assises rwanda 2001
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Instruction d’audience C. Mukangango, « sœur Gertrude » et J. Mukabutera, « sœur Kizito » Audition témoins compte rendu intégral du procès
Procès > Instruction d’audience C. Mukangango, « sœur Gertrude » et J. Mukabutera, « sœur Kizito » > Audition témoins > le témoin 72
1. le témoin 19 2. M.le témoin 44 3. R. Tremblay 4. le témoin 110 5. le témoin 38 6. le témoin 72 7. le témoin 101 8. le témoin 79 9. le témoin 138 10. le témoin 57 11. le témoin 2 12. le témoin 66 13. le témoin 71 14. le témoin 64 15. le témoin 81 16. le témoin 151 17. le témoin 115 18. le témoin 136 19. le témoin 7 20. le témoin 75 21. le témoin 82 22. le témoin 80 23. le témoin 99 24. le témoin 152 25. le témoin 78 26. Commentaires sur textes rédigés à Maredret 27. le témoin 95 28. le témoin 133 et commentaires de défense 29. le témoin 74 30. le témoin 70 31. le témoin 20 32. le témoin 60 33. le témoin 17 34. le témoin 49 35. le témoin 127 36. le témoin 47 37. le témoin 46 38. le témoin 147 39. le témoin 51 40. A. JANSSENS 41. le témoin 48 42. le témoin 145 43. G. Dupuis
 

8.6.6. Audition des témoins: le témoin 72

Le Greffier : La Cour.

Le Président : L’audience est reprise. Vous pouvez vous asseoir. Les accusés peuvent prendre place. Le témoin le témoin 72 peut approcher. Monsieur l’interprète, voulez-vous bien demander au témoin quels sont ses nom et prénom ?

L’Interprète : Wababwira amazina yawe yombi ?

le témoin 72 : le témoin 72 Domitille.

L’Interprète : le témoin 72

Le Président : Quel âge a-t-elle ?

L’Interprète : Ufite imyaka ingahe ?

le témoin 72 : 47.

L’Interprète : 47 ans.

Le Président : Quelle est sa profession ?

L’Interprète : Umwuga wawe ?

Domitille le témoin 72 : Ubuhinzi.

L’Interprète : Cultivatrice.

Le Président : Quelle est sa commune de domicile ?

L’Interprète : Komine utuyemo ?

Domitille le témoin 72 Komine Huye.

L’Interprète : La commune de Huye.

Le Président : Connaissait-elle les accusés ou certains des accusés avant le mois d’avril 1994 ?

L’Interprète : Mbere y’ukwezi kwa kane muli 94, wari uzi abaregwa cyangwa se umwe mu baregwa ?

Domitille le témoin 72 : Nari umuturage wa segiteri Sovu nari mbazi narabagendereraga.

L’Interprète : Oui, je résidais dans le secteur de Sovu, je les connaissais, et je leur rendais visite.

Le Président : Il s’agit des deux religieuses ?

L’Interprète : Ni ukuvuga bariya babikira babiri ?

Domitille le témoin 72 : Ndabazi bombi uko ari babiri.

L’Interprète : Je les connais toutes les deux.

Le Président : Est-elle de la famille des accusés ou des parties civiles ?

L’Interprète : Hari isano ufitanye n’abaregwa cyangwa se abaregera indishyi ?

Domitille le témoin 72 : Njyewe mu bantu baregwa, mama Kizito tugirana amasano,

L’Interprète : Parmi les accusés, j’ai une relation de parenté avec sœur Kizito.

le témoin 72 : Murumuna wanjye wo kwa data wacu, yashatswe na musaza wa Kizito.

L’Interprète : La fille de mon oncle paternel est l’épouse du frère de Kizito.

Le Président : Ce n’est pas un témoin reprochable. Elle ne travaille pas pour les accusés ou pour les parties civiles ?

L’Interprète : Nta kazi uhemberwa ukorera abaregwa cyangwa abaregera indishyi ?

le témoin 72 : Njyewe nkurikiranye imiryango yannjye yashiriye kuri monasteri ya Sovu,

L’Interprète : Barabaza niba nta kazi ukorera abaregwa cyangwa abaregera indishyi, baba baguhemba, ukaba uri umukozi wabo.

le témoin 72 : Njyewe nkurikiranye abantu bacu bitabye Imana, tubaza icyo bazize, twerekana n’ababikoze, n’ababigizemo uruhari.

L’Interprète : Ce n’était pas une réponse à la question, elle disait qu’elle est ici contre, elle parle de l’accusation, j’allais répéter et insister sur la question que vous venez de poser.

Le Président : Oui.

L’Interprète : Bakubazaga niba nta kazi ufite mu baregwa cyangwa abaregera indishyi, ko waba uri umukozi wabo, baguhemba amafaranga. Ntabwo uri umukozi w’abaregwa cyangwa se abaregera indishyi, ntabwo uri umukozi wabo ?

le témoin 72 : Ntabwo ndi umukozi.

L’Interprète : Non.

Le Président : Bien. Voulez-vous l’inviter à lever la main droite et à prononcer le serment de témoin ?

L’Interprète : Uzamure ukuboko ku iburyo noneho urahire indahiro y’abatanga ubuhamya.

le témoin 72 : Njyewe le témoin 72 Domitila, ndahiriye kuvuga ukuri gusa, nta rwango, nta n’umususu.

L’Interprète : Moi, le témoin 72 Domitille, je jure de parler sans haine et sans crainte, de dire toute la vérité et rien que la vérité.

Le Président : Prenez place tous les deux. Madame, vous êtes-vous réfugiée à un moment donné, au mois d’avril 1994, au couvent de Sovu ou au centre de santé de Sovu ?

L’Interprète : Mu kwezi kwa kane kwa 94, hari ubwo wigeze uhungira mu kigo cy’i Sovu cyangwa ku ivuriro ry’i Sovu ?

le témoin 72 : Ku itariki 17 z’ukwa kane muri 94 narahahungiye.

L’Interprète : Le 17 avril 1994, je m’y suis réfugiée.

Le Président : Etait-elle accompagnée de membres de sa famille lorsqu’elle s’est réfugiée à Sovu ?

L’Interprète : Ubwo wahungiraga i Sovu, wari ujyanye n’umuryango wawe ?

le témoin 72 : Nari njyanye n’umugabo wanjye n’abana banjye, n’abandi baturanyi.

L’Interprète : Oui, j’étais avec mon mari, mes enfants et d’autres voisins.

Le Président : Combien d’enfants étaient avec elle, de ses enfants ?

L’Interprète : Wari kumwe n’abana bawe bwite bangahe ?

le témoin 72 : Ubundi nari mfite abana batandatu,

L’Interprète : En fait, j’avais six enfants,

le témoin 72 : Ariko babiri, nabo umugabo wanjye yibyariye ku wundi mudamu, bane nibo bari abanjye.

L’Interprète : Mais deux sont des enfants que mon mari a eus d’une autre femme, tandis que mes propres enfants sont au nombre de quatre.

Le Président : Quel âge avait le dernier de ses enfants ?

L’Interprète : Umwana wawe wa bucura yari afite imyaka ingahe ?

le témoin 72 : Yari afite imyaka 3 n’amezi 4.

L’Interprète : Il était âgé de trois ans et quatre mois.

Le Président : Son mari a-t-il été tué à Sovu ?

L’Interprète : Umugabo wawe yiciwe i Sovu ?

le témoin 72 : Niho yaguye.

L’Interprète : Oui, il est décédé là-bas.

Le Président : Combien a-t-elle perdu de ses enfants à Sovu ?

L’Interprète : Abana bawe baguye i Sovu ni bangahe ?

le témoin 72 : Njyewe ku giti cyanjye, n’umugabo wanjye, haguye abana banjye batatu.

L’Interprète : Mes propres enfants et donc, mon mari, qui sont morts là-bas, sont au nombre de trois.

le témoin 72 : Uwa kane yarakomeretse.

L’Interprète : Le quatrième a été blessé.

Le Président : Peut-elle expliquer pourquoi, le 17 avril, elle s’est réfugiée avec les membres de sa famille au couvent de Sovu ?

L’Interprète : Wasobanura icyatumye ku itariki ya 17 z’ukwa kane, wowe n’uwo muryango wawe mwahungiye mu kigo cy’ababikira cy’i Sovu ?

le témoin 72 : Nabisobanura.

L’Interprète : Oui, je peux l’expliquer.

Le Président : Elle peut le faire ?

L’Interprète : Wabikora ?

le témoin 72 : Ubwo komini duhana imbibi ni iya Maraba, bari baraye batwikiye abantu kandi bajonjora

L’Interprète : Oui, on avait, sur base d’un tri, incendié les maisons des gens qui habitaient la commune voisine, la commune de Maraba,

le témoin 72 : Ubwo kuri 17, tuvuye mu misa ya mbere,

L’Interprète : Après la première messe du 17,

le témoin 72 : Gutwika amazu bari bigeze muri segiteri Sovu,

L’Interprète : L’incendie des maisons atteignait le secteur de Sovu.

le témoin 72 :   Selire Gako.

L’Interprète : La cellule de Gako.

le témoin 72 : Ubwo kuberako abatwikaga bagendaga batoranya amazu y’abatutsi,

L’Interprète : Comme ceux qui incendiaient, triaient les maisons des Tutsi,

le témoin 72 : Abantu twabibonye dutyo, duhitamo guhunga.

L’Interprète : Face à cette situation, nous avons jugé bon de nous enfuir.

Le Président : Est-ce qu’il n’y avait pas aussi eu des grenades lancées sur les gens ?

L’Interprète : Nta grenade zari zarabanje guterwa abantu ?

le témoin 72 : Ahubwo ku itariki ikurikiyeho, ya 18,

L’Interprète : Par contre, le lendemain, le 18,

le témoin 72 : Nibwo hatewe grenade,

L’Interprète : C’est à ce moment-là qu’une grenade a été lancée,

le témoin 72 : Yica uwitwa RANGIRA.

L’Interprète : Et elle a tué un homme du nom de RANGIRA.

Le Président : Et celui qui a jeté la grenade, est-ce que c’était un certain KAMANAYO ?

L’Interprète : Uwateye grenade yaba ari uwitwa KAMANAYO ?

le témoin 72 : Ubwo mbere yo gutera iyo grenade, burugumestiri,

L’Interprète : Avant de lancer la grenade, le bourgmestre,

le témoin 72 : Yaraje aho twari twahungiye kuri centre de santé,

L’Interprète : Est venu là où nous étions réfugiés, au centre de santé.

le témoin 72 : Aradusuhuza,

L’Interprète : Et nous adressa des salutations.

le témoin 72 : Atubaza abalimo bateza umutekano umutekano mucye aho baherereye,

L’Interprète : Et il nous a demandé l’endroit où se trouvaient les personnes qui provoquaient l’insécurité.

le témoin 72 : Tubarangira ko bari ahitwa mu buruhukiro,

L’Interprète : Et nous avons désigné un endroit dit « Uburuhukiro »,

le témoin 72 : Bakunze kwita kuri douane.

L’Interprète : Communément appelé Douane.

le témoin 72 : Ubwo yaratwijeje cyane, hari abadamu n’abana,

L’Interprète : Il nous a alors assurés, il y avait une grande majorité de femmes et d’enfants,

le témoin 72 : Ngo baducungiye umutekano,

L’Interprète : Il nous a rassurés qu’il assurait notre sécurité.

le témoin 72 : Ariko yari afite abasirikare batatu,

L’Interprète : Mais il était en compagnie de trois militaires.

le témoin 72 : Umusirikare umwe bari bicaranye mu modoka imbere,

L’Interprète : Un des militaires qui étaient avec lui, était assis dans la voiture, la cabine de la voiture,

le témoin 72 : Inyuma hari hicaye abasirikare babiri.

L’Interprète : D’autres étaient à l’arrière de la voiture.

le témoin 72 : Ubwo harimo ibikarito, mu modoka harimo ibikarito.

L’Interprète : Dans la voiture, il y avait aussi des cartons,

le témoin 72 : Harambitsemo n’imbunda,

L’Interprète : Et il y avait des fusils,

le témoin 72 : Ariko abasirikare bari bafite izindi zabo.

L’Interprète : Mais les militaires portaient leurs propres armes.

le témoin 72 : Ubwo yarazamutse rero ajya ahongaho kuri douane,

L’Interprète : Il est monté jusqu’à cet endroit dit Douane,

le témoin 72 : Asanga abari bwicwe bahagaze ku mazu yabo agiye gusenwa,

L’Interprète : Et il a trouvé ceux qui devaient être tués et puis se tenir devant leurs maisons qu’on allait détruire.

le témoin 72 : Ubwo burugumestiri RUREMESHA,

L’Interprète : Alors, le bourgmestre RUREMESHA,

le témoin 72 : Nibwo yahereje grenade KAMANAYO

L’Interprète : A donné une grenade à KAMANAYO.

le témoin 72 : Muri ako kanya rero grenade barayitera.

L’Interprète : A ce moment même, la grenade fut lancée.

le témoin 72 : Ubwo abantu bayiteye bagira ubwoba bariruka,

L’Interprète : A ce moment-là, des personnes furent saisies de frayeur et ont couru,

le témoin 72 : Kuko RANGIRA yaraguye, agiye kweguka bamusongesha inkota,

L’Interprète : Car quand la grenade venait de tomber, il a essayé de se redresser mais on l’a achevé avec une épée.

le témoin 72 : Umuhutu witwa MATABARO wari ukomeretse, bene wabo baramuteruye baramujyana.

L’Interprète : Un Hutu du nom de MATABARO, qui venait d’être blessé, a été transporté par les siens.

le témoin 72 : Uwitwa KARABAYINGA yarakomeretse,

L’Interprète : A été également blessé, un certain KARABAYINGA.

le témoin 72 : Na le témoin 102 yarakomeretse.

L’Interprète : Et le témoin 102 aussi, a été blessé.

le témoin 72 : Ubwo bamanutse biruka bamanuka,

L’Interprète : Ils descendirent en courant,

le témoin 72 : Kuri centre de santé.

L’Interprète : Pour revenir au centre de santé.

le témoin 72 : Twirukanka tujya kuri monasteri y’ababikira.

L’Interprète : Alors, nous avons couru en direction du monastère des sœurs.

le témoin 72 : Ubwo tuhageze twasanze bakinze.

L’Interprète : A notre arrivée là-bas, la porte était fermée.

le témoin 72 : Abashoboye baruriye bagwamo imbere,

L’Interprète : Ceux qui ont la possibilité du faire ont monté pour tomber dedans, la porte,

le témoin 72 : Abadashoboye, nkanjye wari uhetse umwana kandi ufite abandi bana sinari nshoboye kurira,

L’Interprète : Et ceux qui ne pouvaient pas grimper, comme moi qui portais un enfant au dos et qui avais d’autres enfants,

le témoin 72 : Naraseseye mu isenyenge.

L’Interprète : Nous avons pénétré à travers les fils barbelés.

le témoin 72 : N’abandi batishoboye baraseseye.

L’Interprète : D’autres aussi, qui n’avaient pas la possibilité de grimper comme moi, se sont faufilés à travers les fils barbelés.

le témoin 72 : Hari mo nabagiye bakomereka.

L’Interprète : Parmi ceux-là, il y en a qui se sont blessés.

Le Président : Madame, n’avez-vous pas été étonnée que ce jour-là, c’était le 18 avril, je crois…

L’Interprète : Umunsi wo kuri 18,

Le Président : …N’avez-vous pas été étonnée que la grille ou la porte du couvent était fermée pendant la journée, alors que ce n’était pas le cas les autres jours ?

L’Interprète : Ntabwo watangajwe nuko amarembo y’ikigo yari afunze kuri uwo munsi kandi indi minsi atarabaga afunzwe ?

le témoin 72 : Ubundi ubwo tukihagera, dusanze bahakinze kandi igihe cyose ari ahantu twatembereraga hicaye hafunguye,

L’Interprète : A notre arrivée, quand nous avons trouvé que c’était fermé alors que c’était un endroit que nous fréquentions souvent et dont…

le témoin 72 : Byaradutangaje biranatubabaza.

L’Interprète : La porte était toujours ouverte, cela nous a étonnés et attristés.

Le Président : Il semble que le soir et la nuit du 18 avril, il a plu ?

L’Interprète : Hari ubwo nimugoroba n’ijoro ryose ku itariki ya 18, imvura yaguye ?

le témoin 72 : Ubwo, imvura yaraguye cyane birenze,

L’Interprète : La pluie est tombée abondamment, de façon inexplicable.

le témoin 72 : Twari duhari turi abantu benshi cyane,

L’Interprète : Nous étions là, une grande foule.

le témoin 72 : Harimo ababyeyi bahetse abana,

L’Interprète : Et il y avait des parents qui portaient les enfants au dos.

le témoin 72 : Harimo abatwite,

L’Interprète : Il y avait des femmes enceintes.

le témoin 72 : Harimo abashaje,

L’Interprète : Il y avait des vieilles personnes.

le témoin 72 : Imvura iratunyagira bikabije.

L’Interprète : La pluie nous a mouillés terriblement.

Le Président : Quelques réfugiés n’ont-ils quand même pas pu prendre place à l’intérieur du couvent, se mettre à l’abri de la pluie ?

L’Interprète : Bamwe mu mpunzi baba barabashije kubona uko bagera imbere mu kigo bakugama imvura ?

le témoin 72 : Ubwo muri iryo joro,

L’Interprète : Au cours de cette nuit-là,

le témoin 72 : Hari umubikira wahagaze hejuru asohotse,

L’Interprète : Une des sœurs s’est étonnée en haut, et du haut, elle a vu les gens.

le témoin 72 : Abona abantu bariho baranyagirwa,

L’Interprète : Elle a vu que les gens étaient sous la pluie.

le témoin 72 : Ahamagara uwitwa MPAMBARA wahakoraga,

L’Interprète : Elle a appelé un certain MPAMBARA, qui travaillait là-bas.

le témoin 72 : Ngo yarebye urufunguzo akugamisha abo babyeyi.

L’Interprète : Elle lui a dit de chercher la clé, et de mettre à l’abri ces mères.

le témoin 72 : Ubwo yarakinguye,

L’Interprète : Elle a alors ouvert.

le témoin 72 : Akinguye akingura akumba kamwe gato,

L’Interprète : Elle a ouvert une petite chambre.

le témoin 72 : Hinjiramo abantu bake,

L’Interprète : Très peu de personnes entrèrent,

le témoin 72 : Abandi bose banyagiriwe aho ngaho.

L’Interprète : D’autres restaient dehors, sous la pluie.

Le Président : Le lendemain, le 19 avril, les gens qui avaient réussi à rentrer dans le couvent n’ont-ils pas été expulsés du couvent ?

L’Interprète : Bukeye bwaho, kuri 19, abantu bari babashije kwinjira, ntabwo baba barirukanwe muri icyo kigo ?

le témoin 72 : Bukeye kuri 19, mameya MUKANGANGO,

L’Interprète : Le lendemain, le 19, la cheftaine de la maison, la mère MUKANGANGO,

le témoin 72 : Yajemo mu mpunzi,

L’Interprète : Est venue parmi les réfugiés,

le témoin 72 : Zari zahahungiye.

L’Interprète : Qui s’étaient réfugiés là-bas.

le témoin 72 : Avuga ko adashaka ko tuguma aho ngaho muri icyo kigo cyabo.

L’Interprète : Elle a dit qu’elle ne voulait pas que nous restions dans leur établissement.

le témoin 72 : Kuko hari abantu niba bari bari mu mahugurwa, ntabyo nsobanukiyemo,

L’Interprète : Quand il y avait des gens qui étaient en séminaire, je ne les connais pas,

le témoin 72 : Ngo, impunzi zarabasakurizaga, ngo zikabateza n’umwanda.

L’Interprète : Que les réfugiés provoquaient des bruits et amenaient la saleté là-bas.

le témoin 72 : Ubwo yadusabye kuhava,

L’Interprète : Elle nous a alors demandé de quitter les lieux.

le témoin 72 : Ntitwasohokamo,

L’Interprète : Mais nous ne sommes pas sortis,

le témoin 72 : Kubera ko abari baraye bateye grenade, bari bari kuri centre de santé.

L’Interprète : Car ceux qui avaient, la veille, lancé la grenade, étaient au centre de santé.

le témoin 72 : Ubwo yahise avuga ko agiye kuzana abasirikare.

L’Interprète : Elle, aussitôt, dit qu’elle allait amener les militaires.

le témoin 72 : Ubwo muri ako kanya yajyanye n’umugabo wari mu mahugurwa aho i Sovu,

L’Interprète : Immédiatement, elle est partie avec un homme qui était en session, là-bas, à Sovu.

le témoin 72 : Ajya i Butare, azana abasirikare.

L’Interprète : Elle s’est rendue à Butare et est revenue avec les militaires, elle a amené les militaires.

Le Président : Le 19 avril, après l’intervention des militaires, les réfugiés, que sont-ils devenus ?

L’Interprète : Kuri 19, abasirikare bamaze kubizamo, byagenze bite ?

Le Président : Où se sont-ils installés ?

L’Interprète : Impunzi zagiye he ?

le témoin 72 : Ubwo abasirikare bamaze kuza,

L’Interprète : Après l’arrivée des militaires,

le témoin 72 : Baraduhamagaye,

L’Interprète : Ils nous ont appelés,

le témoin 72 : Baratubwira ngo duterure ibyo twaba dufite, tubijyane hepfo muri centre de santé.

L’Interprète : Ils nous ont dit de prendre nos effets éventuels et de nous rendre avec des sous, au centre de santé.

le témoin 72 : Ubundi ngo tugaruke kuri kiriziya y’ababikira,

L’Interprète : Après, ils nous ont dit de revenir à l’église des sœurs,

le témoin 72 : Badukorere inama.

L’Interprète : Pour qu’ils tiennent une réunion.

le témoin 72 : Ubwo twaragarutse tujya imbere ya Kiriziya,

L’Interprète : Alors, nous sommes retournés en face de l’église,

Domitille le témoin 72 : Abasirikare tubona baratugose, baradutangatanze,

L’Interprète : Et nous avons vu les militaires nous encercler.

le témoin 72 : Nyuma umusirikare umwe yahamagaye nyirurugo Gertruda,

L’Interprète : Après, un des militaires a appelé la mère supérieure Gertrude,

le témoin 72 : Baramanukana,

L’Interprète : Et ils sont descendus ensemble,

le témoin 72 : Basubira hepfo muri centre de santé,

L’Interprète : Ils sont retournés au centre de santé.

le témoin 72 : Hamaze umwanya barongeye baragarukana,

L’Interprète : Après un instant, ils sont revenus ensemble.

le témoin 72 : Ubwo umusirikare aratubwira ngo tumanuke,

L’Interprète : Le militaire nous dit alors de descendre,

le témoin 72 : Ngo tujye muri centre de santé

L’Interprète : Pour nous rendre au centre de santé.

le témoin 72 : Ngo ubwo turakangisha ko turi impunzi.

L’Interprète : Il nous a dit que nous avancions comme prétexte le fait que nous étions des réfugiés, pour aller nous rendre au centre de santé.

le témoin 72 : Ngo n’iyihe mpunzi yahunganye moto,

L’Interprète : Depuis quand on voit un réfugié s’enfuir avec une moto,

le témoin 72 : Cyangwa matelas ?

L’Interprète : Ou alors un matelas ?

le témoin 72 : Kuko hari abari babifite.

L’Interprète : Car, parmi les réfugiés, il y en avait qui en avaient.

le témoin 72 : Mameya avuga ko impunzi ari izahungiye i Nyacyonga.

L’Interprète : La mère supérieure a dit que les vrais réfugiés sont ceux-là qui s’étaient installés à Nyacyonga.

le témoin 72 : Ariko ubwo twaramanutse tujya muri centre de santé,

L’Interprète : Mais nous nous sommes rendus au centre de santé,

le témoin 72 : Turahaguma.

L’Interprète : Et nous sommes restés là-bas.

Le Président : On est donc le 19 avril ?

L’Interprète : Ubwo ni kuri 19 z’ukwa kane ?

le témoin 72 : Yee, nibyo.

L’Interprète : Oui, c’est vrai.

Le Président : Le 17 avril, les réfugiés ont-ils reçu à manger ?

L’Interprète : Kuri 17, impunzi zahawe ibyo kurya ?

le témoin 72 : Kuva twahagera, nta biryo byabo twabonye.

L’Interprète : Depuis notre arrivée, nous n’avons pas eu de leur nourriture.

Le Président : Pas le 17, pas le 18, pas le 19 ?

L’Interprète : Haba kuri 17, haba kuri 18, haba kuri 19 ntabyo mwabonye ?

le témoin 72 : Ubwo kuri 19 tumaze kugera kuri centre de santé,

L’Interprète : Le 19, à notre arrivée au centre de santé,

le témoin 72 : MUKABUTERA Juliyana,

L’Interprète : MUKABUTERA Julienne,

le témoin 72 : Umwenebikira,

L’Interprète : Euh, une sœur de la congrégation des benebikira,

le témoin 72 : Yazanye impapuro,

L’Interprète : Est venue avec des papiers.

Le Président : Est-ce que ce n’est pas le 20 qu’on est venu avec des papiers ?

L’Interprète : Ntabwo ari kuri 20 yaba yazanye impapuro ?

Domitille le témoin 72 : Numva ari uwo munsi twari tuhavuye batujyanye muri centre de santé.

L’Interprète : A ma connaissance, c’est ce jour-là où nous sommes arrivés.

le témoin 72 : Azana impapuro,

L’Interprète : Elle est venue avec des papiers,

le témoin 72 : Aravuga ngo twirebemo abanyabwenge ngo bazi kwandika neza,

L’Interprète : Et elle nous a dit de choisir parmi nous, les intellectuels qui savaient bien écrire,

le témoin 72 : Ngo bagende bandika shefu w’umuryango n’abo atunze.

L’Interprète : Et qu’ils écrivent les chefs de famille et leur famille.

le témoin 72 : Ubwo i selire imwe yanditswe n’uwitwaga KARDO Kasiyani,

L’Interprète : Pour une cellule, la liste fut dressée par un certain KARDO Cassien.

le témoin 72 : Indi selire yandikwa n’uwitwaga KABERA,

L’Interprète : L’autre cellule fut confiée à un certain KABERA,

le témoin 72 : Indi selire nayo ya Gako yanditswe n’undi mugabo numva ntazi izina,

L’Interprète : Tandis que la personne qui a écrit les familles de notre cellule, la cellule de Gako, est un homme dont j’oublie le nom.

le témoin 72 : Ubwo yavugaga ko ari mameya umutumye, ngo twiyandike baduhe ibyo kurya.

L’Interprète : Elle disait que cette mission lui avait été confiée par la mère supérieure afin de nous fournir de la nourriture.

le témoin 72 : Atubwira ko nitumara kwandika impapuro zizanwa n’uwitwa SEBIHINYORI wari umukozi wabo.

L’Interprète : Elle nous a dit que ces gens qui étaient leurs employés, devaient alors ramener les papiers.

le témoin 72 : SEBIHINYORI Johani.

L’Interprète : Elle nous a dit que SEBIHINYORI Jean, qui était leur employé, devait leur ramener les papiers.

le témoin 72 : Ubwo, impapuro, barangije kwandika, SEBIHINYORI yazijyanye ruguru mu babikira

L’Interprète : Après l’écriture, SEBIHINYORI ramena les papiers au couvent.

le témoin 72 : Ibyo biryo byabo ntabyo twabonye.

L’Interprète : Leur nourriture ne nous est pas parvenue.

Le Président : Quelle est la sœur qui a demandé de mettre les noms sur les papiers ?

L’Interprète : Ninde mubikira wasabye ko ayo mazina yandikwa kuli izo mpapuro ?

le témoin 72 : Kizito niwe wazanye impapuro, avuga ko mameya abimutumye.

L’Interprète : C’est Kizito qui a amené les papiers disant que cette mission, elle l’avait de la mère supérieure.

Le Président : La sœur supérieure n’est pas venue avec les papiers ?

L’Interprète : N’ukuvuga ko mameya we ubwe ataje azanye izo mpapuro ?

le témoin 72 : Zazanwe na Kizito.

L’Interprète : C’est Kizito qui les a amenés.

le témoin 72 : Kuko njyewe uwo munsi twaranavuganye.

L’Interprète : Car ce jour-là, je lui ai parlé personnellement.

Le Président : L’attaque sur le centre de santé va commencer réellement le 22 avril, tôt le matin.

L’Interprète : Mubyo ukuri, igitero nyakuri cyateye centre de santé, cyabaye kuri 22 mu gitondo ?

le témoin 72 : Hum.

L’Interprète : Oui.

Le Président : Savez-vous, connaissez-vous les gens qui dirigeaient les attaquants ?

L’Interprète : Waba uzi abantu bari bayoboye abateraga ?

le témoin 72 : Abari bayoboye igitero ?

L’Interprète : Ceux qui dirigeaient l’attaque ?

Le Président : Contre le centre de santé, oui, c’était qui ?

L’Interprète : Yego, icyo gitero cyo kuri centre de santé, ni bande bari bakiyoboye ?

le témoin 72 : Nabonye arabaturanyi nzi.

L’Interprète : J’ai vu que c’étaient les voisins que je connaissais.

Le Président : Dans les chefs, est-ce qu’il y avait REKERAHO Emmanuel ?

L’Interprète : Mu bayobozi b’icyo gitero harimo REKERAHO Emmanuel ?

le témoin 72 : Yari akirimo.

L’Interprète : Oui, il était dedans.

Le Président : Y avait-il aussi RUSANGANWA Gaspard ?

L’Interprète : Hari hanarimo RUSANGANWA Gaspard ?

le témoin 72 : RUSANGANWA Gaspard yari arimo.

L’Interprète : RUSANGANWA Gaspard faisait partie.

Le Président : le témoin 151, était-il là, aussi dans les chefs ?

L’Interprète : le témoin 151 nawe yari ari muri abo bayobozi ?

le témoin 72 : le témoin 151 Jean-Baptiste mubona, namubonye umunsi wo guhamba.

L’Interprète : Quand j’ai vu le témoin 151 Jean-Baptiste, c’était le jour de l’enterrement.

Le Président : Le témoin n’a pas vu le témoin 151 le jour de l’attaque, le 22 ?

L’Interprète : Kuri 22 ku munsi w’igitero ubwacyo ntiwabonye le témoin 151 ?

le témoin 72 : Kuri uwo munsi w’ibitero, kuri 22, hari abantu benshi, ariko mu maso yanjye sinashoboye kumubona.

L’Interprète : Il y avait beaucoup de gens, une grande foule ce jour-là de l’attaque, mais de mes propres yeux, je n’ai pas pu le voir.

Le Président : Le témoin sait-elle, savez-vous, Madame, si sœur Kizito a des frères ?

L’Interprète : Waba uzi niba mama Kizito afite basaza be ?

le témoin 72 : Arabafite.

L’Interprète : Oui, elle en a.

Le Président : Dans les attaquants que vous avez vus le 22 avril, auriez-vous reconnu un ou plusieurs frères de sœur Kizito ?

L’Interprète : Mu bari mur’icyo gitero wabashije kubona, har’umwe cyangwa se benshi muri basaza ba Kizito wabonye ?

le témoin 72 : Oui, basaza ba Kizito, uwitwa NGOBOKA Tharsisi, ari mu bantu bari bantaritse bampamba, kandi ari muramu wanjye. Bari bampambye njyewe. NGOBOKA Tharcisse.

L’Interprète : NGOBOKA Tharcisse, frère de Kizito, était parmi ceux qui m’avaient déjà enterrée, alors que c’est mon beau-frère.

Le Président : Ca se passait le 22, ça ?

L’Interprète : Ibyo bikaba byarabaye kuri 22 ?

le témoin 72 : Ubundi kuri 23 nibwo bankuye mu kigo. Cya centre de santé.

L’Interprète : En fait, moi j’étais sortie, en fait, moi, c’est le 23 qu’ils m’ont fait sortir du centre de santé.

Le Président : Le 22 avril, avez-vous vu sœur Kizito ou sœur Gertrude ou une autre sœur faire quelque chose de particulier contre les réfugiés du centre de santé ?

L’Interprète : Kuri 22 z’ukwa kane, waba warabonye mama Gertrude, mama Kizito cyangwa umubikira wundi hari ikintu akora kidasanzwe, agikorera impunzi zari kuri centre de santé ?

le témoin 72 : Kuri 22 z’ukwezi kwa kane 94, saa mbiri za mu gitondo, kuri centre de santé habereye ubwicanyi.

L’Interprète : Le 22 avril 1994, à 8h00 du matin, au centre de santé, il y a eu des massacres.

Le Président : Dans le courant de la journée du 22 avril, sœur Kizito, sœur Gertrude ou une autre religieuse sont-elles intervenues au centre de santé ?

L’Interprète : Kuri uwo munsi, ku manwa w’uwo munsi, mama Gertrude, mama Kizito cyangwa undi mubikira baje muri centre de santé ?

le témoin 72 : Kuri iyo tariki hagati, mu masaha numva ntibuka ariko ku manwa,

L’Interprète : A cette date-là, à une heure, je ne me souviens plus, mais en tout cas, à la mi-journée,

le témoin 72 : REKERAHO wari uyoboye ubwicanyi,

L’Interprète : REKERAHO qui dirigeait les massacres,

le témoin 72 : na RUSANGANWA Gaspard,

L’Interprète : Ainsi que RUSANGANWA Gaspard,

le témoin 72 : Na NDAYISABA Yonasi,

L’Interprète : Et NDAYISABA Jonas,

le témoin 72 : RUGOMBYUMUGABO Etienne,

L’Interprète : Etienne RUGOMBYUMUGABO,

le témoin 72 : Wari responsable wa cellule Kigarama,

L’Interprète : Qui était responsable de la cellule de Kigarama,

le témoin 72 : Barazamutse, bajyamo muri monasteri.

L’Interprète : Ils sont montés et se sont rendus au monastère.

Domitille le témoin 72 : Ariko REKERAHO yari asize abwiye Intera-hamwe,

L’Interprète : Mais REKERAHO venait de dire aux Interahamwe,

le témoin 72 : Ngo ricukure igaraji ryari rihari,

L’Interprète : Qu’ils creusent au garage qui était là,

le témoin 72 : Ngo agiye kuzana lisansi araje.

L’Interprète : Qu’il allait amener de l’essence et qu’il allait être de retour incessamment.

le témoin 72 : Ubwo barazamutse,

L’Interprète : Alors, ils sont montés,

le témoin 72 : Muri ako kanya tubona baramanutse.

L’Interprète : Et presque en même temps, nous les avons vus redescendre.

le témoin 72 : Mbona mama Gertruda,

L’Interprète : J’ai vu sœur Gertrude,

le témoin 72 : Na mama Yuliyana,

L’Interprète : Sœur Julienne,

le témoin 72 : Bari kumwe na RUSANGANWA,

L’Interprète : En compagnie de RUSANGANWA,

le témoin 72 : REKERAHO,

L’Interprète : REKERAHO,

le témoin 72 : RUGOMBYUMUGABO,

L’Interprète : RUGOMBYUMUGABO,

le témoin 72 : Na NDAYISABA Yonasi.

L’Interprète : Et NDAYISABA Jonas.

le témoin 72 : Bamanuka baganira,

L’Interprète : Ils descendaient en se parlant,

le témoin 72 : Bafite ubujerikani.

L’Interprète : Des petites jerricanes en main.

le témoin 72 : Ubwo baraje kuri iryo garaje.

L’Interprète : Ils sont alors venus à ce garage.

le témoin 72 : REKERAHO yavugiye muri micro,

L’Interprète : REKERAHO a pris la parole dans un micro,

le témoin 72 : Avuga cyane,

L’Interprète : Il parlait à haute voix,

le témoin 72 : Arangurura, abwira izo Nterahamwe,

L’Interprète : En s’adressant à ces Interahamwe,

le témoin 72 : Ko bashiki le témoin 2 babagobotse.

L’Interprète : Que leurs sœurs leur venaient en aide.

le témoin 72 : Ubwo bahise bakora uruziga kuri iryo garaje,

L’Interprète : Ils ont alors encerclé ce garage.

le témoin 72 : Yaba Gertruda,

L’Interprète : Gertrude,

le témoin 72 : Kizito,

L’Interprète : Kizito,

le témoin 72 : Bahereza lisansi,

L’Interprète : Ont donné de l’essence,

le témoin 72 : REKERAHO,

L’Interprète : A REKERAHO,

le témoin 72 : Uwitwa BYOMBOKA,

L’Interprète : Un certain BYOMBOKA,

le témoin 72 : Ajya kuzana imitwe y’inturusi,

L’Interprète : Est allé ramener des têtes des eucalyptus,

le témoin 72 : Arazana,

L’Interprète : Il les a amenés,

le témoin 72 : Ubwo bahise batwika igaraji, ryarimo abantu benshi cyane.

L’Interprète : Alors, ils ont incendié le garage dans lequel se trouvaient d’innombrables personnes.

le témoin 72 : Niibyo nabonye kuri iyo tariki ku manwa.

L’Interprète : C’est cela que j’ai vu à cette date-là, à la mi-journée.

Le Président : Se souvient-elle de la couleur, vous souvenez-vous, Madame, de la couleur des bidons d’essence, des jerricanes d’essence ?

L’Interprète : Waba wibuka amabara y’ibyo bijerikani bya lisansi ?

le témoin 72 : Njyewe muri ako kanya nkubwo, uretse kuba narabirebaga, umugabo wanjye bari bamaze kumurasa,

L’Interprète : A ce moment-là, à part que je le voyais, on venait de tirer sur mon mari,

le témoin 72 : Kandi baranamutwika.

L’Interprète : Et on venait de l’incendier.

le témoin 72 : Ntabwo nakurikiye amabara y’amajerikani.

L’Interprète : Je n’ai pas suivi les couleurs des jerricanes.

Le Président : Madame, vous avez échappé à la mort le 22 avril ?

L’Interprète : Warokotse urupfu kuri 22 z’ukwa kane ?

le témoin 72 : Njyewe ?

L’Interprète : Yee, wowe.

le témoin 72 : Uwo munsi njyewe kuri 22 nta kintu nabaye. Hapfuye umugabo wanjye, hakomereka umwana wanjye baramurasa, ku kibero,

L’Interprète : Oui. Personnellement, ce jour-là du 24, rien ne m’est arrivé personnellement et mon mari a été tué et mon enfant a été blessé au niveau de la cuisse.

le témoin 72 : Wavuze zingahe, 22 ?

L’Interprète : Yee, 22.

le témoin 72 : Naringize ngo uvuze 24.

L’Interprète : Elle demandait si j’avais bien dit le 22, elle a cru que j’avais dit 24, mais elle parle du 22.

Le Président : Elle parle bien du 22, oui ? Le 23, le lendemain, confirme-t-elle ce qu’elle a déclaré, que sœur Kizito est venue compter les survivants en les faisant mettre par lignes de 30 personnes ?

L’Interprète : Bukeye bwaho, uribuka ko wavuze ko, bukeye bwaho, ku itariki ya 23, sœur Kizito yaje kubara abasigaye, abarokotse, akajya abashyira ku mirongo y’abantu mirongo itatu mirongo itatu ?

le témoin 72 : Ndabivuga ndi hano.

L’Interprète : Je le dis, je suis là devant vous.

Le Président : Lorsqu’il y avait…

le témoin 72 : Kuri 23 ntabwo ariho namubonye.

L’Interprète : Je ne l’ai pas vu le 23.

le témoin 72 : Namubonye kuri 22,

L’Interprète : Je l’ai vu le 22,

le témoin 72 : Mu ma saa kumi,

L’Interprète : Vers 16h00,

le témoin 72 : Ari kumwe na RUSANGANWA,

L’Interprète : Elle était en compagnie de RUSANGANWA,

le témoin 72 : Na Gertruda.

L’Interprète : Et de Gertrude.

le témoin 72 : Ubwo abasirikare baraje,

L’Interprète : Alors, les militaires sont venus,

le témoin 72 : Birukana Interahamwe zari zihari,

L’Interprète : Ils ont chassé les Interahamwe qui étaient là,

le témoin 72 : Ngo nibareke kwica muri ako kanya,

L’Interprète : Et leur ont interdit de tuer à ce moment-là.

le témoin 72 : Abasirikare baratubwira ngo nituze, ngo baduhungishe.

L’Interprète : Les militaires nous ont dit de venir, qu’ils allaient nous faire fuir.

le témoin 72 : Ubwo mama Gertruda na mama Kizito,

L’Interprète : Alors, sœur Gertrude et sœur Kizito,

le témoin 72 : Na RUSANGANWA,

L’Interprète : Ainsi que RUSANGANWA,

le témoin 72 : Bari no mu ntumbi,

L’Interprète : Etaient parmi les cadavres.

le témoin 72 : Mama Kizito,

L’Interprète : Sœur Kizito,

le témoin 72 : Avuga ngo : « Ese, ni uko babishe ? ».

L’Interprète : Disait : « Ah, c’est de cette façon-là qu’on les a tués ».

le témoin 72 : Ngo : « Babishe neza kandi baraciye amafaranga ».

L’Interprète : « Qu’est-ce qu’on les a bien tués alors qu’ils avaient donné de l’argent ».

le témoin 72 : Ubwo RUSANGANWA ya maraporo ya za mpapuro,

L’Interprète : Alors, RUSANGANWA avait ces rapports-là de ces papiers-là,

le témoin 72 : Afite n’igitabo kinini,

L’Interprète : Et il avait un grand livre,

le témoin 72 : Ayo maraporo n’amwe bari badukoreyeho bavuga ko ari ibiryo bazaduha.

L’Interprète : Ces rapports, ce sont ces listes-là qu’on avait dressées disant qu’il s’agissait de la nourriture qu’on allait nous donner.

le témoin 72 : Ahubwo, icyo nongeraho,

L’Interprète : Par contre, ce que j’ajouterai,

le témoin 72 : Nuko ku itariki 23,

L’Interprète : C’est que le 23,

le témoin 72 : Ndongera kurega nyirurugo mameya Gertruda.

L’Interprète : J’accuse encore la mère supérieure, responsable de la maison, sœur Gertrude.

le témoin 72 : Mu gitondo cya kare,

L’Interprète : Très tôt le matin,

le témoin 72 : Yafashe imodoka,

L’Interprète : Elle a pris la voiture,

le témoin 72 : Mazda,

L’Interprète : De marque Mazda,

le témoin 72 : Ari kumwe n’umupolisi,

L’Interprète : En compagnie d’un policier,

le témoin 72 : NSABABERA Saveri,

L’Interprète : Du nom de NSABABERA Xavier,

le témoin 72 : N’abandi babikira,

L’Interprète : Ainsi que d’autres sœurs,

le témoin 72 : Imodoka ayicisha hejuru y’abariho basamba batarahwana,

L’Interprète : Et de cette voiture, elle a roulé sur les corps des personnes qui agonisaient, mais qui n’étaient pas encore complètement mortes,

le témoin 72 : Akandagira n’abandi bari bapfuye.

L’Interprète : Et écrasant d’autres qui étaient déjà mortes.

le témoin 72 : Mwamubaza rero nimba iyo modoka yarayicishije mu kirere.

L’Interprète : Vous pouvez lui demander si cette voiture-là, elle l’a conduite dans le firmament, dans l’air, en tout cas, au-dessus du sol.

le témoin 72 : Ubundi ku itariki 23,

L’Interprète : En plus, le 23,

le témoin 72 : Kizito ndumva ntacyo muregaho.

L’Interprète : Je n’ai rien à accuser Kizito.

le témoin 72 : Umuntu wadutoje umurongo w’abantu 30,

L’Interprète : La personne qui nous alignés par 30 personnes,

le témoin 72 : Ni Interahamwe yitwa Mathias ivuka i Sovu.

L’Interprète : C’était un Interahamwe du nom de Mathias, originaire de Sovu.

le témoin 72 : Niwe wadutozaga umurongo,

L’Interprète : C’est lui qui nous a alignés,

le témoin 72 : Uwo wa 30,

L’Interprète : Par 30 personnes,

le témoin 72 : Akarasa,

L’Interprète : Et qui tirait,

le témoin 72 : Ubundi agahagarara, abandi bagatemagura.

L’Interprète : Et qui s’arrêtait pour que d’autres découpent,

le témoin 72 : Mu ntwaro zinyuranye,

L’Interprète : Utilisant des armes différentes,

le témoin 72 : Bigeza n’ubwo ategeka yuko abantu bazajya bibara bakizana bakicwa.

L’Interprète : Jusqu’à ce qu’il a ordonné que les gens se comptent eux-mêmes, et qu’ils s’amènent pour être tués.

le témoin 72 : Nanjye uwo murongo nawugiyeho.

L’Interprète : Moi-même, je suis allée sur ces lignes.

le témoin 72 : Muri gazo yo munsi ya centre,

L’Interprète : Dans un gazon, au-dessus du centre,

le témoin 72 : Niho abana banjye baguye,

L’Interprète : C’est là où ont été tués mes enfants,

le témoin 72 : Nanjye niho natemaguriwe.

L’Interprète : Et moi-même, c’est là où j’ai été découpée.

le témoin 72 : Kugeza no ku mwana nari mpetse, bamuntsinze mu mugongo.

L’Interprète : Jusqu’à l’enfant que je porte au dos, ils l’ont achevé dans mon dos.

le témoin 72 : Mubishoboye nabereka uko bangize.

L’Interprète : S’il vous est possible, je peux vous montrer comment ils m’ont fait.

Le Président : Expliquez-lui qu’elle ira voir demain, un médecin légiste qui examinera toutes les blessures qu’elle avait.

L’Interprète : Ejo ngo uzajya kureba umuganga uzasuzuma ibyo bikomere.

le témoin 72 : N’ubundi nari nisuzumishije.

L’Interprète : Elle-même s’est fait examiner, elle a des papiers à cet effet.

le témoin 72 : Ariko nibiba ngombwa nzasubiramo.

L’Interprète : Mais si c’est nécessaire, je vais le refaire.

Le Président : Le 23, elle a aussi été enterrée avec les morts ?

L’Interprète : Enterrée ?

Le Président : Le 23, a-t-elle aussi été, en plus de ce qu’elle dit avoir subi comme blessures, enterrée avec les morts ?

L’Interprète : Kuri 23, wahambanwe n’abandi bari bapfuye ?

le témoin 72 : Kuri 23, njye sindasobanukirwa itariki iyo ariyo kuko nari nageze mu bintu binkomereye.

L’Interprète : Le 23, il m’est difficile de me souvenir des dates, tant j’étais dans des moments très difficiles.

le témoin 72 : Yaba nimba atari kuri 23, bashobora kuba barampambye kuri 24.

L’Interprète : Si ce n’est pas le 23, ils m’ont enterrée le 24.

le témoin 72 : Ariko nahambanwe n’abandi mu isambu ryo kuri uwo mugabo KARIDO Casiyani,

L’Interprète : Mais j’ai été enterrée avec d’autres, dans la propriété de Monsieur KARIDO Cassien,

le témoin 72 : Ndumva ari na njyewe naherekanye, aho bari bahambye.

L’Interprète : Et à ma connaissance, j’ai montré là où j’avais été enterrée.

le témoin 72 : Abandi bahambwe mu mashyamba y’abo babikira,

L’Interprète : D’autres ont été enterrés dans les bois de ces sœurs-là,

le témoin 72 : Ibyobo byinshi cyane,

L’Interprète : Dans plusieurs fosses,

le témoin 72 : Abandi mu igaraje,

L’Interprète : D’autres au garage,

le témoin 72 : Ariko hari n’inzu yindi ya home nayo yahiriyemo abantu,

L’Interprète : Mais il y a une autre maison, home, qui a été incendiée dans laquelle plusieurs personnes ont brûlé.

le témoin 72 : Abandi rero bahambwe mu rutoke rwabo, mu gikari.

L’Interprète : D’autres ont été enterrés derrière, dans la bananeraie des sœurs.

le témoin 72 : Ariko hari ikindi nongera kuvuga,

L’Interprète : Mais j’ai quelque chose à dire.

le témoin 72 : Abantu ntabwo bari bari kuri centre de santé gusa,

L’Interprète : Les réfugiés n’étaient pas qu’au centre de santé.

le témoin 72 : Hari n’izindi mpunzi zari zirimo muri monasteri mu mazu y’abo babikira,

L’Interprète : Il y avait d’autres réfugiés, qui se trouvaient au monastère, dans les maisons de ces sœurs.

le témoin 72 : Naho harimo imiryango yacu niy’abandi,

L’Interprète : Là aussi, il y avait nos familles, ainsi que les familles des autres.

le témoin 72 : Nabwo dukeneye kumenya abo bantu aho baherereye.

L’Interprète : Là aussi, nous voudrions avoir des explications sur l’endroit où se trouveraient ces personnes-là.

le témoin 72 : Harimo abakuru n’abato,

L’Interprète : Il y avait les plus âgés, les petits,

le témoin 72 : Niba abana barabajyanye muri orphelinat,

L’Interprète : Ces enfants ont été conduits dans un orphelinat,

le témoin 72 : Bariya babikira babitubwira tukajya kubishakira,

L’Interprète : Que ces sœurs-là nous le disent pour que nous allions les chercher nous-mêmes,

le témoin 72 : Abakuru rero nimba nabo barahunze, bagasobanura aho bahungiye.

L’Interprète : Et si les adultes se sont réfugiés, qu’elles nous disent l’endroit de leur refuge et que nous allions les chercher.

Le Président : Bien. Moi, je n’ai plus rien à demander au témoin. Y a-t-il des questions ?

Me. VERGAUWEN : Je vous remercie, Monsieur le président. Monsieur le président, le témoin ici présent a été entendu également le 8 octobre 1995 par Monsieur DELVAUX accompagné d’un inspecteur rwandais et le 8 octobre 1995, le témoin avait également parlé d’un bidon d’essence et ne parlait pas à l’époque de sœur Gertrude. Peut-elle nous expliquer aujourd’hui pourquoi elle vient nous dire que sœur Gertrude accompagnait sœur Kizito avec deux bidons d’essence ?

Le Président : Madame, lorsque vous avez été entendue en 1995, à la demande du juge belge, vous aviez expliqué que Kizito avait apporté de l’essence et qu’il s’agissait d’un bidon d’essence. Aujourd’hui, vous dites que Kizito et Gertrude ont apporté chacune un bidon d’essence. Pourquoi cette différence ?

L’Interprète : Muri 95, ubwo bakubazaga bisabwe n’umucamanza w’umubiligi, wari waravuze ko Kizito yaje afite ikijerikani kimwe, none ubu ngubu wavuze ko na Gertruda yaje, kandi ko ibijerikani bibaye bibiri, wasobanura ute ko ayo magambo yombi anyuranye ?

le témoin 72 : Njyewe, nta na rimwe, naba narakoresheje dosiye, ngo mvuge ko nabonye Kizito wenyine, nababonye ari babiri.

L’Interprète : Moi, à ma connaissance, je n’ai jamais fait faire aucun dossier dans lequel j’aurais parlé uniquement de Kizito, je les ai vues à deux.

le témoin 72 : Nakoresheje amadosiye menshi, no kuri par-quet iwacu, narayikoresheje, mwazatumira iyo dosiye mukazabirebamo.

L’Interprète : J’ai fait faire plusieurs dossiers, même chez nous, au parquet, et j’y ai fait faire un dossier, vous pouvez le faire venir et voir.

Le Président : Je pense bien que nous l’avons.

Me. VERGAUWEN : Donc, si je comprends bien, le témoin ne se souvient pas avoir été entendu le 8 octobre 1995 par Monsieur DELVAUX et un inspecteur rwandais, je peux éventuellement citer son nom, Anastase, elle ne se rappelle pas de cette audition ?

Le Président : Madame, vous souvenez-vous, oui ou non, avoir été interrogée par l’inspecteur Athanase DUSHIMIRIMANA,

Me. VERGAUWEN : Excusez-moi.

Le Président : Athanase DUSHIMIRIMANA? Athanase DUSHIMIRIMANA?

L’Interprète : Waba wibuka ko wigeze kubazwa na ipeji witwa Athanase DUSHIMIRIMANA ?

le témoin 72 : Uwo ntawe nzi.

L’Interprète : Celui-là, je ne le connais pas.

Le Président : Qui était avec un inspecteur belge.

L’Interprète : Wari kumwe n’undi mwipeji w’umubiligi ?

le témoin 72 : Njye ntawe nzi.

L’Interprète : Moi, je ne le connais pas.

le témoin 72 : Kandi,

L’Interprète : Et puis,

le témoin 72 : Nshobora gukoresha dosiye, nayirangiza bakayimpa nkayisoma,

L’Interprète : Je peux faire faire un dossier, et après l’avoir fait faire, on peut me le donner et lire,

le témoin 72 : Nkareba  ahangiritse,

L’Interprète : Je peux voir là où ça ne va pas,

le témoin 72 : Nkahakosora,

L’Interprète : Je corrige,

le témoin 72 : Ntabwo bigeze bampa rero ngo nsome.

L’Interprète : On ne me l’a jamais donné pour que je le lise.

le témoin 72 : Nshobora kubigorora igihe nicaye hano nkabibwira bano bose ibyabaye.

L’Interprète : Depuis que je suis ici, je peux rectifier et dire à tous ceux qui sont ici, tout ce qui s’est passé.

Me. VERGAUWEN: Je n’ai pas d’autre question.

Le Président : Maître VANDERBECK.

Me. VANDERBECK : Je vous remercie, Monsieur le président. Je voudrais revenir à une partie de la déclaration du témoin, qu’elle a faite aujourd’hui concernant les listes qui auraient été rédigées au centre de santé en vue d’apporter de la nourriture aux personnes qui s’étaient réfugiées. Le témoin a été entendu, Maître VERGAUWEN vient de le signaler, par la commission rogatoire en 1995, mais avant ça, sauf erreur de ma part, elle avait été entendue par les enquêteurs, je ne sais pas si on peut les appeler comme ça, d’African Rights, et elle a été entendue par Monsieur TREMBLAY que nous avons vu ce matin, beaucoup plus tard, en 1999 et elle a donné trois versions relativement différentes qui sont encore différentes de celle qu’elle a donnée aujourd’hui. Pour rappel, devant les enquêteurs rwandais et belges, en 1995, le témoin nous disait que le 20 avril, deux sœurs, soit Kizito et MUKANGANGO, entendons sœur Gertrude : « Nous ont amené du papier pour nous inscrire afin qu’elles puissent nous donner à manger ».

Devant les enquêteurs d’African Rights, elle n’a pas évoqué du tout l’existence de listes et le fait que sœur Kizito ou sœur Gertrude aurait demandé qu’une liste soit établie et devant Monsieur TREMBLAY, elle dira que sœur Kizito et sœur Gertrude ont fait une liste qu’elles ont remise à Emmanuel REKERAHO et ce, le 21 avril. Aujourd’hui, sauf erreur de ma part, elle nous a dit que le 19 avril, sœur Kizito était venue avec du papier, demandant qu’on dresse une liste qui a été remise ensuite par une personne qui se trouvait là, à savoir SEBUNYONI, je m’excuse d’écorcher son nom, SEBUNYONI, au personnel du couvent. Alors, est-ce qu’elle peut nous expliquer comment se fait-il que, par rapport à un point aussi précis, on soit confronté à quatre versions totalement différentes, et laquelle faut-il croire ?

Le Président : Madame, quelle est votre version définitive en ce qui concerne les papiers qu’on a dû remplir pour la nourriture ou pour autre chose, avec les chefs de famille et la composition des familles ?

L’Interprète : Ubwawe, uyu munsi wa none, icyo wemeza burundu ku byerekeye impapuro zazanwe kugirango zandikweho bene urugo nabo umuryango wabo, byaba bigamije ibiryo cyangwa se ibindi bindi, icyo wemeza kuri ibyo burundu, ku buryo buhamye none n’ikihe ?

le témoin 72 : Icyo nemeza kuri uno munsi kuri izo mpapuro zaje,

L’Interprète : Ce que je retiens aujourd’hui à propos de ces papiers qu’on a apportés,

le témoin 72 : Nuko izo nyandiko arizo zagendagamo mu ntumbi, bagendaga bavuga ko babonye intumbi ya kanaka, iya kanaka bayihebye.

L’Interprète : C’est sur ces papiers-là qu’on avait, à travers les cadavres, en disant qu’on a trouvé le cadavre d’un tel et qu’on n’a pas trouvé le cadavre d’un tel.

Le Président : Qui a donné les papiers pour qu’on fasse cette liste ?

L’Interprète : Ninde watanze impapuro kugirango hakorwe iyo liste ?

le témoin 72 : Kizito niwe wazanye impapuro, avuga ko azihawe na mameya, ngo nitwiyandike, shefu w’urugo bajye bashyiraho umuryango we bamenye umubare atunze.

L’Interprète : C’est Kizito qui a amené ces papiers, disant qu’elle les avait de la part de la supérieure pour qu’on écrive le chef de ménage, et en mentionnant bien sa composition de ménage.

le témoin 72 : Kandi nababwiye ko uwo munsi mfite ijambo navuganye nabo.

L’Interprète : Et je vous ai dit qu’il y a un mot que j’ai adressé à elle, ce jour-là.

Le Président : Ce jour-là, c’était bien le 19 avril ?

L’Interprète : Ni ukuvuga ko uwo munsi wari kuri 19 z’ukwa kane ?

le témoin 72 : Njyewe numva haba ari kuri iyo tariki.

L’Interprète : A ma connaissance, je pense que ce serait cette date.

Le Président : Une autre question ?

le témoin 72 : Kuko,

L’Interprète : Car,

le témoin 72 : Mu yandi matariki yagiye akurikiyeho,

L’Interprète : Les autres dates qui ont suivi,

le témoin 72 : Ubwo haribyo naba naravuze ntibabyandike.

L’Interprète : Il y a des choses que j’aurais dites, et qui n’ont pas été écrites,

le témoin 72 : Kandi numva navuze, kandi ntabajijwe.

L’Interprète : Et qu’à ma connaissance, j’ai dites, mais au sujet desquelles des questions ne m’ont pas été posées.

le témoin 72 : Ahubwo ibyo ntavuze, akaba aribyo mbazwa.

L’Interprète : Par contre, l’on me pose des questions sur des choses que je n’ai pas dites.

Le Président : Bien. Une autre question ?

Me. VANDERBECK : Moi, je me pose aussi une question, Monsieur le président. Les deux premières versions se situaient quand même en juillet 1995 et en septembre 1995.

Le Président : Oui, mais je vous pose une question : Voulez-vous poser une question.

Me. VANDERBECK : Oui, bien sûr. Par rapport à ce qui a été dit concernant le 23 avril, Monsieur le président, là aussi, nous sommes confrontés à des versions, dans le temps, différentes et qui sont encore différentes de celle que nous entendons aujourd’hui, sept ans après les faits. Alors, sauf erreur de ma part, je vais de nouveau reprendre les versions différentes, si vous me le permettez, Monsieur le président. Le 23 avril, devant les enquêteurs et le juge d’instruction VANDERMEERSCH, le témoin disait que le 23 avril, sœur Kizito était revenue et avait commencé à les compter et qu’elle les faisait s’aligner par groupes de 30 et qu’elle les amenait vers le gazon et que par après, sœur Kizito était venue en criant que les Tutsi avait déchiré de l’argent, et qu’il fallait les tuer sans pitié. Devant les enquêteurs d’African Rights, le témoin ne parle plus d’alignement, elle nous dit simplement : « J’ai vu sœur Julienne Kizito (en parlant des événements du 23, vers 8h00) fille de ces magnats de Sovu, elle était en train de parler avec ses frères qui étaient dans l’attaque et je voyais qu’elle leur donnait une liste, sans doute c’était la liste des travailleurs Tutsi et réfugiés qui restent dans le monastère ».

Et puis, devant Monsieur TREMBLAY, qui nous l’a dit, enregistre bien les réponses, les demandes qu’on confirme et qu’on signe page à page, devant Monsieur TREMBLAY, elle  dit que, c’est à la page 12 de sa déclaration, en parlant des événements du 22, là, elle dit à la fin de ce qu’elle a évoqué : « Je n’ai plus revu sœur Gertrude et sœur Kizito après ces massacres peu de temps après l’incendie du garage qui continuait », et quand elle évoque les événements du 23, elle parle d’un certain Jonas qui procède à un comptage, elle ne dit plus un mot, ni sur Kizito, ni sur Gertrude. Alors, aujourd’hui, nous avons affaire à une quatrième version où elle nous dit que ce n’est pas le 23, puisque vous lui avez posé la question, sauf erreur, Monsieur le président, à savoir si c’était le 23 ou le 24, que ce comptage avait eu lieu et elle le situe le 22, vers 16h00 avec, cette fois-ci, Gaspard et Gertrude. Elle parle des militaires qui sont venus chasser et elle accuse sœur Gertrude d’avoir, très tôt le matin, pris le véhicule Mazda avec le policier Xavier et les autres sœurs et d’avoir roulé délibérément sur les corps. Ce sont évidemment quatre versions de nouveau totalement différentes. Je souhaiterais savoir, avec une explication peut-être un peu plus fournie, ce qui explique les différences entre ces versions, autre que le fait que les questions ne lui ont pas été posées. Je pose la question aujourd’hui : qu’est-ce qui explique, qu’à quatre moments différents par rapport à des faits assez précis, elle nous donne des versions totalement différentes ?

Le Président : Madame, savez-vous expliquer pourquoi, à propos des mêmes événements, vous donnez, selon les moments où vous êtes interrogée, des versions qui sont différentes ?

L’Interprète : Ngo wasobanura uti uburyo ibintu bimwe ubivuga ku buryo bunyuranye bitewe n’igihe ubarijwe ?

L’Interprète : Différentes ?

le témoin 72 : Njyewe nongeye kubabwira ko, ku itariki 23,

L’Interprète : Moi, je vous répète que le 23,

le témoin 72 : Kizito ntamubonye.

L’Interprète : Je n’ai pas vu Kizito.

le témoin 72 : Haje Interahamwe yitwa Mathias ivuka i Sovu,

L’Interprète : Un Interahamwe du nom de Mathias, originaire de Sovu, c’est celui-là qui est venu,

le témoin 72 : Yari kumwe n’izindi Nterahamwe,

L’Interprète : En compagnie des autres Interahamwe,

le témoin 72 : Niwe watujyanye ku mirongo y’abantu 30.

L’Interprète : C’est lui qui nous a alignés par 30 personnes.

le témoin 72 : Kizito, uwo munsi ntawe nabonye,

L’Interprète : Ce jour-là, Kizito, je ne l’ai pas vue.

le témoin 72 : Nababwiye ko mu gitondo cya kare,

L’Interprète : Je vous ai dit que, très tôt le matin,

le témoin 72 : Ariho nabonye imodoka,

L’Interprète : C’est à ce moment-là que j’ai vu le véhicule,

le témoin 72 : Itwawe na mameya,

L’Interprète : Au volant duquel était la mère supérieure,

le témoin 72 : Ari kumwe n’umupolisi, NSABABERA,

L’Interprète : En compagnie d’un policier, du nom de NSABABERA,

le témoin 72 : N’abandi babikira,

L’Interprète : Ainsi que d’autres religieuses,

le témoin 72 : Agenda anyura hejuru y’intumbi n’abandi batari baraye bapfuye.

L’Interprète : Roulant sur les corps d’autres personnes qui n’avaient pas été mortes la veille.

le témoin 72 : Kuri iyo tariki 23 niba byanditse,

L’Interprète : A cette date-là, du 23, si c’est écrit,

le témoin 72 : Ntabwo nigeze mubona ngo adushyire ku murongo. Ibyo nabonye nibyo mvuga. Kizito rwose ntawe nabonye kuri iyo tariki 23.

L’Interprète : Je n’ai pas vu Kizito, absolument pas ce 23, ce que j’ai vu c’est ce que je viens de vous dire.

Le Président : Oui, Maître VANDERBECK.

le témoin 72 : Kandi mu bantu 30, nagiye mu gihembwe cya gatatu.

L’Interprète : Et puis, dans ces groupes-là de 30 personnes, j’ai fait partie du troisième groupe.

le témoin 72 : Ubwo baje kuntema, ibindi byakurikiyeho ntabyo nzi.

L’Interprète : Ils sont venus me couper, ce qui a suivi, je ne le sais pas.

Le Président : Oui, Maître VANDERBECK.

Me. VANDERBECK : Monsieur le président, je comprends la difficulté de poser une question après les événements traumatiques dont a fait état le témoin. Je m’excuse de devoir poser cette question, mais, dois-je comprendre que le témoin, qui me dit qu’elle n’a pas vu sœur Kizito le 23, ne l’a donc pas vue dans le véhicule Mazda qui roulait sur les corps.

Le Président : Mais elle n’a pas parlé de sœur Kizito.

Me. VANDERBECK : Non, mais je voudrais qu’elle confirme qu’elle n’était pas dans le véhicule.

Le Président : Elle n’a pas parlé de cela.

Me. VANDERBECK : Elle a dit que dans le véhicule, il y avait d’autres sœurs, enfin, si j’ai bien compris.

Le Président : D’autres sœurs, mais elle n’a pas parlé de sœur Kizito.

Me. VANDERBECK : Est-ce qu’elle a vu sœur Kizito dans les autres sœurs qui étaient dans le véhicule ? C’est tout ce que je veux demander.

Le Président : Ca présente vraiment un intérêt ?

Me. VANDERBECK : Je pense que oui, Monsieur le président, puisqu’elle dit qu’elle n’a…

Le Président : A condition que ce soit alors la sœur Kizito qui donne les instructions à la conductrice pour rouler sur les corps, peut-être, mais sinon ?

Me. VANDERBECK : Mais cela a une importance, puisque nous savons qu’il y a eu, en effet, un départ pour Ngoma, le matin du 23, et que sœur Kizito était dans le premier convoi, donc, cela m’intéresserait de savoir si l’épisode où on a roulé sur les corps, ça se passait avec le premier, le deuxième convoi, cela a une importance, oui, je pense.

Le Président : Dans la voiture qui est partie très tôt le 24, dans la Mazda qui est partie très tôt, le 24, conduite par sœur Gertrude, euh, très tôt le 23, pardon, conduite par sœur Gertrude, y avait-il, parmi les passagers, sœur Kizito ?

L’Interprète : Mu bantu bari mu modoka ya Mazda itwawe na mama Gertrude, yagiye mu gitondo kare kuri 23, mu bantu bari bayirimo wabonyemo Kizito ?

le témoin 72 : Ariko, njyewe nari naraye mu ntumbi, intumbi zaraye zitunukira, nizo bari batwitse,

L’Interprète : Moi, j’avais passé la nuit parmi les cadavres qui puaient et d’autres qu’on avait brûlés,

le témoin 72 : Nabonye imodoka irimo umupolisi,

L’Interprète : J’ai vu un véhicule dans lequel il y avait un policier,

le témoin 72 : Itwawe na mameya,

L’Interprète : Au volant duquel était la supérieure,

le témoin 72 : Harimo ababikira,

L’Interprète : Et les sœurs dedans,

le témoin 72 : Kandi yari ifunze.

L’Interprète : Et il était fermé.

le témoin 72 : Mwumve ibyo bibazo twari twarayemo n’ibyo twari twaraye tubonye,

L’Interprète : Comprenez la situation terrible dans laquelle nous nous trouvions, ce que nous avions vu la veille,

le témoin 72 : Kandi yarazindutse cyane,

L’Interprète : Et puis, elle partait très tôt le matin.

le témoin 72 : Abari baraye ari bazima mu mpunzi,

L’Interprète : Ceux qui étaient encore survivants, parmi les réfugiés,

le témoin 72 : Yagiye bamuhi induru :

L’Interprète : La huaient quand elle partait, hurlaient sur elle :

le témoin 72 : « Ngo yaraye arikoze none aramenye aragiye ».

L’Interprète : « Tu as fait de terribles choses hier, et maintenant, très tôt le matin, tu t’en vas ».

Le Président : Donc, elle ne sait pas qui était à l’intérieur, sauf qu’il y avait un policier et sœur Gertrude.

L’Interprète : Ni ukuvuga ko utazi abarimo imbere usibye Gertrude n’umupolisi na…

le témoin 72 : Umwe kuko yari ayitwaye, n’umupolisi, ubundi harimo abandi babikira ariko ntabwo nashoboye kumenya abari bo.

L’Interprète : C’est elle qui conduisait, puis il y avait d’autres religieuses que je n’ai pas pu identifier.

le témoin 72 : Nari nifitiye ibibazo.

L’Interprète : J’avais des problèmes à moi.

Le Président : D’autres questions ? Maître WAHIS.

Me. WAHIS : Je vous remercie, Monsieur le président. Je suis bien conscient que tout ceci sont des souvenirs extrêmement pénibles, mais malheureusement la vérité sera, dans cette affaire, au prix de souvenirs malheureusement pénibles. Je voudrais revenir aux événements du 22 avril. Le témoin a été interrogé à quatre reprises concernant ces mêmes faits. Nous avons affaire à quatre versions complètement différentes. La première version, sa déclaration auprès d’African Rights, il n’est pas question d’essence, mais bien de sœur Kizito qui remet une liste et elle croit que c’est une liste des réfugiés travailleurs Tutsi qui étaient restés au monastère. Deuxième version, commission rogatoire du 8 octobre 1995 : il s’agit de sœur Kizito qui donne un bidon d’essence à REKERAHO et il n’est pas question de sœur Gertrude. Troisième version : il est question de sœur Gertrude et sœur Kizito et là, elle va être extrêmement précise, c’est en 1998, le 3 décembre : « Sœur Kizito tient un petit bidon noir à la main, sœur Gertrude un bidon rouge, elles sont accompagnées de deux personnes qu’elle identifie comme GARAMBE et NYUNDO qui, eux, portaient en plus un gros bidon jaune ». Quatrième version : aujourd’hui à cette audience, il y a apparemment deux bidons dont elle ne peut plus déterminer la couleur. Ça fait quatre versions différentes, comment explique-t-elle ces versions parfaitement inconciliables ?

Le Président : Vous savez quoi ? Je n’ai pas envie de poser la question. Mais que vous ayez fait le commentaire que vous venez de faire, je le conçois.

Me. WAHIS : Bien. En ce qui concerne, Monsieur le président, la mort de Gérard KABILIGI, est-ce que le témoin peut confirmer ce qu’elle a déclaré dans sa version à African Rights et nous dire à quelle date ces faits se sont passés, puisqu’elle dit que sœur Kizito a donné l’essence qu’on a versée sur Gérard KABILIGI, et puis on allumé une allumette sur lui. KABILIGI a couru tout en brûlant et finalement, il est tombé par terre et est mort là-bas. Alors, est-ce qu’elle le confirme, est-ce qu’elle peut le situer dans le temps ?

Le Président : Alors, le témoin confirme-t-il et peut-il situer dans le temps, le moment de la mort de Gérard KABILIGI ?

L’Interprète : Uremeza ibyo wavuze ku rupfu rwa Gérard KABILIGI ukaba wanavuga igihe byabereye, amasaha byabereyeho ?

le témoin 72 : Njyewe kuri KABILIGI Gerardi, ndumva, namye mvuga ko namubonye yambukiranya umuhanda ashya.

L’Interprète : Gérard KABILIGI, j’ai dit, depuis toujours, que je l’ai vu traverser la route en brûlant.

le témoin 72 : Kandi yari aje ashoreranye na bariya babikira,

L’Interprète : Et puis, il venait, alors que derrière lui, étaient ces sœurs-là,

le témoin 72 : Na REKERAHO,

L’Interprète : REKERAHO,

le témoin 72 : Ariko sinamenye uwari umusutseho lisansi, akamutwika,

L’Interprète : Mais je n’ai pas pu savoir si s’est ui qui avait versé de l’essence sur lui et avait mis feu sur lui,

le témoin 72 : Uretse ko yari umukozi w’ababikira.

L’Interprète : A part qu’il était employé des sœurs.

le témoin 72 : Yambutse ajya mu muhanda arimo ashya.

L’Interprète : Il a traversé, se rendant de l’autre côté de la route, en brûlant.

le témoin 72 : Aho namye mbisobanura neza ako ntazi ukuntu byagenze, uretse ko namubonye ashya.

L’Interprète : Depuis tout le temps, j’ai expliqué que je ne le sais pas bien, à part que je l’ai vu brûler, brûlant.

Le Président : Est-ce qu’elle sait dire quel jour c’était…

L’Interprète : Waba wibuka igihe, umunsi byabereyeho ?

le témoin 72 : KABILIGI se ariho ashya ?

L’Interprète : …alors que KABILIGI brûlait ?

Le Président : Oui. C’est le 22, le jour de l’attaque, le jour de l’incendie du garage ?

L’Interprète : Ni kuri 22 umunsi igitero kiza, n’umunsi se igaraji ritwikwa ?

le témoin 72 : Ubundi igitero cyateye kuri 22, n’igaraji ryahiye kuri 22.

L’Interprète : C’est-à-dire, le garage, l’attaque a eu lieu le 22, et le garage a été incendié le 22.

le témoin 72 : N’undi nicyo gihe yahiriye.

L’Interprète : Et puis, lui aussi, c’est ce jour-là qu’il a brûlé.

le témoin 72 : Yarashyaga yiruka, abantu bavuza induru.

L’Interprète : Il a brûlé, alors qu’il courait et que les gens criaient.

Le Président : Oui, Maître WAHIS.

Me. WAHIS : Petite dernière question, Monsieur le président. Est-ce qu’elle pourrait nous dire, le 22 avril, comment était équipé et habillé REKERAHO ?

Le Président : Je voudrais d’abord signaler à la salle, au public, qu’un procès, c’est comme cela que ça se passe, hein. Un procès, c’est cruel. Madame, vous souvenez-vous comment Monsieur REKERAHO était habillé le jour de l’attaque du centre de santé, le 22 avril 1994 ?

L’Interprète : Uribuka uburyo REKERAHO yari yambaye ku munsi w’igitero ?

Le Président : Vous souvenez-vous, éventuellement aussi, en plus de son habillement, quel était son équipement militaire ?

L’Interprète : Noneho kandi ukaba wanavuga, usibye iyo myambarire, ibindi bintu yarafite bya gisirikare ?

le témoin 72 : Nshobora kubisubiramo.

L’Interprète : Je peux le répéter.

Le Président : Oui.

L’Interprète : Ngo yego.

le témoin 72 : REKERAHO yari yambaye ibendera rya MDR,

L’Interprète : REKERAHO portait le drapeau du MDR.

le témoin 72 : Afite micro,

L’Interprète : Il avait un microphone,

le témoin 72 : Yambaye amagrenade hose,

L’Interprète : Et il portait des grenades partout,

le témoin 72 : Ndumva ari uko namubonye.

L’Interprète : C’est comme cela que je l’ai vu.

Le Président : D’autres questions ? Maître JASPIS.

Me. JASPIS : Je voudrais rendre hommage évidemment au courage du témoin, pour qui cette déposition est particulièrement pénible, mais est aussi l’aboutissement d’un long chemin, et je voudrais revenir chronologiquement pour poser quelques questions de précision au 17, si vous me le permettez. Ce ne sera pas très long, ne vous inquiétez pas. Le témoin nous a dit qu’une religieuse, lorsque les réfugiés sont entrés dans la cour ou le jardin qui se trouve devant le monastère, les a vus et a fait en sorte qu’ils puissent s’abriter dans une petite pièce. Est-ce qu’elle connaît cette religieuse ? Elle peut nous dire de qui il s’agit ?

Le Président : Se souvient-elle du nom de la religieuse qui a permis d’ouvrir une petite pièce où les réfugiés ont pu prendre place lors de la pluie ?

L’Interprète : Waba wibuka izina ry’umubikira wafunguye akumba gato, kugirango impunzi zibashe kugama ?

le témoin 72 : Umubikira ntabwo ariwe wafunguye.

L’Interprète : Ce n’est pas la religieuse qui a ouvert.

Le Président : Oui, la religieuse qui a demandé à quelqu’un d’ouvrir.

le témoin 72 : Ni sœur mama Schola, wahamagaye, umukozi witwa MPAMBARA,

L’Interprète : C’est sœur Scholastique qui a appelé l’ouvrier du nom de MPAMBARA.

le témoin 72 : Amubwira ngo yashatse urugunguzo, agakingura, ababyeyi bakugamisha abana.

L’Interprète : Elle lui disait alors : « Pourquoi tu ne cherches pas la clé pour ouvrir, que les mères puissent abriter les enfants ? ».

le témoin 72 : Kandi narindi hasi, nawe yari ari hejuru.

L’Interprète : J’étais en bas, elle était au-dessus.

Le Président : Oui.

Me. JASPIS : Voilà. Alors, le 22, est-ce qu’elle aurait entendu REKERAHO, le 22, lorsqu’il est arrivé ou lorsque les bidons d’essence sont arrivés devant le garage, est-ce qu’elle aurait entendu REKERAHO prononcer une phrase particulière qu’elle aurait retenue ? Est-ce qu’il a dit quelque chose de particulier qui l’aurait frappée, elle, s’il vous plaît ?

Le Président : Le 22, lorsque REKERAHO reçoit ou arrive avec des bidons d’essence, est-ce que REKERAHO dit quelque chose de particulier ?

L’Interprète : Kuri 22 ubwo REKERAHO yazanaga jerikani za lisansi, hari ikintu yaba yaravuze kidasanzwe ?

le témoin 72 : REKERAHO ikintu numvise atangariza abari barahongaho naho bari bazanwe no kwica,

L’Interprète : Ce que j’ai entendu REKERAHO dire à des personnes qui étaient là et dont l’objectif de leur présence là-bas, était de tuer,

le témoin 72 : N’uko yababwiye yuko bashiki le témoin 2 babagobotse,

L’Interprète : C’est qu’il leur a dit que leurs sœurs venaient de leur venir en aide,

le témoin 72 : Kubera iyo lisanse bari bazanye.

L’Interprète : A cause de l’essence qu’il venait d’apporter.

le témoin 72 : Ahubwo hari icyo naba nibukaho kuri 23,

L’Interprète : Mais je me souviens d’une chose à propos de lui, le 23.

le témoin 72 : Ubwo bari batangiye guhamba abantu,

L’Interprète : Alors qu’on venait de commencer l’enterrement des gens,

le témoin 72 : Yakanguriye abari bahari,

L’Interprète : Il a incité ceux qui étaient là,

le témoin 72 : Ngo nibarebemo harimo abagihumeka babasonge,

L’Interprète : A chercher ceux qui respiraient encore pour les achever,

le témoin 72 : Ngo Croix rouge itabajyana kwa muganga,

L’Interprète : Pour que la Croix-Rouge ne les amène pas à l’hôpital,

le témoin 72 : Ngo ariko niyo babajyana,

L’Interprète : Mais même si elle les amenait là-bas,

le témoin 72 : Babahasanga bakabica.

L’Interprète : Qu’il y avait moyen de les trouver là-bas et de les tuer.

le témoin 72 : Abatangariza ngo nibagire ningoga,

L’Interprète : Quand il leur disait de faire vite,

le témoin 72 : Ngo saa munani n’igice ziregereje,

L’Interprète : Et que 14h30 approchait,

le témoin 72 : Ngo bajye kwica abahungiye kuri komine Huye.

L’Interprète : Et a fait qu’ils aillent tuer ceux qui s’étaient réfugiés à la commune de Huye.

le témoin 72 : Ibyo nabyumvaga ndyamye mu ntumbi.

L’Interprète : J’écoutais cela alors que j’étais couchée parmi les cadavres.

le témoin 72 : Nibwo basubiyemo mu bantu bari bagisamba,

L’Interprète : C’est à ce moment-là qu’ils ont fait le tour de ceux qui agonisaient encore.

le témoin 72 : Bankubita impiri yo mu mutwe,

L’Interprète : Ils m’ont asséné un coup de massue, de gourdin dans la tête,

le témoin 72 : N’abandi bari bagiye barimo.

L’Interprète : Ainsi qu’à d’autres qui étaient là.

le témoin 72 : Nibwo batangiye guhamba.

L’Interprète : Et c’est à ce moment-là qu’on a commencé à enterrer.

Me. JASPIS : La toute dernière question, Monsieur le président.

Le Président : Ce n’est pas la dernière, parce que Maître BEAUTHIER en a encore à poser.

Me. JASPIS : Le témoin connaît-elle d’autres religieuses qui seraient originaires de la colline de Sovu, donc parmi celles qui se trouvaient au monastère, en dehors de sœur Kizito ?

Le Président : Dans les religieuses de Sovu, y avait-il d’autres religieuses qui étaient originaires de la colline de Sovu ?

L’Interprète : Mu babikira b’i Sovu, hari abandi babikira bari bahari bakomoka i Sovu ?

le témoin 72 : Hari uwahavukaga. Ariko…

L’Interprète : Il y avait une, originaire de là-bas, mais il y a une religieuse,

le témoin 72 : Hari n’umufurere wari urimo,

L’Interprète : Il y avait un frère aussi,

le témoin 72 : Hari n’umukobwa wari warigeze kuba umubikira nyuma avamo yigira kwiga,

L’Interprète : Et il y avait une autre fille qui, jadis, avait été religieuse, qui avait quitté les ordres pour les études.

le témoin 72 : Umubikira wahavukaga yitwaga MUKAGASANA Fortunata,

L’Interprète : La sœur originaire de là-bas s’appelait Fortunée MUKAGASANA,

le témoin 72 : Umufurere NYANDERA Innocent,

L’Interprète : Le frère s’appelait NYANDERA Innocent,

le témoin 72 : Uwo wari warahoze mu babikira le témoin 2 yitwaga MUKAMURERA Philomena,

L’Interprète : Tandis que MUKAMURERA Philomène, celle-là qui avait été religieuse dans leur ordre,

le témoin 72 : N’abongabo gusa.

L’Interprète : Ce sont ceux-là que je connais.

Le Président : Oui, Maître BEAUTHIER.

Me. BEAUTHIER : Monsieur le président, Madame a répondu lors d’une question de Maître JASPIS, à la question que je voulais poser. Maître JASPIS a posé la question et Madame y a répondu.

Le Président : Mais, Maître RAMBOER se lève à l’instant.

Me. RAMBOER : Monsieur le président, il y a une chose que je n’ai pas très bien comprise, c’est donc la phrase qui aurait été prononcée et qui  a été prononcée par sœur Gertrude au moment qu’elle est arrivée parmi les réfugiés et qui a dit : « Les meilleurs réfugiés sont ceux de… ? » et alors qu’elle commente cette phrase de sœur Gertrude : « Les meilleurs réfugiés sont ceux de… ? ». Elle a dit un endroit, vous avez traduit ça mais je n’ai pas compris. Et quelle est la signification de cette phrase ?

Le Président : La signification ? Ecoutez, Maître RAMBOER, ne cherchons pas de signification, voulez-vous bien ?

Me. RAMBOER : S’il y a une signification, bien sûr.

Le Président : D’où étaient les meilleurs réfugiés selon sœur Gertrude ? Ca c’est la question, Monsieur l’avocat n’a pas bien compris d’où étaient les meilleurs réfugiés selon l’expression, la phrase de sœur Gertrude ?

L’Interprète : Oui, je peux le dire. Elle a dit que ce sont les Nyacyonga, ce n’est pas une phrase, c’est plutôt un endroit, je peux préciser, c’est près de Kigali. C’est un lieu, ce n’était pas une définition, c’est un lieu qu’elle a cité, que les réfugiés sont des réfugiés qui se trouvaient à Nyacyonga.

Me. RAMBOER : Et qu’est-ce que ça veut dire si sœur Gertrude dit : « Les meilleurs réfugiés ou les militaires… »

Le Président : Sœur Gertrude, qu’est-ce que ça veut dire si vous avez dit ça ?

Consolata MUKANGANGO : Merci, Monsieur le président, je n’ai jamais dit cela. Nyacyonga, c’était un lieu comme on vient du dire vers Kigali que je ne connais pas moi-même. Merci.

Me. RAMBOER : Nous ne sommes pas avancés pour le moment.

Le Président : Mais nous sommes désolés que vos questions ne nous fassent pas avancer, Maître RAMBOER.

Me. RAMBOER : Deuxième question. J’ai entendu la déclaration du témoin qui parle d’un épisode qui me paraît étrange et qu’on pourrait peut-être un peu mieux détailler. On dit qu’à un certain moment, il y a des militaires qui sont arrivés le premier jour des massacres, le grand jour des massacres et qu’alors, les militaires ont demandé d’arrêter et qu’alors, qu’est-ce qui s’est passé alors, à ce moment-là ? Donc, l’épisode des militaires qui interviennent en fin de journée.

Le Président : Oui. Le témoin a froid. On peut comprendre pour elle qu’il fasse froid avec le courant d’air. Je ne sais pas si on peut fermer une porte éventuellement ou une fenêtre, pour éviter ce courant d’air ? Madame… Ah oui, celle-là on ne peut pas la fermer. Celle-là ne peut pas être fermée ! Désolé !

Madame, vous avez, dans votre déposition d’aujourd’hui parlé de l’intervention de militaires… Merci, Monsieur… parlé de l’intervention de militaires, le 22 avril. Si nous avons bien compris, vous avez expliqué que ces militaires ont demandé à ce que les tueries arrêtent. Pouvez-vous confirmer que c’est bien cela que vous avez déclaré ?

L’Interprète : Wavuze ko kuri 22 hari abasirikare baje. Bamaze kuza, basaba ko ubwicanyi buhagarara. Ibyo wabyemeza ?

le témoin 72 : Mu ma saa kumi baratumanukanye,

L’Interprète : Vers 16h00, ils nous ont fait descendre,

le témoin 72 : Batujyana ahantu imbere yo kwa prokireri MATABARO,

L’Interprète : Ils nous ont amenés à un lieu, devant chez le procureur MATABARO,

le témoin 72 : Imbere y’uruganda rwa tanori ruhari.

L’Interprète : En face d’une fabrique de tainerie,

Le Président : Tannerie ?

L’Interprète : Tannerie, tainerie… sur le tain ? Enfin, une usine de…

le témoin 72 : Ni uruganda bakoreragamo ibya zahabu

L’Interprète : Ah, c’est tainerie alors ! C’est une usine où on fabriquait les choses relatives à l’or.

le témoin 72 : Bagiraga imiringa, amasahani…

Le Président : Oui

L’Interprète : On faisait les bracelets en cuivre, c’est en face de cette usine-là.

le témoin 72 : Ubwo baratujyanye badushyira mu gisiza gihari,

L’Interprète : Alors, on nous a placés dans un endroit étendu qui est là,

le témoin 72 : Ariko nabo batujyanye badutangatanze impande n’impande imbere n’inyuma.

L’Interprète : Mais en nous amenant là-bas, eux aussi nous avaient encerclés partout, devant comme derrière.

le témoin 72 : Ubwo tuhageze twasanze ba bicanyi noneho bamanutse bicaye kuri uwo muhanda,

L’Interprète : Arrivés là-bas, nous avons trouvé ces tueurs-là qui étaient à cette route-là.

le témoin 72 : Na REKERAHO niho yari ari.

L’Interprète : REKERAHO aussi était là-bas.

le témoin 72 : Ubwo REKERAHO yari yuriye imodoka,

L’Interprète : Alors, REKERAHO avait grimpé sur un véhicule.

le témoin 72 : Abo bicanyi bandi barimo batyaza imipanga.

L’Interprète : D’autres tueurs, là, étaient en train d’aiguiser leurs machettes.

le témoin 72 : Bashaka kuza kudutema,

L’Interprète : Ils ont voulu venir nous couper.

le témoin 72 : Abasirikare bakabasubiza inyuma,

L’Interprète : Alors, les militaires les repoussaient derrière.

le témoin 72 : Bareba ku masaha yabo,

L’Interprète : Ils ont consulté leur montre.

le témoin 72 : Bavuga ko bwije.

L’Interprète : Ils ont dit qu’il faisait soir.

le témoin 72 : REKERAHO ararangurura yongera kuvuga,

L’Interprète : Alors, REKERAHO a pris la parole encore une fois, à haute voix.

le témoin 72 : Ngo nibabwire abo baturage,

L’Interprète : Il a dit : « Qu’on dise à ces paysans-là… »

le témoin 72 : « N’abaturage kazi le témoin 2, ngo nibatahe bajye mu ngo zabo »,

L’Interprète : « …Et à leurs paysannes, qu’ils rentrent dans leurs maisons »,

le témoin 72 : « Ngo ejo prefe azaza kudukoresha inama »,

L’Interprète : « Que le lendemain, le préfet allait venir leur tenir une réunion »,

le témoin 72 : « Ngo abaze icyo abo bantu barimo badu-hora ».

L’Interprète : « Qu’il allait demander pourquoi ces gens-là nous pour-chassaient ».

le témoin 72 : Ariko ubwo yabivugaga bararangije kudu-senyera.

L’Interprète : Mais quand ils le disaient, ils avaient déjà détruit nos maisons.

le témoin 72 : Abasirikare barongeye baratuzamura.

L’Interprète : Les militaires nous ont encore une fois fait monter.

le témoin 72 : Batugejeje imbere y’igaraji baraduhagarika,

L’Interprète : Ils nous ont fait arrêter, une fois arrivés devant le garage,

le témoin 72 : Bavuga ko bagiye kureba mu babikira, yuko twabona aho tujya.

L’Interprète : Et ils ont dit qu’ils allaient voir du côté du couvent s’il y avait une place où nous mettre.

le témoin 72 : Ubwo bagiye muri monasteri.

L’Interprète : Ce sera un lieu monastère.

le témoin 72 : Ariko baragaruka,

L’Interprète : Mais ils sont revenus,

le témoin 72 : Barekura urugi rwa centre de santé,

L’Interprète : Et ils ont ouvert le portail du centre de santé,

le témoin 72 : Batwohereza mu ntumbi zacu.

L’Interprète : Et ils nous ont envoyés dans les cadavres des nôtres.

le témoin 72 : N’imirobwa y’abapfuye [Inaudible].

L’Interprète : Alors, les corps de ceux qui étaient morts sentaient mauvais.

le témoin 72 : Bavuga ko ababikira babahakaniye ko nta mwanya ugihari.

L’Interprète : Ils ont dit que les sœurs venaient de leur dire : « Non », qu’il n’y avait pas de place où nous mettre. (Le témoin pleure)

le témoin 72 : Mumbabarire.

L’Interprète : Excusez-moi.

Le Président : Y a-t-il d’autres questions ? Les parties sont d’accord pour que le témoin se retire ? Monsieur l’interprète, voulez-vous bien demander au témoin s’il confirme ses déclarations ?

L’Interprète : Waba wemeza

le témoin 72 : Uko nabivuze niko, ngomba kubisubiramo n’ahandi hose ariko kandi n’ahandi amadosiye arahari nabibabwiye, muzakurikirane na dossier ya parquet ya Butare, muzasanga ibyo mbabwira aribyo.

Le Président : S’il vous plaît, un instant, il y a déjà des mouchoirs.

L’Interprète : Tel que je l’ai dit, c’est comme cela que je veux toujours le répéter, puis, je l’ai déjà dit ailleurs, informez-vous auprès du parquet de Butare, on va vous le dire.

Le Président : Bien. Vous pouvez dire au témoin que la Cour la remercie pour son témoignage,

L’Interprète : Urukiko ruragushimiye ibyo urubwiye,

Le Président : Qu’elle peut disposer de son temps,

L’Interprète : Wakwigendera,

Le Président : Mais qu’elle doit rester à la disposition pour les formalités jusqu’à son retour au Rwanda.

L’Interprète : Ukigendera ariko ukaba waboneka igihe cyose urukiko rwagukenera kugirango hatunganwe utarasubira mu Rwanda.

le témoin 72 : Hari icyo nongera kubyo mvuze.

L’Interprète : J’ai à ajouter à ce que j’ai dit.

Le Président : Il n’y a plus rien à ajouter, c’est terminé.

L’Interprète : Byarangiye ngo ntagishobora kongerwaho.

le témoin 72 : Ntacyo shobora gusaba ?

L’Interprète : Elle demande si elle ne peut rien demander.

Le Président : Demander des dommages et intérêts ou des choses comme ça ?

L’Interprète : Kubasaba nk’indishyi cyangwa se ibintu bisa nibyo ?

le témoin 72 : Nibyo nashakaga.

L’Interprète : Oui, c’est ça que je veux.

Le Président : Elle a un avocat qui la représente et qui fera le nécessaire en temps opportun.

L’Interprète : Umwavoka ushinzwe kukunganira igihe nikigera, azakora ibigomba gukorwa.

L’Interprète : Elle vous remercie.

Le Président : Bien. Vous êtes prêts à aller jusqu’à quelle heure ? Il y en a encore deux qui sont présents ? Deux présents.