8.6.9. Audition des témoins: le témoin 138
Le Président : L’interprète ?
Quand on est au Rwanda, on parle français et quand on est en Belgique, on parle
kinyarwanda. Alors, l’interprète… Monsieur l’interprète, voulez-vous bien demander
au témoin quels sont ses nom et prénom ?
L’Interprète : Amazina yawe yombi ?
le témoin 138 : le témoin 138
Solange.
L’Interprète : le témoin 138.
Le Président : Quel est son
âge ?
L’Interprète : Imyaka yawe ?
le témoin 138 : 33.
L’Interprète : 33 ans.
Le Président : Quelle est
sa profession ?
L’Interprète : Umwuga wawe ?
le témoin 138 : Ndi umubikira
i Sovu.
L’Interprète : Je suis religieuse
à Sovu.
Le Président : Quelle est
sa commune de résidence actuelle ?
L’Interprète : Komine
utuyemo ubungubu ?
le témoin 138 : Maraba.
L’Interprète : La commune de Maraba.
Le Président : Connaissait-elle
les accusés ou certains des accusés avant le mois d’avril 1994 ?
L’Interprète : Mbere y’ukwezi
kwa kane, muri 94, hari uwo wari uzi mu baregwa cyangwa se bose wari ubazi ?
le témoin 138 :
Nzi Gertruda na Kizito gusa.
L’Interprète : Seulement Gertrude
et Kizito.
Le Président : Est-elle de
la famille des accusés ou des parties civiles ?
L’Interprète : Ufitanye
isano mu muryango w’abaregwa cyangwa abaregera indishyi ?
le témoin 138 : Oya.
L’Interprète : Non.
Le Président : Travaille-t-elle
sous un lien de contrat de travail, pour les accusés ou les parties civiles ?
L’Interprète : Hari umurimo ukorera
abaregwa cyangwa abaregera indishyi baguhembera ?
le témoin 138 : Oya, ntawe.
L’Interprète : Non.
Le Président : Voulez-vous
bien l’inviter à lever la main droite et à prêter le serment de témoin.
L’Interprète : Zamura ukuboko
kw’iburyo nuko urahire ino ndahiro y’abatanga ubuhamya.
le témoin 138 : Ndahiriye
kuvuga ukuri gusa, nta rwango, nta mususu.
L’Interprète : Je jure de parler
sans haine et sans crainte, de dire toute la vérité et rien que la vérité.
Le Président : Bien. Vous
vous asseyez à côté du témoin, si vous voulez bien, Monsieur l’interprète. Madame,
vous souvenez-vous si, au mois d’avril 1994, vous vous trouviez au couvent de
Sovu et la raison pour laquelle vous y étiez ?
L’Interprète : Uribuka niba mu
kwezi kwa kane kwa 94, wari mu kigo cy’ababikira n’impamvu wari uhari ?
le témoin 138 : Nari mpari
ndi umubikira.
L’Interprète : J’y étais en tant
que religieuse.
Le Président : Normalement,
à cette époque-là, n’était-elle pas attachée à un autre couvent que celui de
Sovu ?
L’Interprète : Ubusanzwe muri
icyo gihe ntabwo wari uwo mu kindi kigo kitari icya Sovu ?
le témoin 138 : Oya.
L’Interprète : Non.
Le Président : Mais elle
était étudiante à Butare ?
L’Interprète : Ntabwo
wigaga i Butare ?
le témoin 138
: Narahigaga nkaza muri vacances mu kigo cyacu
i Sovu.
L’Interprète : J’y étudiais mais
je passais mes vacances dans notre couvent, à Sovu.
Le Président : Et au mois
d’avril 1994, c’étaient les vacances de Pâques ?
L’Interprète : Noneho kandi ubwo
nyine muri 94 mu kwa kane, hari ibiruhuko bya Pasika ?
le témoin 138 : Yego.
L’Interprète : Oui, oui.
Le Président : A partir de
quelle date des réfugiés sont-ils arrivés au couvent de Sovu ?
L’Interprète : Ni uguhera ku yihe
tariki impunzi zatangiye kuza mu kigo cy’ababikira cy’i Sovu ?
le témoin 138 : Batangiye
kuza ku itariki ya 17.
L’Interprète : Ils ont commencé
à arriver le 17.
Le Président : Certains de
ces réfugiés ont-ils voulu pénétrer à l’intérieur même du couvent ou de la clôture
du couvent ?
L’Interprète : Bamwe muri izo
mpunzi bagerageje kwinjira mu kigo imbere, baciye mu ruzitiro rw’ikigo ?
le témoin 138 : Nyuma y’iyo
tariki.
L’Interprète : Après cette date.
Le Président : A partir du
lendemain ?
L’Interprète : Kuva bukeye bwaho ?
le témoin 138 : Yee, ku
mugoroba wakurikiyeho.
L’Interprète : Oui, le soir d’après.
Le Président : Y a-t-il eu
une démarche de la part de sœur Gertrude et éventuellement d’une autre religieuse
qui se seraient rendues à Butare pour avoir éventuellement des conseils sur
ce qu’il fallait faire des réfugiés ?
L’Interprète : Hari ibyakozwe
na soeur Gertrude cyangwa undi waba yari yaragiye i Butare kureba niba yagisha
inama kucyari gukorwa icyo gihe ?
le témoin 138 : Yee, nzi
ko yagiyeyo, agiye kubaza icyo bakorera abo bantu.
L’Interprète : Oui, je sais qu’elle
s’y est rendue pour demander ce qu’il fallait faire à ces gens-là.
Le Président : Quelles religieuses,
au pluriel, se sont rendues à Butare pour avoir des conseils ?
L’Interprète : Ababikira bagiye
i Butare kugisha inama ni bande ?
le témoin 138 : Ni Sœur
Gertruda n’uwitwaga sœur Stefania.
L’Interprète : C’est sœur Gertrude
et sœur Stéphanie.
Le Président : Ces deux religieuses
étaient-elles accompagnées d’une autre personne ou de plusieurs autres personnes
lorsqu’elles se sont rendues à Butare ?
L’Interprète : Abo babikira, hari
undi muntu cyangwa se abandi bantu bagiye babaherekeje, ubwo bajyaga i Butare ?
le témoin 138 : Oya, icyo
gihe ntabo.
L’Interprète : Non, à ce moment-là,
non.
Le Président : Lorsqu’elles
sont revenues de Butare, étaient-elles accompagnées de militaires ou d’autres
personnes ?
L’Interprète : Ubwo bagarukaga
bavuye i Butare, bazanye n’abasirikare cyangwa se bazanye n’abandi bantu ?
le témoin 138 : Oya ntabo
bazanye.
L’Interprète : Non, elles ne sont
revenues avec personne.
Le Président : Des militaires
sont-ils venus après le retour des sœurs Gertrude et Stéphanie ?
L’Interprète : Abasirikare baje
nyuma yuko sœur Gertrude na Stéphanie bagaruka ?
le témoin 138 : Yee, ndumva
narababonye mu minsi ikurikira ariko sinibuka itariki.
L’Interprète : Oui, à ma connaissance,
je les ai vus dans les jours qui ont suivi mais je ne me souviens plus de la
date exacte.
Le Président : Lorsque sœurs
Gertrude et Stéphanie sont revenues de Butare, ont-elles expliqué à qui elles
s’étaient adressées pour obtenir les conseils et quels conseils leur avaient
été donnés ?
L’Interprète : Ubwo Gertrude na
Stéphanie bagarukaga, basobanuye uwo bari bagiye kugisha inama, n’inama yabagiriye?
le témoin 138 : Njye nababonye,
nabateze gutya ariko ntabwo nibuka niba barabwiye ababikira bose, ariko njye
nababajije uko byagenze.
L’Interprète : Je ne me souviens
pas si elles l’ont dit à toutes les sœurs mais moi, je leur ai demandé ce qui
s’était passé.
le témoin 138 : Hanyuma
ngo barababajije niba abo bantu babazi,
L’Interprète : Alors, elle m’a
dit qu’on leur a demandé si elles connaissaient ces gens.
le témoin 138 : Avuga ko
atabazi, baravuga ngo ntibabinjize,
L’Interprète : Elle a dit qu’elle
ne les connaissait pas et on lui a dit de leur interdire l’accès.
le témoin 138 : Kubera
ko bashobora kuba bafite intwaro.
L’Interprète : Puisqu’ils peuvent
être armés.
Le Président : Sait-elle
si les réfugiés, à partir du 17, du 18 avril 1994 et dans les jours suivants,
ont reçu de la nourriture provenant du couvent ?
L’Interprète : Waba uzi niba impunzi,
kuva kw’itariki ya 17 cyangwa se mu minsi yakurikiyeho, hari ibiryo byahawe
n’ikigo cy’ababikira ?
le témoin 138 : Ntabwo
nzi…, ntabwo nabibonye, gusa nuko nzi hari nk’abantu bari kuri dispensaire bavugaga
ko bashonje kandi babibuze.
L’Interprète : Je ne l’ai pas
vu, ce que je sais c’est qu’il y avait des gens au centre de santé et qui disaient
qu’ils n’avaient pas de nourriture.
le témoin 138 : Ibyo nabibwiwe
n’umudamu wakoraga kuri dispensaire witwa Consolata.
L’Interprète : C’est une dame,
qui travaille au centre de santé, du nom de Consolée, qui me l’a dit.
le témoin 138 : Wavugaga
ko babahaye imfashanyo kandi inzara yabishe babuze icyo barya.
L’Interprète : Qui disait qu’on
leur avait donné de l’aide mais qu’ils mouraient de faim et qu’ils n’avaient
plus à manger.
Le Président : Le témoin
a-t-il demandé, par exemple, à sœur Gertrude ou à la sœur qui était responsable
de l’hôtellerie, de distribuer à manger aux réfugiés ?
L’Interprète : Wowe ubwawe waba
warabajije mama Gertrude cyangwa se undi wari ushinzwe hôtellerie, ngo ube waramusabye
gutanga ibiryo ?
le témoin 138 : Njye ntabwo
nabimusabye.
L’Interprète : Moi, je ne lui
ai pas demandé.
Le Président : A-t-elle vu
ou entendu dire, et si elle l’a entendu dire, de qui l’a-t-elle entendu, que
des listes de réfugiés avaient été établies pour leur fournir à manger ?
L’Interprète : Wigeze wumva, niba
se warabyumvishe n’inde wabyumvanye ? Wumvishe ko bakoze amaliste y’impunzi
kugirango zihabwe ibiryo ?
le témoin 138 : Nabyumvanye
uwo nguwo witwa Consolée kuko twari tuziranye, yakoraga kuri dispensaire.
L’Interprète : Je l’ai entendu
de la part de la même Consolée puisque c’était une connaissance à moi, elle
travaillait au centre de santé.
le témoin 138 : Hanyuma
ambwira ko bavuze ngo abakorere liste babahe ibiryo,
L’Interprète : Alors, elle m’a
dit qu’on leur avait demandé de dresser des listes pour l’obtention de la nourriture,
le témoin 138 : Ariko ko
nta kintu babahaye.
L’Interprète : Mais qu’on ne leur
a rien donné.
Le Président : Le témoin
sait-elle s’il y avait des stocks d’essence au couvent ?
L’Interprète : Waba wibuka niba
hari za stocks za lisansi mu kigo cy’ababikira ?
le témoin 138 : Ntabwo
mbizi ariko narabajije nyuma,
L’Interprète : Je ne le sais pas
mais après je me suis informée.
le témoin 138 : Bambwira
ko kubera ko twari dufite imodoka, bambwira ko twagiraga lisansi muri iyo nzu,
ya moteri.
L’Interprète : On m’a dit que
puisque nous avions des véhicules, que nous avions de l’essence dans une petite
maison, il y avait notre moteur, groupe électrogène.
Le Président : Le 22 avril
1994, le jour où la plus forte des attaques va avoir lieu contre le centre de
santé, le témoin a-t-il pu éventuellement identifier les personnes qui dirigeaient
cette attaque ?
L’Interprète : Kuri 22 z’ukwa
kane ubwo igitero gikomeye cyatereraga ivuriro, waba warabashe kureba, ukamenya
abantu bari bayoboye icyo gitero ?
le témoin 138 : Ntabwo
nababonye, gusa nabonye ko bigitangira, Interahamwe zagose ikigo.
L’Interprète : Je ne l’ai pas
vu à part que tout au début, j’avais constaté que beaucoup d’Interahamwe avaient
encerclé le centre, avaient encerclé le monastère.
Le Président : Qu’ont fait
les religieuses pendant la journée du 22 avril, pendant la journée de cette
attaque ?
L’Interprète : Ababikira kuri
uwo munsi wa 22 z’ukwa kane, ku munsi w’igitero, ababikira bakoze iki ?
Bakoze iyihe mirimo ?
le témoin 138 : Twe twabonye
bamaze kugota ikigo, duhurira ahantu mu nzu imwe nini,
L’Interprète : Quand nous avons
vu que le monastère était encerclé, nous nous sommes rassemblées dans une grande
maison,
le témoin 138 : Hanyuma
turasenga.
L’Interprète : Et nous nous sommes
mises à prier.
Le Président : Certaines des religieuses
ont-elles quitté la salle où les autres priaient ?
L’Interprète : Hari bamwe mu babikira
bahavuye muri icyo cyumba, abandi basengeragamo ?
le témoin 138 : Twarasenze
bigeze ahongaho, byaje gutinda, Getruda na Kizito nibo bagiye. Nabonye tutari
kumwe ariko sinabonye igihe bagendeye.
L’interprète : Nous avons
prié longtemps et à un certain moment c’est sœur Gertrude et Kizito qui sont
parties. Je me suis rendu compte qu’elles n’étaient pas avec nous mais je ne
sais pas quand elles ont quitté.
Le Président : C’était avec
qui elles ont eu, semble-t-il, un contact lorsqu’elles ont quitté la salle des
prières ?
L’Interprète : Wemenya umuntu
babonanye, ubwo bari bavuye mu cyumba cy’amasengesho ?
le témoin 138 : Ntabwo
nabonye mucyo bakoze nyuma.
L’Interprète : Non, je n’ai pas
vu ce qu’elles ont fait après.
Le Président : Peut-elle
expliquer pourquoi, alors, elle avait déclaré, lors de la commission rogatoire,
que sœurs Gertrude et Kizito avaient des contacts avec les gens de l’extérieur,
et notamment un certain REKERAHO qui était le chef des miliciens ?
L’Interprète : Wasobanura icyatumaga
ubwo bazaga kukubaza mbere wavuze ko, Gertrude na Kizito bari bafite imibonano
n’abantu bari mu bitero nka REKERAHO ?
le témoin 138 : Nabibonye
ibyo ngibyo nyuma ya 22.
L’Interprète : Ca, je l’ai vu
après le 22.
Le Président : Après le 22 ?
L’Interprète : Nyuma ya 22 ?
le témoin 138 : Yego.
L’Interprète : Oui.
Le Président : Le 23 et le
24, plus exactement le 23, le 23 avril, le lendemain de la grande attaque, les
religieuses ou certaines des religieuses vont quitter le couvent de Sovu ?
L’Interprète : Kuri 23 na 24,
ariko cyane cyane kuri 23, ababikira bavuye i Sovu ?
le témoin 138 : Yee, twarahunze,
twahungiye paroisse ya Ngoma.
L’Interprète : Oui, nous nous
sommes réfugiées à la paroisse de Ngoma.
Le Président : Ce départ
s’est fait en deux voyages, deux groupes.
le témoin 138 : Oui, oui.
Le Président : Le témoin
faisait-il partie du premier ou du deuxième groupe ?
L’Interprète : Wowe ubwawe wari
mu kiciro cya mbere cyangwa icya kabiri ?
le témoin 138 : Mu kiciro
cya mbere.
L’Interprète : Premier convoi.
Le Président : Qui conduisait
la voiture du premier convoi ?
L’interprète : Ninde warutwaye
imodoka y’icyo kiciro cya mbere ?
le témoin 138 : C’est
sœur Gertrude.
Le Président : Y avait-il
un policier qui accompagnait le convoi ?
le témoin 138 : Oui.
Le Président : Y avait-il,
ce départ s’est fait très tôt le matin du 23 avril ? Y avait-il, sur le
chemin, entre le couvent et le centre de santé, ou le chemin, entre le centre
de santé et la paroisse de Ngoma, devant ce centre de santé, des cadavres sur
la route ?
L’Interprète : Hagati y’ikigo
cy’ababikira n’ivuriro cyangwa se hagati y’ikigo cy’ababikira na paroisse ya
Ngoma, hari imirambo ku muhanda ? Yari ihari ?
le témoin 138 : Aho nabonye
imirambo ni hantu habiri,
L’Interprète : J’ai vu des cadavres
à deux endroits,
le témoin 138 : Aho ngaho
kuri centre de santé yacu,
L’Interprète : A notre centre
de santé,
le témoin 138 : N’ahandi
hantu tugiye kugera i Ngoma, ariko sinamenye neza uko hitwa.
L’Interprète : Et à un autre endroit
dont je n’ai pas pu connaître le nom exact, juste avant notre arrivée à Ngoma.
Le Président : Y avait-il
des cadavres sur le chemin même, qui auraient, par exemple, obligé sœur Gertrude
à passer avec la voiture sur des cadavres ?
L’Interprète : Hari mu muhanda
ubwaho, hari ahantu hari imirambo yaba yaratumye sœur Gertruda agomba kuyikandagira ?
le témoin 138 : Ibyo ntabwo
nabibonye.
L’Interprète : Ca, je ne l’ai
pas vu.
le témoin 138 : Aho myinshi
ni aho kuri centre de santé yacu,
L’Interprète : Là où j’ai
vu beaucoup de cadavres, c’est là-bas, à notre centre de santé.
le témoin 138 : Narahageze
numva ngize ubwoba, nipfuka mu maso, ku buryo ntabonye uko byagenze.
L’Interprète : A notre arrivée,
j’ai vu et puis j’ai été saisie de frayeur et je me suis fermé les yeux ce qui
fait que je ne sais pas ce qui se passait.
Le Président : Le témoin
sait-il pourquoi, le 24 avril, la décision a été prise de revenir de la paroisse
de Ngoma au couvent de Sovu ?
L’Interprète : Waba uzi icyatumye
kuri 24 z’ukwa kane harafashwe icyemezo cyo kuva kuri paroisse ya Ngoma no kugaruka
i Sovu ?
le témoin 138 : Ni
uko twahageze dusanga naho Interahamwe zikomeje kuduterayo,
L’Interprète : C’est parce que,
à notre arrivée, nous avons trouvé que les Interahamwe nous y attaquaient,
le témoin 138 : Hanyuma
dusaba ko batujyana mu rugo.
L’Interprète : Alors, nous
avons demandé qu’on nous ramène chez nous.
le témoin 138 : Kandi icyo
gihe, hari Interahamwe yari yatubwiye umugambi wabo ko, ngo bagomba kwica abatutsi
bose,
L’Interprète : Et à ce moment-là,
il y avait les Interahamwe qui nous avaient révélé leurs plans comme quoi ils
allaient exterminer tous les Tutsi,
le témoin 138 : Ngo ntihagire
imbuto isigara,
L’Interprète : Pour qu’il
ne reste même pas leurs fruits,
le témoin 138 : Ngo nabazasigara
bazasange bene le témoin 2 i Burundi.
L’Interprète : Et que même
ceux qui allaient être rescapés rejoignent les leurs au Burundi.
le témoin 138 : Nuko tubonye
dukomeje kuba menacées rero dusaba ko twataha, tugasubira muri monastère.
L’Interprète : Après avoir
constaté que nous ne cessions pas de recevoir des menaces, nous avons décidé
de retourner chez nous et de mourir au monastère.
Le Président : Au retour
au monastère, le témoin a-t-il rencontré ou vu la présence de REKERAHO ?
L’Interprète : Mu kugaruka muri
monastère, waba warabonye ko REKERAHO yari ahari ?
le témoin 138 : Yee, narahamusanze.
L’Interprète : Oui, je l’y ai
trouvé.
Le Président : REKERAHO a-t-il
parlé à leur retour ?
L’Interprète : REKERAHO hari icyo
yavuze mugarutse ?
le témoin 138 : Ntabwo
nabonye icyo gihe icyo yavuze, njye naje muri convoi ya kabiri.
L’Interprète : Non, je ne l’ai
pas vu, je ne l’ai pas entendu ce qu’il a dit étant donné que moi, je suis venue
par le deuxième convoi.
Le Président : Le lendemain
du retour, le 25 avril, REKERAHO est-il venu au couvent ?
L’Interprète : Bukeye bwaho, kuri
25 z’ukwa kane, REKERAHO yaje mu kigo ?
le témoin 138 : Yaraje
mu gitondo.
L’Interprète : Il est venu le
matin.
Le Président : Suite à la
visite de REKERAHO, y a-t-il eu une réunion des religieuses et des réfugiés
qui se trouvaient dans le couvent ?
L’Interprète : Ubwo amaze kuza,
hari inama y’ababikira yabaye n’izindi mpunzi zari mu kigo cy’ababikira ?
le témoin 138 : Yee, twahuriye
twese ahantu hamwe, bavugije inzogera,
L’Interprète : Oui, on a sonné
et puis, nous tous, nous avons été rassemblés à un même endroit.
Le Président : Qui a pris
la parole lors de cette réunion ?
L’Interprète : Muri
iyo nama ninde wafashemo ijambo ?
le témoin 138 : Ni sœur
Gertrude.
L’Interprète : C’est sœur Gertrude.
Le Président : Qu’a-t-elle
dit ?
L’Interprète : Yavuze ngo iki ?
le témoin 138 : Yaravuze
ngo : « Abo bantu basohoke », ngo : « Nibadasohoka
ngo barasenya monasteri ngo bice n’ababikira ».
L’Interprète : Elle a dit :
« Que ces gens-là sortent. S’ils ne sortent pas, on va détruire le monastère
et tuer les religieuses ».
Le Président : Que s’est-il
passé ?
L’Interprète : Ngo byagenze bite ?
le témoin 138 : Icyo gihe
nibwo, hari umudamu umwe wari uhari,
L’Interprète : A ce moment-là,
il y avait une dame,
le témoin 138 : W’umugabo
witwa KARDO yahise ubona asa nkaho agize agahinda,
L’Interprète : L’épouse d’un
certain KARDO, comme si elle était prise de chagrin.
le témoin 138 : Ahita avuga
ati : « Daweya ngo dusohoke badasenya amazu y’abandi ».
L’Interprète : Elle a dit :
« Venez, sortons, qu’on ne détruise pas ces maisons des autres ».
le témoin 138 : Hanyuma
baje gusohoka,
L’Interprète : Alors, ils
sont sortis,
le témoin 138 : Baragenda
barabagrupa bababaza ibyan-gombwa,
L’Interprète : On les a groupés
en leur demandant les cartes d’identité.
le témoin 138 : Bashyira
abantu bo mu miryango y’ababikira uruhande rumwe,
L’Interprète : On a mis d’un
côté, les membres des familles et des religieuses,
le témoin 138 : N’abantu
baturuka, bavuka Sovu,
L’Interprète : Et de l’autre
côté, les originaires de Sovu,
le témoin 138 : Hanyuma
rero, REKERAHO akaba ariwe ugenda abahereza Interahamwe.
L’Interprète : Et c’est REKERAHO
qui les passait aux Interahamwe.
le témoin 138 : Ariko icyo
gihe ntabwo abantu bo mu mafamiye y’ababikira babishe.
L’Interprète : Mais à ce
moment-là, les membres des familles et des religieuses n’ont pas été tués.
Le Président : Absolument
aucun membre des familles des religieuses ?
L’Interprète : Nta n’umwe mu muryango
wo mu babikira, ufitanye isano n’ababikira wapfuye ?
le témoin 138 : Oya, barapfuye,
uretse abo ngabo, hari bakeya bari plus proches y’ababikira, bo bari imbere.
Ariko hari abandi bo muri za famille kure, bari kumwe n’abandi kuri… bashoboye
kwinjira nyuma yaho, aho twahungiye.
L’Interprète : …Subiramo.
le témoin 138 : Ndavuga
ko, hari abantu bo mu mafamiye bari bahari,
L’Interprète : Heu… Les membres
de la famille étaient là,
le témoin 138 : Hari une
partie bari bari hamwe natwe muri monastère,
L’Interprète : Une partie était
avec nous, au monastère,
le témoin 138 : Ariko muri
abo basohotse na none le 25, harimo amafamiye y’ababikira, nka ba Fortunata
bavukaga aho ngaho, nka ba Regina.
L’Interprète : Mais parmi ceux-là
qui sont sortis qui étaient membres des religieuses comme Fortunata et Régine,
originaires de là-bas.
Le Président : Est-ce qu’il
n’y a pas eu une jeune fille qui était cousine avec une des religieuses qui
a été amenée à l’extérieur ?
L’Interprète : Nta mubikira waba
wari mubyara w’umwe mu babikira waba yarajyanwe hanze ?
Le Président : Une jeune
fille blessée.
L’Interprète : Umukobwa wari wakomeretse ?
le témoin 138 : Arahari,
ni mubyara we witwaga Théonile
L’Interprète : Oui, c’est la cousine
de sœur Théonile.
Le Président : Et qui a amené
la cousine de sœur Théonile à l’extérieur ?
L’Interprète : Ninde wasohoye
hanze mubyara wa sœur Theonila ?
le témoin 138 : Ni sœur
Gertrude.
L’Interprète : C’est sœur Gertrude.
Le Président : A part cette
cousine-là, les membres des familles des religieuses n’ont pas été tués le 25
avril ? Ils sont encore restés au couvent ?
L’Interprète : Usibye uwo nguwo
nta bandi mu muryango w’ababikira bishwe kw’itariki ya 25 ? Bahamye mu
kigo ?
le témoin 138 : Bahambye ?
L’Interprète : Bahamye, bagumye
mu kigo ? Usibye uwo nguwo, nta wundi wapfuye, abandi bose bahamye mu kigo?
le témoin 138 : Nibyo navugaga
ko abari bahari, n’abo ngabo ba famille kure, nk’abo ngabo bose nka ba Regina,
nka ba babyara le témoin 2 ba kure n’abandi nka ba Fortunata, kereka ariko abo ngabo
bari mu kigo bo, ntabwo icyo gihe bo babishe.
L’Interprète : Les membres de
la famille large qui n’étaient pas là, oui, mais ceux-là mêmes qui étaient au
couvent, n’ont pas été tués.
Le Président : Le 6 mai 1994,
le bourgmestre de Huye va venir au couvent et emmener les membres des familles
des religieuses ?
L’Interprète : Ku itariki ya 6
z’ukwa gatanu bourgmestre wa komine yaraje nuko atwara, avana mu kigo, atwara
abo mu miryango y’ababikira ?
le témoin 138 : Yee, nari
mpari.
L’Interprète : Oui, j’étais là.
Le Président : Entre le 25
avril et le 6 mai, sœur Gertrude aurait-elle demandé aux religieuses qui avaient
des membres de leur famille au couvent, de faire partir les membres de leur
famille ?
L’Interprète : Hagati y’itariki
25 n’itariki ya 6, sœur Gertrude yaba yarabajije ababikira gukura mu kigo abo
mu miryango yabo bari bahari ?
le témoin 138 : Ngo yarabikoraga
ariko sinamubonaga. Sinabyumvise ko atiyadresa kuri njye.
L’Interprète : Elle le faisait,
mais moi-même, je ne l’ai pas entendu puisqu’elle ne s’adressait pas à moi.
le témoin 138 : Nabibwirwaga
n’uko nabonaga ababikira bababaye, bakabinsobanurira.
L’Interprète : Je l’apprenais
puisque je trouvais tristes les religieuses qui alors m’expliquaient.
Le Président : Pendant cette
période-là, du 25 avril au 6 mai, y avait-il des miliciens ou des Interahamwe
qui menaçaient le couvent ?
L’Interprète : Hagati aho, hagati
y’itariki 25 z’ukwa kane n’itariki 6, hari Interahamwe zari aho hafi, zashakaga
gutera ikigo ?
le témoin 138 : Ntabo,
bagarutse icyo gihe ku itariki ya 6, nyuma ya saa sita batwara abo bantu.
L’Interprète : Non, ils sont revenus
à cette date-là du 6, dans l’après-midi, pour emmener les gens.
Le Président : Le 6 mai,
il semble que sœur Gertrude ait quitté le couvent en compagnie de RUSANGANGWA
Gaspard ?
L’Interprète : Ku itariki ya 6,
hari ubwo sœur Gertrude yavuye mu Kigo, ajyanye na Gaspard RUSANGANWA ?
le témoin 138 : Barajyanye,
bagiye hashize umwanya muto tuvuye gusenga.
L’Interprète : Oui, ils sont partis
ensemble après un petit moment, après notre prière.
Le Président : Ils sont revenus
ensemble aussi ?
L’Interprète : Baranagarukanye ?
le témoin 138 : Agaruka
ntabwo namubonye.
L’Interprète : Quand elle est
revenue, je ne l’ai pas vue.
Le Président : C’est ce jour-là,
dans l’après-midi, que le bourgmestre de Huye est venu au couvent ?
L’Interprète : Nyuma y’isaa sita
bourgmestre wa Huye yaje mu kigo ?
le témoin 138 : Yego.
L’Interprète : Oui.
Le Président : De qui le
bourgmestre était-il accompagné ?
L’Interprète : Bourgmestre yazanye
na nde ?
le témoin 138 : Yazanye
n’abapolisi.
L’Interprète : Il est venu avec
les policiers.
Le Président : Dans sa déclaration
sur commission rogatoire, elle parle de la présence de REKERAHO. REKERAHO était-il
avec le bourgmestre ?
L’Interprète : Ubwo wabazwaga
mbere wavuze ko REKERAHO bazanye. REKERAHO yari kumwe na bourgmestre ?
le témoin 138
: Uwo munsi ntabwo yari ahari REKERAHO. Naba
naribeshye,
L’Interprète : Non, ce jour-là,
REKERAHO n’était pas là,
le témoin 138 : Naba
naribeshye, ahubwo hari RUSANGANWA.
L’Interprète : Peut-être que je
me suis trompée. Par contre, il y avait RUSANGANWA.
Le Président : RUSANGANWA
Gaspard, hein ?
le témoin 138 : Yego.
L’Interprète : Oui.
Le Président : Sœur Gertrude
avait-elle souvent des contacts avec RUSANGANWA Gaspard ?
L’Interprète : Sœur Gertrude yakundaga
kubonana cyane na RUSANGANWA Gaspard ?
le témoin 138 : Yego.
L’Interprète : Oui.
Le Président : Se rendait-elle
parfois dans la maison de Gaspard qui se trouvait quelque part derrière le couvent ?
L’Interprète : Kenshi yakundaga
kujya kenshi kwa Gaspard mu rugo, urwo rugo rwari hirya gato, inyuma y’ikigo ?
le témoin 138 : Ntabwo
nabimenya ariko aho namubonye ni kuri icyo gihe cyo ku itariki ya 6,
L’Interprète : Je ne peux pas
le savoir mais quand je l’ai vu, c’était à cette date-là du 6.
le témoin 138 : Bamaze
kumubwira ko Interahamwe zizengurutse urugo,
L’Interprète : Après qu’on lui
ait appris que les Interahamwe encerclaient le monastère,
le témoin 138 : Nibwo yahise
ajya yo, bahise bagarukana.
L’Interprète : C’est à ce moment-là
qu’il s’y est rendu et qu’ils sont revenus ensemble.
Le Président : Lorsque le
bourgmestre est venu dans l’après-midi, il était accompagné de policiers ?
le témoin 138 : Oui ?
Le Président : Les policiers
ont-ils fouillé les chambres pour trouver les membres des familles des religieuses ?
L’Interprète : Abapolisi baje
bazanye na bourgmestre baje gusaka mu byumba, kugirango bashakemo abo mu miryango
y’ababikira bari bahari ?
le témoin 138 : Yee, icyo
gihe bari kumwe na sœur Kizito.
L’Interprète : Oui, à ce moment-là,
ils étaient en compagnie de sœur Kizito.
Le Président : Que sont devenus
les membres des familles des religieuses lorsqu’on les a rassemblés et retrouvés ?
L’Interprète : Abo bantu bo miryango
y’ababikira byabagendekeye bite, ubwo bari bamaze kubabona no kubashyira hamwe ?
le témoin 138 : Icyo gihe
barabasohoye, babajyana hanze,
L’Interprète : On les a mis dehors,
le témoin 138 : Imbere
y’ihostiya, y’aho bakorera za hostiya.
L’Interprète : Devant la fabrique
des hosties.
le témoin 138 : Njye ntabwo
nabakurikiye ngo ngere hasi, nari imbere ya hôtellerie,
L’Interprète : Je ne les ai pas
accompagnés jusqu’en bas, j’étais devant l’hôtellerie.
le témoin 138 : Nabonaga
bourgmestre ababwira ariko sinzi icyo yababwiraga.
L’Interprète : Je voyais le bourgmestre
leur dire quelque chose mais je ne savais pas ce qu’il leur disait.
Le Président : N’a-t-elle
pas vu qu’une partie des membres des familles montait dans la voiture de la
commune de Huye ?
L’Interprète : Ntabwo wabonye
ko muri iyo miryango y’ababikira binjiraga mu mokoka ya komine Huye ?
le témoin 138 : Ibyo narabibonye,
L’Interprète : Ca, je l’ai vu
le témoin 138 : Hanyuma
hasigara abantu bari batuye hafi,
L’Interprète : Ca, je l’ai vu
et sont restés les originaires des environs.
Le Président : Et les membres
des familles qui étaient originaires des environs sont partis à pied ?
L’Interprète : Abari batuye hafi
aho ngaho bagiye n’amaguru ?
le témoin 138 : Bagiye
n’amaguru ariko hariho nk’ababyeyi b’uwitwa Bernadette,
L’Interprète : Oui, ils sont partis
à pied mais il y avait les parents d’une certaine Bernadette.
le témoin 138 : Nabonye
abahereza agapapuro ariko sinzi icyo yanditseho.
L’Interprète : J’ai vu qu’elle
leur donnait un papier mais je ne sais pas ce qui était écrit dessus.
Le Président : Et ceux qui
sont partis à pied n’ont-ils pas été tués près du dispensaire ?
L’Interprète : Abagiye n’amaguru
ntabwo biciwe hafi y’ivuriro ?
le témoin 138 : Ntabwo
nzi aho babiciye.
L’Interprète : Je ne sais pas
où on les a tués.
Le Président : Le témoin
s’est-il réfugié avec les autres membres de la communauté de Sovu qui ont quitté
le monastère à la fin du mois de juin ou au début du mois de juillet 1994 ?
S’est-elle réfugiée avec les autres membres de la communauté à Maredret ?
L’Interprète : Wahungiye i Maredret
uhunganye n’abandi mwari kumwe mu kigo mu mpera z’ukwezi kwa 6 cyangwa se mu
ntangiro z’ukwezi kwa karindwi ?
le témoin 138 : Nari mpari.
L’Interprète : Oui, j’étais là.
Le Président : Pendant le
séjour à Maredret, y a-t-il eu éventuellement des pressions de sœur Gertrude
ou d’autres personnes pour éviter qu’on ne parle de ce qui s’était passé à Sovu ?
L’Interprète : Ubwo mwari Maredret
hari ibiterabwoba mwashyirwagaho na sœur Gertrude cyangwa abandi, kugirango
mutavuga ibyabereye i Sovu ?
le témoin 138 : Kutabivuga
simbizi, ahubwo nuko badusabaga ko twatanga témoignage tumurenganura.
L’Interprète : Ne rien dire, là,
je ne sais pas. Ce qu’on nous demandait, c’est de faire des témoignages la disculpant.
Le Président : Qui demandait
de faire ce genre de témoignages ?
L’Interprète : Ibintu byo kumurenganura
ni nde wabasabaga kubikora ?
le témoin 138 : Ni umuntu
wari umubikira wa Hermeton.
L’Interprète : Hermeton ?
le témoin 138 : Hum.
L’Interprète : C’est une sœur
de Hermeton,
le témoin 138 : Ni uwari
supérieure wacu witwaga mère Marie-Jeanne.
L’Interprète : Ainsi que notre
supérieure, mère Marie-Jeanne.
Le Président : Entre le 6
mai, le jour où les derniers membres des familles ont dû donc quitter le couvent
où il ne restait à partir du 6 mai, il ne restait plus dans le couvent que les
religieuses de Sovu ?
le témoin 138 : Oui ?
Le Président : Y a-t-il eu
encore des miliciens qui venaient rôder autour du couvent ?
L’Interprète : Ubwo hari hasigaye
ababikira gusa, nyuma y’itariki ya 6 z’ukwa 5, hari Interahamwe zagarutse kuza
zicaracara inyuma y’ikigo ?
le témoin 138 : Ntabaje.
L’Interprète : Non, ils ne sont
pas venus.
Le Président : Sœur Gertrude,
pendant ce temps-là jusqu’au départ de Sovu, du 6 mai jusqu’au départ de Sovu,
s’est-elle occupée des religieuses qui avaient perdu des membres de leur famille ?
L’Interprète : Kuva icyo gihe
cyose kugeza ubwo muviriye i Sovu, sœur Gertrude yajyaga yita ku bantu bapfushije
abantu le témoin 2, hari ukuntu yabitagaho ?
le témoin 138 : Nta kintu
na kimwe yabakoreye. Nta nubwo yasuye abarwayi. Ntabwo yigeze abasura nta n’icyo
yabavugishije kuko benshi bahise barwara.
L’Interprète : Non, elle n’a rien
fait, elle n’a même pas rendu visite aux sœurs qui étaient malades puisque beaucoup
d’entre elles sont tombées malades.
Le Président : Sœur Gertrude
est-elle tombée malade ?
L’Interprète : Ubwe, hari ubwo
yarwaye,
le témoin 138 : Nyuma y’iyo
tariki ntabwo, ntabwo nigeze mbona ko arwaye,
L’Interprète : Après cette date,
je ne l’ai jamais vue disant qu’elle était malade.
le témoin 138 : Aho nabyumvise
n’icyo gihe ku itariki ya 6, avuye i Butare, niho numvise bavuga ngo araryamye
ngo ararwaye.
L’Interprète : Quand je l’ai appris,
c’est à cette date même du 6, à son retour de Butare. C’est à ce moment-là que
j’ai entendu dire qu’elle était malade, qu’elle était au lit, voilà.
Le Président : Madame, avez-vous
perdu vous-même des membres de votre famille à Sovu ?
L’Interprète : Wowe ubwawe hari
abantu bo mu muryango wawe baguye i Sovu ?
le témoin 138 : Nta n’umwe.
L’Interprète : Aucun.
Le Président : Savez-vous
si, dans la communauté de Sovu, il y a eu des difficultés avant le mois d’avril
1994, notamment suite à l’élection de sœur Gertrude comme prieure du couvent ?
L’Interprète : Waba uzi niba mbere
y’ibyo, mu kigo cy’i Sovu nta bibazo byari birimo bikuruwe n’itorwa rya sœur
Gertrude nk’umukuru w’ikigo ?
le témoin 138 : Ntacyo
nzi, ntacyo narinzin nta kibazo cyari gihari.
L’Interprète : Je n’ai rien su,
il n’y avait pas de problèmes.
Le Président : Y a-t-il des
questions à poser au témoin ? Monsieur le 6e juré ?
Le 6e Juré : Merci,
Monsieur le président. Vous pouvez demander au témoin si elle a connaissance
de l’ambulance du couvent et quand elle n’aurait plus vu cette ambulance ?
Le Président : Connaissez-vous
le véhicule qui servait d’ambulance au centre de santé ?
L’Interprète : Wari uzi imodoka
yakoreshwaga nka ambulance itwara abarwayi b’ivuriro.
le témoin 138 : Ndayizi.
L’Interprète : Oui, je le connais.
Le Président : Il semble
que ce véhicule était stationné dans les garages du couvent ?
L’Interprète : Ngo iyo modoka
ngo yari ihagaze mu igaraji ry’ikigo cy’ababikira ?
le témoin 138 : Ubundi
yabikwaga mu igaraji rya dispensaire, dispensaire yari ifite igaraji ryayo.
L’Interprète : Non, normalement
le véhicule était garé au garage du dispensaire, le dispensaire avait son propre
garage.
Le Président : A-t-elle constaté
à un moment, et si elle l’a constaté, à quel moment, que ce véhicule n’aurait
plus été à la disposition du dispensaire ou du couvent ?
L’Interprète : Hari ubwo waba
uzi ko iyo modoka hari igihe itakoreshwaga na dispensaire, ntinakoreshwe n’ikigo
cy’ababikira, niba se waba ubizi, byaba barabaye ryari ?
le témoin 138 : Ibyerekeranye
n’iyo ambulance nabyumvise le 22,
L’Interprète : En ce qui concerne
l’ambulance, je l’ai appris le 22,
le témoin 138 : Ko ngo
REKERAHO yaje akayitwara.
L’Interprète : Que REKERAHO serait
venu la prendre,
le témoin 138 : Akayihabwa
na sœur Gertrude.
L’Interprète : Qu’il l’aurait
reçue de sœur Gertrude.
Le Président : Oui, une autre
question ?
Le 6e Juré : Oui.
Est-ce qu’elle a connaissance des réserves de nourriture du couvent et si oui,
est-ce qu’elles étaient importantes ?
Le Président : Madame, savez-vous
quel était, à l’époque des événements survenus à Sovu, l’état des réserves en
nourriture du couvent ?
L’Interprète : Waba uzi, icyo
gihe ibyo bintu byaberaga i Sovu, waba uzi muri icyo gihe, ibiribwa byari muri
stock yarihabitswe uko byanganaga ?
le témoin 138 : Nta kibazo
cy’ibiribwa twari dufite.
L’Interprète : Nous n’avions aucun
problème d’alimentation.
le témoin 138 : Kuko twari
dufite nka macaroni nyinshi, n’icyo gihe twari dufite na commandes nyinshi,
L’Interprète : Je savais que nous
avions beaucoup de macaronis, nous avions beaucoup de commandes,
le témoin 138 : Dufite
n’ibiribwa by’abakene,
L’Interprète : Nous avions aussi
beaucoup de nourriture des pauvres,
le témoin 138 : Nza kumva
ko n’uwitwa NTEZIMANA Lawuriyani yatuzaniye umuceri mwinshi wo gufasha impunzi.
L’Interprète : J’ai appris aussi
qu’un certain le témoin 110 nous a apporté beaucoup de nourriture, pour
assister les réfugiés.
le témoin 138 : Umuceri.
L’Interprète : Apportait beaucoup
de riz pour assister les réfugiés.
Le Président : D’autres questions ?
Madame le 10e juré et ensuite Monsieur le 2e juré suppléant.
Le 10e Juré : Monsieur
le président, a-t-il été demandé de l’argent aux réfugiés pour obtenir de la
nourriture ?
Le Président : Madame, savez-vous
si on a demandé aux réfugiés de l’argent en échange de nourriture ?
L’Interprète : Waba uzi ko hari
amafaranga yatswe impunzi kugirango zihabwe ibyo kurya ?
le témoin 138 : Nabyumvanye
ababikira bafite imiryango bababaye cyane ko babatse cotisations,
L’Interprète : Je l’ai appris
des sœurs qui avaient les familles là-bas qui étaient très tristes puisqu’on
est venu demander des cotisations,
le témoin 138 : Kandi ibiryo
byari bihari.
L’Interprète : Alors que la nourriture
était là.
Le Président : Monsieur le
2e juré suppléant.
Le 2e Juré suppléant : Monsieur
le président, pourriez-vous demander ce que pensait la communauté des sœurs,
du don de voyance de sœur Hermeline ?
Le Président : Du… ?
Le 2e Juré suppléant : Du
don de voyance de sœur Hermeline ?
Le Président : Alors, la
communauté, je ne sais pas, mais le témoin avait-il connaissance de dons de
voyance de sœur Hermeline ?
le témoin 138 : Ntabwo
ibyo twari tubizi cyane ariko twari tuzi ko ari umuntu twafataga nk’umuntu w’umutagatifu,
L’Interprète : Non, nous ne le
savions pas beaucoup mais c’était une personne qu’on considérait comme une sainte,
le témoin 138 : Twe abenshi
twagishaga inama.
L’Interprète : Beaucoup d’entre
nous lui demandions conseil.
le témoin 138 : Twari tuzi
ko hari ikintu, ukuntu abaho, yari afite n’i Sacramentu mu ishambre ye, ariko
ntitwari tuzi byinshi.
L’Interprète : Nous savions qu’elle
avait une façon de vivre étant donné qu’elle avait même le Saint-Sacrement dans
sa chambre mais nous ne savions pas beaucoup.
le témoin 138 : Kereka
niba hari abandi bafite za précisions njye ntazi.
L’Interprète : Sauf, si peut-être
d’autres avaient des précisions que moi je ne connais pas.
Le Président : D’autres questions ?
Le 2e Juré suppléant : Oui.
Quand sœur Gertrude et sœur Stéphanie sont parties à Butare, je n’ai pas entendu
les personnes qui lui ont dit de repousser ceux qui venaient au centre ?
Le Président : Oui, quand
sœur Gertrude et sœur Stéphanie sont parties le 18 avril à Butare, elles sont
revenues toutes les deux et vous avez expliqué qu’elles avaient dit qu’elles
avaient reçu le conseil de ne pas laisser rentrer les réfugiés dans le monastère
parce qu’ils pouvaient être armés. C’est bien ce que vous avez dit ?
le témoin 138 : Oui !
Le Président : Vous avez
peut-être omis de dire qui leur avait donné ce conseil, selon ce qu’elles vous
ont dit ?
L’Interprète : Wibagiwe kuvuga
ngo : « Uwamugiriye iyo nama, bakuri-kijwe ibyo yavuze ».
le témoin 138 : Ntabwo
ibyo nabimubajije, we yari yatubwiye ko agiye kubaza abategetsi. Sinamubajije
rero umuntu bavuganye, numvaga nifuza kumenya gusa icyo bitanga nyuma y’ibyo
bintu.
L’Interprète : Je ne lui ai pas
demandé, elle nous avait dit qu’elle allait voir l’autorité, je ne lui ai pas
demandé, ce que je savais c’était l’issue de cette démarche.
Le Président : Donc, c’est
une autorité dont le témoin ne sait pas…
L’Interprète : Yaba ari umutegetsi
se… utazi,
Le Président : De laquelle
il s’agit précisément ?
L’Interprète : Umutegetsi utazi
uwo ariwe neza ?
le témoin 138 : Ntabwo
natekereje kumenya uwo muntu, uwo bavuganye uwo ariwe.
L’Interprète : L’idée ne m’est
pas venue de chercher à savoir, cette personne-là, à qui elle s’était adressée.
Le Président : Une autre
question ? Monsieur l’avocat général ?
L’Avocat Général : Un petit
instant, à ce qui s’est passé après, lorsque le témoin est donc ici, en Belgique,
au moment où les deux sœurs, fautives d’après ce qu’écrit la hiérarchie religieuse
et lorsqu’on dit les sœurs fautives, on ne vise pas les deux accusées mais les
deux sœurs qui ont osé faire des déclarations, elles sont reparties au Rwanda
sans l’autorisation de la hiérarchie. Le témoin a déclaré qu’il y a eu une réunion
alors à Maredret concernant l’expulsion éventuelle de ces deux sœurs de l’Ordre
des bénédictines et que sœur Gertrude a remis, après cette réunion, sa démission
parce que les autres sœurs n’avaient pas voulu voter pour cette expulsion. Est-ce
qu’elle peut confirmer ça ?
le témoin 138 : Ibyo narabivuze
kandi nari mpari.
L’Interprète : Ca, je l’ai dit,
et j’étais là.
Le Président : Une autre
question. Maître WAHIS.
Me. WAHIS : Quand vous avez
quitté la communauté de Sovu, vous vous êtes rendue à l’étranger, c’était donc
fin juin début juillet, vous êtes passée par le Zaïre, par Bukavu ou par le
Burundi ?
L’Interprète : Ubwo mwahungaga
ikigo mujya mu mahanga mu mpera z’ukwezi kwa gatandatu cyangwa se mu ntangiro
z’ukwezi kwa karindwi, waciye muri Zaïre cyangwa se waciye i Burundi ?
le témoin 138 : Naciye
muri Zaïre.
L’Interprète : Je suis passée
par le Zaïre.
Me. WAHIS : C’est sœur Gertrude
qui vous a demandé de partir avec le groupe qui partait vers le Zaïre ?
L’Interprète : Ni sœur Gertrude
wagusabye kujyana n’igrupe yaciye muri Zaïre ?
le témoin 138 : Oya, ni
uko ninjiye mu modoka, ninjiye ntazi n’aho batujyanye.
L’Interprète : Non, je suis montée
seulement dans la voiture, je ne savais pas où on nous amenait.
Me. WAHIS : Les sœurs pouvaient
donc choisir ?
L’Interprète : Ni ukuvuga ko washoboraga
guhitamo ?
le témoin 138 : Byatewe
n’aho twari turi. Njye nari naraye ku kindi kigo kitabonye informations zo kuvuga
ngo urajya aha cyangwa urajya hariya.
L’Interprète : Ca dépendait de
là où on était. Moi, j’avais passé la nuit dans un autre établissement où on
n’avait pas reçu d’information comme quoi il fallait aller là-bas ou là-bas.
le témoin 138 : Naraje
rero mbona abandi barurira imodoka,
L’Interprète : Je suis venue et
j’ai vu que d’autres montaient dans les véhicules.
le témoin 138 : Hanyuma
nanjye nurira ntazi aho batujyanye.
L’Interprète : Et puis, je me
suis rendue, ne sachant pas où on nous emmenait.
Le Président : Oui. Un à
la fois. Qui a levé le premier son doigt ? Je crois que c’était Maître
FERMON, à moins qu’il ne cède son tour à Maître BEAUTHIER, je ne sais pas.
Me. FERMON : J’ai trois petites
questions, Monsieur le président. Première : dans son audition devant le
TPIR, le témoin relate un incident avec la dame Consolée dont elle a déjà parlé
tout à l’heure, qui, à un certain moment, fuit devant une attaque avec des grenades.
Est-ce qu’elle pourrait aujourd’hui nous répéter ce qui s’est passé à ce moment-là
et quelle a été la réaction de sœur Gertrude plus particulièrement ?
Le Président : Le témoin
se souvient-il d’une attaque avec des grenades qui implique Consolée, ce qui
se passe et quelle est l’attitude de sœur Gertrude ?
L’Interprète : Waba uzi ibijyanye
n’igitero bateragamo na za grenades, igitero hakaba havugwamo izina Consolée.
Wasobanura imyitwarire, uko byagenze na Gertrude ?
le témoin 138 : Ni igitero
cya mbere ya 22,
L’Interprète : Il s’agit d’une
attaque qui date d’avant le 22.
le témoin 138 : Mbega haje
abantu baturutse kuri komine, bari kumwe ubwo na bourgmestre, ariko sinamubonye
ubwo nabonye imodoka inyura inyuma ya dispensaire kuko nari ndi…
L’Interprète : Des gens sont venus
provenant de la commune incluant le bourgmestre, mais personnellement, je ne
l’ai pas vu, j’ai vu seulement la voiture qui passait derrière le dispensaire,
le témoin 138 : Harimo
abapolisi nyuma.
L’Interprète : Et les policiers
qui étaient derrière, dans la voiture.
le témoin 138 : Bagenda
bagiye ngo gufasha abagabo bariho birukana Interahamwe ku musozi,
L’Interprète : Et ils disaient
qu’ils allaient aider les hommes qui chassaient les Interahamwe de la colline.
le témoin 138 : Bahageze
ngo aho kubafasha bahita babaha za grenades, batera abo bantu, havamo umugabo
umwe arapfa,
L’Interprète : Arrivés là-bas,
au lieu de les aider, on leur a donné des grenades et ils ont jeté à ces gens-là
et l’un d’entre eux est tombé mort.
le témoin 138 : Hanyuma
abagabo bose bahita birukanka bagana kuri dispensaire.
L’Interprète : Alors, tous les
autres hommes ont couru en direction du dispensaire.
le témoin 138 : Nibwo rero
abantu bose bagize ubwoba, birukanka bagana kuri monastère guhungirayo,
L’Interprète : Alors, tout le
monde a eu peur et s’est réfugié en direction du monastère.
le témoin 138 : Icyo gihe
rero nibwo Consolée yamenye idirishya ryaho badodera,
L’Interprète : C’est à ce moment-là
que Consolée a cassé la fenêtre de l’atelier de couture
le témoin 138 : Yinjira
mu kigo imbere.
L’Interprète : Et qu’elle est
entrée dedans, dans le couvent.
Le Président : Et quelle
a été la réaction de sœur Gertrude ?
L’Interprète : Ngo ubwo Gertrude
yabyifashemo ate ?
le témoin 138 : Yarababwiye
ngo nibasohoke, Consolée we kubera ko yari nk’umukozi wacu ukora kuri dispensaire
aranga,
L’Interprète : Elle lui a dit
de sortir, alors Consolée, c’était comme une autre employée d’autant plus qu’elle
travaillait au dispensaire et elle a refusé.
le témoin 138 : Hanyuma,
nyuma haje kuza abapolisi bambwira ko ngo bazanwe na Gertruda, barabasohora.
L’Interprète : Alors, par après,
des policiers sont venus et on m’a dit que c’est sœur Gertrude qui les avait
fait venir et on les a fait sortir.
le témoin 138 : Aliko ntabwo
njye nabonye Gertruda ajya kubazana.
L’Interprète : Personnellement,
je n’ai pas vu Gertrude les chercher.
Le Président : Une autre
question ?
Me. FERMON : Oui, Monsieur
le président. Le témoin nous a relaté tout à l’heure l’incident avec la cousine
de la sœur Théonile. Immédiatement après, elle relate dans son témoignage devant
le TPIR, un autre incident avec un autre enfant. Est-ce qu’elle pourrait nous
répéter ce qui s’est passé ?
Le Président : Lorsque les
membres des familles des religieuses sont livrés ou sont pris par REKERAHO le
25, non, non ce n’est pas, oui, c’est le 25 avril, une cousine de sœur Théonile
va être conduite à l’extérieur par sœur Gertrude. Y a-t-il un autre enfant qui
a subi un autre sort ?
L’Interprète : Ubwo kuri 25 abari
aho batangwaga cyangwa se bafatwaga na REKERAHO, ibyo wavuze kuri mubyara wa
sœur Théonile, yasohowe na sœur Gertrude. Hari undi mwana waba ufite icyo uziho
muri icyo gihe ?
le témoin 138 : Ni umwana
wari uri muri hôtellerie,
L’Interprète : Oui, c’est un enfant
qui était à l’hôtellerie.
le témoin 138 : Uwo mwana
ngo yari yarakize massacres zabereye ku Gikongoro.
L’Interprète : Cet enfant était
rescapé des massacres qui avaient eu lieu à Gikongoro.
le témoin 138 : Uwo mwana
aza kwihisha mu ishyamba ryacu,
L’Interprète : Cet enfant s’est
caché dans notre bois,
le témoin 138 : Hanyuma
abantu bari bahari muri hôtellerie b’abagabo, barimo batembera baramubona.
L’Interprète : Alors que les hommes
qui étaient là, à l’hôtellerie, se promenaient et l’ont vu.
le témoin 138 : Umwana
yababona, kubera ko …, akagira ubwoba akirukanka, bageze aho baramuhamagara,
baramwiyegereza.
L’Interprète : Quand l’enfant
les voyait, il se sauvait puis, à un certain moment, ils l’ont appelé et puis
ils l’ont fait approcher.
le témoin 138 : Noneho,
umwana akavuga ati : « Ese ninza ntimunyica ? ».
L’Interprète : Alors, l’enfant
leur disait : « Et si je viens, vous n’allez pas me tuer ? ».
le témoin 138 : Ibyo twabibwirwaga
n’abo bagabo.
L’Interprète : Ce sont ces hommes-là
qui nous racontaient tout ça.
le témoin 138 : Hanyuma
bageze aho barumvikana, baratubwira bati : « Tuzakubera ababyeyi,
uzatubera umwana, igihe cyose tuzaba turiho ntacyo uzaba ».
L’Interprète : A un certain moment,
une confiance s’est établie, ils lui disaient : « Nous allons être
tes parents, tu vas être notre enfant. Tant que nous serons en vie, rien ne
va t’arriver ».
le témoin 138 : Ubwo bamuzana
rero iwacu mu kigo kuko ariho bari bari.
L’Interprète : On l’a alors amené
chez nous, au monastère puisque c’est là où ils étaient.
le témoin 138 : Bigeze
rero kuri iyo tariki ya 25,
L’Interprète : Le 25,
le témoin 138 : Uwo mwana
nawe sœur Gertruda yaramusohoye.
L’Interprète : Cet enfant fut
aussi chassé, fut aussi mis dehors par sœur Gertrude.
le témoin 138 : Agira ubwoba
cyane, noneho agasakuza, akamusaba imbabazi ati : « Ko uri umuntu
w’Imana, wangiriye impuhwe ? ».
L’Interprète : L’enfant a eu beaucoup
peur et il criait, implorait sa sympathie. Il disait : « Toi, tu es
un être de Dieu, aie pitié de moi ».
le témoin 138 : Nuko aramujyana,
umwana akajya amwihambira ku maguru,
L’Interprète : L’enfant alors
s’accrochait sur ses jambes,
le témoin 138 : Kubera
ko umwana yasakuzaga cyane icyo gihe, nagize agahinda mpita nigira mu kiriziya,
L’Interprète : Comme cet enfant
provoquait beaucoup de pitié, j’ai eu beaucoup de chagrin et je me suis rendue
à l’église,
le témoin 138 : Hashize
akanya numva grenade iravuze,
L’Interprète : Après un court
instant, j’ai entendu une détonation d’une grenade,
le témoin 138 : Mpita nza
kubaza niba wa mwana bamwishe.
L’Interprète : Je suis venue m’informer
si on venait de tuer cet enfant.
le témoin 138 : Nsanga
rero umwana yagiye, niba ariwe bari bishe icyo gihe niba ari iki, ariko bambwiye
ko Interahamwe zahise zimutwara.
L’Interprète : Alors, j’ai trouvé
que l’enfant avait été emmené et je ne sais pas si c’est lui qu’on venait de
tuer mais on m’a dit que les Interahamwe venaient du prendre.
Le Président : Oui.
Me. FERMON : Monsieur le
président, à propos de cet incident encore, est-ce que le témoin peut confirmer
ce qu’elle a dit devant les enquêteurs du TPIR : « Sœur Gertrude est
revenue à l’intérieur de l’hôtellerie et est ressortie avec un jeune garçon ».
Est-ce que c’est elle qui est allée chercher le garçon à l’intérieur de l’hôtellerie ?
Le Président : Est-ce bien
sœur Gertrude qui est allée chercher cet enfant, ce jeune garçon, à l’intérieur
de l’hôtellerie ?
L’Interprète : Ni sœur Gertruda
wagiye gukura uwo mwana wundi w’umuhungu muri hôtellerie ?
le témoin 138 : Nicyo gihe
nyine basohoraga abantu,
L’Interprète : C’est à ce moment-là
même où on faisait sortir les gens,
le témoin 138 : Njyewe
nakoze attention gusa arimo avuza induru,
L’Interprète : Moi, j’ai fait
attention seulement au moment où je l’ai entendu crier.
le témoin 138 : Mbona amutwaye.
Mbonye Gertruda amujyanye.
L’Interprète : Et alors que je
voyais que Gertrude l’emmenait.
Le Président : Oui.
Me. FERMON : Alors, dernière
question, si vous le permettez, Monsieur le président, pour ce qui me concerne,
quand les sœurs sont à Ngoma, pendant les deux jours où elles quittent le couvent.
A un certain moment, sœur Gertrude, selon les déclarations du témoin, aurait
demandé si les sœurs étaient en possession de leur carte d’identité. Est-ce
que le témoin peut confirmer cela et nous expliquer ce qui s’est passé ?
Le Président : Maître FERMON,
je vais vous demander, parce que les efforts de mémoire sont difficiles, pour
les témoins comme pour tout le monde, de poser des questions alors plus précises.
Me. FERMON : Est-ce que pendant,
si vous me permettez alors, Monsieur le président, est-ce que pendant le séjour
des sœurs à Ngoma, sœur Gertrude a demandé aux autres sœurs si elles disposaient
de leur carte d’identité ?
Le Président : Pendant le
séjour à Ngoma, la paroisse de Ngoma, sœur Gertrude a-t-elle demandé si les
religieuses qui étaient réfugiées avec elle là-bas, avaient leur carte d’identité ?
L’Interprète : Mu gihe mwari i
Ngoma, sœur Gertrude yaba yarabajije ababikira cyangwa abandi bari kumwe, indangamuntu
zabo ?
le témoin 138 : Yarabitubajije,
ni muri icyo gihe cya ya nterahamwe navugaga,
L’Interprète : Elle les a demandées,
c’est au moment où… oui, qui concerne l’Interahamwe que j’ai évoqué plus haut,
le témoin 138 : Imaze kuvuga
ayo magambo, nibwo yarangije iravuga ngo nituzane cartes d’identité zacu.
L’Interprète : Après les paroles
du Interahamwe, c’est à ce moment-là qu’il nous a dit de montrer nos cartes
d’identité.
le témoin 138 : Ariko mbere
sœur Gertrude yari yatubwiye ngo tuzazihishe, ngo nibazitubaza tuvuge ko turi
abakristu.
L’Interprète : Mais avant, sœur
Gertrude nous avait dit de les cacher et si on nous les demandait, elle nous
avait conseillé de dire que nous étions des chrétiens.
le témoin 138 : Hanyuma
icyo gihe iyo nterahamwe izitubajije ,ahita atubwira ngo nituzerekane.
L’Interprète : Et puis, à ce moment-là,
quand le Interahamwe nous les a demandées, elle nous a demandé de les montrer.
le témoin 138 : Uwitwaga
sœur Bernadette ahita amubwira ati : « Koko ntiwatubwiye ngo tuzazihishe ? ».
L’Interprète : Alors, sœur Bernadette
lui a dit : « N’est-ce pas que tu nous as dit auparavant de les cacher ? ».
le témoin 138 : Ahita atubwira
ngo : « Ese mwajyaga he mutazanye indangamuntu zanyu ? ».
L’Interprète : Elle a répliqué :
« Où iriez-vous sans vos cartes d’identité alors ? ».
le témoin 138 : Twese turaceceka.
L’Interprète : Et, nous toutes,
avons gardé silence.
Le Président : Maître BEAUTHIER.
Me. BEAUTHIER : Je vous remercie,
Monsieur le président. Le témoin a déclaré devant Monsieur TREMBLAY, pourrait-elle,
et c’est tout à fait précis, pourrait-elle le confirmer, au moment où on parlait
de la nourriture, je lis…
Le Président : Alors, je
vais vous faire une autre remarque, Maître BEAUTHIER, pour faciliter à toutes
les parties votre lecture, le numéro de la pièce, page…
Me. BEAUTHIER : Page 11.
Le Président : Voilà.
Me. BEAUTHIER : Je répète
la question : page 11, le témoin a dit, devant Monsieur TREMBLAY, à propos
de la nourriture : « Même si les religieuses voulaient
aider les réfugiés, il fallait avoir la permission de sœur Gertrude ».
Peut-elle le confirmer et nous dire en quoi, elle, si elle voulait faire quelque
chose, devait toujours passer par sœur Gertrude ?
Le Président : Madame, pouvez-vous
confirmer cette déclaration, en ce qui concerne la nourriture, de la nécessité,
même si les autres religieuses voulaient venir en aide aux réfugiés, de la nécessité
de passer par sœur Gertrude, et peut-être préciser en quoi il était nécessaire
de passer par sœur Gertrude ?
L’Interprète : Wakwemeza ku byerekeye
ibyo kurya, niba niyo abandi babikira bashakaga guha abo mu muryango wabo ibyo
kurya, barabanzaga kwaka uburenganzira sœur Gertrude no gusobanura ibyo mu burenganzira
ibyo aribyo ?
le témoin 138 : Ni Ukubera
ko Gertruda yari umukuru wacu,
L’Interprète : C’est parce que
sœur Gertrude était notre supérieure,
le témoin 138 : Kandi mu
mategeko nta kintu dukora tutanyuze ku mukuru.
L’Interprète : Et que suivant
le règlement, nous ne pouvions rien faire sans passer par la responsable.
le témoin 138 : Niba yaba
ari umushyitsi wawe,
L’Interprète : Même s’il s’agit
de votre visiteur,
le témoin 138 : Nta kintu
watanga utabanje kubivuga.
L’Interprète : Tu ne peux rien
donner sans le dire avant, sans l’annoncer.
Le Président : Oui.
Me. BEAUTHIER : Page 24,
non, page 18 et nous sommes le 24, Monsieur REKERAHO vient, et ça, je crois
que tout le monde le confirme, de parler avec sœur Kizito et le témoin peut-il
confirmer qu’à ce moment-là sœur Liberata, et je lis : « Poursuit
(elle s’adresse au
témoin) en disant qu’elle avait rencontré sœur Kizito qui lui aurait
dit que tout le monde serait tué par la suite. Sœur Kizito aurait mentionné
à sœur Liberata que c’est seulement les sœurs Tutsi qui seraient tuées ».
Le Président : Avez-vous
bien déclaré cela à Monsieur TREMBLAY. Je crois que vous comprenez le français,
en vérité ?
le témoin 138 : Oui, narabimubwiye,
L’Interprète : Oui, je le lui
ai dit,
le témoin 138 : Kuko Liberata
yari umuntu twumvikanaga cyane, kandi wabonaga ariwe wajyaga atubonera uko ibintu
bimeze.
L’Interprète : Que je m’entendais
bien avec Liberata et puis c’était une personne qui voyait pour nous la situation,
comment les choses se passaient.
le témoin 138 : Igihe cyose
rero najyaga kumubaza nti : « Ese bigeze hehe ? Ese bavuganye
iki ? Hari bube iki ? ».
L’Interprète : Alors chaque fois,
j’allais m’informer auprès d’elle : « Qu’est-ce qu’on a dit ?
Qu’est-ce qui va se passer ? ».
le témoin 138 : Liberata
rero agahita ambwira ati : « Bigenze bitya, Kizito bamubwiye gutya…
».
L’Interprète : Alors, Liberata
me disait : « Ca s’est passé comme ceci. Kizito vient de dire comme
cela ».
le témoin 138 : Icyo gihe
rero nibwo twavuganye, rimwe akambwira ati baravuze ngo baraza kwica abatutsi
gusa,
L’Interprète : C’est ainsi que
nous nous sommes parlées et qu’on a dit qu’on viendra tuer uniquement les Tutsi.
le témoin 138 : N’uko bityo.
L’Interprète : Voilà, c’est ça.
Me. BEAUTHIER : Monsieur
le président.
Le Président : Autre question ?
Me. BEAUTHIER : Oui, j’aurais
voulu encore poser quatre questions. Page 22, toujours pour Monsieur TREMBLAY,
mais on n’aura pas beaucoup de difficultés à voir que les versions du témoin
sont les mêmes lors d’autres auditions. Au moment où l’incident se passe avec
ce jeune homme qui va s’accrocher aux jambes de sœur Gertrude, on en a parlé,
il y a alors un troisième incident, celui de la petite sœur de sœur Thérèse.
N’a-t-elle pas dit : « Si sœur Gertrude vient me chercher pour me
livrer aux miliciens, je vais la mordre » ?
Le Président : Vous vous
souvenez de cet épisode relaté à Monsieur TREMBLAY ?
le témoin 138 : Ibyo narabivuze
kuko,
L’Interprète : Ca, je l’ai dit
car,
le témoin 138 : Tereza
yari muri étage hejuru ari kumwe na murumuna we,
L’Interprète : Car Thérèse était
au-dessus, à l’étage, en compagnie de sa petite sœur
le témoin 138 : Abona bajyanye
uwo mwana.
L’Interprète : En voyant qu’on
emmenait cet enfant.
le témoin 138 : Hanyuma
mpuye na Tereza tuguma tuvugana iby’uwo mwana,
L’Interprète : Alors que, comme
je croisais Thérèse et qu’on parlait de cet enfant,
le témoin 138 : Ahita ambwira
ko murumuna we Candari we yavuze ati : « Ari njyewe, njye nibaza kuntwara,
ndahita muruma ».
L’Interprète : Elle m’a dit que
sa petite sœur Chantal lui avait dit : « Moi, si on vient me
prendre, je vais la mordre ».
Me. BEAUTHIER : Il y avait
donc une tension de jour en jour plus importante. Et pages 24 et 25, on voit
cette tension monter puisqu’un autre incident entre une autre religieuse, un
autre événement s’est produit, dit le témoin, vers le 5 mai 1994 : « J’ai entendu une conversation entre sœur Gertrude et sœur
Bénédicte ». Pourrait-elle nous dire quelle était la teneur de cette
conversation, si elle s’en souvient, entre sœur Gertrude et sœur Bénédicte,
vers le 5 mai 1994, au moment où il est question d’expulsion des familles ?
Le Président : Le témoin
peut-il relater l’incident entre sœur Gertrude et sœur Bénédicte ?
L’Interprète : Wavuga ikibazo
cyavutse hagati ya sœur Gertrude na sœur Bénédicte ?
le témoin 138 : Icyo gihe
nibyo byo kugirango abantu basohoke,
L’Interprète : Oui, c’est en rapport
avec le fait de faire sortir les gens,
le témoin 138 : Noneho
bavuga ngo bazabajyana ku makomine yabo.
L’Interprète : Alors qu’on disait
qu’on allait les emmener dans leurs communes respectives.
le témoin 138 : Umwana
wa murumuna wa sœur Bénédicte wari uhari, w’umukobwa,
L’Interprète : Une nièce à sœur
Bénédicte qui était là
le témoin 138 : We asaba
ko atagenda kuko yavugaga ati : « Iwacu ni kure, ni i Kigali, ntabwo
bari bungeze yo ».
L’Interprète : A demandé de ne
pas partir en disant que chez lui c’était loin, c’était à Kigali et qu’on n’allait
pas l’amener jusque-là, saine et sauve.
le témoin 138 : Icyo gihe
sœur Gertruda yaramusubije ngo : « Ntibagiye gusenya monastère kubera
Aline ».
L’Interprète : Alors, sœur Gertrude
a répondu qu’on n’allait pas détruire le monastère à cause d’Aline.
Le Président : Oui, sœur
Bénédicte demandait à sœur Gertrude si Aline ne pouvait pas mourir au couvent ?
L’Interprète : Sœur
Bénédicte yabazaga sœur Gertrude niba bitashobokaga ko Aline apfira mu kigo ?
le témoin 138 : Oui, yaravugaga
ati : « Mpagume, ninshaka nzapfire hano ».
L’Interprète : Elle disait :
« OK, je reste ici et s’il le faut, que je meure ici ».
Le Président : Oui, une autre
question ?
Me. BEAUTHIER : Je vous remercie,
Monsieur le président. Après cet épisode-là et on est donc, à mon avis, le 6
mai, on ne voit pas sœur Gertrude. Vous avez posé la question tout à l’heure,
elle est partie chercher le bourgmestre, mais on donne une raison. Est-ce que
le témoin peut confirmer qu’au moment où sœur Gertrude est absente à ce moment-là,
sans doute tôt dans la matinée, elle demande : « Sœur Gertrude est
absente ? ». Et elle dit : « Elle n’était pas également
là, au repas de midi. J’ai appris ou j’aurais appris - c’est difficile à dire
- qu’elle était malade et couchée au lit, le 6 mai, au moment où elle va chercher
le bourgmestre. Est-ce que c’est ce qu’elle a déclaré ? Que sœur Gertrude
se faisait donc passer pour malade à ce moment-là ?
Le Président : Vous avez
d’ailleurs parlé, Madame, dans votre témoignage, d’un moment où sœur Gertrude
avait dit qu’elle était malade et au lit. Vous situez ce moment où sœur Gertrude
se trouve malade au lit ?
le témoin 138 : Ni nyuma
y’aho aviriye i Butare.
L’Interprète : C’est après son
retour de Butare.
Le Président : Le 6 mai ?
le témoin 138 : Le
6 mai, oui.
Le Président : Avant que
le bourgmestre ne vienne dans l’après-midi ?
le témoin 138 : Oui.
Me. BEAUTHIER : Oui, puisqu’elle
n’était pas au repas de midi, hein, a-t-elle déclaré.
Le Président : C’est bien
à ce moment-là ?
le témoin 138 : Yaje twavuye
ku meza, bahita bahita bambwira ngo yaje arwaye, ngo araryamye.
L’Interprète : Elle est venue
après notre repas et on m’a dit qu’elle était venue malade et qu’elle était
au lit.
Le Président : Oui.
Me. BEAUTHIER : Monsieur
le président, vous avez posé la question à différents témoins. Je voudrais que
vous la posiez également à ce témoin-ci. Il est bien clair que le 6 mai, ne
rentrent dans les chambrettes que le bourgmestre et un policier ? A aucun
moment, ni REKERAHO ni des Interahamwe ne sont entrés ni dans le couvent, ni
dans les chambrettes ?
Le Président : Les seules
personnes étrangères au couvent et autres que les membres des familles, autres
que des gens en séminaire, quelles sont les autres personnes qui sont rentrées
dans, dans le monastère même ?
L’Interprète : Abandi bantu binjiye
muri monastère batari abo mu babikira, ntibabe n’abari mu mahugurwa ni bande ?
Bandi batari abasanzwe mu kigo.
le témoin 138 : Ntabo uretse
abapolisi baje gutwar’abantu.
L’Interprète : Il n’y en a pas,
à part les policiers qui sont venus prendre les gens.
Me. BEAUTHIER : Et c’est
à ce moment-là que, sans doute, le bourgmestre a dit qu’il fallait, et je crois
que c’est à sœur Thérèse, qu’il fallait donner un voile à une jeune fille pour
que cette jeune fille échappe aux policiers ? Est-ce que le témoin peut
le confirmer ?
Le Président : Vous vous
souvenez de cet épisode du voile que l’on aurait remis ou qu’on aurait voulu
remettre à une jeune fille pour qu’elle échappe ?
L’Interprète : Waba wibuka ivara
baba barahaye umwana w’umukobwa cyangwa se baba barashatse kumuha kugirango
arokoke ?
le témoin 138 : Umwana
bashatse kuriha ?
L’Interprète : Umwana bashatse
kuriha cyangwa se baba bararihaye kugirango arokoke ? Ibyo bintu nk’ibyo
waba ubyibuka ?
le témoin 138 : Uwo nzi
barihaye ni uwitwa Immaculée turi kumwe, ni sœur le témoin 133. Oya barimuhaye
nyuma.
L’Interprète : C’est la personne
dont je me souviens avoir reçu le voile c’est le témoin 133.
Le Président : Quelqu’un
a-t-il refusé de lui donner un voile ? Et qui ?
le témoin 138 : Sinzi ko
[Inaudible] jye numvise ko ari bourgmestre…
L’Interprète : Elle a entendu
parler du bourgmestre, elle voudrait savoir…
le témoin 138 : Je
n’ai pas bien saisi la question.
L’Interprète : Concernant le bourgmestre.
Me. BEAUTHIER : Je vais la
reformuler, Monsieur le président. Le bourgmestre, au moment où on enlève les
familles des réfugiés des chambrettes, avec un policier, c’est ce que le témoin
dit, aurait mentionné à sœur Thérèse : « Que si votre supérieure veut
bien donner un voile à telle personne que je ne connais pas ». Il est d’accord,
et cela se situe à la page 28 et il l’a fait en présence de sœur Gertrude. Est-ce
que le témoin peut confirmer ces paroles du bourgmestre et l’attitude de sœur
Gertrude ?
le témoin 138 : Ibyo nibyerekeranye
n’abo bana bato, uwo nguwo Aline na murumuna wa Tereza.
L’Interprète : Cela concerne ces
jeunes filles, Aline et la petite sœur de Thérèse.
le témoin 138 : Nibo bourgmestre
yavuze ngo niba bashaka, ngo abo bana b’abakobwa babambike amavara, ngo bakajya
mu bandi.
L’Interprète : Ou alors, c’est
à propos d’elles que le bourgmestre a dit que si on le souhaitait, que ces deux
jeunes filles pouvaient porter des voiles et rejoindre les autres.
Me. BEAUTHIER : Je peux demander
au témoin : quelles sont les paroles précises, à ce moment-là, de sœur
Gertrude ? Ou bien peut-être, je m’excuse, je vais lire ce que le témoin
a dit, est-ce qu’elle peut confirmer ? Le témoin dit que sœur Gertrude
dit à ce moment : « Non, non, Monsieur le bourgmestre,
je ne veux pas de réfugiés au monastère », page 29 ?
Le Président : Est-ce bien
les paroles qu’a prononcées sœur Gertrude ?
L’Interprète : Ngo icyo gihe,
sœur Gertrude yarahakanye aravuga ngo oya, ngo ntashaka muri kino kigo, ayo
magambo yaba yarayavuze, Sœur Gertrude ?
le témoin 138 : Ibyo yarabivuze,
kuko yaravugaga ngo : « Aba bantu nibo batuma badutera ».
L’Interprète : Elle a dit, puisqu’elle
a dit que c’est à cause de ces gens-là qu’on nous attaque.
Me. BEAUTHIER : Je vous remercie.
J’ai encore, Monsieur le président, si vous le permettez, deux petites questions
à poser. Je vous épargnerai toutes les questions que les parties civiles veulent
poser sur l’état, j’imagine, du témoin, mais on en plaidera. Deux questions
relativement générales, mais par rapport à un fait particulier. Page 30, au
milieu de cette page, le témoin fait état de ce qu’après ces événements dont
on sent la tension monter, on doit se situer le 6 mai, elle dit ceci :
« J’ai vu sœur Gertrude se diriger vers la maison de
Gaspard ». Alors, après ces événements où visiblement on a tué les
derniers qui restaient, le témoin peut-il confirmer : 1) si elle a vu sœur
Gertrude se diriger vers Gaspard, la maison de Gaspard et 2) si c’était son
habitude en d’autres moments où des décisions, où des discussions devaient avoir
lieu ?
Le Président : Ce jour-là,
a-t-elle vu sœur Gertrude se diriger vers la maison de Gaspard ? L’a-t-elle
vue, à d’autres moments, se diriger vers cette maison ?
L’Interprète : Kuri uwo munsi
wabonye sœur Gertrude ajya kwa Gaspard mu rugo, hari ubundi se mbere y’aho wamubonaga
nabwo ajyayo ?
le témoin 138 : Mbere yaho
ntabwo namubonaga.
L’Interprète : Avant cette date,
je ne la voyais pas s’y rendre.
Le Président : Mais cette
fois-là, elle l’a vue ?
L’Interprète : Ariko ubwo bwo
warababonye ?
le témoin 138 : Naramubonye.
L’Interprète : Oui, je l’ai vue.
Le Président : Oui ?
Me. BEAUTHIER : Monsieur
le président, dans nos plaidoiries, nous ferons également, parce que…
Le Président : Eh bien, ne
parlez pas de vos plaidoiries, si vous voulez bien.
Me. BEAUTHIER : Oui, je vais
vous dire la question que je pose. Il serait également état de la responsabilité
de sœur Kizito, c’est pour cela que je pose une question générale. En page 31,
le témoin parle de ce que Liberata lui disait certaines choses au moment où
l’atmosphère dans le couvent est absolument triste et désolée comme elle la
dépeint dans deux pages de ses dépositions. Elle dit : « Liberata savait beaucoup de choses à travers sœur Kizito.
Sœur Kizito était en quelque sorte - et le témoin peut-il confirmer -
la seconde, l’adjointe de la mère supérieure ».
Le Président : En fait, dans
les faits, je ne parle pas de la hiérarchie qu’il pouvait y avoir éventuellement,
officiellement dans le couvent, sœur Kizito apparaissait-elle comme la seconde
de sœur Gertrude ?
L’Interprète : Usibye ibisanzwe
bihari, uko ikigo kiyoborwa, ugitegeka, umukurikira kuri cyo, mu byukuri, usibye
ibyo biteganyijwe n’amategeko byabaga bisa naho ari sœur Kizito asa naho wungirije
sœur Gertrude.
le témoin 138 : Mu buryo
bw’amategeko ntabwo ariwe wamwungirizaga,
L’Interprète : Suivant la hiérarchie
réglementaire, ce n’est pas elle qui la secondait,
le témoin 138 : Yamufashaga
cyane muri ibyo bihe bikomeye kuko wabonaga ariwe ushobora kubonana n’abantu
bo hanze.
L’Interprète : Elle épaulait surtout
dans ces moments difficiles puisqu’on voyait que c’était elle qui pouvait entrer
en contact avec les gens de l’extérieur.
Me. BEAUTHIER : Je vous remercie,
Monsieur le président.
Le Président : Bien, nous
allons suspendre l’audience jusqu’à 11h15. Nous la reprendrons à ce moment.
Je vous signale aimablement qu’il y a encore beaucoup de témoins à entendre,
que, compte tenu du déroulement, qu’il y a encore beaucoup de questions à poser
à ce témoin, j’imagine, les choses sont extrêmement simples. Le 12, les témoins
retournent au Rwanda. D’ici là, j’entendrai ou nous entendrons ceux que nous
aurons pu entendre. L’audience est suspendue, elle reprend à 11h15.
[Suspension d’audience]
Le Président : L’audience
est reprise. Vous pouvez vous asseoir. Les accusés peuvent prendre place. Et
alors, nous avons… Le témoin peut reprendre place aussi. Bien. Oui ? S’il
y a encore des questions à poser au témoin, c’est le moment.
Me. JASPIS: Je vous remercie,
Monsieur le président. J’ai supprimé deux questions de ma liste et pour gagner
un peu de temps, si vous le permettez, plutôt que de poser une question concernant
les voiles, je voudrais lire un petit extrait du dossier pour permettre aux
membres du jury qui portait des voiles et qui ne portait pas de voile dans la
communauté religieuse, il me semble que cela a une importance. Je comptais poser
la question au témoin mais la réponse est un peu compliquée. C’est comme vous
le souhaitez.
Le Président : Moi, je souhaite
que vous fassiez cela éventuellement à un autre moment alors, dans vos plaidoiries
si c’est pour une explication.
Me. JASPIS : D’accord.
Alors, je vais poser la question simplement.
Le Président : Eventuellement,
ou un commentaire qui sera fait après.
Me. JASPIS : Voilà,
Monsieur le président. Est-ce que le témoin pourrait nous informer au sujet
de ceci : à un certain moment, et à quel moment, combien de voiles ont
été distribués effectivement à des personnes qui faisaient partie de la communauté
religieuse mais qui n’en portaient pas ?
L’Interprète : Uribuka amavara
yatanzwe, umubara wayo n’abayahawe batari bayasanganwe ?
le témoin 138 : Ntabwo
nibuka neza umubare,
L’Interprète : Je ne me souviens
pas bien du nombre.
le témoin 138 : Ariko yahawe
abapostulante bari batarahabwa voile.
L’Interprète : Mais ils ont été
distribués aux postulantes qui n’étaient pas encore au stade de les porter.
Le Président : Et à quel
moment cette distribution a-t-elle été faite ?
L’Interprète : Bayahawe ryari ?
le témoin 138 : Ni igihe
twari tugiye guhunga tuvuye mu kigo,
L’Interprète : C’est au moment
où nous allions quitter le monastère,
le témoin 138 :
Mu ntangiriro z’ukwa karindwi.
L’Interprète : Au début du mois
de juillet.
Le Président : Oui, une autre
question ?
Me. JASPIS : Monsieur
le président, est-ce que le témoin peut nous informer sur le nombre de voiles
que chaque sœur possède, de remplacement, dans ses vêtements, dans son trousseau ?
L’Interprète : Waba uzi umubare
w’amavara buri mubikira agira, atunze mu valisi ye, mu cyumba cye ? Baragira
kugera angahe ?
le témoin 138 : Ibyo biterwa
n’umuntu.
L’Interprète : Ca dépend, ça varie
de personne à personne et ça dépend de chacune.
le témoin 138 : Hari ukenera
menshi bakayamuha, cyangwa se ukunda kujya ku rugendo…
L’Interprète : Une personne peut
avoir besoin de beaucoup de voiles, on lui en donne ou alors une personne qui
voyage souvent.
le témoin 138 : Ariko ku
byerekeranye n’igihe bambariye iyo voile, ntabwo… ndumva mfite confusion, kuko
ntibuka neza tujya i Ngoma,
L’Interprète : Mais concernant
le moment où elles ont porté le voile, j’ai à ce sujet une confusion, je ne
me souviens pas exactement quand nous nous sommes rendues à Ngoma.
le témoin 138 : Ntekereza
ko nabwo babahaye voiles kugirango bashobore gusohoka. Simbyibuka neza icyo
gihe.
L’Interprète : Je pense qu’à ce
moment-là aussi on leur a donné des voiles pour qu’elles puissent sortir mais
je ne me rappelle pas bien.
Me. JASPIS : Monsieur
le président, est-ce que le témoin peut nous dire s’il lui semble faisable qu’on
confonde le physique de sœur Stéphanie avec celui de sœur Kizito ? Est-ce
qu’elle considère que ces deux personnes se ressemblent beaucoup, se ressemblaient
beaucoup ?
le témoin 138 : Baratandukanye
cyane.
L’Interprète : Elles diffèrent
beaucoup.
Me. JASPIS : Est-ce
qu’elle peut être plus précise ?
L’Interprète : Wasobanura neza
uburyo batandukanye ?
le témoin 138 : Kuko, njyewe
mbona Stefaniya na Kizito, Kizito arirabura,
L’Interprète : A mon avis, ce
que je vois, c’est que le teint de Kizito est plus foncé,
le témoin 138 : Stefaniya
yari inzobe kandi…
L’Interprète : Tandis que le teint
de Stéphanie est clair,
le témoin 138 : Ntabwo
basaga na gato.
L’Interprète : Non, elles ne se
ressemblaient pas du tout.
Me. JASPIS : J’ai encore
deux petites questions.
Le Président : Allez-y. Vous
savez les limites, allez-y.
Me. JASPIS : Monsieur
le président, le témoin nous a dit tout à l’heure qu’à Maredret, on leur avait
demandé d’écrire des lettres pour disculper ? S’agissait-il de disculper
Gertrude ou Kizito ou les deux ? parce qu’elle a parlé de Gertrude
uniquement tout à l’heure ?
L’Interprète : Amabarwa bababajije
kwandika Maredret yari ayo gukuraho icyaha, wavuze ko yari ayo gukuraho icyaha
Kizito, cyangwa yaba ari ayo gukuraho icyaha Kizito cyangwa Gertrude, cyangwa
bombi ?
le témoin 138 : Ni Gertruda
cyane wavugwaga icyo gihe.
L’Interprète : Non, on parlait
surtout de Gertrude à cette époque-là.
Me. JASPIS : La dernière
question. Lorsqu’elle a été entendue le 6 février 1996 par Monsieur STASSIN
à Bruxelles, le témoin a dit : « Sœur Scholastique
n’a rien ajouté à ce qu’elle nous avait dit à l’époque, après les événements.
C’est normal, c’est comme si cela était de notoriété publique ».
Mais qu’est-ce qui était de notoriété publique ? Le procès-verbal ne le
mentionne pas. Est-ce qu’elle peut nous le préciser ?
le témoin 138 : J’ai
pas bien compris.
L’Interprète : Est-ce possible
de…
Le Président : Oui, répétez
la question.
L’Interprète : En fragmentant
les phrases…
Me. JASPIS : Sœur Scholastique
a raconté certaines choses après les faits, au témoin
L’Interprète : Sœur Scholastique
hari ibintu yakubwiye.
Me. JASPIS : Et quand
on en a rediscuté par la suite, elle n’a pas donné plus de détails (c’est comme
cela que je le comprends),
L’Interprète : Ubwo byaje kuvugwaho
nyuma ntabwo wabivuze ku buryo burambuye,
Me. JASPIS : Comme si
c’étaient des choses que tout le monde savait.
L’Interprète : Nkaho byaba ari
ibintu umuntu wese yari azi.
Me. JASPIS : Mais quelles
étaient ces choses que tout le monde savait ?
L’Interprète : Ibyo bintu umuntu
wese yari azi n’ibihe ?
le témoin 138 : Ndumva
ntashobora kwisitiwa neza,
L’Interprète : Je ne peux pas
me situer bien,
le témoin 138 : Kubera
ko icyo gihe mvugana n’uwo muntu w’i Bruseli,
L’Interprète : Au moment où je
m’entretenais avec la personne de Bruxelles,
le témoin 138 : Ntabwo
nari mufitiye confiance, nta kintu gifatika, ntabwo namubwiye ubuhamye uko buri.
Ntacyo navuze.
L’Interprète : Je n’avais pas
confiance en cette personne et je ne lui ai pas dit tout mon témoignage, je
n’ai rien dit.
Le Président : D’autres questions ?
Maître VERGAUWEN.
Me. VERGAUWEN : Je vous remercie,
Monsieur le président. Une première question, Monsieur le président. Pourriez-vous
demander au témoin quand elle a vu pour la première fois Monsieur REKERAHO ?
Le Président : Quand avez-vous
vu pour la première fois Monsieur REKERAHO ?
L’Interprète : Niu ryari wabonye
bwa mbere REKERAHO ?
le témoin 138 : REKERAHO
njye namubonye, ndumva ari kuri 25.
L’Interprète : Quand j’ai vu REKERAHO,
moi je pense que c’est le 25,
le témoin 138 : Oya, ni
kuri 24 tugaruka.
L’Interprète : Non, le 24, à notre
retour.
Me. VERGAUWEN : Je vous remercie.
Deuxième question : pourriez-vous demander au témoin s’il y avait, à Sovu,
une sœur polonaise et quelle était sa responsabilité ?
le témoin 138 : Yari umubikira
wakoraga kuri dispensaire yacu.
L’Interprète : C’était une religieuse
qui travaillait à notre dispensaire.
Le Président : Sœur le témoin 115 ?
le témoin 115 ?
L’Interprète : le témoin 115 ? Ngo
yitwa le témoin 115 ?
le témoin 138 : Yee, n’uwo
nguwo.
L’Interprète : Oui, c’est celle-là.
Me. VERGAUWEN : Et autre
question : pourriez-vous demander au témoin si cette sœur, après l’arrivée
des réfugiés, n’est-elle pas allée à la commune pour demander aide et assistance ?
Le Président : Cette sœur
est-elle allée à la commune pour demander de l’aide ?
L’Interprète : Uwo mubikira…
le témoin 138 : Yarabivuze,
ariko sinzi niba yaragiyeyo, nyuma nibwo nabonye iyo modoka ije, izanye abapolisi.
L’Interprète : Oui, elle l’a dit
mais je ne sais pas si elle s’y est rendue. C’est par après que j’ai vu ce véhicule
venir, amenant les policiers.
Me. VERGAUWEN : Je vais peut-être
répéter ce que le témoin avait dit à l’époque. Donc, le témoin a dit :
« La sœur polonaise qui était parmi nous s’est rendue
avec le chauffeur du dispensaire Boniface à la commune pour demander aide et
assistance. Ils sont revenus et quelques heures après, la voiture de la commune
est arrivée au couvent avec des militaires à son bord ». Est-ce
que - mais ça je ne sais pas si le témoin va pouvoir répondre à cette question
- avec quelle voiture le chauffeur du dispensaire est allé à la commune ?
Est-ce que c’était la voiture du centre de santé ? Est-ce que c’était l’ambulance ?
le témoin 138 : Iyo gihe
habaye, ubundi ni ambulance, ariko habaye faits ebyiri niyo mpamvu ntashobora
kubimenya neza.
L’Interprète : D’habitude, c’est
l’ambulance mais il y a eu, à ce moment-là, deux faits, c’est pourquoi je ne
me rappelle pas bien.
le témoin 138 : Umubikira
yabanje gushaka ngo kujya gusaba ibifasha impunzi kuri paroisse ya Rugango,
L’Interprète : D’abord, la
sœur a eu une idée d’aller chercher l’assistance aux réfugiés à la paroisse
de Rugango,
le témoin 138 : Hanyuma
avuga ko ajya no gushaka abantu bo kuza ngo… mbega barinda umutekano wabongabo,
kugirango babone uko bawuvura.
L’Interprète : Elle a dit
qu’elle allait aussi chercher des personnes pour venir assurer la sécurité de
ceux-là, afin de pouvoir prodiguer des soins de santé.
le témoin 138 : Icyo gihe
yarabitubwiraga kubera ko twamufashaga kuvura aho kuri dispensaire.
L’Interprète : Alors, elle
nous disait, puisque nous l’aidions à donner des soins, là-bas, au dispensaire,
le témoin 138 : Ubwo rero
nyuma sinzi ukuntu yabigenje, niba aho yabanje n’uko babigenje, twe twakomeje
akazi we aragenda.
L’Interprète : Après, je
ne sais pas où elle s’est rendue avant et ce qu’elle a fait.
L’Interprète : Nous, on a
continué le travail tandis qu’elle, elle est partie.
Le Président : Oui.
Me. VERGAUWEN : Je vous remercie.
Puisque, d’après le témoin, aucune sœur ne pouvait agir sans l’autorisation
de sœur Gertrude, je suppose donc que si la sœur polonaise est allée à la commune…
Le Président : Ne supposez
pas, posez une question.
Me. VERGAUWEN : Est-ce qu’elle
a reçu l’autorisation de sœur Gertrude ?
le témoin 138 : Ntabwo
uwo nguwo yagombaga uruhushya rwa sœur Gertruda,
L’Interprète : Celle-là n’avait
pas besoin de l’autorisation de Gertrude,
le témoin 138 : Kuko ntabwo
yari umubikira wo muri congrégation yacu,
L’Interprète : Car ce n’était
pas une sœur de notre congrégation.
le témoin 138 : Kandi yari
responsable wa dispensaire.
L’Interprète : Et puis, elle
était responsable du dispensaire.
Me. VERGAUWEN : Je vous remercie.
Autre question, Monsieur le président. Pourriez-vous demander, avec plus de
précision, ce qui s’est exactement passé le 23 avril à la paroisse de Ngoma ?
Le Président : Le témoin
peut-il relater les événements de manière complète et précise sur ce qui s’est
passé le 23 avril à la paroisse de Ngoma ?
L’Interprète : Wasubiramo ku buryo
burambuye kandi bufututse neza ibyabaye muri paroisse ya Ngoma kuri 23 z’ukwa
kane ?
le témoin 138 : Tugeze
i Ngoma kuri iyo tariki ya 23,
L’Interprète : A notre arrivée
à Ngoma à cette date du 23,
le témoin 138 : Twagezeyo
mu byiciro bibiri.
L’Interprète : Nous sommes allées
en deux groupes.
le témoin 138 : Groupe
ya mbere yagiye muri Mazda yacu itwawe na Gertruda,
L’Interprète : Le premier groupe
est parti à bord de notre Mazda que conduisait Gertrude.
le témoin 138 : Groupe
ya kabiri yazanwe na bourgmestre,
L’Interprète : Le deuxième
groupe est venu avec le bourgmestre,
le témoin 138 : Irimo ababikira
bari basigaye bakeya.
L’Interprète : Qui transportait
quelques sœurs qui étaient restées.
le témoin 138 : Noneho
groupe ya kabiri imaze kuhagera, nibwo Interahamwe zatangiye kuza,
L’Interprète : Après l’arrivée
du deuxième groupe, c’est à ce moment-là que les Interahamwe ont commencé à
venir,
le témoin 138 : Habanza
iyongiyo yavugaga ngo nibamwereke ababikira bourgmestre azanye batatu.
L’Interprète : Et en premier
lieu est venu un Interahamwe qui demandait qu’on lui montre trois sœurs que
le bourgmestre venait de déposer.
le témoin 138 : Noneho
umubikira umwe witwaga Yuliyana arahaguruka,
L’Interprète : Une sœur,
du nom de Julienne, s’est alors levée.
le témoin 138 : Interahamwe
iramubwira iti : « Icara si wowe nshaka, ndashaka abatutsi kazi bazanye
na bourgmestre ».
L’Interprète : Le Interahamwe
lui a dit : « C’est pas toi dont j’ai besoin, je cherche les trois
Tutsi qui sont venues avec le bourgmestre ».
le témoin 138 : Noneho,
twese icyo gihe twaracecetse,
L’Interprète : Nous toutes,
là-bas, avons gardé un profond silence,
le témoin 138 : Iyo Nterahamwe
itunyuzamo amaso,
L’Interprète : Alors, cet
Interahamwe nous traversa de son regard.
le témoin 138 : Nibwo yavugaga,
yatubwiraga ngo : « Ese ubwo mwivanga nabo mutazi ko ari abagome ? ».
L’Interprète : Et c’est à
ce moment-là qu’il nous a dit : « Vous vous mélangez avec elles, ne
sachant pas que ce sont des malfaiteurs ».
le témoin 138 : Nibwo yahitaga
rero avuga ngo bazica abatutsi kuburyo hatazasigara n’imbuto,
L’Interprète : C’est à ce
moment-là qu’il a dit qu’ils allaient tuer les Tutsi de telle sorte qu’ils n’allaient
laisser aucun survivant.
le témoin 138 : Ngo ushaka
kubaho azajye i Burundi, ngo asange bene wabo.
L’Interprète : Que quiconque
avait encore besoin de vivre n’avait qu’à se rendre au Burundi et rejoindre
les siens.
le témoin 138 : Nibwo rero
hahise hakurikiraho icyo kintu cyo kutubaza irangamuntu.
L’Interprète : Alors, ce
qui a suivi, c’est le fait qu’on nous a demandé les cartes d’identité.
le témoin 138 : Nyuma yaho
ibyo birangiye, kuko Interahamwe zakomeje kujya ziza zikurikiranya,
L’Interprète : Après cet
événement, les Interahamwe ont commencé à venir, les uns après les autres.
le témoin 138 : Kuko hariho
n’abazaga bashaka ngo umupadiri wari uhari witwaga MASINZO ;
L’Interprète : Quand il y
en aussi qui venaient à la recherche de prêtres qui étaient là-bas, du nom de
MASINZO.
le témoin 138 : Tubona
rero Interahamwe zitumereye nabi nta buhungiro tuhafite,
L’Interprète : Quand nous
avons vu que les Interahamwe nous menaçaient que nous n’avions pas de refuge
là-bas.
le témoin 138 : Nibwo twasabaga
Gertruda ngo twasubiye muri monastère, niba ari ugupfa tugapfirayo.
L’Interprète : Nous avons
alors demandé à Gertrude de nous ramener au monastère et que s’il s’agissait
de mourir, qu’il fallait mourir là-bas.
le témoin 138 : Yaje guterefona
rero baramubwira ngo bazaza kudutwara ;
L’Interprète : Elle a alors
téléphoné et puis on lui a dit qu’on allait venir nous chercher.
le témoin 138 : Nibwo baje
kudutwara dusubira mu kigo kuri 24 nimugoroba.
L’Interprète : Et alors,
on est venu nous prendre et nous avons regagné le monastère, le 24 au soir.
Me. VERGAUWEN : Je voudrais
demander au témoin si sœur Gertrude, le 23 avril, à la paroisse de Ngoma, est
intervenue à parlementer avec les Interahamwe et de quelle façon ?
Le Président : Sœur Gertrude
a-t-elle parlementé avec les Interahamwe, quelle a été éventuellement la teneur
de son intervention ?
L’Interprète : Gertrude yavuganye
n’izo Nterahamwe, bavuganye se iki ?
le témoin 138 : Ndumva
ibyo ntabyibuka.
L’Interprète : Je ne me souviens
pas.
Me. VERGAUWEN : Est-ce que
le témoin ne se souvient pas que sœur Gertrude a donné de l’argent aux Interahamwe ?
L’Interprète : Ntabwo wibuka ko
Gertruda yahaye amafaranga…
Le Président : Sœur Gertrude
a-t-elle donné de l’argent à ce moment-là ?
L’Interprète : Icyo gihe hari
amafaranga sœur Gertrude yatanze ?
le témoin 138 : Narabyumvise
ariko sinabibonye.
L’Interprète : Je l’ai appris,
mais je ne l’ai pas vu moi-même.
Me. VERGAUWEN : Autre question,
Monsieur le président, à propos de sœur Hermelinda. Pourriez-vous demander au
témoin, quand et comment cette sœur est-elle décédée ?
le témoin 138 : Hermelinda
yapfanye n’abandi babikira bacu munani,
L’Interprète : Elle est morte
avec huit autres sœurs de notre ordre.
le témoin 138 : Icyo gihe
tuvuye kuri évêché, bamwe baganye inzira y’i Burundi, abana bagana inzira ya
Gikongoro, muri zone Turquoise.
L’Interprète : Après avoir
quitté l’évêché, un groupe s’est rendu vers le Burundi et un autre est passé
par Gikongoro, dans la zone de l’Opération Turquoise.
le témoin 138 : Icyo gihe
byari ku itariki ya 3.
L’Interprète : C’était alors
le 3.
le témoin 138 : Noneho,
njye naganye muri gana ku Gikongoro,
Le Président : Le 3 juillet ?
le témoin 138 : 3
juillet, oui. Njye nafashe igana ku Gikongoro,
L’Interprète : Moi, j’ai pris
la direction de Gikongoro.
le témoin 138 : Nyuma,
ntabwo namenye ukuntu bo byabagendekeye mu nzira,
L’Interprète : Après, je
n’ai pas su ce qui leur était arrivé en cours de route.
le témoin 138 : Ku itariki
ya 4, turi ku Gikongoro,sinibuka neza umupadiri waje kubwira Gertruda ngo ko
ababikira babiciye mu nzira.
L’Interprète : Mais le 4,
alors que nous étions arrivées à Gikongoro, je ne me souviens pas d’un prêtre
qui est venu dire à Gertrude que les sœurs avaient été assassinées en cours
de route.
Le Président : Oui.
Me. VERGAUWEN : Je vous remercie.
Dernière question, Monsieur le président. Pourriez-vous demander au témoin s’il
y avait une bonne entente entre sœur Scholastique et sœur Gertrude ?
Le Président : Sœur Gertrude
et sœur Scholastique s’entendaient-elles bien, avant les événements ?
L’Interprète : Sœur Gertrude na
sœur Scholastique barumvikanaga neza mbere yuko ibyo biba ? Bari babanye
neza mbere yuko ibyo biba ?
le témoin 138 : Nta kibazo
nababonanaga.
L’Interprète : Je n’ai constaté
aucun problème entre elles.
Le Président : Et après les
événements ?
L’Interprète : Naho nyuma y’ibyabaye ?
le témoin 138 : Après les
événements, icyo nabonaga n’uko hagati y’iyo taliki habayemo ikintu kitari kiza,
muri ibyo bintu byo kuvuga ngo abantu le témoin 2 basohoke.
L’Interprète : Après les événements,
ce que j’ai vu c’est que l’atmosphère n’était pas bien dans cette situation
de dire que leurs membres de la famille devaient sortir.
le témoin 138 : Kuko Schola
ubwe niwe wambwiraga ati ariho kumbwira ngo ninsohore Chantal, umuntu wari uwo
muri famiye ye,
L’Interprète : Scholastique me
disait qu’elle lui demandait de faire sortir Chantal, une femme, membre de sa
famille,
le témoin 138 : We kandi
yarafite umwana muto, ambwira ati : « Ubundi se bwo ntitujya mu bihuru
ko ngo nitujye mu bihuru, umwana arahita arira, babyumve ».
L’Interprète : Alors qu’elle portait
un bébé. Alors, elle disait : « Elle nous dit d’aller dans la brousse
et si nous allons dans la brousse, l’enfant va pleurer et on va nous démasquer ».
Me. VERGAUWEN : Merci.
Le Président : D’autres questions ?
Me. WAHIS : Oui, je
vous remercie, Monsieur le président. Une première question que je souhaiterais
voir poser au témoin au sujet des faits qui se sont déroulés le 22 avril. Le
témoin nous a rappelé tout à l’heure qu’elle avait assisté à l’encerclement
du monastère par les Interahamwe. Pourriez-vous lui demander quel était le nombre
de ces Interahamwe tout d’abord, est-ce qu’il y avait 10 personnes, 20 personnes,
30 personnes, ou plus ?
le témoin 138 : Ntabwo
namenya umubare,
L’Interprète : Je ne peux pas
connaître le nombre,
le témoin 138 : Kandi,
Interahamwe naziboneraga hafi yanjye, nazibonaga muri trous ziri kuri mur,
L’Interprète : Et puis les Interahamwe,
je ne les voyais pas près de moi, je les voyais à travers les brèches qui étaient
dans le mur.
le témoin 138 : Nkabona
gusa bazengurutse urugo kandi sinabonaga, aho nari ndi sinabonaga niba ari n’urugo
rwose bazungurutse, n’uko nabonaga abantu bari aho ngaho.
L’Interprète : Je voyais seulement
qu’on avait encerclé…
[Interruption d’enregistrement]
Le Président : Est-ce qu’elles
chantaient, est-ce qu’elles criaient, est-ce qu’elles sifflaient, est-ce qu’elles
jouaient du tambour ? Est-ce qu’elles étaient éventuellement déguisées,
masquées, porteuses de feuilles de bananier ou d’autres choses de ce genre ?
le témoin 138 : Ibyo byaterwaga
n’igihe,
L’Interprète : Ca dépendait des
moments.
le témoin 138 : Hariho
igihe twicaraga, hariho igihe najyaga nko kubareba ari uko numvise ko bavuza
ingoma, nkarunguruka,
L’Interprète : Des fois, j’allais
les voir après avoir entendu les sons des tambours.
le témoin 138 : Ubundi
se nkajya kumva nkumva, cyangwa narunguruka gutya nkabona abantu bazungurutse
cyangwa bakambwira bati : « Hari abantu bagose ikigo ».
L’Interprète : Quand je voyais
à travers la brèche, je voyais que les gens avaient encerclé ou alors, quand
on me disait : « Regarde, il y a des gens qui encerclent le monastère ».
le témoin 138 : Icyo gihe
rero, nibwo hahitaga haba nk’ikindi kintu, nk’icyo gihe wenda bategereje nk’umuntu,
waza mu kigo,
L’Interprète : Et à ce moment-là,
suivait un événement,
le témoin 138 : Nk’icyo
gihe bategereje nk’abo bantu bo ku itariki ya 6, baraje bazunguruka urugo ariko
icyo gihe ntacyo bavugaga.
L’Interprète : Par exemple, le
6, ils sont venus encercler le monastère mais à ce moment-là, ils ne disaient
rien.
le témoin 138 : Naho kuri
22 aho bazaga bavuza induru batera za grenades, bavuza ingoma.
L’Interprète : Tandis que le 22,
ils criaient, ils frappaient les tambours, ils lançaient des grenades.
Le Président : Oui ?
Me. VERGAUWEN : Oui, Monsieur
le président, au sujet maintenant de ce qui s’est passé le 25 avril, le témoin
a été interrogé par Monsieur TREMBLAY en janvier 1999 et on a fait allusion,
tout à l’heure, Maître BEAUTHIER notamment, à cette audition qui est effectivement
fort longue. On assiste, et ça, c’est mon interprétation, à des résurrections
de mémoire devant Monsieur TREMBLAY. Le témoin a parlé à Monsieur TREMBLAY de
ce fameux épisode de la cousine de sœur Théonille que sœur Gertrude aurait amenée
à l’extérieur du monastère, cette jeune femme blessée, et par ailleurs, elle
a parlé également à Monsieur TREMBLAY d’un jeune garçon que sœur Gertrude aurait
également expulsé. Est-ce que le témoin pourrait confirmer ce qu’elle a déclaré
en page 21 de son audition, au sujet de l’épisode de la cousine de sœur Théonille :
« J’étais très choquée de voir sœur Gertrude livrer
une réfugiée à REKERAHO » ?
Le Président : Est-ce bien
ce que vous avez déclaré ?
L’Interprète : Warabivuze ?
le témoin 138 : Yee, ibyo
narabivuze, narabibonye.
L’Interprète : Oui, je l’ai
dit, je l’ai vu.
Me. VERGAUWEN : Je vous remercie,
Monsieur le président. Le témoin avait, par ailleurs, été entendu antérieurement,
c’est-à-dire précisément le 6 février 1996 par Monsieur STASSIN et je voudrais
savoir si, lorsqu’elle a été entendue par Monsieur STASSIN, le témoin a évoqué
ces deux faits, donc, le fait de la jeune fille et le fait du jeune garçon avec
l’enquêteur qui l’interrogeait ?
Le Président : Vous le savez,
hein.
Me. VERGAUWEN : Monsieur
le président, je ne le sais pas, non, ce n’est pas acté. Tout à l’heure, mais
hier nous avons eu un témoin qui a dit qu’elle en avait parlé.
Le Président : Vous en aviez
parlé à Monsieur STASSIN de ces deux événements, enfin, la jeune fille, le jeune
garçon, la cousine ?
le témoin 138 : Ibyo i
Brusseli, urebye nta kintu navuze.
L’Interprète : A Bruxelles,
en fait, je n’ai rien dit.
le témoin 138 : Bampamagaye
bamwira ngo… sinarinzi neza abantu, bavuga ngo ni procureur du Roi,
L’Interprète : Quand on m’a fait
venir, je ne connaissais pas bien les gens. On disait : « C’est le
procureur du Roi ».
le témoin 138 : Ngenda
mfite idée ko ari umuntu ushaka kuntwara amagambo, ngo arebe uburyo atransforma
ibintu.
L’Interprète : Quand je m’y rendais,
j’avais une idée que c’était quelqu’un qui voulait seulement me piller, m’écouter
pour transformer les propos.
le témoin 138 : Ku buryo
twavuganye ari nko kugirango mpikure, nta confiance na ntoya namugiriye.
L’Interprète : Je n’avais aucune
confiance quand j’étais là, c’était seulement une façon de voir comment on me
retirait de là.
le témoin 138 : Kubera
ko kenshi batubwiraga ngo bararega ibintu byo ku… ngo barimo kubeshyera mugenzi
wabo…
L’Interprète : Car, souvent, on
disait quand on entrait, dire des mensonges, de notre collègue…
le témoin 138 : Nta kintu
navuze urebyemo.
L’Interprète : En fait, il ne
fallait rien dire.
Le Président : Oui ?
Me. VERGAUWEN : Oui, je vous
remercie Monsieur le président. Pourriez-vous alors demander au témoin si elle
peut confirmer ce qu’elle a déclaré en page 3 de cette audition, sur ce qui
s’était passé le 25 avril 1994, je cite : « Le
25 avril 1994, une réunion a eu lieu avec les réfugiés. Sœur Gertrude a expliqué
que s’ils ne partaient pas, tout le monde allait être tué. C’est à ce moment
que l’un des réfugiés a dit qu’il était préférable pour eux de sortir plutôt
que les miliciens ne viennent assassiner tout le monde, y compris les sœurs.
Ils sont sortis. Quant à moi, je suis partie vers l’église. Par après, sœur
Fortunata m’a dit qu’un tri avait été opéré mais qu’elle et les membres de sa
famille avaient pu regagner le couvent ».
Le Président : C’est
bien ce que vous avez déclaré, à l’époque, à Monsieur STASSIN à Bruxelles ?
L’Interprète : Ibyo wavuze nibyo
wavuze imbere ya Bwana STASSIN ?
le témoin 138 : Ibyo narabivuze,
L’Interprète : Je l’ai dit,
le témoin 138 : Ariko ntabwo
nabivugaga avec fondement, kuko numvaga ntamwizeye.
L’Interprète : Mais je le disais
sans fondement car je n’avais pas confiance.
Me. VERGAUWEN : Dernière
question, Monsieur le président. Le témoin pourrait-elle confirmer ce qu’elle
a déclaré dans cette audition-là, qu’elle avait eu l’occasion de retourner au
Rwanda, du 18 décembre 1995 au 8 janvier 1996 ?
Le Président : Etes-vous
retournée à cette époque-là ?
le témoin 138 : Narabimubwiye.
L’Interprète : Je lui ai
dit.
Le Président : Et vous étiez
effectivement retournée ?
le témoin 138 : Oui.
L’Interprète : Oui.
Le Président : Oui ?
Me. VERGAUWEN : Je vous remercie,
Monsieur le président. Je n’ai pas d’autres questions.
Le Président : Maître VANDERBECK ?
Me. VANDERBECK : Je vous
remercie, Monsieur le président. Deux ou trois petites confirmations. Est-ce
que le témoin peut nous confirmer qu’elle était, à l’aller comme au retour,
à Ngoma, dans le même convoi que sœur Kizito, c’est-à-dire, si je ne m’abuse,
dans le premier convoi pour l’aller et dans le second pour le retour ?
Le Président : Etiez-vous
dans le même convoi que sœur Kizito au départ de Sovu vers Ngoma et au retour
de Ngoma vers Sovu ?
L’Interprète : Mwari mu
modoka imwe na sœur Kizito muva i Sovu mujya i Ngoma cyangwa se muva i Ngoma
mugarutse i Sovu ?
le témoin 138 : Tugenda
twari kumwe,
L’Interprète : A l’aller, nous
étions ensemble,
le témoin 138 : Ariko mu
kugaruka sinibuka neza convoi yari arimo.
L’Interprète : Mais au retour,
je ne me souviens pas bien dans quel convoi elle était.
Le Président : Oui ?
Me. VANDERBECK : Je vous
remercie, Monsieur le président. Le témoin vient de nous dire, sur question
de Maître VERGAUWEN, que face aux enquêteurs bruxellois à Bruxelles, elle disait
des choses sans fondement et qu’elle n’avait pas confiance. Est-ce qu’elle avait
confiance en Monsieur TREMBLAY lorsqu’elle a été entendue par lui au mois de
janvier 1999 ?
Le Président : Aviez-vous
confiance en Monsieur TREMBLAY lorsqu’il vous a entendue ?
L’Interprète : TREMBLAY wari umufitiye
ikizere ubwo yakubazaga ?
le témoin 138 : Namugiriye
ikizere,
L’Interprète : Oui, j’ai
eu confiance en lui,
le témoin 138 : Kuko situation
ntabwo yari imwe.
L’Interprète : Car la situation
n’était pas la même.
le témoin 138 : Situation
icyo gihe y’ino aha ngaha, numvaga nari mvuye muri génocide, nyuma yaho bagasa
n’aho basa badufata nkaho ari twebwe les coupables,
L’Interprète : La situation d’ici
c’est que nous venions de sortir fraîchement du génocide et c’était comme si
on nous prenait comme des coupables.
le témoin 138 : Nahise
rero icyo gihe we namubwije ukuri kose, kuko numvaga nta intérêt na ntoya mfite
yo guhisha ibyabaye muri génocide.
L’Interprète : Alors, lui, je
lui ai fait toute la confiance puisque je voyais que je n’avais plus aucun intérêt
à cacher ce qui s’était passé pendant le génocide.
Le Président : Oui ?
Me. VANDERBECK : Encore une
autre question, Monsieur le président. Sauf erreur de ma part, aujourd’hui,
le témoin nous a dit sous serment que le 6 mai, lorsque le bourgmestre est arrivé
avec des policiers, sœur Kizito accompagnait un policier dans les chambrées
pour venir chercher les familles des sœurs. Or, je lis que dans sa déclaration
du 6 février où elle n’avait pas confiance, elle dira à nos enquêteurs qui l’ont
acté, en page 3 de ce procès-verbal : « Plus tard, dans l’après-midi, REKERAHO, Gaspard et le bourgmestre
de Huye sont revenus au couvent ; ils étaient accompagnés de miliciens
qui étaient restés à l’extérieur du couvent, ils étaient aussi accompagnés de
policiers qui ont commencé à fouiller les chambres, ils ont fait sortir tout
le monde, à l’exception des sœurs… ». Je ne lis pas plus loin parce
qu’on n’évoque nullement la présence de sœur Kizito avec les policiers. Enfin,
le témoin nous dit qu’elle n’avait pas confiance.
Et puis, le 25 janvier 1999, devant Monsieur TREMBLAY où elle a toute
confiance, le témoin dira ceci, je me permets de lire ce passage, si vous me
le permettez, Monsieur le président : « Vers 15h
(page 27, excusez-moi de ne pas préciser), vers 15h, alors
que je suis à la buanderie, je vois des sœurs descendre, elles sont paniquées.
Elles disent que des Interahamwe ont encerclé le monastère. J’ai tout laissé,
je suis montée à l’étage supérieur et par la fenêtre, j’ai pu apercevoir les
Interahamwe qui encerclaient le monastère. Par la suite, je me suis dirigée
vers l’hôtellerie, rejoindre les autres sœurs qui étaient avec les membres de
leur famille. J’ai rencontré sœur Thérèse qui m’informe que le bourgmestre,
Jonathan RUREMESHA, vient d’arriver accompagné de policiers et que les policiers
sont entrés dans les chambrées pour faire sortir les membres des familles des
sœurs ». Elle n’évoque pas la présence de sœur Kizito. Et elle dira,
à la page suivante, soit la page 29 : « J’aperçois
un policier qui fait sortir les membres des familles des sœurs qui se trouvaient
dans les chambrées et les conduire vers la cour ». Alors, est-ce
que le témoin peut nous expliquer pourquoi, devant Monsieur TREMBLAY, en toute
confiance, elle n’a pas évoqué le fait que sœur Kizito est allée dans les chambrées
avec les policiers ?
Le Président : Avez-vous
plus confiance ici encore que devant Monsieur TREMBLAY, à un point tel que vous
ajoutez des détails par rapport à ce que vous lui avez dit ?
L’Interprète : Ubu ngubu ngo ufite
ikizere kiruta icyo wari ufitiye TREMBLAY bikaba bituma ubu ngubu hari ingingo
uvuga, utari waravuze mbere ?
le témoin 138 : N’uwo nguwo
ntabwo nabimubwiye kuko ntabivuze kuko ntari mfite icyizere,
L’Interprète : Celui-là non
plus, je ne lui ai pas dit puisque je n’avais pas confiance,
le témoin 138 : Ahubwo
n’uko ibintu byose ntabwo bihita biza gutya, ambajije Kizito nari guhita mbivuga
aliko ntabwo byahise biza mu mutwe ngo mvuge ngo Kizito nawe byari bimeze gutya
na gutya.
L’Interprète : Mais c’est parce
que les choses ne viennent pas comme çà en tête. On ne m’a pas posé la question
concernant Kizito, que je dise à propos de Kizito, que c’était comme ceci ou
comme cela.
Le Président : Oui ?
Me. VANDERBECK : La réponse
me suffit, Monsieur le président, je n’ai plus d’autres questions.
Le Président : Maître WAHIS ?
Me. WAHIS : Deux petites
questions seulement, Monsieur le président. Une première question relative aux
soins qui ont été dispensés aux réfugiés les 18 et 19 avril. Dans son audition
par la Commission rogatoire, le témoin confirme que la sœur polonaise est allée
chercher de l’aide à la commune, le 18 avril, elle nous a dit aujourd’hui que
c’était pour qu’il y ait un peu d’ordre pour pouvoir travailler. Elle confirme
elle-même aussi : « Le lendemain, je me suis rendue
parmi eux - les réfugiés - et j’ai pris mon travail
comme d’habitude, dans un local qui était situé dans le centre de santé. Mon
travail consistait à soigner les gens du village, je faisais des pansements ».
Alors, est-ce qu’elle peut confirmer aujourd’hui que les 18 et 19 avril en tout
cas, des soins ont bel et bien été dispensés aux réfugiés ?
Le Président : Y a-t-il eu
des soins donnés aux réfugiés les 18 et 19 avril ?
L’Interprète : Kuri 18 na 19 z’ukwa
kane, hari uburyo impunzi zavuwe ?
le témoin 138 : Ntabwo
ari impunzi zavuwe, ubundi abaturage, mbega abaturage bakomeje kuvurwa,
L’Interprète : Ce ne sont
pas les réfugiés qui ont été soignés mais la population a continué à être soignée
normalement.
le témoin 138 : Ariko muri
désordre nyinshi kuko impunzi ariho zari ziri.
L’Interprète : Mais en tout désordre,
vu que c’est là que les réfugiés se trouvaient.
Le Président : Oui ?
Me. WAHIS : Deuxième question,
Monsieur le président. Est-ce que le témoin peut nous parler des circonstances,
si elle les connaît bien sûr, de l’arrestation et la mort de Gérard KABILIGI,
ouvrier travailleur au monastère ?
le témoin 138 : Kabirigi
namubonye… sinibuka itariki,
L’Interprète : Quand j’ai
vu KABILIGI, je ne me souviens plus de la date,
le témoin 138 : Namubonye
bamutwaye,
L’Interprète : Je l’ai vu amené,
le témoin 138 : Ari Interahamwe
zigenda zimunyuza munsi y’ikigo cyacu.
L’Interprète : Ce sont les Interahamwe
qui le traînaient par le dessous de notre monastère.
le témoin 138 : Ntabwo
urupfu bamwishe rwo narubonye.
L’Interprète : La mort par laquelle
on l’a tué, je ne l’ai pas vue.
Le Président : Oui ?
Me. WAHIS : Au niveau de
la date, est-ce que ces faits se situent après le 25 avril, après le 6 mai,
à quel moment, avec un peu de précision ?
Le Président : Est-ce que
c’est le jour de la visite de REKERAHO qui vient chercher les réfugiés sauf
les membres des familles des religieuses ? Est-ce que c’est le 6 mai, le
jour où le bourgmestre vient chercher les membres des familles des religieuses ?
Est-ce entre le 25 et le 6 mai ? Est-ce après le 6 mai ?
L’Interprète : Ibyo byaba byarabaye
nyuma ya 25 z’ukwa kane, nyuma se ya gatandatu cyangwa iza gatanu, wabisobanura
kurushaho ?
Le Président : Est-ce que
c’est le jour de la visite de REKERAHO qui vient chercher les réfugiés sauf
les membres des familles des religieuses,
L’Interprète : N’uwo munsi se
REKERAHO yaziyeho gushaka impunzi,
Le Président : Est-ce que
c’est le 6 mai, le jour où le bourgmestre vient chercher les membres des familles
des religieuses… ?
le témoin 138 : Ntabwo
ari umunsi ubwo…
Le Président : Est-ce entre
le 25 et le 6 mai, est-ce après le 6 mai ?
L’Interprète : Yaba ari aho yaje
gutwara impunzi zari aho usibye gutwara abo mu muryango w’ababikira, cyangwa
se n’umunsi bourgmestre yaje gutwariraho n’abo mu muryango w’ababikira, hagati
ya 25 se n’itariki ya 6, inyuma se y’itariki z’ukwa gatanu ?
le témoin 138 : Ndumva
ari hagati ya 25 niyo tariki ya 6,
L’Interprète : Je pense que cela
se situe entre le 25 et le 6 mai.
le témoin 138 : Kuko ar’icyo
gihe KIZITO yatemaga ibihuru n’ibiki bashaka mu bihuru aho abantu bihishe.
L’Interprète : Car, c’est à ce
moment-là que Kizito coupait, dégageait les brousses qui étaient là-bas et qu’on
cherchait les gens qui s’y cachaient.
Le Président : Oui ?
Me. WAHIS : Une dernière
précision, Monsieur le président. Le témoin nous a rappelé tout à l’heure qu’elle
était partie au Rwanda, fin décembre 1995. Pourriez-vous lui demander si, ici
en Belgique, quelqu’un aurait cherché à l’empêcher de partir au Rwanda à ce
moment-là ?
Le Président : Avez-vous
été empêchée, a-t-on essayé de vous empêcher de retourner au Rwanda, au mois
de décembre 1995 ?
L’Interprète : Bigeze kukubuza
gusubira mu Rwanda mu kwezi kwa cumi n’abiri 95 ?
le témoin 138 : Nta muntu
wambujije.
L’Interprète : Personne ne
m’a empêchée.
Me. BEAUTHIER : J’ai une
question, ce n’est pas une question, c’est une question de traduction. Tout
à l’heure, j’ai noté que quand on parlait de Monsieur TREMBLAY, l’interprète
a dit, et je voudrais qu’on le répète pour que ce soit bien clair : « C’est
parce que j’avais confiance ». En fait, il semblerait que le témoin ait
dit : « Ce n’est pas parce que je n’avais pas confiance », il
y avait deux négations, mais on n’a pas entendu les deux négations. Je voudrais
bien savoir si c’est cela que le témoin dit : « Ce n’est pas parce
que je n’avais pas confiance, mais c’est parce qu’on ne m’avait pas posé la
question ».
Le Président : En Monsieur
TREMBLAY, aviez-vous confiance ?
L’Interprète : TREMBLAY wari ufite
ikizere ?
le témoin 138 : Yego.
L’Interprète : Oui.
Le Président : Alors, si
certaines choses que vous dites aujourd’hui ne se trouvent pas dans la déclaration
que vous avez faite à Monsieur TREMBLAY,
L’Interprète : Niba hari
ibyo uvuze ubungubu bitari ibyo wabwiye TREMBLAY,
Le Président : Cela ne signifie
pas que vous n’aviez pas confiance en lui ?
L’Interprète : Ibyo ntabwo bisobanura
ko utari umufitiye ikizere ?
le témoin 138 : Yee, n’uko,
ibintu byose ntabwo byazira mu mutwe icyarimwe.
L’Interprète : Oui, c’est
parce que les choses ne peuvent pas venir en même temps, en tête.
le témoin 138 : Ntabwo
icyo naba ntaravuze aruko nakimuhishe, ahubwo nuko ntakibutse.
L’Interprète : Ce que je n’ai
pas dit, ce n’est pas que je lui aurais caché, c’est parce qu’il ne m’est pas
venu en tête.
Le Président : Une autre
question ? S’il n’y a plus de questions, les parties sont-elles d’accord
pour que le témoin se retire ? Bien. Madame, est-ce bien des accusés ici
présents dont vous avez voulu parler, le sens de cette question étant de savoir
si vous persistez, persistez-vous dans vos déclarations d’aujourd’hui ?
L’Interprète : Urahamya kandi
ugatsimbara kubyo wavuze byose none ?
le témoin 138 : Ndabi…
Nibyo.
L’Interprète : Oui, c’est
vrai, je le confirme.
Le Président : La Cour vous
remercie pour votre témoignage, Madame, vous pouvez disposer de votre temps
tout en restant administrativement à la disposition de la Cour pour les formalités
de votre retour au Rwanda. |