri muntu afate utuntu dukeya tuzagerageze guhunga bukeye.

L’Interprète : Elle nous a alors conseillé de prendre un peu de nos effets personnels pour que nous puissions préparer la fuite.

le témoin 44 : Umunsi wo kuri 22 n’uko wagenze. Twagize ibibazo by’imbunda, uwageragezaga kwihisha, abapolisi babaga bafite imbunda bari hirya no hino banyanyagiye, bakamurasa akagwa aho ngaho. Niko byagenze.

L’Interprète : La journée du 22 s’est ainsi passée. Quiconque essayait de s’enfuir, recevait des balles de la part des militaires qui guettaient là-bas et… c’est ainsi que la journée du 22 s’est déroulée.

le témoin 44 : Ubwo rero igihe Gertruda yatubwiraga ko yabonye ko impunzi bapfuye ariko ntibapfe bose, njye namenye ko igihe basohokaga, yenda yari yagiye kureba uko ubwicanyi bwagendaga.

L’Interprète : Alors, quand Gertrude nous a dit que les réfugiés avaient été assassinés mais que tout le monde n’était pas mort, j’ai conclu qu’elle était partie voir comment se déroulaient les tueries.

Le Président : Est-ce que le témoin sait quelles étaient les personnes qui dirigeaient les Interahamwe ?

L’Interprète : Waba uzi abantu bayoboraga Interahamwe ?

le témoin 44 : Umuntu mukuru wayoboraga Interahamwe, yitwaga Emmanuel REKERAHO,

L’Interprète : Oui. Le chef principal qui dirigeait les Interahamwe, s’appelait Emmanuel REKERAHO.

le témoin 44 : Agafashwa n’undi witwaga Gaspard RUSANGANWA,

L’Interprète : Il était épaulé par un autre qui s’appelait Gaspard RUSANGANWA,

le témoin 44 : Abandi, n’abandi bari bahari ariko ntabwo nari nzi amazina yabo, ariko abo nibo nashoboye kumenya.

L’Interprète : Il y avait d’autres dont je ne connaissais pas les noms, sauf ces deux-là, que j’ai pu identifier.

Le Président : Est-ce que, éventuellement, parmi les Interahamwe et parmi les chefs des Interahamwe, se trouvait le conseiller le témoin 151 ?

L’Interprète : Mu bakuru b’Interahamwe harimo conseiller witwaga le témoin 151 ?

le témoin 44 : Njyewe le témoin 151 ntabwo mubyo ukuri, ntabwo narimuzi,

L’Interprète : Personnellement, je ne connaissais pas le témoin 151,

le témoin 44 : Wenda yashoboraga kuba arimo ariko ntabwo namubonye, ntanubwo narimuzi.

L’Interprète : Peut-être qu’il faisait partie, en tout cas, je ne l’ai pas vu et ne le connaissais pas.

le témoin 44 : Ubwo rero ku itariki ya 23 mu gitondo, twaragiye, twarazindutse cyane dufata minibus.

L’Interprète : Ainsi le lendemain, le 23 avril au matin, nous sommes parties, nous avons pris le bus.

le témoin 44 : Bus yari itwawe na Gertruda, na Kizito twari turi kumwe muri convoi ya mbere,

L’Interprète : Le bus était conduit par Gertrude et Kizito qui étaient également avec nous, dans le premier convoi.

le témoin 44 : Twari duherekejwe n’umupolisi waturindaga.

L’Interprète : Nous étions escortées par un agent de police qui nous gardait.

le témoin 44 : Turagenda tunyura kwa bourgmestre witwaga RUREMESHA Jonathan,

L’Interprète : Nous sommes passées par le bourgmestre d’alors, du nom de RUREMESHA Jonathan,

le témoin 44 : Ubwo twaragiye dusanga aracyaryamye, baramutegereza arabyuka.

L’Interprète : A notre arrivée, il était encore au lit, et nous avons attendu qu’il se réveille

le témoin 44 : Noneho abyutse araduherekeza tujya kuri paroisse ya Ngoma.

L’Interprète : Après, il nous a accompagnées jusqu’à la paroisse de Ngoma.

le témoin 44 : Amaze kutugeza kuri paroisse ya Ngoma, we yasubiye i Sovu gutwara indi groupe yasigaye. Ariko, ariko hari ikintu kimwe nari nibagiwe gusobanura,

L’Interprète : Après notre arrivée à la paroisse de Ngoma, lui, il est retourné à Sovu, conduire des personnes qui étaient restées là-bas. Mais j’avais oublié de dire une chose.

le témoin 44 : Icyo nari nibagiwe kuvuga ni uko tugenda muri groupe ya mbere, hari uwo sœur Scholastique wasabye Gertruda ngo ajyane umudamu witwaga Chantal hamwe n’akana ke,

L’Interprète : Ce que j’avais oublié de dire, c’est qu’avant notre départ, dans le premier convoi, sœur Scholastique a demandé à Gertrude de prendre une dame du nom de Chantal, et son bébé.

le témoin 44 : Hanyuma Gertruda aramubwira ati : « Nta muntu wundi njyana uretse ababikira ».

L’Interprète : Et Gertrude a répondu qu’elle n’allait prendre personne d’autre que des religieuses.

le témoin 44 : Noneho bourgmestre agarutse gutwara abandi babikira baraje badusanga muri paroisse ya Ngoma.

L’Interprète : Après, le bourgmestre a ramené d’autres religieuses qui nous ont trouvées à la paroisse de Ngoma.

le témoin 44 : Bamaze kwinjira, ubwo hashize umwanya mutoya Interahamwe zirinjira, zinjirana n’udushoka,

L’Interprète : Après un petit moment, après leur arrivée, les Interahamwe sont entrés, armés de petites haches.

le témoin 44 : Noneho Interahamwe imwe iratubwira ngo : « Umugambi wacu dufite ni uwo kwica abatutsi »,

L’Interprète : Un des Interahamwe nous a dit : « Nous, notre objectif est de tuer les Tutsi »,

le témoin 44 : Ngo « Wo kwica abatutsi, ngo ni uwo kwica abatutsi bose kuburyo hatazasigara n’imbuto ».

L’Interprète : « De tuer tous les Tutsi, sans laisser aucun survivant ».

le témoin 44 : Noneho aratubwira ati, aratubwira na none ngo : « Uru Rwanda nta mwanya murufitemo ».

L’Interprète : Il nous a dit que nous n’avions aucune place au Rwanda.

le témoin 44 : Noneho twabonye bikomeza, i Ngoma bari bafite ibibazo nabo, nta mazi bari bafite,

L’Interprète : Alors, quand nous avons vu que ça continuait et qu’à Ngoma, ils avaient aussi leurs problèmes, notamment le manque d’eau,

le témoin 44 : Interahamwe zinjira zongera zisohoka, rimwe bakaziha amafaranga zikagenda zikongera zikinjira,

L’Interprète : Et que les Interahamwe sortaient puis, revenaient, des fois on leur donnait de l’argent, mais ils partaient et revenaient,

le témoin 44 : Hanyuma nibwo twasabye rero nibishoboka, ngo dusubire i Sovu kuko twabonaga ko igisigaye ari ugupfa, ngo tujye gupfira i Sovu.

L’Interprète : Alors, nous avons demandé si c’était possible que nous soyions ramenées à Sovu, puisqu’il n’y avait plus de possibilité, que nous allions mourir à Sovu.

le témoin 44 : Gertruda yaterefonye aba GP nimba ari aba GP nimba ari abasirikare sinzi, ubwoko bwabo, ariko…

L’Interprète : Gertrude a téléphoné aux GP, si ce sont les GP, ou alors aux militaires, je ne connais pas leur groupe.

le témoin 44 : Hanyuma bukeye ku itariki 24, baje kudutahana badusubiza i Sovu.

L’Interprète : Alors, le lendemain, ils sont venus et nous ont ramenées à Sovu.

le témoin 44 : Twageze i Sovu kuri 24 nimugoroba,

L’Interprète : Nous sommes arrivées à Sovu, le 24 au soir,

le témoin 44 : Tuhageze, yego… kuko nabwo dutaha twagiye muri groupes ebyiri,

L’Interprète : En rentrant, nous avons également été réparties en deux groupes.

le témoin 44 : Tuhageze, dusanga chef w’Interahamwe arahari.

L’Interprète : A notre arrivée, nous avons trouvé, présent, le chef des Interahamwe.

le témoin 44 : Hanyuma ijambo yabwiye Gertruda, yaramubwiye ngo : « Wanyiciye programme ! ».

L’Interprète : Ce qu’il a dit à Gertrude : « Tu m’as gâché mon programme ! ».

le témoin 44 : Noneho aravuga ati : « Ubu burije tuzagaruka ejo ».

L’Interprète : Il a alors ajouté : « Il fait maintenant sombre, je reviens demain ».

le témoin 44 : Bukeye ku itariki ya 25,

L’Interprète : Le lendemain, le 25,

le témoin 44 : Mu gitondo,

L’Interprète : Le matin,

le témoin 44 : Njyewe nali muri hôtellerie, narikumwe n’abashyitsi bari baraduhungiyeho, akenshi twakundaga kuba turi kumwe nabo tureba uko ibintu bigenda.

L’Interprète : Personnellement, j’étais à l’hôtellerie avec des visiteurs qui avaient fui vers nous, qui s’étaient réfugiés vers nous.

le témoin 44 : Noneho mbona REKERAHO araje, yicaranye na Gertruda muri salle ya hôtellerie.

L’Interprète : J’ai vu REKERAHO venir et s’asseoir avec Gertrude, dans une salle de l’hôtellerie.

le témoin 44 : Ibyo bavuganye ntabwo mbizi, ariko icyo nabonye nuko yatubwiye ngo nitumanure abantu bose bari aho ngaho tubashyire muri grand parloir ngo hari icyo ashaka kubabwira.

L’Interprète : Je ne sais pas ce qu’ils se sont dit, ce que je sais c’est qu’il nous a dit d’amener tout le monde qui était là, de rassembler tout le monde qui était là, dans le parloir, et qu’il avait quelque chose à leur dire.

le témoin 44 : Ubwo rero ngeze muri parloir, afata ijambo arababwira ati : « Turashaka ko musohoka muri monastère ».

L’Interprète : Au parloir, il leur a dit : « Je veux que vous sortiez du monastère ».

le témoin 44 : Yakundaga kwensisita ku ijambo avuga ngo batazasenya monastère.

L’Interprète : Le mot sur lequel elle insistait souvent, c’était : « Qu’on ne détruise pas le monastère ».

le témoin 44 : Ubwo impunzi kuko zari zarabonye ubwicanyi bwo kuri 22 bagize ubwoba baramubaza bati : « Ese uradusohora, turajya hehe ? Baratwica ».

L’Interprète : Comme les réfugiés avaient assisté aux massacres du 22, ils ont eu peur et lui, a dit : « Tu nous fais sortir pour aller où ? On va nous massacrer ».

le témoin 44 : Hanyuma yarababwiye ngo REKERAHO ari bubahe urupapuro, ngo abataha mu maprefecture ya kure, ngo REKERAHO arabaha urupapuro rubajyana muri préfecture yabo.

L’Interprète : Elle leur a dit que REKERAHO allait leur donner un papier, ceux qui rentrent dans les préfectures éloignées, qu’ils allaient recevoir un papier de REKERAHO, leur permettant de rejoindre leurs préfectures respectives.

le témoin 44 : Noneho abavukaga i Sovu baravuga bati : « Ese ko twe amazu yacu bayasenye, twe turajya hehe ? ».

L’Interprète : Ceux qui étaient originaires de Sovu lui ont dit : « Voyez, nos maisons ont été détruites, nous allons où, maintenant ? ».

le témoin 44 : Arababwira ati mwebwe muragenda, abaturanyi banyu barabakira.

L’Interprète : Elle leur a dit que les voisins allaient les accueillir.

le témoin 44 : Ubwo twebwe twumvaga ko ari kubashinyagurira, ko ari kugirango basohoke bave muri monastère ariko bo twari tuzi ko bahita babica.

L’Interprète : Alors nous, nous voyions que c’était une façon de les narguer, et qu’ils allaient sortir du monastère, mais pour être tués par la suite.

le témoin 44 : Twaragiye, ubwo ababikira bamwe basigaye mu nzu, twe dusohokana n’abashyitsi bacu turabakompanya kugera imbere ya hôtellerie,

L’Interprète : Ils sont sortis, certaines religieuses sont restées à l’intérieur de la maison. Quant à nous, nous avons accompagné nos visiteurs jusque devant l’hôtellerie.

le témoin 44 : Tugeze hanze REKERAHO nibwo yatangiye kubacamo amagroupe atatu.

L’Interprète : Une fois dehors, REKERAHO a commencé à les mettre en trois groupes.

le témoin 44 : Aravuga ati : « Groupe y’abantu baturutse mu maprefecture ya kure mujye ukwanyu ».

L’Interprète : Il a mis, d’un côté, un groupe de ceux qui venaient des préfectures éloignées,

le témoin 44 : Indi groupe y’abo i Sovu,

L’Interprète : Le second groupe était constitué des originaires de Sovu,

le témoin 44 : Iyindi ikaba iya famille y’ababikira.

L’Interprète : Le troisième groupe était composé des membres de familles de religieuses.

le témoin 44 : Bamaze kubashyira mu magroupe atatu, amagroupe abiri yahise ayasohora, ayajyana imbere ya grille.

L’Interprète : Les groupes ainsi répartis, il a sorti deux d’entre eux qu’il a mis devant la grille.

Bernadette le témoin 44 : Hanyuma ubwo nyuma barabajyanye, babajyana mu ishyamba hirya bahita, bahise babica.

L’Interprète : Alors, ceux-là ont été emmenés dans un bois à côté, et ont été immédiatement exécutés,

le témoin 44 : Noheho rero aratubwira ngo tuzamuke, tujya muri salle ya hôtellerie, abari bafite, ababikira bose bari bafite abashyitsi aho, twari turi ababikira nka barindwi, ati muze hari icyo nshaka kubabwira.

L’Interprète : Elle nous a dit de remonter à l’hôtellerie, toutes les religieuses là, qui avaient des visiteurs, nous étions à peu près au nombre de sept, elle nous a rassemblées, nous disant qu’elle avait à nous dire,

le témoin 44 : Na Gertruda twari turi kumwe nawe.

L’Interprète : Gertrude était avec nous.

le témoin 44 : REKERAHO noneho aratubwira ati : « Njyewe mfite ububasha bwo kwica abo bantu banyu, mfite n’ububasha bwo kubakiza ».

L’Interprète : Alors, REKERAHO nous a dit : « Moi, j’ai le pouvoir de tuer ces gens-là, comme j’ai le pouvoir de les sauver ».

le témoin 44 : Noneho aratubwira ati ariko ubu, ntabwo nshaka kubica.

L’Interprète : Il a ajouté : « Mais, pour le moment, je ne veux pas les tuer ».

le témoin 44 : Arongera arabareba, arabitegereza, aravuga ati ndabona ari abasaza n’abakecuru, ati kandi ntabize barimo, ati ndabona ntawe uzategeka igihugu ubarimo.

L’Interprète : Alors, il les a  regardés encore une fois, et il a dit : « Bon, je vois, ce sont des vieillards et des vieilles, je ne vois pas, parmi eux, des personnes instruites, je ne vois pas un possible dirigeant ».

le témoin 44 : Noneho amaze kutubwira ayo magambo, aratubwira ati : « Mameya wanyu nimb’abyemeye mushobora kubashyira, kubasubiza mu nzu, mukabaha ibyo barya, ubundi tukazareba mu minsi iri imbere, wenda intambara ishobora kuzashira ».

L’Interprète : Après nous avoir dit ces mots, il nous a dit : « Si votre mère supérieure est d’accord, vous pouvez les rentrer encore dans la maison, peut-être que la guerre va prendre fin ».

le témoin 44 : Nyuma y’ayo magambo, REKERAHO yarongeye aratubwira ati : « Ikibemeza ko ibyo mbabwira ari ukuri kandi ntazagaruka,ikibemeza yuko ibyo mbabwira ari ukuri, ntabwo nzagaruka hano kuhashaka abantu ngo mbice ».

L’Interprète : REKERAHO nous a dit… a ajouté : « Ce qui vous confirme que ce que je vous dis, est vrai, c’est que je ne reviendrai jamais ici, chercher ces personnes pour les tuer ».

le témoin 44 : Nyuma yaho ubwo abantu twarababwiye koko barazamuka basubira aho bari bari.

L’Interprète : Alors, effectivement par après, nous avons dit à ces personnes de monter, de retourner là où elles étaient avant.

le témoin 44 : Bukeye bwaho njye ku itariki ya 26, Gertruda ubwe arampamagara.

L’Interprète : Le lendemain, le 26, Gertrude, en personne, m’a appelée.

le témoin 44 : Arampamagara arambwira ati : « Sohora abo bantu bawe ».

L’Interprète : Elle m’a dit de faire sortir tous mes gens.

le témoin 44 : Noneho ndamubwira nti : « Ese ndabasohora mbajyana hehe ko REKERAHO, chef w’Interahamwe wicaga ko yababonye kandi ko abazi tutabahishe, igituma umbwira kubasohora n’iki ? ».

L’Interprète : Alors, je lui dis : « Pourquoi tu me dis que je dois les sortir ? Pourtant REKERAHO, le chef des Interahamwe les connaît bien, il sait qu’ils sont ici, pourquoi dois-je les sortir ? ».

le témoin 44 : Nawe rero ibyo aravuga ati : « Nimba mudashaka gusohora abo bantu banyu, murashaka kunyicisha cyangwa murashaka ko basenya monastère ».

L’Interprète : Alors, elle a continué, en disant : « Si vous ne voulez pas sortir ces gens… vos gens, c’est que vous voulez me faire tuer, ou alors, vous voulez qu’on détruise le monastère ».

le témoin 44 : Ubwo kuva kuri iyo tariki byarakomeje, umunsi ku munsi, aliko tubaho muri ibyo bihe by’akababaro.

L’Interprète : Après cette date, ça a continué ainsi, jour après jour et nous, on continuait dans notre situation de tristesse.

le témoin 44 : Haba aho muhuriye nawe akakubwira ngo : « Sohora abo bantu, ngo batazasenya monastère », igihe cyose akicara ari amagambo amwe asubiramo.

L’Interprète : Chaque fois que tu la croisais, elle te disait : « Sors tes gens, qu’on ne détruise pas le monastère » ; elle répétait toujours les mêmes mots.

le témoin 44 : Hanyuma njyewe umunsi umwe namubwiye ko sinshobora gushobora gusohora abavandimwe banjye ngo babatemagure ndeba, kugirango amatafari yubatse monastère adasenyuka.

L’Interprète : Alors, un jour, je lui ai dit que je ne peux pas sortir mes frères et sœurs, qu’on les taillade sous mes yeux pour que les briques de ce monastère ne soient pas détruites.

le témoin 44 : Byaratinze, uko iminsi ishira indi igataha Gertruda ariko twese atugendamo atubuza amahoro ngo nidusohore abo bantu bacu, biratinda bigera ku itariki 5 z’ukwezi kwa 5, aliko yanditse ibaruwa iteye agahinda itarikwiye kwandikwa n’umuntu wihaye Imana.

L’Interprète : Cela a continué ainsi et sous cette tension, jusqu’au 5 mai, quand elle a écrit une triste lettre, une lettre qui n’est pas digne d’une religieuse.

le témoin 44 : Ubwo iyo lettre rero yandikiraga bourgmestre wa Komine Huye,

L’Interprète : La lettre était adressée au bourgmestre de la commune de Huye,

le témoin 44 : Agaha copie préfet, préfet wa préfecture Butare,

L’Interprète : Avec ampliation, au préfet de la préfecture de Butare,

le témoin 44 : Agaha copie commandant wa place wa Butare.

L’Interprète : Ainsi qu’au commandant de place de Butare.

le témoin 44 : Monsieur le président, je vous demande de montrer cette lettre si c’est possible.

Le Président : Cette lettre figure dans le dossier.

L’Interprète : Ngo ilettre iri muri dossier.

Le Président : Est-ce que vous aviez vu cette lettre ? Vous personnellement, aviez-vous vu, ce jour-là, la lettre ?

L’Interprète : Ngo uwo munsi, wowe ubwawe wabonye iyo baruwa ?

le témoin 44 : Iyo baruwa njye ntabwo nayibonye, twahunze ntayibonye, ariko nari narayumvise ko yanditswe.

L’Interprète : Cette lettre, je ne l’avais pas personnellement vue avant notre fuite, mais j’avais entendu parler de son existence, qu’elle avait été écrite.

Le Président : Je voudrais revenir un petit instant au 25 avril.

L’Interprète : Aragira ngo mugaruke kuli 25,

Le Président : Le témoin a expliqué qu’il y avait eu une réunion où sœur Gertrude avait expliqué que les réfugiés devaient sortir.

le témoin 44 : Wasobanuye ko hari inama yari yarabaye, sœur Gertrude akaba yari yaravuze ko impunzi zagombaga kuhava.

Le Président : Y a-t-il un autre Interahamwe que REKERAHO qui est venu à l’intérieur du couvent, ce jour-là ?

L’Interprète : Hari iyindi Nterahamwe itari REKERAHO yinjiye muri couvent uwo munsi ?

le témoin 44 : Nta nimwe yigeze yinjira. Kuva intambara itera kugeza duhunga tuvuye i Sovu, nta bitero by’Interahamwe byigeze bitera Sovu, uretse amadate : kuli 22,

L’Interprète : Non, personne d’autre n’est entré depuis le début jusqu’à notre fuite de Sovu, sauf les dates du 22,

le témoin 44 : Na 25 ariho REKERAHO wenyine niwe wari uhari abandi b’Interahamwe bari inyuma ya grille.

L’Interprète : Et du 25, mais REKERAHO, seul, était là-bas présent, les autres Interahamwe étaient de l’autre côté, derrière la grille.

Le Président : Est-ce que le 25 avril, soit REKERAHO, soit peut-être des militaires, ont visité les chambres pour faire sortir les personnes qui s’y cachaient ?

L’Interprète : Kuri 20… nko mu matariki REKERAHO cyangwa se abasirikare binjiye mu byumba kugirango baze gusohora abantu bari bahihishe ?

le témoin 44 : Yego, ku itariki ya 25,

L’Interprète : Oui, le 25,

le témoin 44 : Oya, ntabwo baje. Binjiyemo le 6. Ariko kuri 25 ntabaje ubwo.

L’Interprète : Ils ne sont pas venus, ils sont venus le 5 mai,

le témoin 44 : Le 6.

L’Interprète : Le 6, ils sont venus le 6 mai, le 25, ils ne sont pas entrés.

Le Président : Donc le 25, ni les militaires, ni REKERAHO, n’ont visité les chambres…

L’Interprète : Ngo kuri 25,

Le Président : …ou les autres locaux, à l’intérieur du monastère ?

le témoin 44 : Non. Ntabyabayeho.

L’Interprète : Non, ça n’a pas existé.

Le Président : Donc, les personnes se sont présentées,

le témoin 44 : Baratubwiye…

Le Président : A la demande de sœur Gertrude ?

le témoin 44 : Oui, à la demande de sœur Gertrude, niwe watubwiye ngo tubamanure, tubashyire muri salle hasi, bababwire icyo bagomba kubabwira, turabamanura bose, n’ababikira bose twari turi kumwe nabo.

L’Interprète : Oui, à la demande de sœur Gertrude qui nous avait dit de les descendre jusqu’à la salle, en bas, euh… puisqu’elle avait à leur dire. Alors, nous, les avons descendus avec toutes les personnes qui étaient avec eux.

Le Président : Est-ce que, parmi ces gens, certains se seraient proposés de partir pour que les sœurs ne soient pas tuées ?

L’Interprète : Ngo muri abo bantu hari ubwabo bashatse kwijyana, bo ubwabo ngo bagende kugirango ababikira baticwa ?

le témoin 44 : Ku itariki 25 ?

L’Interprète : Vous parlez du 25 ?

Le Président : Oui, le 25. Est-ce que, parmi les gens présents le 25, certains auraient dit : « Eh bien, pour éviter que les sœurs ne soient tuées, nous allons partir ? ».

L’Interprète : Ngo kuri 25 hari abavuze ngo : « Kugirango ababikira baticwa tugiye kugenda ? ».

le témoin 44 : Nta byabayeho.

L’Interprète : Non, ça n’a pas existé.

Le Président : Lorsque les personnes… lorsque REKERAHO a parlé à sœur Scholastique, au témoin lui-même, semble-t-il, à Theresa et Fortunata de ce que lui, en tout cas, si sœur Gertrude était d’accord pour que les membres de familles restent dans le monastère, lui ne viendrait plus pour les tuer, est-ce que sœur Gertrude était présente à ce moment-là ?

le témoin 44 : Oui, elle était présente.

Le Président : Parce que, dans la déclaration qui a été faite lors de la commission rogatoire, le témoin a dit que Gertrude n’était pas présente à ce moment-là.

L’Interprète : Ni ukubera ko, ubwo bazaga kukubaza bwa mbere ngo wavuze ko sœur Gertrude atari ahari.

le témoin 44 : Oya, ahubwo kereka nimba abanditse aribo bashobora kuba baribeshye, ariko ntitwari turi kumwe.

L’Interprète : Non, sauf si ceux qui ont écrit le témoignage se sont trompés, sinon moi, j’ai dit que nous étions avec sœur Gertrude.

Le Président : Bien. Donc, si nous avons maintenant suivi le 26, 27, 28, 29, 30 avril, on arrive au 5 mai. Si j’ai bien compris le témoin, tous les jours, sœur Gertrude demandait aux religieuses qui avaient des membres de leurs familles dans le couvent, de faire sortir ces gens ?

le témoin 44 : C’est cela.

Le Président : Le 5 mai, elle écrit une lettre au bourgmestre de Huye, qu’est-ce qui va se passer le 6 mai ?

L’Interprète : Ngo ku itariki ya 5 yandikira ibarwa bourgmestre wa Huye no kuya 6 byagenze bite ? Habaye iki ?

le témoin 44 : Ku ya 6 mu gitondo,

L’Interprète : Le 6 au matin,

le témoin 44 : Twagiye gusenga nkuko bisanzwe.

L’Interprète : Nous sommes allées prier comme d’habitude.

le témoin 44 : Turangije gusenga, Gertruda twumva aravuze, aravuga ngo : « Mbere y’Imana ishobora byose…

L’Interprète : Et après la prière Gertrude nous a dit : « Devant Dieu tout puissant…

le témoin 44 : …nongeye gusaba ababikira bafite abantu le témoin 2 hano ko babasohora…

L’Interprète : …je prie toutes les religieuses qui ont les membres de leur famille ici, qu’elles les fassent sortir…

le témoin 44 : …nimba batabikoze, njye ndabikora ku ngufu za Leta, nubwo sinjye wateje intambara ».

L’Interprète : …si elles ne veulent pas le faire, je vais le faire suivant le pouvoir de l’Etat puisque ce n’est pas moi qui ai provoqué cette guerre ».

le témoin 44 : Amaze kuvuga ayo magambo yarasohotse.

L’Interprète : Après avoir dit ça, elle est sortie.

le témoin 44 : Aragenda afata imodoka ntoya yari ihari ya VW,

L’Interprète : Elle a pris une petite voiture qui est était là, de marque Volkswagen,

le témoin 44 : Ajyana na Gaspard RUSANGANWA birirwayo umunsi wose, bagarutse nko mu masaa munani, saa munani gutyo.

L’Interprète : Elle est partie avec Gaspard RUSANGANWA, ils ont passé la journée dehors, là-bas, et ils sont revenus vers 14-15h00.

le témoin 44 : Noneho Gertruda, mu kugaruka kwabo, baje mbere,

L’Interprète : A leur retour, ils sont venus avant,

le témoin 44 : Hashize umwanya mutoya kuko natwe igihe cyose twabaga turi muri hôtellerie dukurikira ibibera aho ngaho, hashize umwanya mutoya twongera kubona tubona Interahamwe zagose monastère, nkuko byabaye kuri 22.

L’Interprète : Après un court moment, comme nous suivions, de l’hôtellerie, tout se qui se passait, nous avons vu que le monastère était encerclé par les Interahamwe, comme cela s’était produit au 22.

le témoin 44 : Hashize umwanya muto, tubona imodoka ya bourgmestre iraje, yari kumwe n’abapolisi babiri.

L’Interprète : Après un autre court moment, nous avons vu arriver le véhicule du bourgmestre, escorté par deux agents de police.

le témoin 44 : Bageze aho ngaho Kizito azamukana abapolisi babiri, abajyana mu machambre y’abashyitsi bacu, niwe wabamanuye hamwe n’abapolisi.

L’Interprète : Après leur arrivée, Kizito est montée dans les chambres où étaient nos visiteurs, alors, c’est elle qui les a fait sortir, Kizito avec deux policiers.

le témoin 44 : Noneho bageze hasi, hari umubikira wabwiye bourgmestre amwinginga ngo abo bantu abababarire, undi aramusubiza ngo : « Amazi yarenze inkombe ! », un proverbe rwandais…

L’Interprète : Alors, quand ils étaient en bas, il y a une religieuse qui a imploré la pitié du bourgmestre qui a alors dit que c’était trop tard. Là, il a cité un proverbe rwandais qui dit que, si je paraphrase, qui dit que « L’eau est sortie de son thalweg », donc, que c’était trop tard, que le fleuve est sorti de son lit.

le témoin 44 : Noheho bourgmestre kubera ko harimo abana bato, abana batoya b’abakobwa babiri, yaravuze ngo nimba Gertruda abyemeye, abambike voile nk’ababikira, bagumane n’ababikira.

L’Interprète : Comme il y avait, parmi eux, deux jeunes filles, alors, le bourgmestre a dit que si Gertrude était d’accord, qu’on leur fasse porter le voile à l’instar des religieuses, qu’elles restent là comme d’autres religieuses.

le témoin 44 : Ibyo ngibyo amaze kubivuga yarabyanze aravuga ngo nta… yongeye gusubiramo ko nta mpunzi ashaka uretse ababikira gusa, ngo abantu bose nabajyane.

L’Interprète : Mais après, elle a refusé, elle a dit qu’elle le répète, qu’elle ne veut rester qu’avec les religieuses, que le bourgmestre parte avec tout le monde.

le témoin 44 : Ubwo bourgmestre yabwiye impunzi yuko aba kure bogomba kugenda, aba hafi nabo bagataha iwabo.

L’Interprète : Le bourgmestre a alors dit aux réfugiés que ceux qui venaient de loin devaient partir, et que ceux qui étaient du voisinage devaient aussi rentrer chez eux.

le témoin 44 : Abo baturukaga kure yabasize muri camionette,

L’Interprète : Il a fait monter dans une camionette, ceux qui venaient de loin.

le témoin 44 : Arabajyana, ntabwo tuzi n’urupfu rwabo, ntabwo tuzi n’amagufa yabo kugeza n’uno munota, aho bayashyize.

L’Interprète : Il les a pris avec lui et nous ignorions ce qui concerne leur mort, même maintenant, nous ne savons pas où leurs ossements se trouvent, où ils les ont mis.

le témoin 44 : Hanyuma ababyeyi ba Fortunata, umubikira witwaga Fortunata yari afiteyo papa we na mama we, babatemaguye imbere ya hôtellerie, imbere ya kiriziya.

L’Interprète : Concernant les parents de Fortunata, il y avait une religieuse du nom de Fortunata, qui avait les parents là-bas, on les a tailladés devant l’hôtellerie… devant l’église.

le témoin 44 : Hanyuma barumuna be babiri n’akana kamwe, hamwe na mama wa Régine na turumuna twe tubiri,

L’Interprète : Quand ses deux sœurs…

le témoin 44 : Harimo Régine,

L’Interprète : Régine,

le témoin 44 : Bamaze kubona ko batemaguye ababyeyi ba Fortunata, bakase mu rutoki batangira kwihisha.

L’Interprète : Donc, de Régine, quand elles avaient vu la manière dont on avait coupé en morceaux les parents de Fortunata, elles se sont enfuies dans la bananeraie d’à côté, et ont commencé à se cacher là-bas.

le témoin 44 : Batangiye kwihishahisha, bafite ubwoba bwinshi, noneho babwira umupolisi wari uri aho ngaho ngo abarase n’amasasu.

L’Interprète : Elles ont commencé à se cacher, très effrayées, elles ont dit à l’agent de police qui était là, de tirer sur elles.

le témoin 44 : Ariko umupolisi yarabikoze ariko abaka amafaranga, ariko arabarasa.

L’Interprète : Le policier l’a fait, mais après leur avoir demandé de l’argent, mais il l’a fait.

le témoin 44 : Kuva nyuma y’urupfu rw’abo bantu bose, birangiye byose, Gertruda ubwe yafashe imfunguzo za monastère, arafunga, avuga ko nta muntu uzongera kwinjira atari we umukinguriye.

L’Interprète : Après la mort de toutes ces personnes, Gertrude en personne a pris les clés du monastère, a fermé et ordonné que personne d’autre n’entre si ce n’est que sur son autorisation.

le témoin 44 : Nyuma y’ibyo byose habaye icyo nakwita nka … un silence de mort, ikintu ki… umuntu atashoboraga kuvugana n’undi,

L’Interprète : Après tout cela, est devenu ce que je pourrais qualifier, « un silence de mort », en tout cas, une situation pendant laquelle personne ne pouvait parler à personne.

le témoin 44 : Nta muntu washoboraga kuvugana n’undi, ubwo Regina we byageze n’igihe abura umwuka, arwara ikintu kimeze nk’ihahamuka, abura umwuka ntiyashobora no guhumeka.

L’Interprète : Par après, Régine quant à elle, a été comme traumatisée, elle a perdu son souffle, elle ne pouvait même plus respirer.

le témoin 44 : Hanyuma, ibyakomeje gukurikiraho, Kizito niwe wajyaga aza rimwe na rimwe, akavuga ati : « Ku mugoroba haraza igitero, ejo hazaza igitero », ibintu byo kudutera ubwoba gusa, ariko ubundi ntabwo twigeze kwongera kubona igitero kigaruka i Sovu,

L’Interprète : Par après, c’est Kizito qui venait de temps en temps nous dire : « Bon, demain, il y aura une attaque, il y aura une attaque », des propos qui avaient pour objectif de nous faire peur, mais en réalité, aucune autre attaque n’est venue à Sovu.

le témoin 44 : Twakomeje kubaho dutyo kugeza ukwezi kwa 6 kurangiye.

L’Interprète : Nous sommes restées dans cette situation jusque fin juin.

le témoin 44 : Hanyuma ku itariki ya 30 nimugoroba,

L’Interprète : Alors, au soir du 30,

le témoin 44 : Yego, kuko Gaspard yarafite, Gaspard RUSANGANWA yari afite umwana yahishe w’umukobwa, witwaga le témoin 133,

L’Interprète : Comme Gaspard avait caché une jeune fille du nom du témoin 133,

le témoin 44 : Yamuzanye ku mugoroba, amushyira hamwe… Gertrude amushyira hamwe n’ababikira, amwambika voile noneho,

L’Interprète : Il l’a emmenée le soir, alors, Gertrude l’a mise parmi les sœurs, et l’a fait porter le voile cette fois-ci,

le témoin 44 : Oui, comme… ibyo atari yarashoboye gukorera abamuhungiyeho ariko nibura icyo gihe ho yarabikoze.

L’Interprète : Ce qu’elle n’avait pas fait à celles qui s’étaient réfugiées vers elle, au moins cette fois-ci, elle l’a fait.

le témoin 44 : Noneho uwo mwana twashoboye guhungana, tujyana kwa Musenyeri, ku itariki ya mbere y’ukwa karindwi.

L’Interprète : Alors, nous avons pu nous enfuir avec cette jeune fille jusqu’à l’évêché, en date du 1er juillet.

le témoin 44 : Tugeze kwa Musenyeri, twasanze kwa Musenyeri ari hatoya, bamwe, igroupe imwe ijya muri ICA.

L’Interprète : Comme nous avions nous-mêmes, nous nous sommes nous-mêmes rendu compte qu’il n’y avait pas assez de place à l’évêché, on nous a réparties en deux groupes, et un groupe a été hébergé à l’ICA,

le témoin 44 : Nanjye nari muri groupe yari iri kuri ICA.

L’Interprète : Moi-même, je faisais partie du groupe qui se trouvait à l’ICA.

le témoin 44 : Muri icyo gihe, tuhamaze nk’iminsi ibiri, nibwo twumvise, eh ! ikindi nibagiwe kuvuga ni uko mu guhunga kwacu, ni REKERAHO ubwe waje kudutwara. REKERAHO niwe waje kudutwara atuvana i Sovu atujyana kwa Musenyeri.

L’Interprète : Lors de notre fuite, c’est REKERAHO, j’avais oublié de dire que c’est REKERAHO qui est venu, en personne, nous conduire à l’évêché.

le témoin 44 : Noneho batubwira ko abafaransa bazaza guhungisha Musenyeri, ko natwe dushobora guhungana nabo,

L’Interprète : Alors après deux jours, a peu près deux jours, à l’ICA, on nous a dit que les Français allaient venir évacuer l’évêque, et que nous avions la possibilité d’être évacuées avec lui.

le témoin 44 : Ubwo muri icyo gihe rero batubwiye ko hariho possibilités ebyiri, ko bamwe bashobora guhunga bajya i Burundi cyangwa abandi bagahunga bajya ku Gikongoro, ko umuntu ashobora guhitamo aho ashaka.

L’Interprète : Et à ce moment-là, ils nous ont dit qu’il y avait deux possibilités, et que certains pouvaient s’exiler vers le Burundi, d’autres, prendre la direction de Gikongoro, que c’était à chacun de choisir.

le témoin 44 : Abagiye, abanyuze inzira ijya i Burundi, ababikira 9 bose baguye mu nzira, ababikira 9.

L’Interprète : Parmi ceux qui sont, ceux qui ont pris la direction du Burundi, 9 religieuses ont été assassinées en cours de route.

le témoin 44 : Hanyuma twe twagiye ahitwa i Murambi, niho twaraye, tuhamara ibyumweru nka bibiri,

L’Interprète : Quant à nous, nous sommes allées à un lieu-dit, Murambi, où nous avons passé à peu près deux semaines.

le témoin 44 : Hanyuma tujya muri Zaïre ahitwa i Muresa.

L’Interprète : Peu après, nous sommes allées au Zaïre, à l’endroit dit Muresa.

le témoin 44 : Hanyuma tunyura kuri Goma.

L’Interprète : Nous sommes passées par Goma, par après.

le témoin 44 : Icyo gihe cyose twabaga turi kumwe n’abasirikare b’abafransa bari baraje muri Turquoise.

L’Interprète : Mais, durant tout ce temps-là, nous étions avec des militaires français qui étaient là-bas, dans le cadre de l’Opération Turquoise.

le témoin 44 : Ubwo twarakomeje urugendo, turahunga, tunyura muri Centrafrica,

L’Interprète : Alors, nous avons continué notre exil en passant par la République Centrafricaine,

le témoin 44 : Naho twahamaze ibyumweru bibiri.

L’Interprète : Où nous avons passé également deux semaines.

le témoin 44 : Hanyuma tujya mu Bufransa ahitwa Ejoual,

L’Interprète : Après, nous sommes allées à Ejoual, en France,

le témoin 44 : Aho tuhamara icyumweru.

L’Interprète : Nous avons fait une semaine.

le témoin 44 : Hanyuma tujya rero i Maredret aho ababikira bacu bari baraturutse,

L’Interprète : Après, nous sommes allées à Maredret, à la maison mère de notre congrégation,

le témoin 44 : Twahageze wenda mu matariki, sinibuka neza ariko ni hagati ya 16 na 18 gutyo.

L’Interprète : Je ne me souviens plus des dates, mais c’est entre le 15 et le 18.

Le Président : Entre le 25 avril, quand REKERAHO vient chercher une partie des réfugiés, il laisse les membres de la famille des sœurs, au monastère. Est-ce que, le 26, le 27, le 28, le 29, le 30, le 1er mai, le 2 mai, le 3 mai, le 4 mai, le 5 mai, est-ce qu’il y avait des Interahamwe qui entouraient encore le monastère, et qui venaient demander à voir les derniers réfugiés qui se trouvaient dans le monastère ?

le témoin 44 : Nta Nterahamwe yongeye kugaruka mu kigo n’umunsi umwe kuko, iyo baza bashaka kutwica, natwe baba baratwishe nta ntwaro twari dufite zo kubarwanya.

L’Interprète : Aucun Interahamwe n’est venu dans notre établissement car s’ils étaient là, ils auraient pu nous tuer, nous n’avions aucune arme pour les combattre.

Le Président : Après le 6 mai, ils ne sont plus venus non plus ?

L’Interprète : Nyuma yo ku itariki ya 6 z’ukwa gatanu nabwo ntibagarutse ?

le témoin 44 : Nyuma y’itariki ya 6 nabwo ntabaje, uretse Kizito, we wenyine, wavugaga ngo hazaza igitero, ariko njyewe personnellement ntabo nigeze mbona baza.

L’Interprète : Non, après le 6, ils ne sont pas venus non plus. A part Kizito qui disait : « Il y aura des attaques, il y aura des attaques », mais personnellement, je ne les ai pas vu venir.

Le Président : Le 6 mai, lorsque les derniers réfugiés ont été remis au bourgmestre de Huye, après qu’ils aient été, certains tués par les Interahamwe, à la sortie du monastère, que d’autres qui avaient essayé de s’enfuir seront tués par des militaires ou par des policiers, qu’est-ce qu’elle a fait, sœur Gertrude ?

L’Interprète : Nyuma y’itariki ya 6, nyuma y’aho…

Le Président : Est-ce qu’elle n’est pas allée au lit en disant qu’elle était malade ?

L’Interprète : Gertrude yakoze iki, ntabwo yagiye ku buriri avuga ngo ararwaye ?

le témoin 44 : Yafashe imfunguzo arafunga,

L’Interprète : Elle a pris les clés, et elle a fermé,

le témoin 44 : Avuga ko nta muntu uzongera kwinjira muri monastère atari we umuhaye uruhusa.

L’Interprète : Elle a dit que personne d’autre ne pouvait plus entrer au monastère sans son autorisation.

Le Président : Est-ce qu’elle a dit qu’elle était malade ?

L’Interprète : Yavuze ko arwaye ? Ko yararwaye ?

le témoin 44 : Ibyo kuvuga ko yararwaye ntabyo numvise avuga, gusa kuba yaragiye mu cyumba akakinga, twe twabonaga ko ari uburyo bwo kudashaka kubona abantu kuko yaramaze kubahemukira no kwicisha abantu bacu.

L’Interprète : Quant à sa maladie, je n’ai pas entendu parler mais, le fait qu’elle s’est enfermée dans la chambre, c’était un signe qu’elle ne voulait plus croiser les gens, vu ce qu’elle venait de leur faire, et qu’elle venait de faire assassiner nos gens.

Le Président : Quels sont les membres de la famille du témoin qui sont morts à Sovu ?

L’Interprète : Abantu bawe baguye i Sovu ?

le témoin 44 : Abantu banjye, ni basaza banjye babiri.

L’Interprète : Parmi les membres de ma famille, deux de mes frères.

le témoin 44 : Arabaza familles zose, abantu bose ?

L’Interprète : Abawe ?

le témoin 44 : Abanjye ni babiri.

L’Interprète : Les membres de ma famille sont au nombre de deux.

Le Président : Deux frères ?

L’Interprète : Basaza bawe babiri ?

le témoin 44 : Yego.

L’Interprète : Oui.

Le Président : Le témoin est retourné à Sovu, a quitté Maredret en cachette ?

L’Interprète : Ngo wavuye Maredret rwihishwa usubira Sovu ?

le témoin 44 : Ntabwo nagiye en cachette,

L’Interprète : Je ne suis pas partie en cachette,

le témoin 44 : Ahubwo nasabye uruhusa rwo gusubira i Rwanda.

L’Interprète : J’ai demandé l’autorisation de retourner au Rwanda.

le témoin 44 : Nyuma yibyo Gertruda yari amaze kudukorera, numvaga ntakeneye no kumureba kuko nari mbabaye cyane.

L’Interprète : Après ce que Gertrude venait de nous faire, j’étais triste, je n’avais plus envie de la voir.

le témoin 44 : Njyewe rero nasabye uruhushya rwo gusubira mu Rwanda, ariko bararunyima.

L’Interprète : Alors, j’ai demandé, quant à moi, l’autorisation de retourner au Rwanda, mais elle m’a été refusée.

le témoin 44 : Nabisabye Gertruda ubwe,

L’Interprète : L’autorisation, je l’ai demandée à Gertrude elle-même,

le témoin 44 : Narusabye abbé président wo kuri uwo muryango wose, congrégation yose.

L’Interprète : J’ai demandé aussi à l’abbé président, responsable de toute la congrégation.

le témoin 44 : Twageze igihe badukoresha inama, badusaba conditions enye, dushoboye kuzuzuza ko twajya mu Rwanda.

L’Interprète : Par après, on s’est entretenu avec lui, on nous a posé quatre conditions que nous devions remplir pour notre retour au Rwanda.

le témoin 44 : Condition ya mbere, yari ukuvuga ngo tugomba kugira umuntu utwakira,

L’Interprète : La première condition c’était qu’il fallait qu’il y ait quelqu’un pour nous accueillir,

le témoin 44 : Condition ya kabiri, kwari ukuvuga ngo tugomba kugira umutekano,

L’Interprète : La deuxième condition concernait notre sécurité,

le témoin 44 : Condition ya gatatu, ndumva baratubwiraga ngo tugomba kugira ibidutunga financièrement,

L’Interprète : Si je me souviens bien, la troisième condition c’était qu’il fallait que nous ayons des moyens de subsistance,

le témoin 44 : Hanyuma condition ya kane, yari permission ya Gertruda kandi njye nabonaga ko itashobokaga.

L’Interprète : La quatrième condition était l’autorisation de Gertrude qui, à mes yeux, était impossible.

le témoin 44 : Hanyuma abbé président tuvugana, njye namubwiyeko nifuza gusubirayo, cyangwa bakanshakira communauté naba ndimo,

L’Interprète : Lors de notre entretien, j’avais dit que… j’avais dit à l’abbé président que je souhaitais y retourner et s’il fallait, qu’il devait me trouver une communauté d’accueil.

le témoin 44 : Hanyuma nandikiye ibaruwa Musenyeri w’i Butare, GAHAMANYI,

L’Interprète : Alors, j’ai adressé une lettre à l’évêque de Butare, Monseigneur GAHAMANYI,

le témoin 44 : Namusabaga ko twajyayo bakatwakira, yarabyemeye kandi yaranshubije, ibaruwa nayeretse abbé président.

L’Interprète : Je lui ai… il m’a répondu favorablement, sa lettre de réponse, je l’ai montrée à l’abbé président.

le témoin 44 : Hanyuma abbé président twabonaniye i Clairiland, mubwira yuko mwereka ibaruwa ya Musenyeri GAHAMANYI ivuga ko nituza azatwakira kandi azadufasha muri byose.

L’Interprète : A Clairiland, j’ai montré à l’abbé président, la lettre de Monseigneur… de l’évêque, de Monseigneur GAHAMANYI qui acceptait de nous recevoir, et de subvenir à nos besoins.

le témoin 44 : Hanyuma Abbé président yarambwiye ngo nimbona amafaranga yo gutaha, ya ticket, nzagende. Nuko yanshubije.

L’Interprète : Alors, l’abbé président m’a répondu que si j’arrivais à réunir les frais de voyage, je pouvais partir. Telle est la réponse qu’il m’a donnée.

le témoin 44 : Turi Clairiland abbé président yagerageje guterefona Gertruda aramubwira ngo nifuzaga ko mubona nongere musabe permission yo kugenda, ambwira ko tudashobora kubonana, mbere y’ukwezi kwa mbere.

L’Interprète : A Clairiland… de Clairiland, l’abbé président a téléphoné à Gertrude et lui a dit que je désirais la voir encore une fois et lui demander son autorisation. Elle a répondu qu’elle ne pouvait pas être disponible avant le mois de janvier.

le témoin 44 : Maze kumva ko… kandi ubwo twari tukiri mu kwezi kwa 12, maze kumva ko adashobora kunyakira, kandi nari maze gusezera abbé président, kandi twari twarakoze amanama menshi asaba gutaha,

L’Interprète : Alors, comme nous étions en décembre et que je voyais qu’elle ne voulait pas me recevoir, et que nous avions fait beaucoup de réunions à ce sujet, j’ai dit à l’abbé président,

le témoin 44 : Namubwiye yuko noneho ko nzataha, ambwiye ngo nimbona iticket nzatahe, noneho nanjye nasigaye nshakisha uburyo nabona iyo ticket. Nagize Imana mbona abagiraneza barandihira ndataha.

L’Interprète : Je lui ai dit que j’allais rentrer puisqu’il avait dit que, si je trouvais les frais de voyage, je pouvais rentrer. Alors, j’ai eu la chance de trouver des bienfaiteurs qui m’ont aidée, j’ai trouvé les frais de déplacement et je suis rentrée.

Le Président : A son retour au Rwanda, le témoin a-t-il reçu la visite du père COMBLAIN ?

L’Interprète : Ugeze mu Rwanda, umupadiri witwa COMBLAIN yigeze agusura ?

le témoin 44 : Yaransuye.

L’Interprète : Oui, il m’a rendu visite.

Le Président : Que voulait le père COMBLAIN ?

L’Interprète : Yashakaga iki icyo gihe ?

le témoin 44 : Père COMBLAIN yaraje turaganira, noneho arambwira ati : « Muri Belgique hari amagambo avuga ko ari Gertruda yaba yarakoze ubwicanyi ».

L’Interprète : Il est venu, nous nous sommes entretenus, il m’a dit qu’en Belgique, la rumeur court comme quoi Gertrude aurait trempé dans les massacres.

le témoin 44 : Noneho arambaza ati : « Ese ibyo ngibyo waba ubizi ? ».

L’Interprète : Il m’a demandé si j’étais informée de ça,

le témoin 44 : Njyewe ntabwo nashatse muri icyo gihe kumubwiza ukuri, naramwihoreye, ariko arambwira noneho ngo,

L’Interprète : A ce moment là, je n’ai pas voulu lui dire la vérité, je l’ai laissé mais… il a ajouté,

le témoin 44 : Noneho arambwira ati : « Nimba ibyo bintu waba ubizi, ndashaka ko usinya ilettre, ukandika ilettre ivuga ko sœur Gertrude ari innocente, ko nta bwicanyi yigeze ajyamo ».

L’Interprète : Alors, il m’a dit que si j’étais au courant de ça, je pouvais écrire une lettre et la signer, comme quoi sœur Gertrude était innocente, qu’elle n’a pas trempé dans les massacres.

le témoin 44 : Noneho njye naramubwiye nti : « Ese ibyo aribyo byose ko uje kunsaba ngo nandike lettre ivuga ko Gertruda ari innocente, ko twahungiye mu Bubiligi tukabasanga, ko utigeze udusura ngo umenye n’ibibazo twagize muri génocide ? ».

L’Interprète : Alors, je lui ai dit : « Comment se fait-il que vous ne nous avez jamais rendu visite lors de notre séjour en Belgique, et que maintenant, vous venez me demander une lettre prouvant l’innocence de Gertrude, alors que vous savez les problèmes et les difficultés que nous avons rencontrés pendant le génocide ? ».

le témoin 44 : Hanyuma ati : « Ibyo aribyo byose, ntabwo ari byiza ko umubikira avugwaho génocide, kuko tugomba gukoresha ibishoboka byose urwo rupapuro rukandikwa, cyangwa mukagaruka muri Belgique ».

L’Interprète : Il m’a dit que de toutes les façons, ce n’était pas bien que cette religieuse soit accusée de génocide, que nous devons faire tout notre possible pour que ce papier soit trouvé, ou alors, que vous veniez en Belgique.

le témoin 44 : Kugirango dukore inama hamwe hanyuma ibyo bibazo birangire.

L’Interprète : Pour que nous fassions une réunion afin de mettre fin à ces problèmes.

le témoin 44 : Njye rero naramubwiye nti : « Birababaje cyane ko ubabajwe n’ibya Gertruda, ariko ukaba wibagirwa abantu bacu bapfuye, ureke ukuri kuzajye ahagaragara ».

L’Interprète : Alors, je lui ai dit que c’est vraiment triste qu’il oublie nos personnes qui ont été tuées, pour se préoccuper du cas de Gertrude, que c’était mieux que la vérité éclate au grand jour.

Le Président : Bien. Y a-t-il des questions à poser au témoin ? Monsieur le 12e juré ?

Le 12e Juré : Monsieur le président, pourriez-vous poser, demander au témoin si, finalement, le monastère a été attaqué ?

Le Président : Le monastère lui-même, a-t-il été, à un moment quelconque, attaqué ?

L’Interprète : Monastère ubwacyo, hari ubwo igihe kimwe kigeze giterwa ?

le témoin 44 : Monastère ntabwo yigeze iterwa n’umunsi umwe.

L’Interprète : Le monastère n’a été attaqué à aucun jour.

Le Président : Oui ?

Le 12e Juré : Le témoin peut-il expliquer ou a-t-il des informations sur ce qui s’est passé au centre de santé ?

Le Président : Le témoin a-t-il vu ce qui s’est passé au centre de santé ?

L’Interprète : Waba warabonye ibyabaye kuri centre de santé ?

le témoin 44 : Mu gihe cy’ubwicanyi ntabwo nabibonaga kuko,

Le Président : Le 22 avril, hein… le 22 avril. Le témoin a-t-il vu ce qui s’y passait ?

L’Interprète : Kuri 22.

le témoin 44 : Kuri 22, ntabwo nabibonaga n’amaso kuko centre de santé iri hirya gatoya, uri muri monastère ntabwo ahabona neza.

L’Interprète : Le 22 avril, je ne l’ai pas vu de mes propres yeux, car le centre de santé est un peu à l’écart, celui qui est dedans, celui qui est au monastère ne peut pas voir du côté du monastère.

le témoin 44 : Gusa nabonaga nk’abantu bavuye kuri centre de santé birukanka wenda, bakaza bamwe, nabonye babiri baguye imbere ya monastère.

L’Interprète : Seulement, je voyais des personnes qui quittaient, qui fuyaient le centre de santé en courant, j’en ai vu notamment deux qui sont tombés devant le monastère.

Le Président : Le témoin a-t-il vu l’incendie du garage du centre de santé ?

L’Interprète : Wabonye itwikwa ry’igaraji ya centre de santé ?

le témoin 44 : Ntabwo umwanya wo gutwika nabibonye kuko ntahageze, ariko nyuma yaho naje kubona yuko igaraji yatwitswe.

L’Interprète : Non, je ne l’ai pas vu, puisque je ne m’y suis pas rendue, mais par après, j’ai vu que le garage avait été incendié.

Le Président : Le témoin a-t-il éventuellement vu quelqu’un du couvent, ou extérieur au couvent, apporter de l’essence au centre de santé ?

L’Interprète : Waba warabonye umuntu wo muri couvent cyangwa se utari uwo muri couvent ajyanye lisansi kuri centre de santé ?

le témoin 44 : Ntawe nabonye ajyanye essence, icyo nabonye n’uko ku italiki 22, sœurs Gertrude na Kizito basohotse, ariko ntabwo nakurikiranye ibyo bagiye gukora.

L’Interprète : Non, je n’ai vu personne apporter de l’essence, tout ce que j’ai vu, c’est que le 22, sœurs Gertrude et Kizito sont allées dehors, sont sorties, mais je ne sais pas ce qu’elles sont allées faire.

Le Président : Bien. Y a-t-il d’autres questions ? Monsieur le 6e juré ?

Le 6e Juré : Monsieur le président, vous pouvez demander si elle sait quand elle n’a plus vu l’ambulance ? Quelle date ?

Le Président : Est-ce que le témoin se rappelle de l’ambulance du centre de santé ?

L’Interprète : Waba wibuka ambulance ya centre de santé ?

le témoin 44 : Ambulance ya centre de santé ndayibuka, kuko mu gihe cya génocide nabonaga REKERAHO ayigendamo, ariko sinibuka neza umunsi baba barayimuhereye.

L’Interprète : Oui, je me souviens bien de l’ambulance du centre de santé, car, pendant le génocide, je voyais REKERAHO voyager à son bord, mais je ne me souviens pas du jour auquel on la lui a donnée.

Le Président : Elle ne sait plus, le témoin ne sait plus si c’était avant le 22 avril ou si c’est seulement à partir du 22 avril ?

L’Interprète : Ntabwo wibuka niba byari mbere yo kuri 22 cyangwa se niba ari uguhera kuri 22 ?

le témoin 44 : Ntabwo mbyibuka neza.

L’Interprète : Je ne me souviens pas bien.

le témoin 44 : Gusa icyo nzi ni uko ambulance REKERAHO yayigendagamo ariko ntabwo nibuka neza umunsi yaba yarayiboneye.

L’Interprète : Ce que je sais, c’est que REKERAHO se déplaçait à son bord, mais je ne sais pas le jour où il l’a acquise.

Le Président : Oui ?

Le 6e Juré : Juste une deuxième question. Les sacs de riz, c’étaient des sacs de combien de kilos ?

Le Président : Les sacs de riz que le témoin 110 aurait apportés pour les… pour la nourriture pour les réfugiés, c’étaient des gros sacs, c’étaient des sacs de combien, de quel poids ?

L’Interprète : Imifuka y’umuceri le témoin 110 yazanye yari imifuka minini, yari imifuka ifite nk’ibiro bingahe ?

le témoin 44 : Nk’ibiro nka 50.

L’Interprète : A peu près 50 Kg.

Le Président : Il y avait combien de sacs ?

L’Interprète : Hari imifuka ingahe ?

le témoin 44 : Il y avait 12 sacs.

Le Président : C’est ça, 12 sacs. Une autre question ? Ou d’autres questions ? Monsieur le 3e juré.

Le 3e Juré : Monsieur le président, pouvez-vous demander au témoin si au sein de la congrégation religieuse, il aurait pu y avoir une autre sœur qui ressemblait à sœur Kizito ?

Le Président : Dans les religieuses de Sovu, y avait-il une ou plusieurs autres sœurs qui ressemblaient ou qui pourraient ressembler à sœur Kizito ?

L’Interprète : Mu babikira b’i Sovu haba hari umubikira umwe cyangwa se ababikira benshi basaga cyangwa se benda gusa na sœur Kizito ?

le témoin 44 : Nta, nta mubikira usa na Kizito rwose.

L’Interprète : Non, il n’y avait aucune religieuse qui ressemblait à sœur Kizito.

Le Président : Quand le témoin a dit que c’est Kizito qu’elle a vue le 22 avril, aller vers les Interahamwe, elle ne se trompe pas ?

L’Interprète : Iyo uvuga ko ari Kizito wabonye usanga Interahamwe ntabwo wibeshya ?

le témoin 44 : Oya ntabwo nibeshya kuko Kizito ndamuzi, n’abandi nari mbazi,

L’Interprète : Non, je ne me trompe pas puisque Kizito, je la connais et d’autres, je les connaissais.

le témoin 44 : Kandi, ikindi nakongeraho ni uko nta muntu n’umwe, kw’italiki ya 22, hagati muri ayo masasu wari gutinyuka gusohoka atari Kizito na Gertruda. Hagombaga gusohoka umuntu ufitanye ibanga rikomeye n’Interahamwe.

L’Interprète : Ce que je pourrais ajouter c’est que, ce jour-là du 22, personne d’autre ne pouvait s’aventurer à travers ces balles qui sifflaient si ce n’étaient que Kizito et sœur Gertrude qui avaient un secret, une confidence, en tout cas, un lien avec ces Interahamwe.

Le Président : Le témoin a-t-il déjà vu sœur Gertrude ou sœur Kizito avec REKERAHO, avant le 22 avril ?

L’Interprète : Mbere yo kuri 22 z’ukwa kane, hari ubwo wari warigeze ubona sœur Gertrude cyangwa Kizito bari kumwe na REKERAHO ?

le témoin 44 : Njyewe ntabwo nababonye nimba, njye REKERAHO, ubundi muri make namumenye mu gihe cya génocide.

L’Interprète : Personnellement, je ne les avais pas vus, mais, je vous dirais que REKERAHO, je l’ai connu pendant la période du génocide.

le témoin 44 : Kuko hakundaga kuza abantu benshi muri monastère, umubikira akakira abashyitsi, ntabwo wakurikiranaga ngo umenye nimba haje naka, buri muntu yiyokipaga abashyitsi be.

L’Interprète : Vu que plusieurs visiteurs venaient au monastère et que chaque religieuse accueillait ses visiteurs, on ne s’occupait pas des visiteurs des autres.

le témoin 44 : Niba yaba yaraje bakaganira, ibyo ntabwo nabihamya kuko ntabwo nabibonye.

L’Interprète : S’il était venu auparavant et qu’ils s’étaient entretenus, je ne pourrais pas l’affirmer, puisque je ne l’ai pas vu.

Le Président : Le témoin sait-il si sœur Gertrude et sœur Kizito se rendaient parfois chez Gaspard RUSAGANWA ?

L’Interprète : Waba uzi yuko sœur Gertrude na sœur Kizito bajyaga bajya kwa Gaspard RUSANGANWA ?

le témoin 44 : Gertruda... Kizito we rwose namubonaga agenda mu Nterahamwe, kuko wabaga uri muri hôtellerie, ukarebera mu idirishya

L’Interprète : Oui, en réalité, Kizito, je la voyais qui allait là où se trouvaient les Interahamwe car, lorsque nous étions à l’hôtellerie, nous la voyions monter.

le témoin 44 : Hanyuma sœur Gertruda nawe namubonye inshuro nyinshi, wabaga uri muri hôtellerie ukarebera mu rugi, hari akugi  kasohokaga, kakajya kwa Gaspari.

L’Interprète : Quant à sœur Gertrude, je l’ai vue à plusieurs reprises,

le témoin 44 : Plusieurs fois rwose ! Yagendagayo kenshi cyane.

L’Interprète : Car de l’hôtellerie, il y a une porte, une petite porte à travers laquelle il était possible de la voir se rendre chez Gaspard.

Le Président : Dans la maison de Gaspard ?

L’Interprète : Mu nzu ya Gaspard mu rugo rwe ?

le témoin 44 : Mu nzu ya Gaspard. N’undi muntu wese washaka gushira wenda amakenga ashobora kuvizita Sovu tukamwereka aho Gertrude yanyuraga ajya kwa Gaspard.

L’Interprète : Oui, chez Gaspard, à la maison de Gaspard. Quiquonque aurait un doute, pourrait visiter Sovu et de là, nous pouvons lui montrer la porte à travers laquelle nous voyions Gertrude se rendre chez Gaspard.

Le Président : Bien. D’autres questions ? Monsieur le 2e juré suppléant.

Le 2e Juré : Monsieur le président, donc, c’est au niveau des fournitures d’eau au moment des événements. On a parlé qu’il n’y avait plus d’eau. Est-ce qu’il y avait des réserves ?

Le Président : Est-ce qu’il y avait de problèmes d’approvisionnement en eau, au moment des événements ?

L’Interprète : Mwigeze mugira ikibazo cy’amazi ubwo ibintu byabaga ?

le témoin 44 : Ubundi i Sovu, nta kibazo cy’amazi kihaba, kuko amazi ari ayo bizaniye ubwabo bayakura ku musozi witwa Huye, nta nubwo bayishyura.

L’Interprète : Non, normalement Sovu n’avait pas de problème d’eau vu qu’ils ont fait les canalisations eux-mêmes du mont Huye, c’est une eau qu’on ne paie même pas,

le témoin 44 : Nta n’ikibazo k’ibiryo twari dufite kuko hari stock zihagije,

L’Interprète : Il n’y avait même pas de problème de nourriture puisque le stock était important.

le témoin 44 : Ahubwo ikibazo cy’amazi navuze wenda twakibonye i Ngoma mu bapadiri aho twahungiye kuri 23.

L’Interprète : Par contre, le problème que nous avons rencontré, nous l’avons rencontré à Ngoma, là où nous nous étions réfugiées le 23.

le témoin 44 : Naho ubundi i Sovu ntabwo hajya habura amazi n’umunsi umwe.

L’Interprète : Sinon, à Sovu, l’eau ne manque jamais.

Le 2e Juré : Y a-t-il eu un recensement qui a été effectué à la demande de Gertrude, sœur Gertrude ?

L’Interprète : Hari ubwo impunzi zigeze zibarwa bisabwe na sœur Gertrude ?

le témoin 44 : Impunzi, uko nigeze kumva, ibyo nabyumvanye Kizito,

L’Interprète : Quant aux réfugiés, ce que j’ai entendu de Kizito,

le témoin 44 : Yaravuze ngo, ngo agiye kubarura impunzi ngo bazabasabire imfashanyo.

L’Interprète : Elle a dit qu’elle allait recenser les réfugiés pour qu’on puisse leur demander de l’assistance.

le témoin 44 : Ibyo ni Kizito ubwe wabimbwiye rwose, avuga ko agiye gusa kubarura impunzi bakazabasabira imfashanyo. Ariko ntabwo nabihagazeho ari kubabarura, ariko Kizito yarabivuze ko yababaruye.

L’Interprète : Ça, c’est Kizito qui me l’a dit elle-même, qu’elle allait faire un recensement des réfugiés pour qu’on demande de l’aide pour eux, mais personnellement, je ne l’ai pas vu recenser.

Le Président : D’autres questions ? Monsieur l’avocat général ?

L’Avocat Général : Je vous remercie, Monsieur le président. Le témoin peut-il confirmer que donc, à partir du 25 avril, lorsque REKERAHO est venu chercher une partie des personnes qui se trouvaient donc, au monastère, sauf donc, les familles des sœurs Tutsi, que chaque nuit, sœur Gertrude venait frapper aux portes pour demander à ses sœurs de livrer leurs familles ?

L’Interprète : Wakwemeza ko kuva kuri 25, ubwo REKERAHO yaza agatwara impunzi zose usibye abo umuryango w’ababikira, buri mugoroba, sœur Gertrude yazaga gukomanga ku nzugi avuga ngo basohore abantu bahari ?

le témoin 44 : Rwose njyewe yarabinkoze hafi ya muri munsi, n’aho duhuriye hose akabimbwira, waba uri muri chambre ukumva arakomanze, ngo musohore abantu banyu ngo batazasenya monastère. Icyo gihe iteka yakundaga kuvuga icyo kintu : « Ngo batazasenya monastère. Wagerageza kujya kumureba ngo mubivugane nawe akakubwira nabi, ukamwihorera, ukigendera ».

L’Interprète : Oui, elle me l’a fait presque chaque soir, et chaque fois qu’on la croisait, elle disait : « Qu’on ne détruise pas le monastère, qu’on ne détruise pas le monastère ». Et quand je suis allée la voir pour qu’on discute ce problème, elle me tenait des propos désobligeants et… j’ai dû laisser.

L’Avocat Général : Lorsqu’alors, le 6 mai, elle vous a encore une fois dit de livrer ces familles et que vous avez refusé, vous pouvez confirmer qu’elle a dit qu’elle allait alors le faire elle-même par la force ?

le témoin 44 : Oui, par la force, yabivuze mu kiriziya, ababikira bose bari bahari, bashobora kuzabisubiramo.

L’Interprète : Oui, par la force, oui, elle l’a dit à l’église, à toutes les religieuses.

le témoin 44 : Yabivuze à haute voix, abivuga, amaze gusenga ngo : « Imbere y’Imana ishobora byose », abivuga cyane, buri wese yarabyumvise. Cyereka nibashaka kubeshya, ariko ubundi yarabivuze.

L’Interprète : Oui, elle l’a dit à haute voix à l’église, toutes les religieuses qui étaient présentes là-bas pourraient le dire, sauf si elle veulent mentir, elle l’a dit à haute voix, après la prière, après avoir dit : « Au nom de Dieu, tout puissant ».

L’Avocat Général : Si j’ai bien compris le témoin, tout à l’heure, le témoin a dit qu’on avait quand même autorisé à une jeune fille qui a été sauvée de prendre le voile, et cette jeune fille avait été emmenée par Monsieur Gaspard RUSANGANWA, c’est exact ?

le témoin 44 : Oui. Uwo mukobwa yihishe kwa Gaspard RUSANGANWA, sinzi itariki yahagereye, ariko yageze i Sovu kw’italiki ya 30 z’ukwezi kwa 6, nimugoroba cyane, mu gitondo bamuha voile nk’ababikira turahungana, na nubu aracyari i Sovu yahise yinjira.

L’Interprète : Oui, cette fille-là s’était cachée chez REKERAHO, je ne sais pas quand elle était arrivée chez lui. En tout cas, quand elle est venue à Sovu le 30, le 30 juin, on lui a fait porter un voile, même actuellement elle vit à Sovu, elle a rejoint la congrégation.

L’Avocat Général : Mais alors, quelques jours auparavant, lorsque REKERAHO avait lui-même proposé que certaines personnes puissent prendre le voile pour être sauvées, sœur Gertrude, à ce moment-là, l’a refusé ?

le témoin 44 : Ntabwo ari REKERAHO wabivuze ni bourgmestre wabivuze.

L’Interprète : Ce n’est pas REKERAHO qui l’a dit, c’est le bourgmestre qui l’a dit.

le témoin 44 : Bourgmestre wa komine Huye yarabisabye, abana babili, harimo uwitwaga Aline n’undi witwaga Candali, arabisaba ngo babambike voile, nibura bashobore kuzarokoka, aliko Gertruda yarabyanze.

L’Interprète : Oui, le bourgmestre de la commune de Huye l’a demandé, il y avait des jeunes filles du nom de Aline et Candali, pour qu’on leur donne le voile afin de les sauver, mais sœur Gertrude a refusé.

L’Avocat Général : Est-ce que l’intéressée vit toujours sur la colline de Sovu.

L’Interprète : Ngo uwo muntu aracyaba ku musozi wa Sovu ?

le témoin 44 : Uwuhe ?

L’Interprète : Quelle intéressée ?

L’Avocat Général : Non, le témoin, je veux dire.

L’Interprète : Wowe ubwawe ?

le témoin 44 : Oya, njyewe mba i Kigali.

L’Interprète : Non, moi, je vis à Kigali.

Le Président : D’autres questions ? Maître JASPIS ?

Me. JASPIS : Merci, Monsieur le président. Trois questions. Je suis peut-être la seule à ne pas avoir bien compris ce que le témoin nous a dit au sujet des frères de Madame MUKABUTERA. Est-ce qu’il y aurait moyen, soit que le témoin répète, soit qu’elle précise dans quelles circonstances elle a appris quoi exactement au sujet de ces frères, durant le génocide ? Et éventuellement, peut-elle nous indiquer le nom ou l’identité plus complète en tout cas, de ces personnes ? Et où elles se trouvaient durant le génocide ? S’il vous plaît.

Le Président : Le témoin sait-il donner des précisions en ce qui concerne les frères de sœur Kizito, qui auraient participé au génocide ?

L’Interprète : Washobora gutanga  ibisobanuro birambuye ku birebana na basaza ba sœur Kizito bagize uruhare muri génocide ?

le témoin 44 : Oya nta bisobanuro natanga birenze, abasaza be, nzimo uwitwa Tharcisse, irindi zina rye ntabwo ndizi, n’undi izina rye sindizi, ariko visages zabo ndazizi. Umwe twahuye nyuma y’intambara ushoboye kumbwira ibyo nababwiye.

L’Interprète : Je ne peux pas fournir plus de précisions concernant ses frères, en tout cas, l’un d’entre eux se prénomme Tharcisse, l’autre, je ne connais pas comment il s’appelle. Un de ses frères, je l’ai croisé après le génocide, et il m’a dit ce que je vous ai dit.

Le Président : Qu’est-ce qu’il vous a expliqué, Tharcisse ?

L’Interprète : Tharcisse ngo yakubwiye iki, yagusobanuriye ibihe ?

le témoin 44 : Tharcisse yambwiye ko abantu, ngo umudamu we yapfuye,

L’Interprète : Tharcisse m’a dit que…

le témoin 44 : Nimba ari umudamu we wapfuye cyangwa ngo mugenzi we, ariko avuga ko nawe ngo bamuzanaga kuri barrière, ndamubwira nti kuki… utamugira… aravuga ngo nuko nawe bamuzanaga kuri bariyeri ku ngufu… Twahuriye i Butare, njyewe ntashye mu Rwanda nabaye muli évêché,

L’Interprète : Oui, Tharcisse, je l’ai croisé à Butare, à mon retour au Rwanda je vivais à l’évêché,

le témoin 44 : Noneho avuga ko bamujyanye kuri bariyeri ku ngufu. Ni uko yambwiye.

L’Interprète : Il m’a dit qu’on l’avait emmené de force aux barrières, c’est ce qu’il m’a dit.

Le Président : Oui, une autre question Maître JASPIS.

Me. JASPIS : Oui, Monsieur le président. Est-ce que le témoin peut nous renseigner sur ceci : y avait-il des enfants parmi les familles des sœurs ou les employés du couvent, qui sont restés un certain temps encore après le 22, dans le bâtiment ? S’il vous plaît.

Le Président : Est-ce que, parmi les réfugiés qui se trouvaient parmi les personnes étrangères au couvent, les personnes, autres que les religieuses qui se trouvaient à l’intérieur du couvent, y avait-il des enfants ?

L’Interprète : Mu bantu bandi bari mu kigo batari ababikira, harimo abana ?

le témoin 44 : Barimo.

L’Interprète : Oui.

le témoin 44 : Hari umudamu uwo Chantal wari ufite umuhungu witwa Crispin w’amezi 18,

L’Interprète : Oui, Chantal avait un bébé du prénom de Crispin, âgé de 18 mois,

le témoin 44 : Hari umudamu witwa Emma-Marie nawe wari ufite abana bane,

L’Interprète : Il y avait une autre dame du nom de Emma-Marie, mère de quatre enfants.

Le Président : Une autre question ? Oui ?

Me. JASPIS : La dernière, Monsieur le président. Le témoin nous a fait part de son malaise une fois qu’elle s’est retrouvée à Maredret et des circonstances par lesquelles elle a été emmenée à quitter la Belgique pour regagner le Rwanda. Peut-elle donner un peu plus de détails sur les raisons pour lesquelles elle n’a pas pu, ou elle n’a pas souhaité, s’exprimer plus tôt, sur les accusations qu’elle porte à l’encontre des deux religieuses, notamment durant le voyage qui a duré quand même un certain nombre de semaines avant qu’elle ne regagne la Belgique, s’il vous plaît ? Ou, à qui l’aurait-elle dit, d’ailleurs ?

Le Président : Le témoin a-t-il, avant qu’elle ne soit entendue lors de la commission rogatoire au Rwanda, a-t-elle, à un autre moment, porté des accusations contre sœur Gertrude et sœur Kizito ?

L’Interprète : Mbere yo kuza kubazwa mu Rwanda, hari ubundi wigeze urega sœur Gertrude cyangwa Kizito ?

le témoin 44 : Ibyo narabikoze ariko ntabwo nabikoze nko kuregana, n’ubu ni ukubivuga nkuko umuntu ashobora kubwira undi ariko ntabwo nabivuze nko kurega kuko tutari mu bucamanza.

L’Interprète : Oui, je l’ai fait, mais ce n’est pas comme on fait une plainte formelle, je l’ai dit comme on peut dire ça à un ami, je l’ai dit comme ça puisque nous n’étions pas dans un cadre judiciaire.

Le Président : A quelles personnes et à quelle moment l’a-t-elle fait…

L’Interprète : Wabwiye nde cyangwa se…

Le Président : Ce genre de confidences à…

L’Interprète : Wabibwiye nde ibyo kandi wabimubwiye ryari ?

le témoin 44 : Nabimubwiye mbere, ibyambayeho byose nabibwiye d’abord abantu nka batatu,

L’Interprète : Ce qui m’est arrivé, je l’ai raconté à au moins trois personnes,

le témoin 44 : Abbé président, umukuru wacu w’umuryango narabimubwiye ngirango turebe, ndebe ukuntu ashobora kuregla problème ariko biranga,

L’Interprète : L’abbé président responsable de notre congrégation afin de voir comment régler à l’amiable notre problème, mais ça n’a pas eu de fruit.

Le Président : C’est l’abbé CULLEN,

le témoin 44 : Oui. Célestin. Sinzi niba ari hano.

L’Interprète : C’est plutôt l’abbé Célestin, je ne sais pas s’il est là.

Le Président : C’est CULLEN, oui ?

le témoin 44 : Oui.

Le Président : Un néerlandais ?

le témoin 44 : Oui, un néerlandais. Nongeye kubibwira…

Le Président : Et ça remonte à quelle époque…

L’Interprète : Ibyo byabaye ryari ?

Le Président : …ces confidences à l’abbé CULLEN?

L’Interprète : Ngo wabwiye, Padiri CULLEN wabimubwiye ryari ?

le témoin 44 : Ntabwo nibuka itariki nabimubwiye ariko twari tumaze igihe gito, tugeze muri Belgique yaje kudusura,

L’Interprète : Je ne me souviens plus bien de la date exacte, mais c’était peu de temps après… puisqu’après notre arrivée en Belgique, il nous a rendu visite,

le témoin 44 : Noneho ndabimubwira.

L’Interprète : Et puis, je le lui ai dit.

le témoin 44 : Undi muntu nongeye kubibwira, n’umubikira witwaga mère Martine w’i Rixensart.

L’Interprète : Je l’ai dit également à une sœur, mère Martine, de Rixensart.

le témoin 44 : Nawe nabimubwiye nzi ko ari inshuti ya sœur Gertruda,

L’Interprète : Je le lui ai dit puisque je savais bien que c’était une amie à sœur Gertrude,

le témoin 44 : Nagirango wenda ashobore ku… nabona bikunda adushyire hamwe na Gertruda kuko twashakaga iteka kubisubiramo Gertruda akabyanga,

L’Interprète : C’était pour que…

le témoin 44 : Hanyuma mbimubwira muri iyo cadre kugirango wenda nabishobora azaduhuze, ariko nabyo ntabwo byashobotse.

L’Interprète : C’était pour voir si elle pouvait jouer une médiation entre sœur Gertrude et moi-même, ce qui, évidemment, n’a pas abouti à quoi que ce soit.

Le Président : Et quelle est la troisième personne à laquelle elle aurait fait la confidence ?

L’Interprète : Uwa gatatu waba warabibwiye ?

le témoin 44 : Uwa gatatu ni umudamu witwa Marie-Claire.

L’Interprète : La troisième est une dame du prénom de Marie-Claire.

Le Président : le témoin 20 ?

L’Interprète : Irindi zina rye ni le témoin 20

le témoin 44 : Sinzi niba yitwa le témoin 20 ariko,

L’Interprète : Je ne sais pas si elle s’appelle le témoin 20,

Le Président : Madame NOVAK ?

L’Interprète : VAAK, Madame DEVAAK ?

Le Président : NOVAK, NOVAK.

le témoin 44 : Yego.

L’Interprète : Oui.

le témoin 44 : Nabimubwiye kuko nawe ari umuntu nawe wabaye i Sovu imyaka ibiri, atwigisha kandi yarazi situations zose z’i Sovu,

L’Interprète : Oui, je lui ai dit, puisque…

le témoin 44 : Aho yambarije uko byagenze mu ntambara, ndabimubwira nk’umuntu twabanye.

L’Interprète : Oui, je lui ai dit puisqu’elle avait vécu à Sovu pendant deux ans, c’était notre institu… inst… …trice, je lui disais en tant que quelqu’un qui avait vécu avec nous, et qui connaissait la situation de Sovu.

Le Président : D’autres questions ? Maître NKUBANYI.

Me. NKUBANYI : Oui, Monsieur le président. Pourriez-vous demander au témoin si, à sa connaissance, sœur Kizito avait un surnom particulier, et la signification de ce surnom ?

Le Président : Sœur Kizito avait-elle un surnom ?

L’Interprète : Sœur Kizito hari izina ry’irihimbano yarafite ?

le témoin 44 : Izina ry’irihimbano ntaryo nari nzi, nabisomye mu kinyamakuru,

L’Interprète : Son surnom, je ne le connaissais pas, seulement, je l’ai lu dans un journal,

le témoin 44 : Nabisomye mu kinyamakuru bandikagaho ngo yitwa Gapyisi. Ntabwo nzi umuntu warimuhimbye,

L’Interprète : J’ai lu dans un journal qu’on la surnommait « Gapyisi », mais je ne sais pas qui lui a donné ce surnom.

Le Président : Et ça veut dire quoi, ce surnom ?

L’Interprète : Bivuga iki ?

le témoin 44 : Un animal.

Le Président : Une autre question ? Maître RAMBOER ?

Me. RAMBOER : Oui, Monsieur le président. J’ai quelques questions à poser. Je vais d’abord poser quelques questions plus générales concernant, je dirais, le monastère et Sovu et puis, des questions plus particulières concernant les faits eux-mêmes. Tout d’abord, concernant le monastère à Sovu. J’aimerais qu’on pose la question sur l’importance de ce monastère. Donc, on sait qu’il y avait 31 sœurs mais en personnel, et aussi en terre ?

Le Président : Alors, dépendant du monastère, est-ce qu’il y avait des… [Sonnerie GSM] …y avait-il des terres ?

L’Interprète : Hari isambu,

Le Président : Des cultures ?

L’Interprète : Hari isambu, imirima, ubuhinge byari i Sovu ? Bwa Sovu ubwayo ?

le témoin 44 : Yego. Sovu hari imirima myinshi cyane, n’intoke, bananeraies, zirahari nyinshi.

L’Interprète : Oui, à Sovu, il y a plusieurs plantations, notamment des bananeraies, il y en a beaucoup.

Le Président : Ce sont des plantations importantes ?

L’Interprète : Ubwo buhinge ni bwinshi, ni bunini, bugari ?

le témoin 44 : Ni bugari yuko byashoboraga gutunga ababikira, mubyerekeye légumes, batagombye guhaha.

L’Interprète : Oui, importantes puisqu’elles pouvaient nourrir notamment les religieuses, en légumes, au lieu d’aller en acheter au marché.

Le Président : Oui. Et y avait-il du personnel qui travaillait au couvent ou à l’extérieur du couvent, pour les religieuses ?

L’Interprète : Hari abakozi bakoraga muri couvent ubwaho mu kigo cyangwa se hanze y’ikigo ariko bakorera ababikira ?

le témoin 44 : Mu Kigo hakoraga abakozi benshi bashobora kurenga nka 30.

L’Interprète : Oui, à l’intérieur, les membres du personnel étaient nombreux, environ à 30,

le témoin 44 : Kuko hari, bafite atelier ya hostiya, bakoreshaga nk’abakobwa barenga 12,

L’Interprète : Notamment, à l’atelier des hosties qui employait plus de 12 filles.

le témoin 44 : Hari imirima ishobora gukorwamo n’abantu nabo, kuko hari ferme, hari ibikorwa byinshi cyane.

L’Interprète : Il y avait des ouvriers à la plantation, il y avait une ferme, il y avait plusieurs activités.

Le Président : Oui. Une autre question ?

Me. RAMBOER : Oui. A-t-elle une idée de combien d’ouvriers travaillaient à la ferme et dans les plantations ?

Le Président : Vous avez une idée de…

L’Interprète : Muri ferme cyangwa se mu mirima yindi hari nk’abakozi bangahe ?

le témoin 44 : Rwose batanduhije ntabwo nabaze ngo ndebe umubare wabo ariko icyo nzi n’uko abakozi bose bakoraga i Sovu bari benshi kandi bose baguye i Sovu, nta n’umwe warokotse, nicyo kintu nababwira.

L’Interprète : Je n’ai pas compté pour connaître leur nombre exact. Ce que je pourrais vous dire, c’est que tous ceux qui travaillaient à Sovu ont été assassinés à Sovu, et qu’il n’y a eu aucun rescapé, je n’ai rien de plus à dire.

Le Président : Une autre question ?

Me. RAMBOER : Une autre question concernant l’autorité de la sœur Gertrude. C’était donc sœur Gertrude qui dirigeait l’ensemble, et de ces sœurs, et du personnel, ou est-ce qu’il y avait d’autres personnes qui avaient une autorité sur le personnel ?

L’Interprète : Sœur Gertrude niwe wategekaga ubwe ikigo cyose n’abo bakozi cyangwa se hari undi muntu wategekag’abakozi ubwabo ?

le témoin 44 : Ubundi sœur Gertrude bwa mbere yarashinzwe ababikira, aliko…

L’Interprète : Avant, sœur Gertrude avait à sa charge les religieuses mais,

le témoin 44 : Ariko ibyaba, buri mubikira akagenda agira aho akoresha, akamenya abakozi akoresha abo aribo, aliko hakaba économe noneho ushinzwe abakozi bose.

L’Interprète : Alors, chaque religieuse avait des employés sous sa responsabilité, et puis, il y avait aussi l’économe général qui était la cheftaine de tout le personnel.

le témoin 44 : Ariko icyabaga mu kigo cyose cyangwa yaba ari umukozi bashyiramo cyangwa iki, byose byagombaga kunyura kuri supérieure.

L’Interprète : Mais tout ce qui se passait à l’intérieur de l’établissement, que ce soit un engagement des membres du personnel, tout cela devait passer par la mère supérieure.

Le Président : Une autre question ?

Me. RAMBOER : Une autre question. C’était donc bien la mère supérieure qui gardait les clés, les clés du magasin, les clés de l’endroit où se trouvait l’essence etc., ou il y avait d’autres personnes qui disposaient de ces clés ?

Le Président : La sœur supérieure, avait-elle toutes les clés, de tous les locaux ou bien les clés étaient-elles réparties entre plusieurs religieuses, par exemple, en raison de leurs fonctions particulières ?

L’Interprète : Mère supérieure niwe warufite imfunguzo zose z’ikigo, cyangwa se hari imfunguzo zimwe na zimwe zagendaga zigirwa n’ababikira aba n’aba, bitewe n’imirimo babaga bashinzwe ?

le témoin 44 : Yego. Imfunguzo ubundi buri mubikira yagiraga imfunguzo zikingura ahantu hakwiranye n’ibyo akora, ariko iteka ryose habaga double.

L’Interprète : Oui, chaque religieuse avait des clés qui concernaient son domaine de travail, mais il y avait aussi des doubles de ces clés.

le témoin 44 : Les doubles de clés zabaga zimanitse ahantu mu biro bya supérieure,

L’Interprète : Qui étaient, quelque part, suspendues dans le bureau de la supérieure…

le témoin 44 : Ku buryo yashoboraga kurukenera akaba yarufata akingura aho akeneye hose gukingura.

L’Interprète : …de telle sorte qu’il lui était possible de les prendre et d’ouvrir là où elle voulait ouvrir.

Le Président : La clé des magasins par exemple, c’était personnellement sœur Gertrude qui l’avait ? Ou une autre religieuse ?

L’Interprète : Imfunguzo za magasin ubwazo, ni sœur Gertrude wari uzifite cyangwa se n’uwundi mubikira ?

le témoin 44 : Umubikira yagiraga imfunguzo aliko nababwiye ko habaga double y’imfunguzo zindi zitakoraga, ku buryo yakenera kujya muri magasin atagombaga kujya gushaka umubikira ngo amusabe imfunguzo.

L’Interprète : Chaque religieuse avait les clés, mais il y avait aussi des doubles, de telle sorte que si elle voulait aller notamment au magasin, elle n’avait pas besoin d’aller les demander à la religieuse concernée.

le témoin 44 : Kandi izo mfunguzo, doubles nyinshi zabaga ziri mu cyumba cya supérieure, niho bazibikaga.

L’Interprète : Et la grande partie des doubles de clés se trouvait chez la supérieure.

Le Président : Une autre question ?

Me. RAMBOER : Oui, Monsieur le président, concernant donc, au moment où les réfugiés sont arrivés, j’avais recueilli la plainte de Madame le témoin 44, et donc, dans cette plainte, elle signalait entre autres que les réfugiés avaient été en quelque sorte dépouillés de leurs provisions, qui avaient été enfermées dans le magasin. Dans sa déclaration, aujourd’hui donc, elle n’a pas fait état de ce fait. Est-ce qu’elle confirme ce fait ou est-ce qu’elle l’infirme ?

Le Président : Lorsque les réfugiés sont arrivés au couvent ou au centre de santé, leur a-t-on retiré la nourriture qu’ils avaient emmenée avec eux ?

L’Interprète : Ubwo impunzi zavaga kuri centre bazatse ibiryo zari zazanye ?

le témoin 44 : Yego. Ibiryo babishyize muri salle ya centre de santé babishyira hamwe.

L’Interprète : La nourriture a été mise ensemble, dans une salle du centre de santé.

le témoin 44 : Noneho bavuze ko bajya babakemurira uko babaga babikeneye.

L’Interprète : On a dit qu’on allait leur ouvrir la porte au fur et à mesure que le besoin se faisait sentir.

le témoin 44 : Hanyuma rero urufunguzo rwabitswe na Gertruda, aliko icyo gihe, hari igihe impunzi zazaga kwaka urufunguzo ntibarubone…

[Interruption d’enregistrement]

L’Interprète : Alors, la clé a été détenue par Gertrude et des fois les réfugiés venaient la demander, mais ne la recevaient pas.

Le Président : Une autre question ?

Me. RAMBOER : Donc, la nourriture des réfugiés a été saisie et plus distribuée aux réfugiés, si j’ai bien compris.

Le Président : Nous avons entendu la réponse.

Me. RAMBOER : Donc, il y a encore des questions que je pose, concernant la proximité entre la sœur Gertrude et Gaspard RUSANGANWA. Donc, le témoin a parlé du fait que Gaspard RUSANGANWA était celui qui, ensemble avec REKERAHO, était le responsable des massacres à Sovu.

Le Président : Oui, nous avons bien entendu.

Me. RAMBOER : Oui, Monsieur le président, mais donc, elle a vu ce fait, ou est-ce qu’elle le sait, ou qu’est-ce qu’elle sait encore, concernant ce que les autres témoins ont dit, que donc, le moine bénédictin en question, était un grand Interahamwe ?

Le Président : Le témoin a-t-elle vu Gaspard diriger les Interahamwe.

L’Interprète : Wabonye Gaspard ayoboye Interahamwe ?

le témoin 44 : Gaspard yazaga kenshi mu kigo, kuko yari yarabaye umubenedictin niko navuga, kandi aziranye na…

L’Interprète : Gaspard venait souvent au couvent quand… je dirais qu’il avait été bénédictin, et puis, ils se connaissaient.

le témoin 44 : Kandi nababwiye ko ku itariki ya 6 umunsi abantu bacu bapfa ba famille ariwe wajyanye na Gertruda,

L’Interprète : Et puis, je vous ai dit que le 6 avril,

le témoin 44 : Bajya muri VW,

L’Interprète : Quand nos personnes sont venues, c’est lui qui était parti avec Gertrude dans la Volkswagen.

Me. RAMBOER : Je suppose que le 6 mai, que la personne euh… le témoin a vu…

Le Président : 6 mai, le 6 mai. Quand elle a été chez le bourgmestre ?

L’Interprète : Uravuga ku itariki ya 6.

le témoin 44 : Ku itariki ya 6.

L’Interprète : Ubwo bajyaga kwa bourgmestre ?

le témoin 44 : Yego.

L’Interprète : Oui, le 6 mai.

Me. RAMBOER : Si vous permettez encore une question ? Alors, plus précisément sur les contradictions qui existaient entre elle et sœur Gertrude, parce que, donc, nous avons entendu qu’il y aurait des problèmes internes et que donc, le témoin a déclaré ici, qu’en réalité, si le témoin, un autre témoin a déclaré ici, que si, donc le témoin, Madame le témoin 44 a porté plainte ou accusé plutôt sœur Gertrude, c’est parce qu’il y avait des problèmes internes à la communauté et qu’elle avait contesté l’autorité de sœur Gertrude. Est-ce qu’elle a contesté l’autorité de sœur Gertrude avant les faits ?

Le Président : Avant les événements de Sovu, du mois d’avril et du mois de mai 1994, y avait-il un problème dans la communauté ?

L’Interprète : Mbere y’ibyabaye mu kwezi kwa kane n’ukwa gatanu kwa 94, hari ibibazo byari mu kigo ?

le témoin 44 : Ibibazo, ushobora kunsobanurira ibibazo by’ubuhe bwoko ?

L’Interprète : Vous pouvez m’éclaircir ? Les problèmes, de quelle sorte ?

Le Président : Y avait-il, par exemple, un mouvement de contestation contre la prieure, sœur Gertrude ?

L’Interprète : Hari ibibazo byo kutumvira cyangwa se kutemera ubutegetsi, ubuyobozi bwa sœur Gertrude

le témoin 44 : Ibyo ntabyo nigeze mbona kuko Gertruda nta myaka myinshi yarategetse, kandi…

L’Interprète : Non, je ne l’ai pas vu, vu que ça ne faisait pas longtemps que Gertrude était à la tête de l’établissement et puis…

le témoin 44 : Kandi kugirango umuntu abe supérieure wa communauté agomba gutorwa n’ababikira,

L’Interprète : …et puis, pour être supérieure d’une communauté, on doit être élue par les religieuses,

le témoin 44 : Igihe rero bemeye kumutora ntabwo bagaruka ngo bamutere ibibazo. Bagomba kwakira amategeko uko ameze, igihe cyazagera cyo guhindura wenda bagahindura.

L’Interprète : Alors, pour autant qu’elles l’ont élue, elles n’ont plus à contester son autorité, elles doivent respecter le règlement jusqu’aux prochaines élections.

Le Président : Donc, il n’y avait pas, avant les événements, de contestation de l’autorité de sœur Gertrude ?

L’Interprète : Ni ukuvuga yuko mbere y’uko ibyo biba, biriya biba, nta butegetsi bwa Gertrude, ntabwo bwigeze buhungabana ?

le témoin 44 : Njyewe ntabyo nigeze mbona ku giti cyanjye, nzi ko Gertruda, ubundi uko batora supérieure nabibabwiye, ntawiyamamaza nta ki bashyiraho bakareba abafite wenda igihe kigeze cyo kuba batorwa, uwo amajwi aguyeho menshi niwe uba supérieure. Ababikira rero icyo gihe bagomba kumwumvira igihe cyose bakiri muri icyo kigo.

L’Interprète : Moi, je ne l’ai pas vu, je vous ai dit comment on devient supérieure, il n’y a pas de candidature qu’on donne, on voit si c’est le moment d’être élue, on élit, et puis, celle qui est élue devient supérieure et d’autres lui obéissent.

Le Président : Une autre question ?

Me. RAMBOER : Oui, Monsieur le président. Est-ce que, justement dans le cadre de cette règle, donc, entre moines ou moniales bénédictines, quel est justement le contenu de cette règle d’obéissance ?

Le Président : Quelle est la règle d’obéissance, ça contient quoi ? C’est obéir à tout ?

L’Interprète : Kumvira no kubaha umuyobozi…

Le Président : Tout ce que décide la supérieure ?

L’Interprète : Kumvira supérieure bivuga kumvira ibyo ategetse byose mu mategeko asanzwe ho ?

le témoin 44 : Ubundi bivugako ugomba kumvira, ariko rero igihe agutegetse ibintu ubona bidashoboka, ushobora kubyanga.

L’Interprète : Oui, on dit que nous… on doit obéir, mais quand elle vous ordonne de faire ce que vous jugez impossible, vous pouvez refuser.

Le Président : Une autre question ?

Me. RAMBOER : Est-ce que c’est justement parce qu’elle se sentait trop poussée… donc, au nom de l’obligation d’obéissance et que donc, on lui demandait de rentrer en Belgique, est-ce que c’est pas la raison principale pourquoi que… elle avait quitté la communauté, donc, que… elle avait entamé une procédure de laïcisation ?

Le Président : Qu’est-ce qui a motivé le témoin à quitter les ordres ?

L’Interprète : Ni iki cyatumye uva mu babikira ?

le témoin 44 : Ikintu cyatumye mva mu babikira, navuye muri Belgique, ntegereza umwaka wose ndi i Butare kwa Musenyeri,

L’Interprète : C’est qu’après mon départ de la Belgique, j’ai attendu à l’évêché de Butare,

le témoin 44 : Icyo gihe rero ntabwo communauté, nkurikije ibyo nabayemo, ntabwo yamfashije kurushaho kwegera Imana, ahubwo…

L’Interprète : Alors, compte tenu de ce qui m’est arrivé à la communauté, elle ne m’a pas aidée à approcher Dieu, au contraire…

le témoin 44 : Ahubwo nabonaga, badusabaga gusinya impapuro, batarebye ukuri aho guherereye, nkabona ko nta bukristu burimo.

L’Interprète : Au contraire, on nous demandait de signer des papiers sans voir… sans considérer la vérité, et j’ai vu qu’il n’y avait rien de chrétienté là-dedans.

le témoin 44 : Hanyuma rero aho kugirango, njye nararebye nsanga n’ibintu bihoraho kandi bitazagera igihe bishira, kuko byavuye muri famille bénédictin, babihereza aba pères blancs ngo babe aribo babyiyokipa, nageze igihe nibaza niba nimba le témoin 133 afite abana, igihe habayemo ibibazo ntashobore kubikemura, akagomba ikibazo kugifata akagihereza iyindi famille, ubwo nabonaga ko byasaga nk’ibyabananiye batangiye kubinyanyagiza, nahisemo gusezera.

L’Interprète : Alors, j’ai vu que c’était un problème récurrent, surtout que le problème venait d’être déplacé de la communauté des bénédictines, s’était déplacé chez les pères blancs, alors que normalement, quand il y a un problème, le père doit régler ce problème, à ce moment-là. Comme le père n’était plus en mesure de gérer ce problème, j’ai vu qu’il n’y avait pas de solution, et je devais quitter la communauté.

le témoin 44 : Ikindi nakongeraho n’ubwo nakise wenda, n’ubwo navuye muri communauté, ntabwo ari ukuvuga ngo umuntu yanze Imana, abantu nzi ko ari abantu, ariko Imana ibyo yankoreye ni byinshi kandi ndabirokonesa ndayishimira, kandi nzi ko nshobora kuyikorera n’ahandi nkakora byiza kurusha wenda nkuko naba muri communauté.

L’Interprète : C’est que je n’abandonne pas Dieu pour autant, et que les hommes étant ce qu’ils sont, je reconnais que Dieu m’a fait beaucoup de merveilles et je lui suis reconnaissante.

Le Président : Une autre question ?

Me. RAMBOER : Monsieur le président, donc, au moment qu’elle est rentrée en Belgique euh… pardon, au Rwanda, le témoin n’a pas été le seul à rentrer, je crois qu’il y a encore - ou bien tout de suite ou par après encore - eu trois autres membres de la communauté qui sont rentrés au Rwanda. Est-ce qu’elle peut nous donner des explications à ce sujet ?

Le Président : Quelles ont été les autres personnes qui sont revenues au Rwanda, de la communauté ?

L’Interprète : Hari abandi batashye mu Rwanda wo mu muryango wanyu ?

le témoin 44 : Ubundi dutaha tuva muri Belgique tujya mu Rwanda twari babiri. Yari njyewe n’uwundi mubikira witwa Scholastika,

L’Interprète : Nous étions à deux quand nous avons quitté la Belgique pour le Rwanda, j’étais avec une sœur du nom de Scholastique,

le témoin 44 : Ibibazo twari twagerageje  kubisobanura n’ubwo bitumvikanye bwose ariko byabaye ngombwa ko dutaha.

L’Interprète : Nous avons essayé d’expliquer, mais en vain, les problèmes qu’il y avait, puis, il a été nécessaire que nous rentrions.

le témoin 44 : Abandi baje nyuma yacu, n’uwitwa Régine, n’undi witwa Annonciata.

L’Interprète : Par après, sont venues Régine et Annonciata.

le témoin 44 : Ubwo rero Régine nawe ngirango azaza hano, mushobora kuzamwibariza impamvu yamukuyemo, wenda azayibasobanurira.

L’Interprète : Je crois que Régine viendra elle-même témoigner ici. Alors, vous pourrez lui demander les raisons de son départ, elle vous expliquera,

le témoin 44 : Ariko, icyi ingenzi navuga ni uko igihe cyose iyo communauté iza gufasha abantu, ikadufata neza kandi ntishake guhengamira kuri Gertruda gusa kandi yibagiwe ibibazo by’abana bari bato kuri we nka Regina, ntanumwe wazaga kuyivamo, bose bari gukomeza.

L’Interprète : Mais, ce que je vous dirais, si la communauté avait bien compris notre problème, au lieu de prendre parti pour Gertrude qui avait fait du mal à des plus jeunes qu’elle, comme Régine, personne d’entre nous n’aurait quitté la communauté.

Le Président : D’autres questions ?

Me. RAMBOER : Oui, Monsieur le président. On a parlé de pressions qui ont été exercées sur le témoin, donc, après son retour au Rwanda. Est-ce qu’elle a eu connaissance d’autres tentatives de pressions possibles, potentielles, qui ont été exercées, depuis lors, aux autres témoins?

Le Président : Le témoin a-t-il eu connaissance d’autres pressions que celles dont elle a parlé. Père COMBLAIN qui était venu, est-ce qu’il y a eu d’autres pressions sur ce témoin-ci, ou sur d’autres témoins ?

L’Interprète : Usibye ibya padiri COMBLAIN wavuze, hari abantu baje kuguhatira nk’icyo wakora nyuma y’ibyo wavuze ? Kuli wowe cyangwa se ku bandi ?

le témoin 44 : Undi babwiye ni Scholastique nawe bamusabye kwandika nk’urwo rupapuro bansabye ariko nawe ntabwo yabyemeye

L’Interprète : Oui, tel a été aussi le cas à Scholastique. On lui a également demandé d’écrire le même papier qu’on m’avait demandé d’écrire mais, elle aussi, a refusé du faire.

le témoin 44 : Abandi bantu nahuye nabo, byaduteye ikibazo cyane tukimara kujya i Butare, banze ko twinjira muri monastère.

L’Interprète : D’autres personnes que j’ai rencontrées, ce qui nous a causé une grande difficulté à notre arrivée à Butare, c’est qu’on nous a refusé d’entrer au monastère.

le témoin 44 : Gertruda yavugaga ko monastère yahihaye abana bo muri « Terre des hommes » ko tudafite uburenganzira bwo kwinjiramo,

L’Interprète : Gertrude disait qu’elle avait donné le monastère aux enfants de « Terre des hommes », que nous n’avions pas le droit d’y entrer.

le témoin 44 : Ubwo rero rimwe, umunsi umwe twagiye twoherejwe na Musenyeri, tujyanye n’imodoka ye, tugezeyo dusanga umudamu wakoraga yo,

L’Interprète : Alors, un jour, nous sommes allées là-bas, envoyées par l’évêque, et dans la voiture de l’évêque, là-bas, nous avons croisé une fille qui travaillait,

le témoin 44 : Twasanze yabwiye abakozi gushyiraho barrieri, kugirango imodoka ya Musenyeri itinjira.

L’Interprète : Cette fille-là qui travaillait avait dit aux ouvriers de dresser une barrière pour que la voiture de l’évêque n’entre pas.

le témoin 44 : Ubwo rero nyuma y’ibyo, l’évêque yanditse ibaruwa ibasaba yuko bagomba kuva muri monastère kugirango imirimo ya hostiya ikomeze,

L’Interprète : Après, l’évêque leur a dit de quitter le monastère pour que la fabrique des hosties puisse continuer son fonctionnement.

le témoin 44 : Nyuma yaho ibintu birakomera biba birebire. Abbé Nicolas w’i Maretsou yaje muri izo nama.

L’Interprète : Après, la situation s’est empirée et par exemple, l’abbé Nicolas de Maredsous a assisté à ces réunions.

le témoin 44 : Hanyuma bagerageza kubikemura, abana babaha igihe bazaviramo, natwe batubwira ko dushobora gutangira tugakora, ariko byanyuze munzira ndende cyane.

L’Interprète : On a essayé de résoudre ces problèmes-là, notamment fixer un délai à ces enfants pour qu’ils évacuent les lieux. Ça a abouti, mais après plusieurs tracasseries.

Le Président : Autres questions ?

Me. RAMBOER : Oui, Monsieur le président. Ce n’est pas que des questions, en réalité je veux revenir un peu en arrière, justement au tout début des événements. Donc, euh… le 18 avril, euh… donc, sœur Gertrude est partie pour Butare, euh… allée voir les militaires à Butare, elle est revenue. Elle est revenue seule, elle est venue avec des militaires, qu’est-ce qui s’est passé exactement à ce moment-là ?

le témoin 44 : Gertruda ntabwo yazanye n’abasirikare, bo baje nyuma.

L’Interprète : Gertrude n’est pas venue en même temps que les militaires ; ils sont venus après.

le témoin 44 : Kuko bari, babaga bafite imodoka yabo.

L’Interprète : Car ils avaient leur propre véhicule.

Le Président : Sont-ce les militaires qui ont regroupé les réfugiés au centre de santé ?

L’Interprète : Abo ni abasirikare bashyize, bakusanyije impunzi muri centre de santé ?

le témoin 44 : Hamwe n’abapolisi.

L’Interprète : Oui, en compagnie des policiers.

Le Président : A la demande de sœur Gertrude ou de leur propre initiative ?

L’Interprète : Ari Gertrude ubikoze cyangwa se aribo babyibwirije ?

le témoin 44 : Ntabwo mbizi.

L’Interprète : Je ne sais pas.

Le Président : Une autre question ?

Me. RAMBOER : Je vous remercie, Monsieur le président.

Le Président : D’autres questions ? Maître BEAUTHIER.

Me. BEAUTHIER : Une seule question, Monsieur le président. J’imagine que dans la communauté, après les événements du 22 avril, les sœurs n’étaient pas toutes sous le même diapason ; il y avait des sœurs qui se taisaient, qui étaient tristes, c’est ce que le témoin a dit, il y a d’autres sœurs qui, paraît-il, peut-elle le confirmer, se sont réjouies ? Qu’a dit par exemple sœur Cécile, après le massacre du 22 avril ?

Le Président : Oui !

L’Interprète : Nyuma y’ibyabaye ku itariki ya 26, ubwicanyi bwo kw’itariki ya 26 z’ukwa 4, hari ababikira bicecekeye hakaba n’abandi bashimishijwe n’ubwo bwicanyi, wavuze ko watanga nk’urugero rwa sœur Cécile ?

le témoin 44 : Oui, sœur Cécile, ndabyibuka yabibwiye umubikira witwa Solange,

L’Interprète : Oui, je me souviens, sœur Cécile l’a dit à une religieuse du nom de Solange,

le témoin 44 : Aravuga ngo : « Ibikotanyi byose babyishe ».

L’Interprète : Elle lui a dit : « Tous ces Inkotanyi ont été massacrés ».

le témoin 44 : Noneho Solange nibwo yamubajije ati se, nabariya bana, harimo abaturanyi bose b’i Sovu, ati nabo n’Inkotanyi ?

L’Interprète : Alors, sœur Solange lui a demandé : « Et ces enfants-là dont nos voisins sont aussi des Inkotanyi ? ».

le témoin 44 : Irindi jambo Gertruda nawe yavuze ryerekanaga ko yishimye,

L’Interprète : Alors, un autre mot qu’a prononcé Gertrude et prouvant sa réjouissance,

le témoin 44 : Yaravuze ngo : « Abatutsi bari baracukuye ibyobo byo kurohamo abahutu »,

L’Interprète : Elle a dit : « Les Tutsi avaient creusé des fosses dans lesquelles ils allaient jeter les Hutu »,

le témoin 44 : Ngo none, abahutu babatanze.

L’Interprète : Et maintenant, les Hutu ont pris les devants.

le témoin 44 : Aho rero ibyo yabivugaga ubona nawe yishimye ko bateguye ko bateguye umugambi mubi none akaba aribo bawuguyemo.

L’Interprète : Visiblement, on voyait qu’elle aussi, était contente que les autres avaient tendu un piège, qu’ils venaient de… dans lequel ils venaient de tomber eux-mêmes…

[Interruption d’enregistrement]

Me. WAHIS : Je vous remercie, Monsieur le président. Une première question au sujet du départ de la paroisse de Ngoma, du 23 avril. Le témoin pourrait-elle nous confirmer, je crois qu’elle l’a dit, je crois qu’elle faisait bien partie du premier convoi ce jour-là ?

Le Président : Le témoin peut-il confirmer qu’elle faisait partie du premier convoi qui a quitté Sovu le 23 avril, pour trouver refuge à Ngoma ?

L’Interprète : Wakwemeza ko wari mu ya mbere, muri groupe ya mbere yavuye i Sovu ihungiye i Ngoma ?

le témoin 44 : Yego nari muri groupe ya mbere alibwo Scholastique yasigaye i Sovu.

L’Interprète : Oui, je faisais partie du premier convoi, mais sœur Scholastique était restée à Sovu.

le témoin 44 : Sœur Scholastique yasigaye i Sovu, sœur Fortunata na Bénédicte, basigaye ari ababikira batatu,

L’Interprète : Sœurs Fortunata et Benedicte également, elles étaient à trois sœurs, à rester à Sovu.

le témoin 44 : Aribwo rero Scholastique yasabye Gertruda ajyane n’uwo Chantal n’akana, akavuga ngo nta muntu wundi ajyana, usibye ababikira gusa.

L’Interprète : Alors, c’est dans ces circonstances que…

le témoin 44 : Scholastique yaramusabye ngo ajyane na Chantal,

L’Interprète : …alors, c’est dans ces circonstances que Scholastique a demandé à Gertrude de prendre aussi Chantal et que Gertrude a refusé.

le témoin 44 : Yavuze ko ajyana ababikira gusa nta bandi bantu agomba kujyana.

L’Interprète : Et qu’elle a insisté sur le fait qu’elle ne prenait rien que des religieuses.

Le Président : Oui, une autre question ?

Me. WAHIS : Oui, je vous remercie, Monsieur le président. Le témoin nous a rappelé donc, que lorsqu’elles étaient arrivées à la paroisse de Ngoma, des Interahamwe se sont présentés et ont dit qu’ils voulaient tuer les Tutsi. Est-ce que le témoin pourrait donner des précisions sur la manière dont on a réussi à repousser les Interahamwe à ce moment-là ?

Le Président : Oui, le témoin se souvient-il comment les Interahamwe, qui étaient venus menacer à la paroisse de Ngoma, ont été repoussés ?

le témoin 44 : Bagendaga padiri rimwe akabaha amafaranga,

L’Interprète : Des fois, le prêtre leur donnait de l’argent,

le témoin 44 : Gertruda rimwe nawe yatanze amafranga, cyangwa se kabiri simbyibuka neza, ariko nawe nzi ko yatanze amafaranga

L’Interprète : Une fois ou deux, je ne me souviens pas exactement, Gertrude a aussi donné de l’argent,

le témoin 44 : Hanyuma Interahamwe ikagenda isohoka nyuma yaho hakinjira indi niyo mouvement twakomeje kubamo iminsi yose.

L’Interprète : Alors, le mouvement auquel nous assistions, c’est qu’un Interahamwe sortait et un autre entrait, ainsi de suite.

Le Président : Oui, une autre question ?

Me. WAHIS : Oui, Monsieur le président. Est-ce que le témoin a appris ce qui s’était passé à Sovu pendant qu’elle était à Ngoma, c’est-à-dire le 23 et le 24 avril. Est-ce qu’elle a appris quelque chose sur ce qui se serait passé au monastère de Sovu ?

Le Président : Trois religieuses sont restées au monastère.

le témoin 44 : Oui.

Le Président : Ces trois religieuses vous ont-elles appris quelque chose sur ce qui s’était passé au monastère, le 23 et le 24, pendant que vous et d’autres étiez absentes ?

le témoin 44 : Tugarutse, batubwiye ko REKERAHO yaje muri monastère.

L’Interprète : A notre retour, elles nous ont dit que REKERAHO était venu au monastère,

le témoin 44 : Yaraje, abara abantu bose bari bahari,

L’Interprète : Il est venu, et il a compté les personnes qui se trouvaient là-bas.

le témoin 44 : Ikindi na none abantu bari bishe kuri 22 bose, niwo munsi babahambye, babacukuriye ibyobo byo kubarundamo.

L’Interprète : Alors, c’est ce jour-là où on a creusé les tombes où ils ont mis tous ceux qui avaient été assassinés, les fosses dans lesquelles ils ont mis les personnes qui avaient été assassinées le 22.

le témoin 44 : Ni ukuvuga ko rero REKERAHO liste y’abantu bari banditsweho bose bari i Sovu bose yari ayifite mu ntoki, niwe wari wabanditse, abaza amazina yabo babandika,

L’Interprète : C’est ce qui prouve que REKERAHO avait la liste de toutes les personnes qui se trouvaient à Sovu,

le témoin 44 : Ni nacyo cyatumaga rero igihe Gertruda yadusabaga kubasohora twamubwiraga ko REKERAHO arabazi, nta kibazo biteye igihe cyose azashakira azaza kubatwara,

L’Interprète : Ce qui nous poussait à dire à Gertrude que quand elle venait nous obliger de les faire sortir, que REKERAHO les connaissait, et qu’il pouvait venir les prendre quand il avait envie du faire,

le témoin 44 : Ni uko byari bimeze.

L’Interprète : Et c’est ainsi que la situation se déroulait.

Le Président : Une autre question ?

Me. WAHIS : Oui, une dernière question, Monsieur le président. Nous savons qu’il y a eu des élections en juillet 1993 pour désigner la nouvelle prieure du couvent. Est-ce que le témoin peut nous dire si sœur Scholastique s’était présentée comme prieure à cette élection ?

Le Président : Sœur Scholastique était-elle candidate prieure, en juillet 1993 ?

L’Interprète : Mu kwa karindwi kwa 93 sœur Scholastique nawe yariyamamaje kuba mukuru w’ikigo ?

le témoin 44 : Muri monastère nta muntu wiyamamaza.

L’Interprète : Au monastère, personne ne présente sa candidature.

le témoin 44 : Baratora ababikira, uwo amajwi menshi aguyeho niwe uba prieure. Ariko nta wiyamamaza kuba prieure. Cyangwa kuba umukuru wa monastère.

L’Interprète : Il n’y a pas de présentation de candidature, les religieuses élisent seulement, et puis, celle qui obtient le plus grand nombre de voix, devient supérieure.

le témoin 44 : Haba hari umukuru w’umuryango abikurikira, icyo gihe rero bakora uko formulaires zibisaba byose, ubwo ugize amajwi menshi niwe uba utowe, abandi bose baka… bagakomeza programme.

L’Interprète : Le responsable de la congrégation supervise les élections, et celle qui obtient le plus grand nombre de voix devient supérieure.

Le Président : Est-ce que sœur Scholastique avait obtenu des voix ?

L’Interprète : Hari amajwi sœur Scholastique yagize ?

le témoin 44 : Ariko se, ibi bambaza hari aho bihuriye na génocide ubundi ?

L’Interprète : Est-ce que les questions que vous me posez ont un rapport avec le génocide ?

Le Président : Pas vraiment, mais cela peut expliquer peut-être certaines choses. Donc, est-ce que sœur Scholastique avait reçu un certain nombre de voix ?

L’Interprète : Ngo oya ariko hari aho byaba bihuriye, ngo sœur Scholastique hari amajwi yagize ?

le témoin 44 : Kuko, nababwiye ibibazo twagize muri génocide n’impapuro zanditswe, ibyo byose birahari. Ibyerekeye amatora n’abasuperieure numva rwose ari ibintu biri ku ruhande.

L’Interprète : Je vous ai parlé des problèmes que nous avons rencontrés pendant le génocide et ce qui concerne les supérieures et les voix, c’est un peu à côté.

le témoin 44 : None se, wenda nanjye nabaza ikibazo nti Gertruda hari uwaba yaramubwiye kwandika urwandiko rutanga abantu, hari umubikira waba yarabimubwiye cyangwa waramufashije kurwandika ?

L’Interprète : Moi-même, je pourrais poser une question. La lettre que Gertrude a écrite, laquelle lettre livrait les gens, est-ce qu’une religieuse lui a demandé de l’écrire ?

Le Président : Moi, je repose la question. Sœur Scholastique a-t-elle reçu des voix lors des élections, en juin 1993 ?

L’Interprète : Arakubaza ikibazo : muri juillet 93, sœur Scholastique hari amajwi yagize ?

le témoin 44 : Yarayagize.

L’Interprète : Oui, elle en a eu.

Le Président : D’autres questions ? Maître VANDERBECK.

Me. VANDERBECK : Je vous remercie, Monsieur le président. Ma question sera assez simple. Le témoin a été entendu deux fois, si je ne m’abuse ; la première fois en 1995, et dans sa déposition, en 95, lors de la commission rogatoire, elle ne parle que très peu de sœur Kizito, en ne disant que deux choses : qu’elle est originaire de Sovu et que ses frères sont Interahamwe, et que sœur Kizito, après le 6 mai, serait venue quelques fois les prévenir que des attaques imminentes risquaient d’assaillir le couvent. En juillet 1997, par l’intermédiaire de ses deux avocats, Maître BEAUTHIER et Maître FERMON, le témoin a déposé plainte avec constitution de partie civile, entre les mains d’un juge d’instruction, contre sœur Kizito et sœur Gertrude et commence sa plainte en ces termes : « Les faits que je dénonce sont les suivants… », et sur les 5 pages de plainte qui seront certifiées chez le notaire, elle ne dit, à propos de sœur Kizito, qu’une seule chose : que sœur Kizito aurait porté au bourgmestre, la lettre que sœur Gertrude avait écrite le 5 mai. Alors aujourd’hui, le témoin nous dit trois choses fondamentales dont, deux pour la première fois. Elle nous avait déjà parlé, au mois de novembre 1999, devant les enquêteurs du TPI, de ce que sœur Kizito aurait quitté le 22 avril - c’est la première fois qu’elle en parlait - en cours d’après-midi, le couvent, où toutes les sœurs étaient en train de prier, sans savoir où elle était allée ; elle l’a confirmé, je pense, aujourd’hui, et aujourd’hui, elle nous dit, de surcroît, deux choses dont elle n’a jamais parlé ; la première étant - et j’ai pris des notes pour éviter de me tromper - que sœur Kizito, le 6 mai, aurait accompagné les militaires dans les chambres des sœurs, ou les deux seuls militaires ou les deux policiers dans les chambres des sœurs, afin de faire sortir l’ensemble des personnes qui s’y trouvaient.

Et deuxième chose qu’elle nous dit pour la première fois aujourd’hui, que sœur Kizito lui aurait dit qu’elle avait procédé au recensement des populations réfugiées avant le 22 avril, c’est-à-dire avant les massacres, en vue de leur apporter une aide. Alors, la seule question que je me pose, c’est pourquoi, alors que précisément c’est contre seule sœur Kizito, qu’elle se constitue partie civile, elle ne fait jamais état, au mois de juillet 1997, de ces deux ou trois accusations fondamentales à l’égard de sœur Kizito.

Le Président : Pourquoi ne pas avoir parlé avant aujourd’hui de certaines choses, comme le déplacement de sœur Kizito, le 22 avril ?

L’Interprète : Kuki hari ibyo utavuze mbere, nk’ibyerekeye aho Kizito yagiye kuri 22 z’ukwezi kwa kane ?

Le Président : Ou la circonstance que sœur Kizito aurait accompagné des militaires le 6 mai pour vérifier dans les chambres s’il ne s’y cachaient pas des réfugiés ?

L’Interprète : Cyangwa se ngo kera ku itariki ya 6 z’ukwezi kwa gatanu sœur Kizito yajyanye, yagiye nko mu machambre kwerekana abantu bari bihishe ?

le témoin 44 : Icyo navuga, nababwira ni uko tuvuga, dusubiza ibintu dukurikije ibyo batubajije.

L’Interprète : Tout ce que je vous dirais, c’est que nous répondons suivant les questions qui nous sont posées.

le témoin 44 : Oui, nabiriya nabivuze kubera ko, bitewe n’ikibazo ambajije nkakimusubiza,

L’Interprète : Ce que j’ai dit, peut-être que je l’ai dit suite à une question qui venait de m’être posée, à laquelle j’ai répondu.

le témoin 44 : Hari n’indi déclaration nakoranye n’abantu bo muri… ni Arusha ?

L’Interprète : Oui. Il existe une autre déclaration que j’ai faite avec le Tribunal international à Arusha.

le témoin 44 : Bitewe nawe nuko nawe yambazaga ibibazo byinshi, icyo gihe nayo yabaye nini, nkamusubizaga nkurikije ibibazo agendaga ambaza.

L’Interprète : Vu que l’enquêteur, lui aussi, me posait plusieurs questions, la déclaration a été longue, suivant les questions qu’il me posait au fur et à mesure.

le témoin 44 : Kandi ikindi nakongeraho ni uko ibintu byabaye muri génocide, udashobora kubitondekanya byose, ngo kuva ku itariki ya mbere kugeza ku itariki ya 30 hose nta na kamwe wibagiwe, ariko iyo bakubajije ikibazo ugerageza kugenda ubyibuka ugasubiza.

L’Interprète : Je dirais aussi que ce qui s’est passé pendant le génocide ne peut pas être relaté chronologiquement, de façon exhaustive, disant telle date un tel événement ou un tel s’est produit, sans sauter un point. Et alors, je réponds suivant les questions qu’on pose.

Le Président : Oui, d’autres questions ?

Me. VANDERBECK : Oui, Monsieur le président. Si je comprends bien, le témoin nous dit que toutes les questions n’étaient pas posées, mais le 29 juillet, lorsqu’elle rédige sa plainte avec ses deux conseils, il n’y a aucune question qui lui est posée, c’est elle qui raconte.

Le Président : Oui, mais ça nous avons bien compris.

Me. VANDERBECK : Et qu’est-ce qu’elle nous dit ? On lui pose pas les questions, mais elle nous dit : « Les policiers sont montés dans les chambres et ont fait sortir, avec les fusils, les membres de nos familles ». Pourquoi est-ce qu’aujourd’hui elle nous dit que c’est sœur Kizito qui est montée avec des policiers, dans les chambres pour faire sortir les membres de famille ?

Le Président : Y a-t-il un motif particulier qui vous fait apporter cette précision aujourd’hui ?

L’Interprète : Ngo ubushize ntabwo… wari waravuze ko abasirikare aribo  bagiye bafite imbunda bakura abantu mu byumba byabo, ubu ngubu uravuga ko ari Kizito wabajyanye. Hari impamvu ituma ubivuga ubu ngubu ?

le témoin 44 : Oya nta mpamvu ituma mbivuga ubu, niba icyo gihe ntarabivuze ni uko wenda batabimbajije.

L’Interprète : Aucun motif particulier. Si, à l’époque, je ne l’ai pas dit comme tel, comme je le dis aujourd’hui, c’est qu’on ne me l’a pas demandé.

Le Président : Une autre question ?

Me. VANDERBECK : Oui, Monsieur le président, une dernière question au témoin. Dans sa plainte, toujours cette fameuse plainte du 29 juillet, ainsi d’ailleurs que dans ses déclarations, et aujourd’hui encore, je pense, le témoin fait part d’accusations, enfin, en tout cas, de choses peu agréables à l’adresse de sœur Cécile. Je crois que c’est sur questions de son conseil qu’elle a d’ailleurs confirmé ce qu’elle pensait de sœur Cécile. Elle dira également dans sa plainte que sœur Cécile aurait refusé de soigner les blessés qui se trouvaient au centre de santé. Alors, ma question est toute simple : elle ne dit pas un mot sur sœur Kizito, ou si peu, et dépose plainte contre elle ; elle émet deux accusations précises contre sœur Cécile, et elle ne dépose pas plainte contre elle. Pourquoi ne pas avoir déposé plainte également contre sœur Cécile ?

Le Président : Pourquoi ne pas avoir déposé plainte contre sœur Cécile ?

L’Interprète : Kuki utareze sœur Cécile ?

le témoin 44 : Oya sœur Cécile ntabwo mufite muri dossier kumurega kuko, nimba ataravuye abantu bari kuri centre, ntabwo abantu bari kuri centre bose mbazi ku buryo nabaregera.

L’Interprète : Je ne peux pas porter plainte contre sœur Cécile puisque si elle n’a pas soigné les personnes qui étaient au centre, je ne connais pas tout le monde qui était au centre pour que je porte plainte à leur place.

le témoin 44 : Ariko ndavugira kuri basaza banjye baguye i Sovu kuko, nibo nshobora guporeza plainte, ntaho ubundi Cécile muri bo, ntawe yimye umuti yarwaye.

L’Interprète : Je porte plainte pour mes deux frères qui étaient à Sovu, car personne d’entre mes deux frères n’a été refusé par Cécile, des médicaments, quand ils étaient malades.

le témoin 44 : Gusa niba naravuze wenda ko sœur Cécile yanze, yanze kuvura abantu, nabivuze bambajije situation ukuntu yari imeze, mvuga ko sœur Cécile atatangaga umuti kuko byageze n’igihe aravuga ngo : « Ese barabaha imiti bazishyura iki ? ».

L’Interprète : Si j’ai parlé de sœur Cécile, c’était par rapport à la description de la situation générale, puisque je me souviens, un jour elle a dit : « Si on leur donne des médicaments, de quoi vont-ils payer les frais médicaux ? ».

Le Président : Une autre question ? Maître WAHIS.

Me. WAHIS : Oui, Monsieur le président. Dans sa déclaration en commission rogatoire, le témoin nous dit que les Interahamwe avaient, jusqu’au 22 avril, encerclé le monastère et le centre de santé, je suppose. Est-ce qu’elle peut nous préciser, si elle-même, en sa qualité de sœur Tutsi, n’a plus pu, à partir du 18 avril, quitter le monastère pour se rendre au centre de santé ou est-ce qu’elle pouvait circuler librement et aller au centre de santé ?

le témoin 44 : Njye ntabwo nashoboraga kujya kuri centre de santé, nabireberaga muri hôtellerie hari étage, washoboraga kubona ibisirikira autour, ariko centre de santé ntabwo uba uyibona neza.

L’Interprète : Il m’était impossible de me rendre au centre de santé, je suivais la situation de l’hôtellerie et on ne voit pas bien le centre de santé.

le témoin 44 : Ariko Interahamwe zabaga zimanuka ziva kuri colline zigana kuri centre de santé, twarazibonaga uko zamanukaga.

L’Interprète : Mais quand les Interahamwe descendaient de la colline vers le centre de santé, nous les voyions.

Le Président : Une autre question ?

Me. WAHIS : Oui, Monsieur le président. En ce qui concerne le riz fourni par le témoin 110, le témoin précise que Laurien a apporté le riz pour les réfugiés et l’a déposé au centre de santé, qu’il l’a donné à sœur Gertrude qui l’a enfermé dans le magasin du centre de santé. Alors, comment est-ce qu’elle le sait puisque, apparemment, elle n’était pas au centre de santé ?

Le Président : Oui.

L’Interprète : Ntabwo wari kuri centre de santé kandi ngo uravuga ko ubwo Laurien yazanaga umuceri yawujyanye kuri centre de santé, noneho sœur Gertrude akawufungirana akajyana imfunguzo, wabibonye ute utari kuri centre de santé ?

le témoin 44 : Icyabimbwiye n’impunzi zawupakuruye, bari batarabica, impunzi zawupakuruye ubwabo, bari bazi… bazaga gusaba urufunguzo hamwe n’ibindi bintu bari bafiteyo kugirango bashobore kuwuteka urufunguzo ntibarubahe.

L’Interprète : Ceux qui me l’ont appris, ce sont les réfugiés qui avaient déchargé le riz, ils n’avaient pas encore été assassinés, alors, ils venaient chercher la clé qu’ils ne recevaient pas.

Le Président : Une autre question ?

Me. WAHIS : Oui, Monsieur le président. En ce qui concerne la journée du 22 avril, aujourd’hui le témoin nous a dit qu’à un moment donné, sœur Kizito et sœur Gertrude sont sorties de la salle dans laquelle se trouvaient les sœurs et les personnes réunies en session, elle ne pouvait pas aujourd’hui préciser l’heure. Cependant, dans la déclaration auprès du TPIR, elle est nettement plus précise, c’est une déclaration du 4 décembre 98 et elle dit ceci : « Vers les 16h00 ou 17h00, j’ai vu sœur Kizito sortir de la salle où nous étions rassemblées pour prier. Je ne sais pas où elle est allée, elle n’est pas revenue », etc. Est-ce qu’elle peut nous confirmer aujourd’hui, que c’est bien vers 16h00 ou 17h00 que sœur Kizito est sortie de cette salle ?

le témoin 44 : Mais, quand je dis « vers » ce n’est pas fixer la date… non, ce n’est pas fixer l’heure.

Me. WAHIS : Donc moi, je note vers 16 ou 17h00 et on en tirera ce qu’il faut. En ce qui concerne la journée du 23 avril, Monsieur le président, le témoin nous dit qu’elle est partie avec le premier convoi vers Ngoma en compagnie d’ailleurs de sœur Kizito. Elle est plus précise dans ses déclarations, elle dit qu’elle a quitté Sovu vers 6h00 du matin avec ce premier convoi. Est-ce qu’elle peut, dès lors, confirmer que sœur Kizito est bien partie avec elle à partir de 6h00 du matin, le 23 avril, et que sœur Kizito n’est revenue à Sovu que le 24 avril, dans la soirée, en même temps que les autres sœurs ?

Le Président : Oui, pouvez-vous confirmer cela ?

le témoin 44 : Vous pouvez encore poser la question ?

Le Président : Est-ce que sœur Kizito est partie le 23, vers 6h00 du matin, de Sovu pour Ngoma, avec vous ?

L’Interprète : Mu masaa kumi, kuri 23 mu ma saa…

le témoin 44 : Oui, yego, yari ari kumwe natwe.

L’Interprète : Oui, elle était avec nous.

Le Président : Est-ce qu’elle est bien revenue le 24, dans la soirée, avec vous ?

L’Interprète : Mukaba mwaragarukanye bukeye, kuri 24 ku mugoroba ?

le témoin 44 : Twaragarukanye.

L’Interprète : Oui, nous sommes revenues ensemble.

Le Président : Une autre question ? Y a-t-il encore des questions ? Les parties sont-elles d’accord pour que le témoin se retire ? Madame, persistez-vous dans vos déclarations ?

L’Interprète : Uremeza ibyo umaze kuvuga ? Uracyabihamya ?

le témoin 44 : Ndabihamya.

L’Interprète : Oui, je confirme.

Le Président : Le témoin peut disposer de son temps, mais doit administrativement rester à la disposition de la Cour jusqu’à son retour au Rwanda.

L’Interprète : Ushobora kwigendera ariko ukaba ukiri mu maboko y’ubucamanza ku birebana na za formalités z’urugendo n’iki, kugeza igihe uzasubirira mu Rwanda.

le témoin 44 : Merci.

Le Président : La Cour la remercie pour son témoignage.

L’Interprète : Urukiko ruragushimiye.

le témoin 44 : Barakoze.

L’Interprète : Elle vous remercie également.

Le Président : Bien, nous allons suspendre l'audience un quart d’heure, nous en aurons certainement aujourd’hui jusqu’à 18h30, tout ça à cause de la S.N.C.B.